Grand homme connaît cet endroit. Ce lieu désert et froid. Il le connaît même par coeur, à force de s'y rendre tous les soirs. C'est devenu une routine pour lui. Une routine qu'il apprécie même s'il a très peu de souvenir concernant la femme qui se trouve là. A six pieds sous terre. Sous cette tombe fleurie, décorée avec soin par son fils dont pourtant, elle n'en avait que faire de son existence. L'ignorant sans état d'âme. Le rejetant depuis sa naissance, sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. Il était bien trop petit pour cela. Bien trop innocent pour comprendre qu'elle ne le voulait pas dans sa vie. Qu'elle ne voulait pas avoir d'enfant.  Mais il est là. Il se rattache à ses maigres souvenirs. Il sait que sa mort est responsable de son trouble. De ses trous de mémoire et de ses changements récurrents mais il ne lui en tient pas compte. Il ne lui en veut pas. Elle est morte. Elle s'est suicidée d'après son psychologue et c'est lui qui l'a trouvé. Du moins, il paraît. Non. Il n'a encore aucun souvenir de ce jour-là. C'est le noir complet. Il ne s'en rappelle pas. Alors il se sent responsable d'elle à présent. Il l'aime comme un fils doit l'aimer. Tout simplement. D'ailleurs. Il n'est même pas sûr que son père vient ici quelques fois. Il n'a plus de nouvelle de lui depuis des mois. Un soupir s'échappe de ses lèvres et grand homme, oui, s'accroupit. Pour déposer ses roses sur sa pierre tombale.
- Bonsoir maman. J'espère que tu vas bien. Moi oui. Je me sens beaucoup mieux depuis que Sean et Hailey ont repris les rênes du gang. Tu sais? Les frères jumeau dont je t'ai parlé la dernière fois. Je me sens libéré. J'ai l'impression qu'eux, au moins, me respecte. Que je ne suis pas qu'un pion à leurs yeux. Ni un moyen amusant de m'utiliser quand enfin… tu sais. Je n'ai plus l'impression d'être dans mon corps tout ça. Et puis, aujourd'hui je n'ai pas ressenti d'absence. Alors je suis plutôt content. C'était même d'ailleurs une bonne journée. Comme celles qui m'ont manqué.

Comme celle qu'il éprouvait avant que le gang d'avant Simon ne soit décimé. Un sourire s'étire sur ses lèvres et il marque une pause. Il profite de cet instant pour s'asseoir sur le sol. Pour avancer sa main sur la pierre où est gravé le nom de sa mère. Un nom qu'il ne se lasse pas de lire à voix haute pour ne jamais l'oublier. Même s'il l’a lu de nombreuses fois dans de vieux magazines de mode. Où elle posait le sourire aux lèvres. Où elle semblait heureuse. Épanouie. Façade sûrement devant l'objectif. Pour faire taire la souffrance qui la tiraillait.
- Lisa Harris. Si j'ai la chance d'avoir une femme et une fille un jour, je l'appellerai comme ça. C'est un beau prénom.  

Grand homme espère. Il espère connaître un jour le grand amour sans que cela ne se termine mal. Comme avec Jodie, séparés au bout d’une année par leurs activités respectives. Es-ce qu’il lui en veut? D’avoir passé sa passion avant lui? D’être partis également car de son côté, le gang prenait trop de place? Non. Du moins, il ne croit pas. Il sent son coeur se serrer parfois mais il se dit que c’est comme ça. Que ce n’est pas autrement. Un nouveau soupir s’échappe d’entre ses lèvres et grand homme replie ses jambes contre sa poitrine, l’entoure de ses bras avant de poser son menton sur ses genoux serrés. Prenant ainsi une position plus confortable.
- Dis maman. Es-ce père est venu te voir? Cela fait plusieurs mois que je n’ai pas de nouvelle. Je ne tiens pas spécialement à en avoir mais je me disais qu’avec toi, peut-être, il se montrait plus présent. Moins au travail. J’ai eu l’occasion, un jour, de retourner à la maison familiale mais je n’en ai pas eu le courage. Ou pas l’envie… Ouai c’est ça. Je n’en avais pas envie. Il ne fait  pas d’effort alors pourquoi j’en ferai. Le pire c’est que je n’arrive pourtant pas à lui en vouloir.

Après tout. C’est son père. C’est lui qui paye encore ses frais médicaux. Qui lui verse une somme régulière sur son compte en banque. Grand homme s’égare dans ses pensées. Ses yeux s’ancrent au loin et il se fond en mutisme. Le jour est presque terminé. Le soleil disparaît, pour laisser place à la nuit. Une douce fraîcheur l’envahit et grand homme réprime un frisson. Reste immobile pendant plusieurs minutes, silencieux, sursautant presque quand soudain ses yeux accrochent le contour d’une silhouette qui arpente elle aussi le cimetière en se rapprochant doucement de sa position.  
- Hum?

Il ne s’y attendait pas. Surpris, grand homme plisse alors les sourcils. Lâche toutes pensées qui se déversent à l’intérieur de son esprit. Dans sa poitrine, il sent son cœur battre sensiblement. Il n’a pas spécialement  peur mais il se demande qui cela peut être. Car rare sont les personne qui font comme lui, à se promener ici  à des heures aussi sombre. Il se pose quelques questions, oui. Comme pour éviter toute confrontation inutile, grand homme se redresse mais lâche néanmoins un soupir de soulagement à ce visage familier se dessinant peu à peu dans la pénombre,
- Clint? Arf, tu m’as fais peur. Qu’est-ce que tu fais ici?

Ⓒslythbitch.

Oui. Grand homme connait ce visage familier. Cette silhouette dans la pénombre. Son corps se détend et un sourire esquisse doucement ses lèvres à son apparition. Clint. Non. Il ne s’attendait pas à le voir ici, dans ce cimetière. Dans ce lieu que certains disent maudit mais dont lui seul se sent à l’aise. C’est étrange. Oui. C’est étrange à expliquer. Peut-être parce que c’est calme ici. Peut-être parce qu’il vient entre ces tombes depuis tellement longtemps qu’il a l’impression de les connaître. Par cœur. Qu’importe. Grand homme regarde cet individu s’avancer et un même sourire étire ses traits. C’est toujours agréable de voir une personne qu’on apprécie. C’est toujours plaisant de voir une personne qu’on considère comme proche. Un proche qui ne l’a jamais jugé même quand son trouble le rend différent d’autrui. Même quand son trouble le plonge dans un état second, dissociant corps et esprit. Il lui demande ce qu’il fait ici. Sans jugement. Aucun. Et quand sa réponse sonne doucement à ses oreilles, il sourit. Encore. Car Grand homme n’est pas genre à être suspicieux ou autre. Il est heureux. Tout simplement. Il se sent entier ce soir. Il se sent lui. Cela lui occasionne un sentiment de bien être et de liberté qu’il compte en profiter pendant quelques heures encore sachant que cela restera éphémère. Fragile. Tant son trouble peut l’envelopper à chaque instant. Lentement, ses sourcils se haussent et sa voix claque à son tour dans le silence environnant. Il est bien tenté de savoir qui. Il est bien tenté de lui demander qui dans son entourage l’a quitté mais Grand homme, pourtant, se tait, estimant que son grand frère de coeur ne voudrait peut-être pas en parler. C’est possible. Beaucoup de personne n’aime pas spécialement mentionner leur mort. C’est un sentiment qu’il respecte même s’il est bien loin de se douter que c’est pour lui que Clint se montre aujourd’hui présent.
- Oh? Elles sont ici aussi? Tu as bien raison. Il faut profiter de les voir quand on le peut encore.

Quand la vie est encore là, présente dans leur cœur et dans leur corps. Le temps passe tellement vite. Grand homme croit en la vie après la mort mais ses croyances ne sont pas spécialement religieuses. Elles lui sont propre. Voilà qu’il part dans quelques réflexions volatiles et ses grandes mains viennent à s’enfouir dans les poches externes de sa veste. Il laisse un soupir d’aise lui échapper. Son regard, lentement, se plonge vers le ciel et il poursuit, haussant les épaules d'un air serein :
- Ça va. Mieux depuis quelques temps on va dire.

Mieux que lorsque Simon tenait les rênes du gang. Mieux que lorsqu'il était obligé de faire ce qu'il ne voulait pas faire. Mieux que lorsque son trouble devenait un poids. Difficile à porter. Pour être devenu une sorte de marionnette manipulé à sa guise. Grand homme n'oublie pas, non. Il n'oublie pas à quel point il se sentait mal en sa présence. A quel point il se sentait utilisé. Il essaye de ne plus y penser. Il ne veux pas l’inquiéter. Son sourire s'agrandit et son regard se porte sur Clint, qui lui demande à qui il parle en particulier.
- Ma mère. J'aime bien lui rendre visite pour lui raconter ma journée. C'est peut-être con mais ça m'apaise.

Un rire s'échappe d'entre ses lèvres et Grand homme cette fois, laisse un bras tomber le long de son corps svelte. Oui. Ça l'apaise. Il se sent proche d'elle sans la connaître. Il se sent comme n'importe quel fils même s'il ne se rappelle plus d'elle. Même si elle est responsable de son trouble. De quelques manières. Grand homme ausculte son suicide et cet oublie l'arrange bien finalement. Lentement, il s'agenouille de nouveau et il laisse sa paume toucher la pierre, la frôlant du bout de ses doigts devenu presque glacé.
- Maman, je te présente Clint. Il veille sur moi lui aussi. Tu vois. Tu n'as pas à t'en faire. Je suis bien entouré.

Même si Grand homme sait que ce n'est pas le cas et que ça ne le sera jamais. Sa mère ne voulait pas d'enfant. Sa mère ne l'aimait pas. Il le sait. Il n'est pas stupide mais non. Il n'en lui tient pas compte. Il lui pardonne. Il veut espérer, voir le bon côté. Un silence passe et Grand homme se redresse. Il remet ses mains dans sa poche. A nouveau, il regarde vers le ciel et il murmure, susurre, à l'attention de son grand frère de cœur qui, comme toujours, demeure à ses côtés.
- Et toi? Comment vas-tu?

Ⓒslythbitch.

Oui. Ce soir, Grand homme est heureux. Il se sent apaisé. Cela fait du bien au moral et il se laisse bercer par ce silence apprécié. Par cette présence affectionnée. L’air entre dans ses narines et son sourire se fait plus grand aux mots prononcés, de son frère de cœur à ses côtés.
- Tant mieux alors.

Grand homme donne de l’importance à ces moments donnés. A ces moments rencontrés, entre vivants et morts dans ce lieu qu’il tend à considérer. Il se sent chez lui ici. Cela paraît étrange mais c’est la stricte vérité. Peut-être parce qu’il passe plusieurs heures à parler à cette tombe qu’il a apprit à aimer malgré la vérité claquée. D’une mère malheureuse et brisée qui a préféré en finir plutôt que d’approuver la vie qu’on lui a donné. Oui. Grand homme ne lui en veut pas. Il préfère façonner la réalité à sa façon. A sa manière. Cela lui parait moins compliqué et plus facile à gérer alors que son trouble le martèle déjà bien assez. D’une scène qu’il a oublié. D’une scène qui, vraisemblablement, n’est pas prête à remonter.

Grand homme regarde le ciel et un sourire nait sur son visage apaisé. Il apprécie ce sentiment. Celui d’être libre de ses gestes. Libre d’être lui-même sans avoir l’impression d’être prisonnier. C’est agréable. Il sait cependant que cela risque de ne pas durer. Cela ne dure jamais. Grand homme garde espoir et se focalise sur l’instant présent. Sur le moment apprécié d’une présence qui l’apaise, oui, pour n’avoir jamais eu de frère à ses côtés. Sa question néanmoins le surprend et il tourne la tête pour le regarder. Ses sourcils se haussent et il marque un silence, une pause à l’inquiétude donné, d’un sentiment qu’il tend pourtant à goûter. Pour refuser de déprimer.
- Je crois oui.

Oui. Il va bien. Mieux. Ce n’est pas un mensonge prononcé. Il y a quelques jours encore, il aurait dit le contraire mais ce n’était qu’une journée. Un moment de fatigue latente. Une perte d’espoir entre l’attitude de son père absent, le traitement qui n’avance pas, la culpabilité d’avoir pris une vie au détriment de lui-même puis le retour de Jodie. Son ex petit-amie dont la rupture, l’éloignement, l’attriste d’une drôle de façon. C’est comme ça. Grand homme ne veut pas ruminer. Grand homme ne veut pas pleurer. Il ne veut pas broyer du noir et il s’accroche toujours plus au bonheur présent d’une belle journée. Ses épaules se haussent et ses mains s’enfouissent dans ses poches à un ricanement échappé, à ses propres mots murmurés.
- Oui, aujourd’hui ça va. Repose moi la question un autre jour, peut-être que cela changera.

La conversation, doucement, dérive et Grand homme écoute Clint et sa faculté à ne pas le juger. Jamais. Chose qu’il apprécie chez lui. Chose qu’il a toujours apprécié pour se sentir protégé, apprécié à sa juste valeur parfois oublié. Ses mots sur sa propre mère l’interpelle cependant et il l’observe s’adresser à la sienne, fais mine de prendre un air outré à ses paroles qui tend pourtant à l’amuser.
- Genre ! Dit aussi que je te mène la vie dure. Ce n’est pas facile non plus pour moi d’avoir un grand frère comme toi.

Grand homme s’amuse, oui et lui rend gentiment son coup de coude sans le faire flancher. Fraternité. C’est agréable quand on est fils unique. C’est agréable de se sentir entouré alors que chez lui, n’existe qu’un fantôme en guise de père qui n’est là que pour lui donner de l’argent dont il n’en a rien à faire. C’est pour cette raison qu’il s’est trouvé un gang. Un gang qui, excepté Simon, l’accepte aussi comme il est. Avec son trouble et ses changements récurrents sans vouloir s’en moquer. S’en vouloir le changer. Sans vouloir l’utiliser et cette pensée à de quoi le faire soupirer. Il rejette légèrement sa tête en arrière. Il ferme brièvement les paupières mais les ouvre bien vite aux mots échangés qui glissent toujours autant à ses côtés :
- Oh non. Reste. Ça me fais plaisir au contraire. Tu as eu raison de venir. Ça fait du bien aussi d’avoir un peu de compagnie mais dis-moi Clint. Pourquoi tu ne te sens pas capable de parler à ta mère toi aussi? Pardon si ça parait un peu brusque comme question mais moi je pense que tu l’es.

Ⓒslythbitch.

Oui. Fraternité. Lien soudé malgré aucun lien de parenté. Cela n’a pas d’importance. Grand homme n’a pas de famille à proprement parlé. Il a un père, certes mais ce dernier n’est jamais là. Il ne l’a jamais été. Il a choisi le gang, Clint en guise de tribut attitré. Il est plus heureux comme ça, plus entouré. Il aurait aimé que Jodie aussi en fasse partie mais leur dernière rencontre le transperce, le foudroie, le fait réaliser qu’ils ne sont désormais que des “amis” et il soupire brièvement à cette pensée. Il fait en sorte de ne pas trop ruminer. Il ne doit pas. Il n’a pas le droit. Il veut simplement profiter de l’instant présent. Un moment unique, apaisé avec son grand frère de cœur à ses côtés.
- C’est vrai. J’imagine que je dois m’en sentir flatté alors.

Oui. Cette journée est une bonne journée et il ne doit pas la gâcher. Son rire se joint au sien et ses mains s’enfouissent dans les poches de sa veste. Aujourd’hui, il est heureux et Grand homme veut simplement souffler. Souffler d’un trouble qui n’est pas toujours facile à accepter. Souffler de certains maux, questions qui lui enlèvent sa bonne humeur comme une baguette magique claquée. Il ne veut pas la perdre : cette bonne humeur. Cette bouée de sauvetage qui le fait relever la tête, dignement, perpétuellement pour ne pas sombrer. Ses paupières se ferment, s’abaissent mais il les ouvre aussitôt aux mots murmurés, d’un grand frère de cœur qu’il ne souhaite pas voir s’en aller. Au contraire. Pour ressentir un sentiment apaisé. Alors oui, il a eu raison de venir. Grand homme apprécie ses moments de solitude mais il n’est pas non plus contre de la compagnie bien pensé. Il a été beaucoup trop seul durant son enfance. Durant son passé. Il a toujours recherché des amis, une présence sur qui se poser, compter alors que son propre père l’a toujours ignoré. Par manque de temps. Il ne sait pas trop. Il croit toujours que cela va changer même si une part de lui a bien baissé les bras depuis leur dernier échange passé. D’un boulot beaucoup trop présent en leur deux âmes séparés. Il croit que l’argent suffit à combler ce lien paternel mais il se trompe sur toute la ligne. Grand homme n’a pas besoin d’argent. Il n’en a jamais eu besoin en vérité. Un énième soupir traverse la barrière de ses chairs et il porte la conversation sur Clint, pour ne pas briser - oh non - cette bonne humeur retrouvé.

Il lui demande pourquoi. Pourquoi il ne se sent pas capable de parler à sa mère. D’échanger. De bavarder devant une tombe qui peut apporter la paix escomptée. Question un peu brutale certes mais curiosité touché, d’une haute confiance qu’il porte à son frère pour n’en jamais douter. Grand homme pose, oui, son regard sur Clint et il l’écoute attentivement. Un léger sourire attristé étire ses lèvres plissés et il hoche le menton, porte à nouveau ses yeux sur la tombe de sa propre mère dressée. Il l’écoute, oui. Et ne peut s’empêcher de comprendre ses ressentis bien qu’il s’est toujours évertué de son côté à n’en éprouver aucune rancœur pour n’en voir là aucune utilité.
- Je vois. Ça n’a pas dû être facile pour toi et ton frère. Je suis désolé d’avoir remué le couteau dans la plaie, tu ne voulais peut-être pas y penser. Mais si tu as besoin d'en parler, hésite pas. Je suis là.

A défaut de ne pas pouvoir échanger avec sa mère enterrée. Grand homme est là oui. Cette fois. Présent, entier sans un trouble pour le tenir par moment éloigné. Un petit coup de coude échangé et un sourire. Un sourire qu'il veut joviale pour partager sa bonne humeur retrouvée.
- Ça viendra sûrement. Il faut peut-être juste attendre le bon moment. C'est plus facile pour moi en vérité. Je n'ai pas beaucoup de souvenir la concernant et le dernier qu'elle m'a laissé…

Soupir. Oui, volonté de ne pas y songer. Volonté de ne pas savoir ce qui s'est réellement passé. C'est mieux comme ça. Il le sait. Il connaît la vérité mais il préfère la détourner pour ne pas avoir de peine à essayer de la mémoriser.
- Je préfère croire et voir qu'elle m'aimait. Qu'elle m'aime toujours là ou elle est et que je puisse échanger comme je le fais. Au moins, je ne suis pas coincé. Tu… tu es encore en contact avec ton père ?

Ⓒslythbitch.

Soirée confessée. Secondes écoulées dans ce cimetière - oui - que Mok apprécie, se sentant étrangement en sécurité. Regard dirigé sur son frère de cœur à ses côtés. Volonté de l'écouter, de lui donner - qui sait - une épaule dressée. Grand homme se rend compte qu'il ne connait pas son passé. Qu'il ne lui a jamais demandé alors que les révélations glissent, tendent à l'attrister. Il s'en veut un peu d'avoir remuer le couteau dans la plaie. C'est vrai. Clint le rassure mais un léger sourire est étiré, aux mots énoncés, à la confiance donné qu'il pourrait faire de même de son côté. Il lui fait confiance, c'est certain. Il n'a jamais douté en vérité. Il lui fait confiance et un hochement de tête est adressé, à ce grand frère à ses côtés qui ne la jamais laissé tomber. Qui lui murmure qu'il lui en aurait parlé de toute manière. Doute qui ne l'a jamais - oui - traversé ou même titiller. Nouveau coup de coude adressé comme pour le rassurer.
- Je sais.

Puis un regard dirigé vers cette tombe. Cette tombe fleurie où Grand homme aime à s'y recueillir et parler de ses journées. Soupir échappé. D'une sombre vérité qu'il préfère ignorer, changer, pour en connaitre pourtant la réalité. D'une mère qui ne la jamais aimé. D'une mère qui s'est suicidé, devant ses yeux d'enfants alors que c'est lui qui la trouvé. Faits sur un bout de papier. Vérité, seulement dévoilé par un psychologue pour l'aider à traverser son trouble imposé. Guérir ce trouble, ses moments d'absences qui tendent à rester. Grand homme soupire - oui - devant cette réalité qu'il préfère changer, modeler à quelques choses de plus joyeux, de moins difficile à gérer. Il sait pourtant qu'il va devoir faire face un jour à cette sinistre vérité. Nouveau sourire étiré. Rire échappé. Haussement d'épaule à son tour quand Clint le rassure qu'il n'est pas obligé d'en parler.
- Il le faudra bien un jour. C'est mon psy qui me l'a conseillé.

Nouveau rire tinté. Oui. Il en parlera un jour. Peut-être. Quand néanmoins, Grand homme est incapable de le préciser. Il n'est peut-être pas encore prêt pour s'imposer une telle vérité. Il n'est peut-être pas encore prêt de s'y confronter. Question détournée. Grimace étirée quand Grand homme demande à son frère de coeur s'il est encore en contact avec son père. Père de toute évidence mauvais dont le mal est dévoilé. Mort. Clint avoue le souhait qu'il aurait préféré s'en charger. Silence étiré. Confessions - oui - émises sur un passé qui, visiblement, n'est pas non plus de toute repos ce qui a de quoi l'attrister. L'inquiéter.
- Je vois. T'as pas à culpabiliser de toute façon. Après tout ce qu'il semble avoir fait, c'est compréhensible. Ce n'est pas moi qui vais te juger.

Même si Mok a du mal quant à lui à en vouloir à son propre père. Père qui le délaisse pour un travail qu'il aime probablement plus que son propre fils. Père qui ne l'achète que par sa richesse dont il s'en contrefiche bien et le partage avec le gang. Soupir. Oui, confession échangée dans cette nuit calme, limpide qui tend à s'étirer. Grand homme ne se doutait pas que son frère de coeur a eu autant une enfance tourmentée. Il se met à espérer qu'il va bien. Qu'il va bien lui aussi malgré les apparences dévoilés. Il ne dit rien cependant. Il ne veut pas de plus belle remuer le couteau dans la plaie. Ses grandes mains s'enfouissent dans ses poches et son regard dérive sur les étoiles annoncées pour quelques réflexions dessinées après cet échange inavoué :
- Il y a certaines choses qui sont mieux enterré finalement. Parfois, il est préférable de n'en garder que le bon ou ce qu'on aurait aimé voir même si c'est bien loin de la réalité et qu'on le sait inconsciemment. Tu ne penses pas? Tant que ta vie te convient mieux maintenant. Mais arrêtons peut-être de parler du passé. On va finir par déprimer. Qu'est-ce que tu raconte de neuf sinon?

Ⓒslythbitch.