Putain de tête à chiotte, que c’était bon de sortir un peu. Que c’était bandant de retourner en mission, de ne plus voir ces têtes de glands en formation. Non parce que dans le genre cadeau empoisonné, Marc avait fait fort. Alors oui, malgré ses multiples injures, malgré ses multiples prises de bec et d’arrachage de cheveux en tout genre, l’assassin kiffait son nouveau poste. Il kiffait botter le cul à ces mou de la bite qui étaient aussi lent qu’un papy en manque mais bordel, il avait aussi besoin de changer d’air, d’avoir un peu plus d’action que de botter le fion à ses élèves. Il avait besoin de se retrouver, de se défouler et quel meilleur moyen de le faire que d’apporter des informations importantes à l’organisation qu’il tendait à servir depuis maintenant plusieurs années. Qu’il tendait toujours à servir, d’ailleurs, malgré l’incident avec l’autre enculé lors de la mise à tabac de ce gros cul rouge qui aurait mieux fait de ne pas trop se la ramener. Oui. Malik avait encore du mal à croire. A réaliser que lui aussi était un possible émergé avec un pouvoir à la clef. Il avait du mal à capter que lui aussi avait des souvenirs planqués. Des souvenirs d’un laboratoire où il aurait créché pour subir des modifications espérés. Il avait du mal à fédérer que sa grosse vache de femme, il l’avait déjà tué. Par accident cette fois et qu’il avait tenté de la ramener. Conneries. Comment il avait pu souhaiter ça? Il aurait pu au moins souhaité une Pamela Anderson plutôt que Peggy la Cochonne. Cela lui aurait éviter de tremper sa nouille ailleurs. Franchement, oui. Malik préférait jouer à l’autruche et de ne plus y penser. C’était plus simple comme ça. Plus facile. Il était loin d’être con mais penser à ça le faisait chier, rendait la vérité trop surréaliste et clairement, réfléchir, se mettre des nœuds au cerveau et l’utiliser, c’était franchement pas son truc et ça ne l’avait jamais été.

Dans un geste habituel, il ramena sa clope à son bec et inhala une bouffée. Une première avant plusieurs accumulées. Un rictus étira la barrière de ses chairs et il regarda sa montre. Il observa l’heure s’écouler. Cinq heure du matin. Parfait. Ce con d’indic aurait pu choisir une meilleure tranche d’horaire mais qu’importe. Au moins, il n’allait plus se cailler les miches dehors. De toute façon, il était bien trop heureux de se bouger le fion pour pester. Une dernière taffe absorbée. Un craquement de nuque et un regard jeté à la volée pour être certain d’être le seul péquenaud présent pour ne pas se faire choper.
- Niquel. A nous deux fils de pute. T’as intérêt à être à l’heure sinon je rapplique chez toi pour te niquer les couilles et les donner ensuite à bouffer à Gertrude. Capiche?

Dans l’ensemble, la mission était simple. Retrouver Huggy à l’intérieur et récolter des informations importantes sur les émergés. Tout avait été soigneusement planifié, appliqué. Un message avait été envoyé. Ce salopard lui avait indiqué une heure et une adresse et il lui suffisait de s’y pointer pour avoir les infos chèrement payés.
“Je suis ici trou du cul. C’est quand tu veux.”

- Pour le prix que tu te touche hein. Elles ont intérêt à être bonnes tes infos.

Son regard glissa sur la bâtisse - un vieil entrepôt d’archive - et ses sourcils se haussèrent sur son front déjà plissé. Il y régnait un lourd silence ici. Un silence de mort indiquant néanmoins une facilité d’accès. Malik jeta sa clope par terre et l’écrasa du bout du pied. Ses pas le menèrent d’emblée vers une porte cachée où la caméra était déjà désactivé. Oui. Tout avait été planifié, dans les moindres détails organisés. Cette tête de fion était plutôt bien placé et il n’allait pas se priver de lui lécher l’anus pour en profiter. Cependant, pour une question de sécurité, il s’arma d’un revolver au cas où la situation tendrait à puer du pâté. Ouai. Question de sécurité. Détails. Question de bon sens aussi même si l’assassin n’était pas réputé pour en avoir d’habitude. L’idée de gueuler une bonne chanson paillardes le titilla mais il se contenta de se fondre dans l’obscurité, arpentant ces longs couloirs puants qui tendait à le faire grimacer au fil des secondes écoulées.
- Bordel. Ça sent le fond de culotte de ma grand-mère ici. Pire qu’une boite à pisse pour laisser les vieux crever. Rah putain de sa mère, je préférai finalement changer les couches de ces couilles molles au QG. Quitte à choisir. Je me croirai dans une morgue tellement que ça schlingue. A quand la rencontre avec un putain d’asticot?

Oui. Gueuler. Râler à mesure des minutes passés. Meilleur sport au monde pour le jeune Caglar qui se dirigea vers le point indiqué. Il ne s’attendait pas à trouver une autre silhouette dans la salle allumée. Une silhouette bien trop musclée et bien trop gaulé pour être son indic qui tendrait plus sur du Trump avec sa coupe de merde sur le côté. Sourcils arqués, Malik tendit son arme vers cette forme dressée, n’attendant pas cent ans pour répliquer - parce que clairement, la patience n’était pas son truc et qu’il était prêt à tirer aux moindres gestes suspects :
- T’es qui toi? A moins que l’autre chien de crétin soit passé sous le billard pour ressembler à Brad Pitt, je crois pas te connaître.

Ⓒslytbitch.

Une moue plisse mes traits tandis qu’une buée glaciale se dessine par-delà mes lèvres entrouvertes. Mes mains gantées ont le réflexe de se frotter l’une contre l’autre alors que mon regard observe les horizons abordés.  Rendu à l’intérieur d’un entrepôt dont je ne connaissais même pas l’existence il y a deux jours, je parcoure les rangées de vieux cartons apposés de tous les côtés avec un manque flagrant de conviction. J’ai, en toute honnêteté, du mal à croire que je vais trouver ce que je cherche ici. Ou alors, il va falloir que je sacrifie des années de ma vie pour réussir à pécher quelque chose d’intéressant dans le coin. En soupirant, je maudis intérieurement le contact qui m’a filé cette adresse en guise de rendez-vous galant. Un indic, que j’ai pu repérer grâce à mon affiliation au SWAT, et que j’ai ensuite contacté pour aider la résistance à garnir ses troupes, et à fuir cette garde rouge et ces putain de chasseurs lancés à nos trousses. Je secoue la tête, vraiment mitigé quant à ma présence en ces lieux. Il fait froid, et à part un rangement étalé sur des centaines de m² de surface d’archives en tout genre, je ne vois pas, là tout de suite, ce qui pourrait confirmer la quête que je poursuis depuis plusieurs jours désormais. Huggy, et ses tuyaux certainement douteux, m’a pourtant assuré qu’il me donnerait de quoi garantir la survie de mes compatriotes : un répertoire d’émergés soigneusement monté par la Garde Rouge en personne. Le genre de listing qu’on ne voudrait pas voir tomber entre de mauvaises mains, en somme. La rumeur raconte que ce répertoire date d’avant la libération des dizaines et dizaines d’émergés lors de la destruction du premier QG des soldats. La Dynastie Magnus aurait en effet assemblé moults informations sur leurs cibles injustifiées, qui sont désormais éparpillées dans la nature. Mais qui sont surtout des proies toutes désignées, à récupérer obligatoirement par la troupe rouge. Aussi, pour leur survie, et pour celle des rebelles, je ne vais pas mentir, on a besoin d’accroître nos effectifs après tout, mieux vaut qu’on les retrouve en premier. Avant que la Garde Rouge use à mauvais escients ce répertoire pour traquer les pouvoirs des gens en question, ou pire, avant que ce dossier ne finisse dans les rangs de mauvaises personnes. De qui ? Oh et bien genre, je ne sais pas, Hydra par exemple.

Je lâche un grognement, consultant ma montre avec une résignation déjà trop fortement éprouvée. 5H du matin, heure convenue pour rencontrer Huggy, sauf que le bonhomme ne s’est toujours pas pointé. Je commence à sentir le coup fourré, et je me tâte pour me tirer d’ici vite fait, quand je décide de me calmer. Bon, le bougre peut bien avoir quelques minutes de retard, cela ne veut rien dire, après tout. Je croise les bras, patientant encore quelques instants. Muni de ma combinaison tactique, on remercie le SWAT et son armurerie, j’ai de quoi sortir un flingue ou un couteau rapidement si l’indic tente de m’éradiquer. Mais à la place de voir Huggy en chair et en os, voilà qu’un inconnu au bataillon se met à débarquer, son revolver dirigé à même ma tronche en gueulant comme un taré. Ah, elle est bien bonne celle-là. Huggy aurait refilé l’info à quelqu’un d’autre ? Et après les indics du genre s’étonnent du manque de confiance des flics, on ne se demande pas pourquoi. Agacé, en tout cas, parce que mon indulgence à des limites, je mets rapidement l’autre en joue à mon tour. J’aurais peut-être dû la jouer plus fine, mais j’ai un mauvais pressentiment. Le temps est contre moi, et ce n’est pas ce nouveau venu qui va me désemparer avec son air frustré. J’ai pas le temps de me laisser abattre par ce revirement de situation, par contre, je ne vais pas me gêner pour glaner quelques infos avant de partir après Huggy et sa connerie. « Je te retourne la même question. Sauf erreur, tu n’m’as pas l’air d’être du genre à partager les bons tuyaux, je me trompe ? » Bon, on parle en métaphores, qui pourraient paraître bien ridicules d’un point de vue externe. Mais c’est aussi notre meilleure option pour nous jauger, lui et moi. Parce qu’il n’y a pas besoin d’être fort doué en maths pour savoir que 1 + 1 = 2 et qu’on vient de se faire rouler dans la farine. Bordel de merde, si Huggy nous a amené tous les deux au même endroit, c’est qu’il joue double jeu. Peut-être bien triple, même. « Alors dis-moi, tu bosses pour qui toi ? Ou pour quoi ? » Comme si je m’attendais à une réponse honnête de sa part.

Absolument aucune confirmation ne m’est due, il faut dire. Mais à sa tenue, je peux au moins croire qu’il n’est pas là pour le compte de la Garde Rouge. Ou alors, les représentants de la Dynastie ont bien changé. Ce qui me rassure d’un côté, mais me fais craindre le pire de l’autre. S’il ne représente pas nos ennemis, alors il peut venir pour le compte de n’importe qui. Le SHIELD, Hydra, la mafia, un gang du coin… Beaucoup de possibilités, et très peu à exclure, au vu de sa dégaine remarquée. Et merde. La prochaine fois, je me rencarde auprès de Ben. Je ferais plus confiance à mon détective de frère qu’à un parfait inconnu au casier bien argumenté. Se plier au fonctionnement des autorités, parfois, ça ne paie pas. La preuve. Mes pensées sont toutefois rapidement interrompues par un claquement distinct. Comme si on venait soit de faire tomber quelque chose, soit de déclencher un truc. Ouais, ce n’est pas bien spécifique, mais je n’ai pas plus de renseignement, au vu du son assez distancé de ma position. Je me tourne rapidement vers l’autre, l’accusant presque en chuchotant : « T’as été suivi ? » Manquerait plus que ce crétin ait amené la garde sur nos pas, et c’en est foutu pour nous. Bon relax Kaine, ne l'insulte pas parce qu'il te menace de son flingue. Et puis, je n’y crois pas. Parce que dans le fond, une seule personne connaissait cette heure et ce lieu de rendez-vous précisément, la seule qui ne s'est pas montrée encore. « Putain Huggy… » Il m’a vendu. Nous a vendu, devrais-je dire. C’est un piège. Et on est tombé dans le panneau comme de parfaits imbéciles finis.