✦ Welcome to the panic room where all your darkest fears are gonna come for you ✦
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
Il faisait sombre, l'obscurité régnait alentour, engourdissant mes membres. La pénombre recouvrant le paysage, de son voile opaque et noir. La brume s'engouffrant en mon esprit, étirant mes souvenirs jusqu'à la surface. Les images plongées au plus profond remontant alors, caressant la limite, la frôlant. Tiraillant mon âme sous l'assaut provoqué par la brusque remontée. Le mouvement bien trop fugace, trop poignant, m'arrachant une plainte du fond de la gorge. Soupir amère qui glissait sur la langue, avant de franchir la barrière de mes lèvres entrouvertes. Fronçant les sourcils, grimaçant à mesure que les souvenirs s'imprégnaient à mon esprit. Que les images s'inscrivaient à l'arrière de mes paupières. Une sensation contre mon corps, un linge sur ma peau, crépitant doucement en rythme avec les soubresauts qui m'empoignaient. De simples réflexes qui me tiraient de l'immuabilité. L'oppression ressentie, contre mon épiderme, mais aussi en mon esprit. Envers et contre moi. Mes poumons se compressant douloureusement, un nœud se formant au fond de ma gorge. Des échos de battements ratés se répercutant en mes entrailles, sous mes côtes, au creux de ma cage thoracique. Un frisson glacial déferlant le long de ma colonne vertébrale, au point de m'en faire courber l'échine. Mes veines gelant malgré le liquide carmin et chaud qui les gonflaient sous les impulsions abruptes. Un souvenir plus grave, plus dur, plus intime, s'inscrivant à mon esprit, déchirant mon âme, scindant mon être sous l'impact. L'horreur m'arrachant de ce sommeil précaire au réconfort incertain, pour revenir à cet état de conscience tangible. Retrouver contenance face à la toile de la réalité en rouvrant les yeux. Mes iris troublés se perdant dans le vide, droit devant moi. Accrochant les contours flous dans la chambre, par réflexe. Mon souffle erratique se perdant dans les airs, soupir fébrile perturbant l'atmosphère avant d'être étouffé par le silence. Mes phalanges agrippant les draps fermement, brusquement. La texture rugueuse sous mes paumes, glissant entre mes doigts, à mesure que j'enserrai le tissu. Tremblant sous le contre-coup et la retombée de l'accalmie. Les souvenirs brumeux s'estompant peu à peu, délaissant mon esprit. Me quittant avec lenteur, marquant l'agonie.
Un soupir plus rauque s'échappa d'entre mes lèvres et je fermais les yeux un court instant. Soufflant bruyamment et retirant les draps pour m'extirper de cette prison. L'angoisse dévorant mes entrailles, à mesure que je chassais ces démons dans ma tête. Que j'évinçais ces souvenirs beaucoup trop oppressants. Trop proches, trop réels. Rouvrant les yeux, je me relevais dans une impulsion. Laissant mes pieds nus frôler la texture douce et moelleuse du sol alors que je me dirigeais vers la fenêtre. L'ouvrant à la volée, savourant l'air frais qui s'écrasa sur mes joues échauffées. Mes iris se perdant en contre-bas, contemplant la vie qui suivait son cours. Les klaxons parvenant à mes tympans, les caressant doucement. Les bruits de tous les jours m'avaient perturbés au début, mais je commençais lentement à m'y faire. Les appréciant de plus en plus, me raccrochant à eux pour ne pas sombrer. C'était toujours mieux que ce silence pesant qui régnait dans l'appartement. Ou que la tension qui crépitait contre ma peau à chaque fois que Marc était dans les parages. Il m'accordait à peine des regards, et ne prenait plus la parole en ma présence. Plus depuis cette nuit là, où je l'avais arraché des griffes de la mort, et où il m'avait traîné en retour pendant des jours. Jusqu'à ce qu'on trouve cette planque, le temps de se remettre de nos émotions. Et de préparer notre prochaine attaque sur Hellhound. Cela sera long et fastidieux, mais nous n'avions pas le choix. Je devais récupérer de l'absence de mon essence, combler ce manque qui me dévorait encore de l'intérieur. Et trouver un moyen de la régénérer, ou de la reprendre à Marc, sans le blesser au passage. Je soupirais à nouveau, m'arrachant de mes pensées et de ma contemplation pour fermer la fenêtre. Et me décaler afin de sortir de la pièce, quittant l'atmosphère étouffante qui pesait lourdement sur mes épaules.
Rejoignant la salle de bain, je profitais du silence annonciateur de l'absence de Marc pour me glisser sous la douche. Savourant le jet d'eau sur ma peau, le sentant détendre mes muscles avec une douceur qui m'était étrangère. Fermant les yeux, les mains à même le carrelage pour me poser. Le liquide clair déferlant sur mon corps à mesure que la pression caressait l'épiderme. Attrapant les pots contenant les substances à la fragrance caractéristique pour me décrasser. Retirer cette pellicule de sueur qui avait collé contre ma peau durant mon repos pas vraiment salvateur. Les paumes frottant énergiquement, appréciant la texture de la mousse contre moi, avant de rincer le tout et de couper l'eau. Agrippant une serviette qui trônait sur le rebord du lavabo pour m'essuyer, l'attachant autour de mes hanches une fois que j'étais à peu près sec. Quelques perles déferlant pourtant sur ma nuque, glissant sur mon échine. Sortant de la pièce, je me rendis dans la chambre de Marc, sans frapper, sans toquer, sans prévenir. Il n'était de toute façon pas là, et je pouvais le ressentir de par l'absence de ténèbres alentour. Le manque se creusant, devenant de plus en plus poignant à mesure qu'il quittait les lieux et ne revenait que bien plus tard. Inspirant longuement, je poussais la porte menant à son antre, et me dirigeais directement vers l'armoire en face de son lit. Ouvrant un placard pour fouiller dans ses affaires. Il avait une petite réserve de fringues, et comme je n'en avais pas encore d'autres, j'étais obligé de piquer les siens. Ils étaient serrés pour moi, mais je m'en fichais. J'attrapais du bout des doigts un débardeur qui devait être blanc à la base, mais qui avait bien déteint depuis, et l'apporta à hauteur de mon visage. Une légère odeur musquée caressant mes narines tandis que j'inspirais. Décelant la fragrance au travers du tissu, je fermais les paupières lentement, tentant de déterminer si Marc l'avait porté récemment. Certainement vu la forte émanation qui embaumait contre mon palais. Soupirant doucement, je rouvris les yeux et haussais les épaules, l'enfilant sans trop réfléchir. Sans plus y penser, préférant lui piquer un boxer et un jogging également sans vraiment regarder. Je les mis rapidement et retira la serviette avant de refermer derrière moi et sortir de sa chambre. De sa pièce, de sa bulle où je ne devrais même pas mettre les pieds de base. Quittant le seul endroit qui était encore témoin de sa présence. Son odeur flottant dans l'air, alors que je sortais enfin d'ici.
J'étais en train de bricoler quelques pièges et de formuler certains sortilèges en latin lorsque Marc revint à l'appartement, plusieurs heures plus tard. Il était chargé comme pas possible, et grognait en déposant les sacs sur la table à côté de moi. Il fit ainsi plusieurs allers-retours, et je m'étais levé, délissant les babioles sur la surface, le suivant sur quelques pas. T'as besoin d'un coup de main ? Il avait grommeler que non, et je m'étais alors écarté, les mains dans les poches, en le voyant galérer à tout rentrer dans l'appartement. Il n'avait pas l'air d'avoir envie que je sorte d'ici, et dans un sens je le comprenais. Mais j'allais devenir dingue si je ne sortais pas, ne serait-ce que la nuit, pour prendre l'air, courir un peu, souffler, respirer. Je soupirais doucement, refermant derrière lui lorsqu'il annonça que c'étaient les derniers sacs. Je le suivis dans la pièce adjacente à la cuisine, et le vis fouiller dans les divers contenants. Sortant de la nourriture, que je m'empressais de ranger dans la cuisine. Ainsi que des ingrédients pour ses sortilèges et invocations. Je le laissais se démerder avec ça, préférant plutôt regarder dans les autres sacs. Il m'informa qu'il avait enfin eu le temps de me prendre des fringues, non sans me jeter un regard en coin. Il avait capté depuis longtemps que je me servais chez lui, et que ce n'était aucunement adapté. Merci. Je soufflais silencieusement, en récupérant tout ça pour le ranger dans ma chambre. Déposant les sacs ça et là, sortant les habits afin de les scruter, puis de les placer dans l'armoire. Une fois chose faite, j'attrapais les sacs pour les rendre à Marc, et l'entendit s'affairer dans la cuisine. Sûrement pour ranger le reste des courses. Déposant les papiers krafts sur le comptoir de la cuisine, je retournais à mes affaires. M'arrêtant devant la table, bloqué, en voyant le paquet de sucettes qui trônait sur la surface. Un sourire étira mes lèvres, relevant mes pommettes et je penchais la tête sur le côté en riant légèrement. Ouvrant le paquet et en agrippant une du bout des doigts, je la faisais glisser entre mes phalanges. Avant de retirer le papier, et de la déposer sur ma langue. Savourant le goût sucré et fruité, soupirant d'aise, fermant les paupières. Profitant de la fragrance tout en continuant le piège que j'étais en train de construire depuis quelques minutes. Sans pouvoirs, sans magie, c'était bien plus compliqué que prévu. Mais j'avais tout de même réussi à en faire trois et à les placer aux coins de certaines pièces.
La nuit était déjà tombée depuis un moment, et Marc s'était enfermé dans sa chambre après avoir mangé un bout. Enfin, j'osais espérer qu'il avait graillé un truc, parce que partir toute la journée et s'effondrer sur son lit le ventre vide, c'était pas vraiment un bon plan. Surtout pour un sorcier qui avait besoin de son énergie en tout temps et en tous lieux. Enfin, je pouvais causer, je n'étais pas vraiment mieux à vrai dire. En quelques heures, j'avais liquidé le paquet de sucettes qu'il avait pensé à m'acheter. Et c'était tout ce que j'avais eu comme potentielle nourriture. N'ayant rien mangé ce matin, après mon réveil, ni même ce midi, et encore moins ce soir. Je sentais d'ailleurs mes entrailles se crisper et je grimaçais en terminant le neuvième piège de la journée. Je n'aimais pas être déconcentré par les besoin physiologiques de mon enveloppe physique. Mais je n'avais pas réellement le choix. Ma forme spectrale ne m'était plus accessible, et les ténèbres ne m'écoutaient plus. Coincé à même ce corps que je n'avais même pas choisi, je ne pouvais plus qu'y être soumis. Sensible à chaque changement, de manière plus authentique qu'auparavant. Être confronté aux sensations toute la journée et même la nuit, durant mon sommeil, était bien plus étrange que je ne l'avais pensé. Moi qui avais toujours voulu avoir cette impression de ressentir, dans le passé, je me retrouvais à y être confronté en permanence. Et c'était vraiment dérangeant pour certaines choses. Désagréables pour d'autres. Mais parfois, certaines sensations étaient bien plus appréciables. Plus agréables, semblables à celles que j'avais déjà ressenties par le passé. Sans que je ne sache réellement pourquoi. Ou du moins, sans que je ne m'en avoue la raison. Un soupir franchissait la barrière de mes lèvres, tandis que je me relevais enfin. Ayant terminé le dernier piège, vers les trois heures du matin, je me dirigeais vers un coin de la cuisine pour le déposer près de la fenêtre. Afin d'empêcher les mauvais esprits de venir nous repérer, et aussi pour repousser les œillades des sbires à l'autre capuchonnée de mes deux. Il valait mieux être prudents, surtout qu'on tentait de faire profil bas en attendant de récupérer. Enfin. Un bâillement m'échappa et je m'étirais alors, me laissant me complaire dans ce tiraillement de mes muscles, cette tension dans la mâchoire. Rangeant mes affaires, jetant les emballages de sucettes. Traînant les pieds jusque dans ma chambre, me couchant à même le lit défait, sans remettre les draps. M'affalant sans me changer, toujours dans les fringues du sorcier.
J'essayais de trouver le sommeil, de me reposer, la tête enfoncée dans l'oreiller. Le silence assourdissant caressant mes tympans. Je n'arrivais pas à fermer l’œil, pour une obscure raison alors que mes paupières étaient pourtant lourdes et que mes iris picotaient. Un nouveau grondement résonna subitement en mes entrailles et je grognais pour la forme. Bougeant dans le lit pour trouver une meilleure position. Il était bien cinq heures passées lorsque je compris que je n'arriverai pas à m'endormir. Soupirant un bon coup, je me levais alors et rouvris la fenêtre. Écoutant les bruits extérieurs de la ville en pleine nuit nuit pour apaiser mon esprit en ébullition. Mon regard voilé par la fatigue accrochant le vide en contrebas, contemplant les contours des silhouettes. Les voitures qui défilaient, les passants encore debout ou à peine réveillés. Peut-être que sortir en pleine nuit me tirerait de cette catatonie. Je devrai essayer la prochaine fois. Mais pas maintenant. Il était bien trop tard, et mes entrailles criaient à la famine. Agonisant à cause du manque. M'arrachant de la fenêtre, je sortis de la chambre pour prendre la direction de la cuisine. Fouillant ça et là, dénichant quelques biscuits, mais qui ne semblaient pas appétissants. Encore moins à mon goût, les remettant alors en place. Marc avait beau avoir fait les courses, faire la cuisine était un putain de mystère pour moi. La seule chose que je savais faire, c'était ouvrir les paquets de sucettes et me sustenter avec le sucre qu'elles contenaient. C'était bien trop addictif et je n'arrivais plus à m'arrêter lorsque je commençais. Grimaçant doucement, je me tirais de la cuisine avant de faire le tour de l'appartement. Pinçant les lèvres, croisant les bras sur mon torse en cherchant quelque chose à faire. Avant que mes entrailles ne se mirent à grogner à nouveau. Je soupirais, comprenant que je n'avais pas vraiment le choix que de demander l'aide du sorcier. M'approchant silencieusement de sa porte, toquant avec légèreté, douceur, pour ne pas le brusquer, malgré l'heure. Il ne répondit pas, et j'entrouvris alors la porte, glissant la tête à l'intérieur. Marc ? Silence, seule sa respiration perturbant l'absence de bruit alentour. Je rentrais complètement dans la pièce et m'approchais de son lit, marmonnant encore son nom. Plusieurs fois, tandis qu'il finit par grommeler dans son sommeil. Eh, connard, réveille-toi. Il bougea et marmonna quelque chose que je ne compris pas vraiment. Rendu groggy par le brouillard du sommeil, certainement. Poussant un soupir, je m'agenouillais, me mettant à sa hauteur. Continuant à lui causer. Allez, debouuuuuuut. Il me tourna le dos et j'aurai pu en ricaner, si je n'étais pas si désespéré. Bouge-toi lààààà. Soupirant en m'asseyant sur le lit, croisant ma cheville gauche sur mon genou droit. Posant les mains sur ma jambe, tout en fléchissant les épaules, alors qu'il se mit à bouger plus vivement, commençant à se réveiller. Steuplaît, j'crève la dalle... Il sortit enfin de son sommeil, complètement à la ramasse, m'offrant également un magnifique 'hein ?' à moitié à côté de la plaque. Me penchant vers lui, je murmurais alors, lentement pour qu'il puisse me comprendre. Chouinant également, à cause de mes entrailles qui me tiraillaient. Mec, t'as pas une sucette qui traîne ? J'ai déjà tout liquidé.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
L’univers a un sens de l’humour bien tordu. Passer un pacte sur un coup de tête, oui. S’aventurer dans une quête qui le dépasse largement ? Il peut encore gérer, même s’il y a laissé quelques plumes. Echapper de peu à une espèce de folle sadique qui se prend un complexe de dieu ? Difficile mais ça ne lui fait pas peur. Par contre, se faire réveiller en plein milieu de la nuit par une déité devenu humain et en manque de sucre qui s’avère être son colocataire ? Putain, non. Il ne faut pas déconner non plus. Marc a besoin de dormir. Ce n’est pas juste récupérer de l’énergie, comme tous les humains de cette terre sont censés le faire. C’est carrément dormir comme une masse car cette essence divine qu’il a l’intérieur de lui le vide de son énergie. Sa propre enveloppe n’est pas totalement faite pour recueillir ce qui fait la divinité de Tenebris. Tout est donc poussé à l’extrême. Il peut soit devenir une espèce de pile hyperactive sous stéroïdes, avec la meilleure défonce du siècle. Soit littéralement tomber de sommeil en s’écroulant sur son lit. Dans le meilleur des cas, il s’agit d’un sommeil sans rêve – il préfère largement ça aux restes des images que lui envoie son inconscient dès le moment où il s’accorde le luxe de fermer les yeux. Celui qui a dit que l’essence de dieu, c’était génial mérite une paire de baffe en aller-retour sur le coin du nez. Si ça ne tenait qu’à lui, voilà bien longtemps que Marc aurait rendu à Tenebris ce qui lui appartient. Il sait très bien qu’il n’est pas censé supporter son essence et que la seule raison qui fait qu’il est encore en vie et non en train d’agoniser après l’avoir reçue, c’est son affinité naturelle avec les ténèbres. Nul doute que ça aurait pu très mal finir dans le cas contraire. C’est pour ça que Tenebris a réalisé ce coup de maitre sur lui, en dernier recours pour lui sauver la vie.
Et c’est aussi parce que Tenebris a sacrifié une partie de son essence pour lui que Marc retient très profondément ses envies de meurtres quand en tentant de s’arracher aux griffes d’un sommeil censé être réparateur, il le découvre assis sur son lit, chouinant comme un gosse parce qu’il n’a plus de sucette. Tenebris. Chouinant comme un gosse. Pour des sucettes. « Qu..Il est quelle heure, bordel ? » marmonne Marc en cherchant son téléphone, qu’il a sagement déposé à côté de lui avant de se laisser aller dans les bras de cet enfoiré de Morphée. Il est tard. Ou beaucoup trop tôt, dans le cas présent. Il tente de rassembler ses esprits en se redressant, à moitié aveuglé par la lumière de son écran. Putain de sa mère. J’vais l’étriper. « Est-ce que… j’ai torturé tes bébés dans une autre vie pour que tu m’en veuilles à ce point ? » demande Marc en secouant doucement la tête. Son être tout entier est en train de lui hurler de se rendormir. Mais il sait, il sait que ça ne sera pas possible tant que Tenebris n’aura pas de gain de cause. Il se passe une main sur le visage « Je t’ai pris un paquet entier et tu viens me dire que t’as déjà tout fini ? » Oh pitié, il recommence à chouiner. Tenebris en humain, c’est la plus mauvaise idée du siècle. Pour la centième fois depuis qu’il le sait, Marc espère qu’ils vont vite trouver le moyen de remettre les choses dans l’ordre. Lui, en tant qu’humain normal. Et Tenebris en tant que dieu. Qu’il récupère son essence et qu’il arrête de le réveiller en plein milieu de la nuit pour des putains de sucettes. Comment il a pu en bouffer autant ? Il va choper le diabète avant même qu’on trouve un moyen de lui rendre son essence. S’il commence à s’inquiéter de la consommation de sucre de Tenebris, c’est qu’il a vraiment besoin de sommeil. Il soupire, une idée tout à fait stupide lui venant en tête. Pour sa défense, il veut impérativement retourner se coucher. Il repousse la couverture, l’envoyant presque à la tête du brun. « Tu commences vraiment à me faire chier. » Une suite de juron s’ajoute à cette phrase quand Marc commence à fouiller dans la poche de sa veste, veste qu’il a laissé trôner sur une chaise. Il en extirpe son paquet de cigarette et le lance sur Tenebris. « Tiens, démerde-toi avec ça. » Et dégage avant que je me serve de tes propres ténèbres contre toi pense un Marc bien trop énervé et bien trop épuisé pour penser clairement. Il s’en fiche, il veut juste dormir. Et avant même que Tenebris ne lui demande comment on se sert de cigarette, Marc s’est déjà rendormi comme une masse, d’un sommeil lourd et sans rêves pour son grand plus bonheur.
***
Lunettes de soleil sur le nez, Marc croise les bras en attendant Tenebris. Le brun tourne en rond dans cet appartement et le blond l’empêche de mettre un pied dehors quand il ne peut pas surveiller. Si on avait dit un jour à Bowman qu’il serait la baby-sitter d’un dieu, il ne l’aurait pas cru. Mais les faits sont là. Tant que Marc a son essence, Tenebris est humain et vulnérable. Et quand on découvre l’humanité dans ce monde dangereux, on est une proie facile. C’est bien sa veine, ça. Devoir jouer les protecteurs alors qu’il ne l’a jamais fait. Lui-même ne sait pas trop comment appréhender la situation. Il n’a jamais ressenti un tel besoin de protéger quelqu’un, hormis quelques rares malchanceux comme Mai et Aidan. Mais eux, c’est particulier. Aidan, c’est son frère. C’est logique. Mai, ils ont été dans la même foutue galère quand ils étaient gosses. Normal aussi. Mais Tenebris ? Tenebris qu’il ne connait que depuis quelques mois ? Tenebris, le dieu des Ténèbres devenu humain et vulnérable ? Mais qu’est-ce que la vie de Marc est bien devenue ? C’est un coup tordu du destin, il ne voit que ça.
Il a besoin de sortir de l’appartement parce qu’il devient dingue. Qu’il veut aider et qu’il se sent inutile sans ses pouvoirs. Marc connait assez bien ce sentiment d’impuissance et a fini par céder, en lui arrachant la promesse de ne pas s’éloigner. Ils n’ont jamais été aussi vulnérables tous les deux. Un dieu sans pouvoirs et un humain qui ne maitrise plus rien. Ils sont des proies parfaites. Un duo improbable que tout oppose et qui est lié par cette épée de Damoclès qui plane sur leur tête, prête à s’abattre sur eux au moindre faux pas. Avec les conseils de Tenebris, Marc a réussi à dissimuler leur empreinte magique pour quiconque capable de ressentir les traces que peuvent laisser l’usage de pouvoirs surnaturels. Il n’a de cesse de redoubler de prudence car il est hors de question de se laisser surprendre une fois de plus. Et surtout pas lors d’une sortie aussi banale. C’est un dieu et un sorcier qui entrent dans une supérette. Ça ressemble à une blague, mais c’en est pas une. Si seulement c’était une mauvaise blague. La curiosité de Tenebris a pris le dessus quand ils sont entrés et Marc, en comprenant que si quelque chose arrivait ici, c’était vraiment la faute à pas de chance, a consenti à le laisser découvrir les rayonnages histoire de ne pas l’avoir dans les pattes pendant qu’il s’occupe de regarnir leur réserve de nourriture. Il est en train de devenir la parfaite ménagère avec ces conneries. Bordel. Il jette un rapide coup d’œil à son téléphone par-dessus ses lunettes. Sans surprise, Tenebris se ramène avec des sucettes et Marc soupire de dépit. Un jour, il lui apprendra comment vraiment se nourrir avec autre chose que ces saloperies. Il abaisse ses lunettes en regardant le nombre de paquet qu’il a dans les mains. « Vraiment ? » Il soupire. Maudit Tenebris qui lui donne l’impression de devoir se comporter comme un daron avec un lardon insupportable qui l’oblige à acheter des sucreries. S’il avait voulu être père de famille, il n’aurait pas fui la vie bien rangée que ses parents adoptifs prévoyaient pour lui. « Et tu comptes payer ça comment ? » A la base, ils sont venus ici pour acheter seulement quelques trucs. Pas pour dévaliser le rayon friandise.
Morgan Reed
Dieu
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Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
L'air frais claquait contre mes joues en ce début d'après-midi. Pas un seul nuage ne se profilant à l'horizon. Je fermais les yeux en appréciant la brise caresser ma peau, picotant mes joues échauffées. J'inspirais longuement, savourant la fraîcheur glisser sur ma langue, empoigner ma gorge. Un soupir d'aise s'échappant de mes lèvres entrouvertes. Roulant des épaules, décontractant mes muscles crispés, je tentais de me relaxer. De profiter de cet instant de liberté accordée par le sorcier. Jamais je n'aurais cru dépendre d'un être humain, et encore moins attendre son approbation pour m'éclipser. Mais tout avait dérapé, et s'était enchaîné beaucoup trop vite. J'avais tout perdu. Tout. Ma vie d'avant, mon essence, ce qui faisait de moi un dieu. Je n'étais plus rien. Un moins que rien. Et me retrouver cloîtré entre ces murs, enfermé dans l'appartement comme un prisonnier, n'avait fait qu'encenser ces émotions contradictoires qui me déchiraient. Je croyais devenir complètement dingue. À rester des jours sans dormir, les iris ternis, pupilles dilatées, yeux défoncés. À ne rien manger d'autre que des sucreries, parfois n'avalant même rien du tout de la journée. Ne profitant de l'air frais qu'en ouvrant la fenêtre, y restant prostré pendant des heures. Oubliant ce que c'était que de vivre. Sombrant dans cette désolation qui vrillait mon esprit et emportait mon âme au loin, lorsque je me retrouvais affalé sur le lit. Le regard perdu sur le plafond, n'accrochant rien de particulier. Ne cherchant que le vide, le néant, pour succomber. Et qui ne parvenais pourtant jamais à trouver le repos, ou un semblant de calme. Le corps tendu, les muscles crispés, les membres engourdis à cause de cette absence de liberté. J'aurais pu la retrouver. Mais il m'en aurait fallu payer le prix. Et tant que Hellhound était encore en vie, il n'était pas question que j'abandonne la mienne. Alors je tentais de me contrôler. De trouver des activités à faire pendant que Marc n'était pas à l'appartement. Protégeant ce foyer, m'informant sur des sorts, surveillant la zone. Ce n'était pas vraiment pérenne, mais je pouvais au moins penser à autre chose que ce désarroi qui me brûlait la gorge. Chassant de mes pensées l'erreur commise, et ces sensations qui me tiraillaient les entrailles. Évinçant les images sombres qui me venaient à l'esprit, en reprenant contenance. En tentant de voir la lueur dans la pénombre. La lumière au cœur des ténèbres.
Enfin une éclaircie s'imprégna sur la toile de la réalité. Un rayon étincelant qui perçait les nuages sombres pour se poser juste devant moi. M'ouvrant la voie, m'accordant le bénéfice du doute, et m'offrant cet instant de liberté. Je pouvais enfin respirer. Toucher de mes mains la texture qui me filait entre les doigts. Le vent caressant la pulpe avec légèreté, telle une plume. Paumes ouvertes vers le ciel, cherchant la salvation. L'instant perdurant, le temps s'étendant. Le moment se figeant tandis que mes iris brillants accrochaient les paysages extérieurs. Les fragrances caressant ma langue, embaumant contre mon palais. Les couleurs vives attirant mon regard, faisant pulser cet écho sous mes côtes. Les battements ratés se répercutant au creux de ma cage thoracique. Je redécouvrais la vie. Y reprenais goût. En appréciant toutes les palettes de saveurs. J'expirais, clignant des paupières. Un fin sourire étirant mes lèvres, en relevant le coin légèrement. Je profitais du trajets pour m'imprégner des bruits alentour. Me retrouvant tiraillé par cette atmosphère à la fois plus légère contre mes épaules, mais bien plus lourde en mon être. Sensation fébrile qui me transcendait, sentiment poignant qui enserrait ma gorge. Mes iris pétillant accrochant les contours d'un bâtiment, alors que le sorcier s'infiltrait déjà à l'intérieur. Le suivant en passant l'ouverture plutôt complexe. Une vive curiosité me titillant alors que je découvrais les merveilles qui se trouvaient cachées alentour. Des babioles en tout genre, des objets colorés, d'autres aux formes plutôt étranges. Marc m'autorisa à aller découvrir ce lieu de moi-même et j'hochais la tête en déambulant dans les genres de passages. Scrutant tout ce que je pouvais, m'arrêtant parfois pour contempler plus précisément. Au bout de plusieurs minutes, je finis par tomber sur une allée aux couleurs beaucoup trop attrayantes. Mes iris accrochant inlassablement ces sucreries, tandis que mes lèvres s'entrouvraient. Un souffle extatique s'échappant de ma gorge, à mesure que je me perdais dans ce nouveau paradis maudit. J'attrapais du bout des doigts un paquet de sucettes aromatisées, l'apportant à mon visage. Tentant d'en percevoir la fragrance au travers du sachet, sans succès. Je pinçais les lèvres, mais en pris d'autres tout de même. M'élançant, avant de m'arrêter. Revenant sur mes pas pour en récupérer un dernier. Sait-on jamais. Retournant vers Marc, en suivant ces impulsions qui me parcouraient. M'entraînaient jusqu'à mon essence. M'attirant jusqu'à lui.
Le soupir qui s'échappait de ses lèvres me fit plisser les paupières. Penchant la tête sur le côté, je le scrutais, abaisser ses lunettes de soleil. Son regard glissant sur les paquets entre mes mains. En un réflexe, j'agrippais plus fermement mon seul réconfort en ce monde. Sentant son air accusateur me juger. Transpercer ma peau à vif, pour tirailler mon esprit. Sa voix, empreinte de dépit, teintée de condescendance, alors que je me retrouvais incapable de bouger. Sous son regard bien trop perçant à mon goût, je sentais le vide se creuser sous mes côtes. M'empoigner avec force et brutalité, au point de m'en faire trembler. Je frémis en déglutissant, passant ma langue sur mes lèvres avant de laisser mon regard se perdre quelque part à côté de lui. Sa voix percutant mes tympans, me frappant de plein fouet. Je... Je me raclais la gorge, indécis. Incertain face à la marche à suivre. Passant le poids de mon corps d'une jambe à l'autre, bougeant pour me donner contenance. M'arrêtant subitement, alors qu'une idée germa à mon esprit. Reportant mes iris durcis sur lui, un air fermé sur le visage. Tu vas voir. Dans une impulsion, je me détournais de lui, et m'élança alors en direction de l'allée principale. Observant avec attention ce qui se tramait. Scrutant les humains se poser les uns à la suite des autres et échanger des sortes de papiers aux couleurs pastels, contre ces objets qu'ils étaient venus chercher. Troc pour le moins étrange. Pinçant les lèvres, je vis un peu plus loin, un humain tout seul, derrière ce genre de comptoir. M'approchant alors de lui, déposant les paquets de sucette sur ce tapis roulant. Le regardant de travers lorsqu'il m'informa que c'était un bon jour. Il finit par se taire et passa les friandises devant un système complexe que je ne saurais décrire. Encore une invention humaine qui me dépassait. Soupirant en voyant la lenteur avec laquelle il progressait, me contenant afin de ne pas me laisser aller à l'impatience. Tentant de ne pas tressauter alors qu'enfin il reprenait la parole. M'indiquant un chiffre, bien plus bas que mon propre âge. Je ricanais doucement, avant de me pencher en avant. Ancrant mes iris aux siens, ma langue claquant contre mon palais. Ecoute moi bien, petit humain insignifiant. Ma voix grave résonnant alentour, tandis qu'il haussait les sourcils, me regardant de haut. Tu crois pouvoir m'avoir avec ton air pincé et circonspect, mais je marche pas. Soupirant pour l'emphase, me penchant toujours plus vers lui, tentant de le magnétiser. D'accrocher son esprit, le toucher du mien pour le manipuler, le placer sous mon emprise. J'ai pas de quoi te dédommager, alors je vais être franc. J'esquissais un sourire narquois, plissant les paupières. Je peux réaliser tes rêves les plus fous. Et te donner ce qu'il manque à ta vie misérable. Croisant les bras contre mon torse, désignant les sucreries et friandises d'un mouvement fluide du menton. Si tu me laisses repartir avec ça.
J'avais à peine le temps de terminer ma phrase qu'il explosa de rire, me coupant dans ma mise en scène. Me prenant de haut, passant à côté de mon sérieux. Je me retrouvais alors complètement à la ramasse. Perdu devant son euphorie, son hilarité ne faisant qu'attiser le brasier de ma colère. De ma rage contenue depuis tout ce temps. De cette haine envers le monde, qui me prenait à la gorge. Tous les jours. Serrant les dents, mes poings se fermant brusquement, je sentais la vague déferler en mon être. S'épancher sur ce brasier, pour l'enflammer avec encore plus d'ardeur. Je n'aimais pas qu'on se paye ma tête ou qu'on se joue de moi. Et cet enfoiré allait prendre cher. Pouvoirs, ou pas pouvoirs. JE SUIS TON PIRE CAUCHEMAR ! CONNARD ! J'allais m'élancer vers lui, lorsque des bras enserrèrent ma taille. M'attirant en arrière jusqu'à tant que mon dos ne percute une surface solide. Me décrochant du comptoir, avec une poigne imposante. Les muscles se contractant contre ma peau, agrippant mon épiderme fermement. Une main posée sur mon ventre, l'autre traversant mon torse. Reposant par dessus cet organe qui palpitait sous mes côtes. Les échos creusant le vide tandis que ma colère se déversait en des grognements hargneux. IN INFERNIS ARDERET ! Une sensation familière me parcourant cependant, un appel à la signature particulière. Mes ténèbres, là, à proximité. Tout proche, presque contre moi. Et pendant que je m'épanchais, je pouvais les sentir cogner tout près. Frôler mon épiderme, crépiter contre ma peau. Encensant ma rage soudaine. Collé contre elles. Les appelant inconsciemment à me retrouver. Sombrant instinctivement à elles. Me rapprochant toujours plus de mon essence. Comblant la distance en m'appuyant contre Marc, qui m'entraînait au dehors. Me tirait de ma torpeur en bousculant mes propres démons. Me sortant de la pénombre qui voilait mon esprit échauffé. M'agrippant fermement pour ne plus que j'y sois embringué. M'offrant un ancrage à la réalité, en m'arrachant de mes obscures pensées. Ce n'était alors juste plus que lui, en cet instant. Ma lumière dans les ténèbres.
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Le silence régnait dans la chambre. Atmosphère pesante qui reposait lourdement contre moi. Me prenant à la gorge, m'empêchant de respirer. Souffle extatique qui s'élevait dans les airs, s'étouffant à peine échappé de mes lèvres. J'inspirais longuement, tentant de délier le nœud qui m'empoignait. Paupières fermées, l'obscurité ne m'apportant cette fois-ci aucun réconfort. Un frisson brûlant glissant le long de mon échine, enserrant mes entrailles, compressant mes poumons. Le brasier ardent qui me parcourait tiraillant mes muscles. Crispant mes membres, tendant mon corps. Tremblant subrepticement entre les draps froissés. J'expirais en grognant, en rouvrant les yeux. Clignant des paupières, me redressant sur le matelas. Tête baissée, un soupir dépité glissant sur ma langue. Elevant la main, je laissais ma paume passer sur mes traits étirés, frottant doucement mon visage échauffé. J'avais bien trop chaud. Et le fait d'être enfermé à l'intérieur d'un corps soumis à des sensations brûlantes, ne pouvait pas vraiment m'apporter cet apaisement permanent d'auparavant. Ce calme ambiant, qui s'épanchait en mon être. Cette ataraxie que j'atteignais à chaque instant. Le paroxysme de l'équilibre. Pur, brut, authentique. Coincé dans le plan physique, enfermé dans cette enveloppe corporelle. J'étais soumis à ces émotions abruptes, ces sentiments âpres, ces sensations acerbes. Sans espoir d'y échapper. Comme si tout ce que je ressentais provenait du fond de mon être. Que ce qui m'empoignait m'était rattaché à l'âme. Et que tout ce qui me touchait, était lié à mon esprit. En moi. De moi. À moi. Décalant mes jambes, je me relevais du lit en une impulsion. Mes pieds nus frôlant la texture moelleuse du sol. M'élançant alors vers la fenêtre, par automatisme. Je l'ouvris en un geste mécanique. L'air frais de la nuit caressant mon visage échauffé. Les bruits extérieurs emplissant doucement la chambre en un écho léger, faible, étouffé. Un soupir glissant sur mes lèvres, tandis que je fermais les paupières. Appréciant la caresse de cet air plus frais, qui apaisait ma chair brûlante. Frissonnant sous le froid qui picotait contre ma peau. Crépitait le long de mon corps. La brise légère tournoyant alentour, glissant entre les mèches de mes cheveux. L'atmosphère devenant moins lourde, moins chargée. Libérant ma gorge enserrée et mes poumons compressés par son poids conséquent. Rouvrant les paupières, j'ancrais mes iris pétillants sur le firmament. Contemplant cet astre laiteux au halo étincelant. Et ces quelques diamants qui brillaient sur la toile obscure et sombre. Les secrets et mystères de l'univers attirant toujours mon esprit. M'appelant encore, malgré le fait que je sois prisonnier d'un corps. M'attrayant de plus belle tandis que je sombrais, m'épanchais. Me perdant dans mes pensées, dans ces souvenirs de ma vie passée. De mes voyages spirituels, en des lieux désolés. Au sein de ces contrées insoupçonnées. Cachées aux yeux des humains. Seulement visibles par certains.
Quelques heures plus tard, l'aube colorait le ciel, la toile de la réalité. Recouvrant les paysages de ces tons orangés, rosés. Les couleurs vives attirant mes iris vers elles, titillant mon intérêt. Transcendé par l'instant, emporté dans mon propre esprit, je mis du temps à revenir à la réalité. A reprendre conscience de ce qui m'entourait. Les pupilles dilatées, yeux défoncés par la fatigue, je m'arrachais de ma contemplation lorsque j'entendis du mouvement dans l'appartement. Fermant la fenêtre, je soupirais doucement, me décalant. Enfilant un jogging et un débardeur avant qu'un vertige ne m'empoigne le crâne. M'arrachant une grimace qui étira mes traits, mon visage se creusant un peu plus de part mon état exténué. Je clignais des paupières, tentant de reprendre un équilibre, quoiqu'un peu précaire. Et sorti enfin de la chambre, en fermant la porte lentement derrière moi. Je suivis le bruit, les échos résonnant à mes tympans. Arrivant dans la cuisine, où le sorcier s'affairait déjà. Soufflant doucement, je l'observais en train de préparer sa collation, levant parfois un sourcil devant les choix qu'il faisait. Secouant la tête, je finis par aller m'asseoir sur un tabouret. M'installant tranquillement, posant mes coudes sur le comptoir. Mains enserrant mon crâne, tandis que je fermais les paupières. Tête baissée, inspirant lentement, m'imprégnant de la fragrance qui s'élevait. Une amertume qui embaumait contre mon palais et caressait mes narines. Instant calme et apaisant qui me permis de me poser un peu. De profiter d'une présence, bien que silencieuse. Et d'une bulle de confort salvateur, au creux de laquelle résonnait ces échos devenus familiers. Un matin de mon quotidien.
Un arôme plus corsé titillait mon odorat. La fragrance parvenant subitement à accrocher mon intérêt. Un fumet délicat caressait mes joues alors que je rouvrais les paupières. Abaissant mes mains, mes iris se posant sur la tasse fumante disposée juste devant moi. Fronçant les sourcils en la scrutant silencieusement. Lèvres entrouvertes, souffle se perdant au delà de la fumée qui s'élevait du breuvage sombre. Du coin de l'oeil, je percevais les contours de la silhouette de Marc. Figé, le bras tendu, la tasse entre ses doigts. Il me l'offrait presque, m'accordait cette offrande, qui était pourtant essentielle à son rituel matinal. C'est quoi ? Je plissais les paupières, détaillant la substance qui se trouvait dans le récipient. Humant le parfum qui s'en dégageait. Tais-toi et bois. Hn. Etandant la main, j'attrapais du bout des doigts la tasse qu'il me tendait. L'agrippant entre mes paumes, me délectant de la chaleur qui picotait contre ma peau. L'apportant à hauteur de mon visage, je fermais les paupières, détaillais l'arôme corsé et amer. Avant de déposer le récipient contre mes lèvres. Le penchant légèrement, recueillant la substance sur ma langue. La saveur brûlante se déversant jusqu'à ma gorge, titillant mes papilles. L'amertume corsée m'arrachant une grimaçe alors que j'avalais ce que je pouvais, en recrachant pourtant une partie. Un vif tiraillement me prenant la gorge, me faisant tousser plusieurs fois tandis que je reposais la tasse sur le comptoir. Elle est chelou ta potion. Je toussais encore, m'époumonnant presque. Tapotant sur mon plexus solaire, tentant de reprendre contenance. Ainsi qu'une respiration normale, malgré ma gorge tiraillée à vif et mes poumons brûlants. Elle est meilleure que celle que tu m'as fait boire la dernière fois. Retrouvant un semblant de stabilité, je laissais un ricanement s'échapper d'entre mes lèvres. Je n'avais jamais goûté cette potion et je n'en connaissais donc pas la saveur. Mais je pouvais comprendre que ce n'était pas du goût de tout le monde. Malheureusement, il avait tout de même fallu l'utiliser, pour passer dans le plan spectral. Et rechigner sur un prétexte aussi futile que l'arôme, le goût ou la saveur, c'était vraiment abusé. Certains humains faisaient vraiment leurs difficiles parfois. Enfin. Tournant la tête, j'ancrais mes iris à ceux de Marc, qui se trouvait toujours au même endroit. A quelques pas. Je désignais le breuvage d'un mouvement du menton, penchant légèrement la tête sur le côté. C'est quoi le nom de ta mixture ? Intrigué, je me laissais aller à lui demander ce qu'était cette substance corsée. Le coin de mes lèvres légèrement relevé. Essence de dieu qui me pourrit la vie. Sa réponse claqua dans les airs, sa voix tranchant l'atmosphère paisible et posée, la perturbant brusquement. Mon sourire fana subitement, se détériorant, et je pinçais alors les lèvres. Plissant les paupières, lui lançant un regard dépité. Mes traits s'étirant en un air blasé, peignant une aura lassée alentour. Une sensation d'engourdissement m'empoignant une fraction de seconde plus tard. Un mouvement de recul m'entraînant tandis que je me tendais subitement. Enculé. Sa voix résonnant dans mon esprit en un écho imperturbable. S'écrasant contre les parois de mon crâne alors que l'engourdissement crépitait avec plus d'ardeur. Soufflant bruyamment, serrant les dents, la mâchoire crispée, je levais la main lentement. Arrêtant son ascension à quelques centimètres de son visage fermé. Fermant alors le poing avec précision, ne gardant que le majeur dressé. Un doigt d'honneur bien mérité, lui étant destiné. Connard.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
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Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Marc redresse la tête et se masse les tempes. A force de lire ces pages jaunies par le temps, il finit par sentir une migraine pointer le bout de son nez. C’est ce qu’il déteste le plus. Fourrer son nez dans les livres anciens, écrit dans une langue morte que plus personne ne parle à part les gens comme lui, les déités et ceux qui veulent briller en société. Il ferme les yeux en soupirant doucement, s’arrachant à la contemplation inutile de ces mots transcrits dans une écriture fine suggérant une plume. Celui-là, il l’a emprunté à long terme à une de ses connaissances. Peut-être que s’il arrive à survivre à tout ce bordel, il songera à lui rendre. Ce ne sont pas tant les écrits qui l’intéresse dans ce cas précis. Ce sont davantage les enluminures, qui recèlent souvent de messages cachés. Grâce à un habile tour de passe-passe, Marc peut percevoir les vraies inscriptions dissimulées sous des traits colorés et des dessins inutiles. En rouvrant les yeux, il jette un œil dubitatif à ses notes. Trois heures qu’il est penché dessus, pour des phrases sans le moindre sens. Pourquoi les sorciers d’avant font-ils dans les énigmes à la con ? Leur espérance de vie a toujours été limitée, pourquoi perdre autant de temps ? Et en faire perdre aux autres, au passage ? Marc laisse échapper un bruit agacé.
Il fait craquer doucement sa nuque en se repenchant sur le manuscrit, cherchant cette fois à lire les inscriptions d’une autre façon. C’est peut-être un code ? La lecture à l’envers peut marcher mais Marc préfère s’en méfier. Des petits malins s’amusent souvent à écrire des invocations comme ça pour piéger le pauvre abruti que le lit à voix haute. Ce dernier finit par invoquer sans le vouloir un truc pas très sympa qui vient des enfers ou d’une dimension différente. Même si parfois, on le fait de son propre chef avec trois grammes de coke dans les narines. Il finit par soupirer une nouvelle fois en comprenant qu’il fait fausse route. Ce n’est que le troisième bouquin qu’il regarde de cette façon et rien qui ne puisse l’aider. Pourtant, Hellhound ne doit pas être la première à sacrifier des déités, non ? Personne n’a retranscrit ça quelque part ? Avec à la clé, un indice pour trouver un moyen de l’arrêter ? Non, il faut croire que non. Marc doit se faire une raison. Il ne trouvera rien. Il repose son stylo avec agacement. A l’autre bout de la pièce, Tenebris est penché sur un piège. Au moins, lui, il a l’excuse de faire quelque chose d’utile. Sans dire un mot, Marc laisse reposer sa tête sur la surface en bois du comptoir. Non seulement ses recherches pour arrêter Hellhound ne mènent à rien mais en prime, ils n’ont toujours pas trouvé le moyen d’inverser l’échange d’essence. Ils se heurtent à des murs où qu’ils aillent. De quoi devenir dingue car il ne peut pas se servir de sa méthode habituelle quand il se retrouve face à une porte fermée. Généralement, il défonce la porte et la réduit en copeaux. Mais devant cette situation inédite, il se retrouve complètement désarmé.
Ce n’est pas dans les habitudes de Marc de se laisser abattre mais là, il en a ras-le-bol. « Hey… ça va ? » Marc grogne à la question de Tenebris en redressant la tête et prenant un air naturel, comme s’il n’était pas en train de se demander quand est-ce que tout allait finir. « T’y crois que dans tous ces putain de bouquins… » Il désigne de la main la pile de livre étalée devant lui. « … Il y en pas un seul foutu de me donner la moindre information ? » Il perçoit du coin de l’œil Tenebris qui marque un temps d’arrêt en haussant les épaules. Marc grogne une nouvelle fois en reportant son regard sur les couvertures craquelées. Fouiller là-dedans a fini par lui donner faim. Et c’est seulement maintenant qu’il a plus le nez dans ces vieux manuscrits qu’il s’aperçoit qu’il a presque oublié de manger. Il se maudit presque. Son énergie fait déjà le yoyo avec l’essence de Tenebris qui court dans ses veines. Si en plus, il ne fait pas attention à se nourrir, il va finir par tomber en morceau avant même d’avoir pu retrouver Hellhound et Aidan par la même occasion. Agacé par cette perte de temps qu’à été cette session de lecture et par la faim qui commence à le torturer, Marc tend la main vers la corbeille de fruit qui trône à portée. C’était une de ses idées fabuleuses pour montrer à Tenebris qu’il n’a pas besoin de savoir cuisiner pour manger, puisqu’il existe des aliments qu’il peut consommer sans problème. C’est bien la première fois de sa vie qu’il achète des fruits autrement que comme ingrédients mais il faut une première fois à tout comme on dit.
Il finit par s’y faire, à tout ce merdier. Apprendre à Tenebris à se comporter comme un humain. A subvenir à ses besoins vitaux. C’est déstabilisant pour la déité comme pour Marc, qui n’a jamais eu à s’occuper de personne d’autre que lui. Mais à force de patience – surtout de la part de Tenebris – ils parviennent à trouver leurs marques. Et puis, c’est pratique d’avoir des fruits à portée de main quand on oublie de se rassasier. Marc tend donc la main pour l’attraper, avec dans l’idée de faire une légère pause et de s’y remettre. Ils vont finir par être à court de temps et ça l’agace de plus en plus de tourner en rond. A l’instant où il s’apprête à se pencher pour attraper la nourriture, il se passe le bordel habituel. Les ténèbres qui viennent tout gâcher. Se solidifiant, s’entremêlant pour former une sorte de lance miniature qui s’extirpe du comptoir et transperce la corbeille en osier, la surélevant de quelques centimètres. Ça ne dure qu’une seconde, mais c’est suffisant pour surprendre Marc qui a un bref mouvement de recul en lâchant un juron. «Mais putain… » Il ferme les yeux, serre les dents et abaisse sa main. Il en a sa claque. C’est officiel. Il en a marre. Il fixe le désastre avec une lassitude certaine. Ça ne le surprend plus, à force. Il a produit ce même exploit sur son paquet de cigarette deux jours auparavant. Il n’arrive pas à maîtriser les ténèbres car il n’est pas une divinité. Il n’arrive pas à faire un geste aussi simple qu’attraper quelque chose sans qu’un truc noir et tranchant ne transperce l’objet en question. Et ça, c’est quand il est calme. Quand il est énervé, ils doivent carrément revoir le budget ampoule. Il secoue la tête et avec moults précautions, tend une nouvelle fois la main vers la corbeille, en retenant presque son souffle. Il a conscience qu’il doit donner un drôle de spectacle à s’approcher centimètres par centimètres comme si la nourriture était une matière instable sur le point d’exploser. Il n’est pas agacé. Non, il est serein. Il tente de s’en convaincre, à défaut de convaincre l’essence.
Il parvient à extraire le fruit au bout de deux minutes de manœuvre. Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour manger un peu, sérieux… Lui qui n’a pas pour habitude de devoir tenir ses émotions en laisse se retrouve à devoir égaler le calme d’un maitre yogi sous peine de faire péter l’appartement avec des pouvoirs bien trop instables pour réussir à les gérer. Ah oui, y’a ça, aussi. Le fait d’être totalement inutile car une simple manipulation des ombres peut avoir des conséquences catastrophiques. Ça, ça le rend dingue. Il pensait qu’il finirait par s’y habituer mais aujourd’hui, c’est clairement la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il veut juste manger, quoi. Même ça, il ne peut pas le faire aussi naturellement que respirer car les ténèbres s’en mêlent. Et puisqu’aucun bouquin ne veut lui donner la solution, il va devoir improviser. Tenebris retrouvera son essence, Marc compte bien s’en assurer.
***
Il a beau explorer les options qui s’offrent à lui, il est dans une impasse. La tête entre les mains, Marc serre les dents. Il maudit la terre entière. Hellhound pour la situation dans laquelle elle l’a mise, Tenebris qui a pas été fichu de le laisser crever et qui a préféré lui filer son essence pour le sauver. Son cercle de connaissance restreint y passe. Marc entre dans ce cercle vicieux où il en veut au monde entier de l’avoir changé en ce qu’il est. Il a dû s’adapter, être ce qu’on voulait ce qu’il soit et devenir cet espèce de connard individualiste qui ne supporte pas quand on lui tend la main car peu habitué à ce qu’on fasse quelque chose pour lui. Du coup, dans la foulée, c’est Tenebris qui mange le plus. Son geste lui a sauvé la vie et ce qui énerve Marc, en plus de lui filer des pouvoirs qu’il n’arrive pas à contrôler et de l’épuiser, c’est que cette essence, c’est une dette dont il ne pourra jamais s’acquitter, du haut de son humanité. Le moyen le plus sûr, c’est de la rendre à son vrai propriétaire mais la vraie question, c’est… comment ? Il ne peut plus rien faire sans que ces pouvoirs se manifestent de façon inattendue, avec des conséquences parfois catastrophiques. Allons-y, pour expliquer pourquoi toutes les ampoules de l’immeuble ont soudainement explosées. Ça, ce n’est qu’un détail parmi la myriade de manifestations. Encore un peu et ils vont avoir une de ces émissions à la con avec des chasseurs de paranormal du dimanche qui vont se pointer dans l’immeuble avec des faux exorcistes et toute la brochette d’escroc pour prouver que l’immeuble est hanté. Les lieux ne sont pas hantés que par une seule chose : sa mauvaise humeur et ces pouvoirs à la con.
L’entièreté de son être bouillonne d’impatience, de cette envie profonde de tirer un trait sur cette histoire et reprendre sa vie là où il l’a laissée. A savoir : tracer sa route, vivre avec ce qu’il trouve, survivre à des trucs moins puissants qu’une espèce de connasse qui fait du trafic d’âme pour on ne sait quelle raison tordue. Mais il ne peut pas. Il est allé trop loin pour faire machine arrière maintenant. Il est lié à ce pacte, lié à Tenebris bien plus qu’il ne l’aurait voulu. Et il y a Aidan. Encore et toujours Aidan. Difficile de croire qu’il est le même Marc qu’avant. Difficile de songer qu’il pense à autre chose qu’à son nombril et qu’il ne prend pas la fuite comme il l’a toujours fait jusque-là. D’un air las, Marc lève la tête pour fixer l’athamé brillant d’une lueur plus que tentante. C’est le même. Celui avec lequel cette garce avait tenté de le tuer et avait presque réussi. Une idée totalement folle lui vient à l’esprit. Son être retient l’essence de Tenebris. Peut-être que s’il facilite l’ouverture, elle pourrait… Il secoue la tête. Non, c’est stupide. Il ne manquerait plus qu’il se mette à se scarifier sur une hypothèse. Et qui dit que l’essence va directement se transférer sur Tenebris, dans le cas présent ? Et si elle… se contentait de se réfugier chez le premier hôte qui passe ? Non seulement il perdrait l’essence mais en prime, il aurait la mort d’un type random sur la conscience. Marc grogne et attrape avec lassitude son verre rempli de son seul réconfort tangible dans une vie qu’il ne contrôle plus. L’alcool lui brûle la gorge mais c’est tout. Il n’a plus les mêmes sensations qu’avant. Plus les mêmes envies. Et il n’arrive pas à se sortir de la tête cette impression de désespoir, ce froid glacial qui l’avait englobé tout entier quand il s’est retrouvé dans cet état. Pas mort, mais pas vivant. Un esprit sans enveloppe physique, sans espoir, condamné à rester sur cette terre sans rien pouvoir faire. Il n’arrive pas à oublier ça. Il se souvient d’avoir lu des textes sur ça. Des conséquences. On ne peut pas vraiment revenir entier d’un face à face avec la mort. Ce n’est pas la première fois que sa vie ne tient qu’à un fil mais c’est la première fois que ce fil est vraiment coupé net. La logique aurait voulu qu’il ne revienne pas. Il n’aurait pas dû revenir. Tenebris lui a dit lui-même et depuis, ses mots tournent en boucle dans sa tête. « Tu ne revenais pas. » Il ne voulait pas revenir.
Il fixe un instant le verre à moitié vide sans la moindre expression et d’un geste vif, il se redresse pour le lancer contre le mur, en poussant un hurlement de rage. Le verre éclate en morceau à l’instant où des ténèbres commencent à envahir la pièce. Elles sont oppressantes, se pressant contre les moindres ouvertures laissant entrer la lumière. Tremblant de rage, il glisse son regard vers elles. Il ne peut pas se permettre de laisser ses émotions prendre le dessus. Mais pourtant, il en a besoin. L’idée de les laisser se déchainer et de réduire cet appartement en cendre le traverse un instant, l’idée étant aussi tentante que celle de s’entailler la peau pour laisser sortir l’essence mais il la retient, elle aussi. Il ferme les yeux, inspire lentement et tente de les rappeler, comme Tenebris lui a montré. Quand il rouvre les paupières, il les voit glisser à nouveau vers lui, avec lenteur. S’énerver tout seul ne lui procurait qu’un effet placebo. Ça ne réglerait pas le problème et il le sait. Alors il reste là, un moment, à réfléchir une nouvelle fois à un moyen de se débarrasser de l’essence de Tenebris. Il réfléchit longuement et en vient à la conclusion qu’il doit tenter le coup. Sa main se referme sur la lame et il s’éloigne du comptoir pour arriver au centre de la pièce.
Il n’y pas la moindre hésitation dans ses yeux quand il fait lentement glisser la lame au creux de sa paume. Cette même paume qu’il a entaillée pour signer le pacte avec Tenebris. Avec le liquide vermeil qui s’en écoule, il commence lentement à tracer le symbole. Les traits sont gravés dans sa mémoire et c’est presque de façon mécanique qu’il trace une à une les lignes complexes de ce symbole. Comme hors de son corps, il se voit faire, sans hésiter une seule seconde. Sa chemise est tâchée de son propre sang car les ténèbres ne cessent de refermer la plaie à chaque fois et qu’il doit s’entailler la paume à de nombreuses reprises. Il finit par s’en débarrasser en la jetant en boule dans un coin de la pièce. Son tee-shirt finit par être taché aussi mais c’est moins chiant qu’une chemise dont les manches finissent par couler à la peau à cause du liquide rouge qui sort des plaies. Il manque de patience plus d’une fois, à force de rouvrir la plaie, augmentant la taille de l’entaille à chaque fois pour être certain de gagner du temps avant que la blessure ne se referme. Il a également conscience que plus il coupe, plus les ténèbres à l’intérieur de lui pompe son énergie pour se manifester. L’épuisement finit par le gagner car il doit à présent lutter pour garder les yeux ouverts. Sa vision se trouble et ses gestes sont désordonnés. Foutue essence. Il n’arrivera jamais à finir de tracer ce symbole de merde. « T’endors pas, putain… » marmonne-t-il pour lui-même, comme pour se reprendre. Il secoue la tête en clignant des yeux. Il ne doit pas s’endormir. Pas maintenant. Il sent qu’il y est presque. Il ne reste plus qu’un dernier symbole pour accompagner le tout. Il se mord la langue pour rester éveiller, s’entaillant une nouvelle fois la paume de la main. Il est à deux doigts d’y parvenir. Cette entaille est visiblement l’entaille de trop, car au moment où un vertige le saisit, Marc doit se retenir pour ne pas flancher sur le côté. « Oh mais va te faire foutre… » Ces mots hasardeux qui sortent de sa bouche sont adressés à personne en particulier. Peut-être bien à lui comme à l’univers. Il ne sait pas et il s’en fout. A court d’énergie, il finit par s’effondrer à côté du symbole, haletant d’épuisement. Pas foutu de le finir. Saloperie de ténèbres. C’est la dernière chose cohérente qu’il arrive à penser, avant de finir par fermer les yeux. Saloperie de ténèbres.
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
La nuit régnait sur le paysage désolé, recouvrant la zone d'un épais voile noir et sombre. Étouffant les dernières lueurs du crépuscule, les ténèbres estompant les subtils fragments de couleurs dont les tons contrastaient habituellement avec l'arrière-plan. La seule source de lumière provenant des néons criards qui clignotaient au cœur de la ville quelque peu délabrée. Un bourdonnement perpétuel émanant de l'endroit, des éclats de voix étouffées résonnant alentour. Les sonorités d'une musique s'écrasant contre les murs épais en un rythme entraînant qui transcendait les corps. Qui emportait mon âme tandis que je me laissais aller, guidé par le tempo endiablé et les mouvements frénétiques et hachurés des autres autour de moi. Tous mortels, tous humains, tous vivants. Profitant de l'instant comme jamais auparavant. Et pour la première fois depuis une éternité, je pouvais enfin me sentir libre et léger, comme eux. Insouciant, et nonchalant, détaché et indifférent à ce qui pouvait bien se passer par après, se dérouler dans la seconde suivante. Complètement étranger à ce futur lugubre qui planait sur mes épaules et à ce destin sombre et opaque qui ne s'éclaircissait aucunement. Malgré nos avancées avec le sorcier, nous en étions toujours au même point. Et je n'en pouvais plus. Contenir toutes mes craintes, mes peurs, ces nouveautés que je découvrais de jours en jours à mon sujet, mais aussi sur tout le reste. Impossible de rester cloîtré dans cette cage qui nous servait de planque sans finir par exploser pour de bon. Impossible de rester près de mes ténèbres sans en ressentir le manque dévorant. Impossible de rester près de l'hôte qui les gardait sans vouloir m'en rapprocher pour combler la distance et récupérer mon essence. Impossible de rester avec lui.
Alors je m'étais éloigné. De lui, de mes problèmes, de l'appartement, de tout. Ce soir-là, j'étais sorti de la planque et je m'étais taillé au loin, en pleine nuit. Errant dans les ruelles à moitié désaffectées des bas-fonds de la ville. Mettant le plus de distance possible entre le sorcier et moi-même. Le creux s'étendant, tandis qu'un poids m'empoignait à la gorge et compressait mes poumons. Une pression destructrice qui crépitait en mes entrailles, tiraillant sous l'épiderme à même mon être. Une sensation désagréable que je tentais vainement d'estomper avec la musique qui s'élevait dans les airs. De plus en plus forte, de plus en plus lourde, de plus en plus oppressante. Plus étouffante au point de surpasser les échos de mes pensées déstructurées qui cognaient en mon crâne. Étrangement, les éclats sonores avaient été bien plus salvateurs que je ne l'avais imaginé. Et les substances aromatisées que ces individus m'avaient fait découvrir semblaient bien plus parfumées qu'au premier abord. Mais la chaleur humaine et la température qui imprégnaient l'atmosphère étaient beaucoup trop suffocantes pour que je puisse vraiment me laisser aller à sombrer. Tout était exacerbé, mes sens étant en ébullition totale au moindre frôlement de peau, au moindre effleurement contre mon épiderme. Les souffles erratiques des mortels s'écrasant contre mon cou, ma nuque, mes épaules, au point de m'en faire frissonner. La pulpe des doigts touchant à peine les contours de ma silhouette, me tirant des soupirs alanguis. Étrangement, malgré l'étouffement constant, je respirais enfin pour la première fois depuis bien trop longtemps.
L'air frais de la nuit claquait contre mes joues échauffées lorsque je sortis de l'endroit quelques heures plus tard. La lune s'élevait haut dans le ciel, les astres éclatants de brillance décorant le firmament sombre et opaque de leur lueur étincelante. Je fermais les yeux, un soupir s'échappant de ma gorge. Caressant ma langue avant de franchir la barrière de mes lèvres. Le bruit déjà étouffé une fois libéré dans l'atmosphère, et à peine perceptible à mes oreilles. Un bourdonnement incessant crépitant contre mes tympans tandis que j'expirais longuement. Me déchargeant de cette énergie sauvage et primaire qui m'avait empoigné tout le long de la soirée. J'esquissais un fin sourire et rouvris les paupières. Mes iris contemplant le paysage plongé dans l'obscurité, tandis qu'une légère pluie se mettait à s'abattre sur les pavés. J'enfonçais les poings dans les poches d'une veste empruntée à Marc et m'éloignais de la zone pour retourner au cœur de la ville. Rentrer à la planque. Chez nous. En un sens, même si je me refusais de l'admettre. Vu ma condition et ma nature, je ne pouvais pas appartenir à un endroit, ou même vouloir disposer d'un foyer. Le seul endroit où je pouvais prétendre me sentir chez moi se trouvait être le plan spectral, et auprès de mes frères et sœurs. Le seul endroit où personne d'autre ne pouvais nous atteindre, et où nous étions vraiment ensemble. Mais avoir été déchu de la sorte, et me retrouver sans défenses, tel un mortel lambda, avait fini par me faire en devenir un. A force de ressentir les mêmes sensations qu'eux, j'allais finir par percevoir les mêmes sentiments qui les transcendaient et discerner les mêmes émotions qui les traversaient. J'allais vraiment devenir comme eux, et à l'instant présent, je ne croyais pas que j'allais m'en sortir. Je ne pensais pas un seul instant que j'allais pouvoir y survivre. Pas sans ce qui me manquait le plus au monde.
Déglutissant un bon coup, je soufflais rapidement par après, tentant de détendre mes muscles à présent crispés. Lèvres pincées, mâchoires serrées, gorge contractée à cause de cet incessant afflux de pensées qui s'épanchaient en mon esprit. Tout mon corps tremblait sous la pluie battante qui s'écrasait contre ma peau et imbibait les couches de vêtements. Une brise glaciale caressait mon visage échauffé, me faisant frissonner alors qu'elle traversait les textiles et frôlait l'épiderme moite. La pluie qui s'écoulait d'au-dessus ne cessait jamais de marteler les pavés, au point de presque me faire crouler sous le poids de mes propres ressentis. Bien trop lourd à supporter, et à garder pour l'éternité. Bien trop poignant pour m'en délaisser ou m'en débarrasser en une fraction de seconde. Tout était bien trop touchant. Bien trop près de moi, trop proche, trop impliquant. Et c'était juste insupportable. De tout assimiler et ne jamais rien laisser s'épancher. Ne jamais rien laisser sortir. Ne jamais se défouler pour décharger. Et à présent, il ne me restait plus beaucoup d'options. Presque plus d'échappatoires pour m'extirper de cette situation dans laquelle j'allais finir par me retrouver coincé. Pour toujours et à jamais.
Le temps semblait s'étendre, ralentir et se stopper tandis que les bruits de la ville s'estompaient. Les lumières des lampadaires luisaient de plus en plus faiblement, clignotant lentement jusqu'à finir par s'éteindre complètement. L'obscurité reprenant son dû alors que son voile opaque m'entourait, me narguant alors que je m'arrêtais pour me figer dans les ténèbres. Contemplant la texture substantielle et la touchant du bout des doigts, la pulpe frôlant la structure de la matière même. Sans pour autant jamais l'atteindre. Serrant le poing, j'abaissais ma main, la laissant retomber et frôler mes cuisses en un mouvement fluide. Un soupir franchissait la barrière de mes lèvres entrouvertes et je m'élançais à nouveau. En une impulsion, j'avançais vers la planque, laissant mon corps me guider tandis que mes pensées assourdissantes étouffaient mon âme à même mon crâne.
J'étais tellement absorbé par l'incessant ressassement de ces remords que je remarquais à peine mon arrivée devant l'immeuble. Relevant le visage doucement, je clignais des paupières un court instant, mes iris se perdant sur le bâtiment, accrochant la fenêtre qui donnait sur l'appartement. Je restais ainsi un bon moment, contemplant la lueur faiblarde qui se dégageait. Marc était déjà rentré ou n'était tout simplement pas sorti. Aucun moyen de savoir étant donné que l'on s'évitait la majorité du temps. En dehors de ces instants où je lui apprenais à contrôler la nouvelle énergie en lui, à maîtriser mon essence, cette partie de moi qui m'appelait et qui me manquait à en crever. Qui creusait le vide en mon être, sous mes côtes à n'en plus finir dès lors que je m'approchais trop près de lui ou que je le frôlais. Ces moments se trouvaient être les seuls où je pouvais me permettre de prendre sur moi et de rester à ses côtés pour l'épauler. Et dès lors que tout cela s'écroulait, que le masque tombait, que la réalité reprenait le dessus, je m'éloignais et je le laissais partir en retour. Il n'y avait rien qui ne nous rattachait d'autre que nos erreurs passées, outre le sacrifice de mon essence, qui avait scellé l'horreur plus encore. Nouant ces liens intangibles qui nous reliaient de par notre collaboration insoupçonnée et hasardeuse. Marquant à jamais la raison de notre accord remontant à des mois de cela. La scène de cette fameuse nuit se jouant en boucle à l'arrière de mes paupières. Le visage étiré et faiblement éclairé de Marc, alors que son corps était bien trop empoisonné et son esprit trop volatile. Un challenge qui avait été jeté entre nous, presque comme un défi, entre deux prédateurs. Et voilà où nous en étions à présent. Dépassé le point de non retour. Bloqués à même la réalité. Des pantins dans le jeu du destin. Où maintenant, plus rien n'était certain.
Ravalant ma salive, je poussais la porte de l'immeuble et grimpais les marches en un rythme lent. Mon esprit enfumé par les vapeurs d'alcool et mon corps imbibé par les effluves aromatisées tournant au ralenti. Refusant presque d'avancer et de retourner en cette cage qui n'attendait plus que moi pour se refermer sur mon ombre. N'arrivant pas à franchir l'ouverture de la porte, à faire ce seul et unique pas qui allait clôturer cette nuit salvatrice. Le retour à la réalité allait être brutal, mais ça en valait sûrement la peine. Se prendre la claque de la menace tangible en pleine gueule pour quelques secondes de liberté salvatrice. Voilà à quoi j'en étais réduis.
Poussant un ultime soupir, j'élevais enfin le bras et apposais ma paume sur la poignée. Ouvrant lentement la porte avant de m'engouffrer à l'intérieur. La refermant silencieusement derrière moi, m'accolant à la texture même le temps de quelques instants. Afin de reprendre mes esprits et de retrouver un semblant de contenance. Je fermais les paupières, comptant mentalement jusqu'à dix avant de me redresser. Me maintenant le plus droit possible, j'avançais à l'intérieur de la planque, lançant des regards à l'intérieur de chaque pièce, cherchant le sorcier du regard. Juste savoir qu'il était ici, qu'il n'avait pas été capturé par les sbires de Hellhound, qu'il était encore vivant, pour apaiser ce poids qui me faisait suffoquer. Pour me rassurer que rien n'était encore joué, que nous étions encore en sécurité. Mais, l'étions-nous seulement, alors que même en se terrant loin de la réelle menace, une autre planait au dessus de nous, plombaient nos épaules et creusait la distance qui nous séparait ? Sans aucun doute, et j'en avais la preuve juste sous les yeux. Mes iris accrochaient la silhouette affaiblie de Marc, étendue par terre. Sa respiration était erratique et du sang avait séché non loin de ses contours. Un symbole stylisé aux arabesques structurées dépeint sur la texture à ses côtés. Une lame pendue à sa main, contre sa paume mais éraflant également le sol. Sa peau déchirée et directement cicatrisée à même l'épiderme pale et pourtant rougi. Ses vêtements étaient tâchés de ce liquide vermeil séché, et je n'arrivais pas à me détacher du spectacle morbide qu'il avait peint de par son propre corps.
Sans réfléchir, je m'élançais vers lui, m'écroulant à ses côtés, mes genoux claquant contre la texture à terre. Mes mains parcourant son visage, son cou, sa nuque, ses épaules et son torse à la recherche d'un moindre signe pouvant m'indiquer qu'il était encore présent. Qu'il était encore vivant, là, et pas perdu à nouveau dans les limbes ou prêt à me claquer entre les doigts et à rejoindre le néant. Comme avant. Marc ?! J'appelais son nom, ma voix s'élevant dans les airs, mon souffle s'écrasant contre sa peau. Reste avec moi... Un ton hachuré, une gestuelle frénétique tandis que je l'attrapais par les épaules et la nuque pour le soulever délicatement. L'apportant près de moi et le déposant sur mes genoux, tapotant ses muscles pour le réveiller ou le faire revenir, peu importait, tant qu'il rouvrait les yeux. Du bout des doigts, je percevais les ténèbres crépiter en lui et contre la pulpe de ma peau, m'indiquant qu'elles s'affairaient déjà à le maintenir en état de stase afin de ne pas le laisser sombrer. Il était encore bien là, bien accroché à la réalité, mais le sorcier avait attenté à sa propre existence pour une raison que je ne concevais aucunement sur l'instant présent. Les cicatrices qu'il avait laissé sur sa peau n'avaient pas que marquées son corps, mais également quelque chose en moi, qui s'était mis à hurler sous l'épiderme. A grogner ardemment en mes entrailles alors que j'attrapais son poignet pour l’amener à hauteur de son visage, scrutant avec effroi son orfèvrerie. Passant mon pouce sur la plaie craquelée, tremblant comme jamais.
J'abaissais mon regard sur son visage, mes iris scrutant ses traits fatigués, son air épuisé s'imprégnant dans chacun des plis de sa peau. Apportant ma main vers la lame, je l'empoignais fermement avant de grogner doucement. La contemplant un instant, l'enserrant au point que mes phalanges en blanchissaient. J'élevais la main et apposais la lame contre ma paume, tiraillant la peau, déchirant l'épiderme afin qu'un peu de liquide vermeil s'épanche et coule sur ses lèvres entrouvertes. Un peu de sang pour rebooster l'essence et le rattacher à la réalité, le faire revenir encore une fois. Une image que je ne connaissais que trop bien. Laissant l'or rouge glisser contre sa peau, j'enserrais de l'autre main le tissu de son T-shirt afin de me raccrocher à quelque chose. Pour ne pas me laisser aller à sombrer encore une fois, à me perdre dans l'incertain et le doute. Abaissant la main, je finissais par glisser ma paume sur son ventre avant d'attraper le dessous de ses cuisses. Plaçant mon autre bras sous ses épaules, je le soulevais délicatement, me relevant lentement. Me dirigeant vers sa chambre avec quelque difficultés, je le déposais ensuite sur son lit. Le berçant presque alors que ma paume passait dans ses cheveux, mon pouce frôlant sa joue. Accroupi à ses côtés, je me perdais dans la contemplation de son état. J'attendais, encore et toujours, mes iris ne cessant de scruter son visage. Le maintenant fermement contre moi, surveillant ses constantes. Oubliant mon propre état au passage, ne me préoccupant plus de la plaie qui saignait toujours, ni des battements qui cognaient à mes tempes. Restant contre lui, à m'occuper du sorcier, à protéger Marc. Une autre forme de sacrifice, bien plus personnel, bien plus important, bien plus poignant. Tout ça, alors qu'il n'en saura jamais rien. Et c'était peut-être pour le mieux.
| . | . |
Le silence imprégnant l'atmosphère était assourdissant à mes oreilles. Un bourdonnement qui pulsait contre mes tympans en un rythme frénétique, tandis que le sang cognait à mes tempes. L'écho de battements ratés se répercutant entre mes côtes, l'organe tambourinant furieusement au creux de sa cage thoracique. Un brasier ardent s’épanchant en mes entrailles, faisant crépiter les flammes d'une colère incommensurable, la laissant s'écouler en mon être. Le feu d'une haine qui ne cessait de brûler chaque parcelle de ma peau tremblante. L'épiderme à vif, une plaie béante cicatrisant tout en se consumant également. La rage s'écrasant à même mon âme, l'emportant dans les méandres de mes ressentis, de mes émotions qui m'empoignaient. La sensation fébrile d'une perte de contrôle imminente, de la proximité du point de non retour me narguant silencieusement. Les poings se serrant instinctivement, les phalanges en devenant blanches sous la pression, les ongles raclant la peau écorchée des paumes rougies. Les épaules tendues comme jamais, le corps crispé, la mâchoire contractée, lèvres pincées, sourcils froncés, paupières plissées. Figé dans l'expression substantielle et sempiternelle de la colère. Les traits tirés par la douleur qui s'épanchait, mais qui semblait si lointaine alors que la haine s'exprimait. Les éclats de voix s'écrasant contre les murs, les tons emprunts de rage s'élevant dans les airs. Le moindre son étouffé sous les piques acerbes et venimeuses qui quittaient mes lèvres. Le poison caressant ma langue, comprimant ma gorge et brûlant mes poumons. Les horreurs crachées à même son visage, les erreurs que je gardais pour moi, à présent balancées contre lui. Envolés les reproches, disparus les remords, enfouis les regrets. Mais jamais loin de la surface. Et jamais tus.
Les iris brillants sous l'assaut de l'émotion répulsive, je dardais mon regard noir en sa direction. Scrutant ses traits étirés par le sentiment aversif qui le transcendait, contemplant la flamme qui illuminait l'onyx de ses pupilles dilatées. Il hurlait, lui aussi, rageait alors qu'il levait la main devant lui, me désignant subitement avant de l'élever encore plus sous le coup de la colère. Ses lèvres se mouvant en un rythme saccadé, sa respiration erratique alors que les piques glissaient sur sa langue affûtée. Mû par ses propres ressentis, empoigné par ses propres émotions, il réagissait aussi violemment que les ténèbres qui s'écrasaient en lui. Des brides de matière sombre éclatant ici et là, l'entourant d'une aura obscure. Des fragments d'ombres qui s’entre-déchiraient derrière lui, entre nous, contre moi. L'attaque même de ses propos, encensés par mon essence en lui, se retournant à mon encontre, physiquement mais aussi émotionnellement. La trahison de ma propre énergie qui se confrontait à moi, qui se formait juste devant lui pour l'écarter de ma présence. Mon principal constituant se dégradant sous mes yeux, tandis que le voile ténébreux recouvrait à présent les siens. Une texture onyx et opaque contre sa rétine, faisant étrangement briller son regard d'une lueur bien plus éclatante. Bien que sombre et presque aussi obscure que celle qui avait un jour embrumé mes iris. Le constat de cet état de fait, bien plus frappant que ses paroles, me bloquant dans mon élan, me touchant plus que le ton qui imprégnait sa voix.
L'impulsion qui m'avait épris, s'éteignant subitement, alors que mes poings se desserraient. Figé, dans la prison de ce corps qui ne m'appartenait aucunement. Mon esprit à vif, tremblant contre les parois de ce crâne. Mon être brisé en une myriade de fragments, éparpillé aux quatre vents. Un semblant de liberté alors que la forme charnelle semblait en suspend dans le vide. Prête à s'effondrer dans l'abîme, le sol se dérobant sous ses pieds. Et pourtant, le temps avait repris son cours, et la réalité m'avait raccroché à elle. Me transcendant de toute part, alors que ma voix s'élevait enfin et que je m'exclamais à nouveau. Sans jamais flancher malgré les tremblements musculaires et les tressaillements corporels. Les convulsions qui m'ébranlaient, les secousses saccadées qui agitaient mon être. Putain, mais... Un souffle hachuré qui s'échappait d'entre mes lèvres craquelées, un poids qui comprimait ma gorge. Tu sais pas de quoi tu parles, Bowman. Poumons brûlants, organe crépitant sous l'épiderme, entre les côtes où les battements s'accéléraient drastiquement. Involontairement. Alors qu'il reprenait ses tirades acides et projetait son poison en ma direction. M'arrachant des souvenirs que je gardais au plus profond de moi, que je chérissais, il y avait bien des siècles de cela. Me tirant des pensées que je gardais enfermées, pour ne plus jamais sombrer. Juste avec ses paroles, juste avec ses propos, il me faisait revivre cet enfer. Il me faisait revivre ce cauchemar qui n'avait jamais cessé de me hanter.
Je mordillais mes lèvres, fermant les paupières brusquement, retenant ces perles salées qui menaçaient de s'écouler. De dévaler en cascade sur mes joues échauffées. Mes dents perçaient la peau fine, un liquide vermeil s'épanchant des micro-coupures, des plaies corporelles bien moins douloureuses que celles qui déchiraient mon âme. Mes poings se serraient à nouveau et le brasier en mon être ne brûlait plus seulement mes entrailles, mais me consumait également moi-même. Calcinant mes espoirs et carbonisant mes appétences. Je te hais... Il me détruisait, comme je m'étais déjà détruit moi-même, il y avait des éternités de cela. Il me renvoyait le reflet de mes propres démons, rien que par sa simple présence. Et par ses paroles perfides, écumait le poison qui coulait déjà en mes veines, pour l'encenser de plus belle. Je te hais... La respiration tremblante, j'inspirais difficilement et ravalais ardument ce poids qui enserrait ma gorge. Ses piques continuaient de percer mon esprit brumeux, empli de ces souvenirs déstructurés et désastreux. D'anciennes sensations revenant picoter ma peau échauffée, tandis que je luttais pour ne pas sombrer dans le néant. Je te hais... Ils avaient toujours tous fini par m'abandonner. Ce premier être qui m'avait intrigué, aux iris d'onyx, à l'aura sombre. Cet humain au sourire radiant, aux traits lumineux et à l'âme scintillante. Les ténèbres, mes plus proches amies, une partie de moi à jamais brisée désormais. Et maintenant, c'était à lui, au sorcier, de me tourner le dos. Je te hais... C'était déjà beaucoup trop insoutenable. Mais le pire, c'était que dans le fond, celui qui m'avait abandonné tout du long, qui m'avait délaissé sans aucune considération, était le seul être dont je ne pourrai jamais me séparer, ni même pardonner de m'avoir écarté. Le seul à m'avoir quitté dès le départ et à m'avoir oublié. Moi-même.
Arrête ça. J'expirais bruyamment en rouvrant les yeux brusquement. Un énième regard noir en sa direction, mes iris furieux accrochant ses orbes d'onyx. Merde quoi. Ferme-la Marc. Dans une impulsion précaire, j'avançais en sa direction, comblant la distance nous séparant. Elevant la main pour contrer la sienne et l'écarter de mon chemin. La peau claquant contre son épiderme en un bruit mat, alors que j'empoignais ensuite le haut de sa chemise à moitié déboutonnée. Écartant les pans en agrippant la texture plus fermement, le rapprochant de moi. Le soulevant par la force tangible de mes bras, son visage près du mien. Tu n'as aucune foutue idée de comment ça se passe. Tu sais fichtrement rien concernant l'essence. Et tu me rejettes tout à la gueule ? La rage éclatant entre nous, étirant nos traits et s'acharnant à nous pousser l'un vers l'autre, tout en s'évertuant à nous éloigner, à nous entre-déchirer. Laisse-moi te dire une chose, enfoiré... Je le repoussais brutalement, le poussant contre le mur en le suivant, le toisant de toute ma hauteur, lui jetant mon regard le plus noir possible sous cette forme. Ne t'avises plus jamais de me parler ainsi. De m'adresser la parole comme si je n'étais plus rien. Je n'ai peut-être plus mon essence, et t'as beau posséder les ténèbres, tu ne sais toujours pas t'en servir. Et ça, c'est pas à cause de moi. Le seul problème ici, Marc... Je le repoussais encore une fois, pointant mon index sur son épaule, passant le poids de mon corps d'une jambe sur l'autre en me penchant vers la gauche. ... c'est toi et ta putain de fierté. Ton ego qui t'amènes sur une pente que t'arriveras pas à remonter. Et t'arrives pas à le concevoir tellement t'es aveuglé. Me reculant enfin, je continuais de le toiser, sans me départir de cette haine qui rongeait mes entrailles et dévorait mon esprit. Transmettant toute la colère qui m'enlaçait, en un regard empoisonné dirigé contre lui.
Je tournais les talons une fraction de seconde plus tard. M'éloignant de sa présence bien trop insupportable. M'écartant de cette pression intenable, de cette atmosphère chargée et lourde, trop étouffante. Il m'avait énervé comme jamais, et je l'avais emmerdé en retour. L'impact de la haine qui était rentrée en collision avec sa colère se répercutait encore alentour. En mes veines gonflées, en mon sang bouillonnant. En mes muscles tendus et mes doigts crispés. Le poing fermé percutant le mur le plus proche tandis que les échos de sa rage continuaient de s'écraser contre mes tympans. Je le laissais s'exprimer dans son coin, alors que je m'enfermais dans ma chambre, claquant la porte sur mon passage. M'accolant contre la texture en fermant les yeux, le corps tremblant sous le contre-coup de l'adrénaline. Les poings à nouveau serrés, alors que je grimaçais, un élancement contre mes phalanges m'arrachant un juron étouffé. Le liquide vermeil s'écoulant d'une nouvelle plaie, plus fraîche, plus vive, plus piquante. N'y prêtant aucune attention, ne m'attardant sur plus aucune sensation, je me laissais emporter par le vide. Par le néant, qui s'étendait sous mes yeux fermés, peignant des arabesques sombres à l'arrière de mes paupières closes. Rejoignant l'obscurité instinctivement, abaissant mes propres barrières, ma carapace s'émiettant dans l'instant. La réalité me frappant subitement, ébranlant ces contours qui m'avaient toujours enlacé. Maintenu en une stabilité incertaine et précaire malgré les aléas intempestifs de l'avenir. Sans plus aucune protection, les paroles du sorcier résonnaient à mon esprit, détruisant une fois de plus les remparts de mon être. Me laissant à nu, l'âme à vif, dans l'absolu. Je t...
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Le silence est glacial, quand il se retrouve seul dans la pièce. Les mots prononcés par Tenebris sont tels une gifle. Ils sont comme du sel sur une plaie. Ils brûlent, attisent les douleurs. Et paradoxalement, ils le glacent également. Il est seul, dans cette pièce, à digérer ces vérités qu’il vient de se prendre en plein visage. Les poings serrés. Les membres tremblant sous la colère qui ne demande qu’à exploser. Il est là, à se demander si le jeu en valait tellement la peine. Si tout ceci n’est pas qu’une vaine blague. Une quête futile. Les ténèbres qui courent sous sa peau sont toujours là, malgré sa tentative idiote pour s’en débarrasser. Se vider de son sang sur le sol n’a servi à rien. Pire que tout, ça n’a fait qu’empirer les rapports tendus entre la déité et lui, au centre de cet appartement qui devient soudainement trop petit pour deux. Trop oppressant pour lui. A quoi bon ? Il se demande ça, encore une fois. A quoi bon ? Lutter contre des moulins à vent, c’est bien drôle quelques minutes. La colère est toujours là alors qu’il tente de maintenir ces ténèbres qui ne lui appartiennent pas. Cette essence divine qui l’empoisonne. Le poids de la dette qu’il a envers Tenebris. Il donnerait n’importe quoi pour s’en débarrasser, là, maintenant. Dans la seconde. Il a peut-être cherché les mots assenés à son visage par la personnification des ténèbres qu’est Tenebris, mais ça ne veut pas dire qu’il accepte. Le déni a toujours été très fort chez Marc. Parfois un peu trop. Beaucoup trop. Après tout, ce n’était pas pour rien qu’on lui avait donné le doux sobriquet de Pride. L’orgueil. Le pire des sept péchés capitaux. Le plus mortel. Tenebris a raison. Pride. Fierté. Ego.
Il se laisse tomber sur le tabouret face au comptoir, la tête entre les mains. Il n’a les yeux fermés que depuis quelques minutes que déjà, les mêmes images reviennent le harceler. Le sourire d’Hellhound, l’éclat de cette lame qui a bien failli le tuer et avec laquelle il a tenté d’accomplir ce rituel raté qu’il n’a pas pu terminer. Le simulacre de douleur revient dans sa poitrine et il grogne en redressant la tête. Les poings serrés. Les ténèbres se pressent contre sa peau, pour sortir. Comment Tenebris fait-il pour les garder sous contrôle ? Pour les empêcher de se manifester à la moindre émotion trop vive ? C’est un pouvoir trop grand pour qu’un humain comme lui puisse le maîtriser et il le sait. Il le sait car il en paie le prix. C’est un miracle que son corps n’ait pas lâché dans l’instant où Tenebris lui avait insufflé cette part de lui pour le sauver. Le sauver. C’est peut-être ça, le coeur du problème. Il était pourtant prêt. S’il ne voulait pas revenir, c’était qu’il acceptait l’idée que c’était fini pour de bon. Qu’il avait fait sa part, qu’il avait échoué mais que enfin, pour une fois… une toute petite fois, il n’aurait plus à se battre. Pour sa survie, pour les autres, pour on ne sait quelle raison. Et voilà que même mourir est devenu un luxe que Marc ne peut pas s’offrir. Il vivra. Et devra continuer à se battre. Encore et toujours. Pas après pas, coup après coup. Du sang sur les mains, sur sa veste, sur son visage. Du sang, encore. A jamais.
Une spirale sans fin de violence et de haine qui l’entraînent vers le fond, sans qu’il ne se sente capable de remonter. Et pourtant, il continuait. Ses ruminations n’ont pour effet que de l’agacer davantage, si bien qu’il se met à désirer avec envie un verre de l’alcool le plus fort qu’il ait en réserve. Pour être engourdi, ne plus avoir à réfléchir et surtout ne plus rien ressentir. D’un point de vue métaphorique, les ténèbres avaient toujours été une part intégrante de lui. Elles ne se manifestaient pas seulement par le biais de ses propres pouvoirs, mais aussi par cette part sombre de lui, contre laquelle il avait cessé de lutter voilà bien des années. A présent, alors qu’elles avaient toujours été là et qu’elles sont plus palpables que jamais, il n’en veut plus. Son regard s’arrête sur sa paume, qu’il ouvre et ferme lentement. Il les sent crépiter, comme toujours. Cette puissance qui ne lui appartient pas lui donne par moment l’impression de brûler de l’intérieur. Et malgré ça, cette même puissance l’a maintenu en vie. A quoi Tenebris pensait quand il a fait ça ? Pourquoi ? C’est toujours la même putain de question. Pourquoi. Pourquoi l’avoir sauvé ? C’est sur ses questions sans réponse qu’il finit une nouvelle fois par fermer les yeux. Il est épuisé. Aussi bien mentalement que physiquement, il est mort de fatigue. Et il ne cherche même pas à lutter, cette fois, contre le sommeil qui s’empare lentement de lui. Au fond, il en a peut-être besoin.
I feel the darkness blanket over me Seems like forever I've been paralyzed
Cette vision lui tord les entrailles. Depuis tout ce temps, il n’a pas su voir. Plus faible que jamais. Sa silhouette recroquevillée sur elle-même, émaciée. Ses traits de visage qu’il avait pourtant appris à aimer sont ravagés par le mal qui ronge l’intérieur de son être. Le voir de cette manière est pire que tout. Un pas après l’autre, il avance vers ce lit sur lequel repose l’humain qu’il aimerait sauver. Ses jambes ne le supportent plus et il s’effondre, à genoux, à son chevet. Sa propre douleur est telle une plaie à vif. Une peau écorchée. Les larmes lui brûlent les yeux et roulent le long de ses joues, allant s’écraser sur le tissu que recouvre le corps de Ruhan. Une main se pose délicatement sur son épaule secouée par le chagrin. La tête enfouie dans ses bras, il la redresse. Ruhan souffre mais lui sourit malgré tout. Il ignore quel mal le ronge mais il sait une chose. L’idée de le perdre, cet humain entré dans sa longue existence, le terrifie et le laisse désarmé. Les sentiments qu’il éprouve pour lui sont si forts. Il n’a pas les mots pour les décrire de même qu’il n’a pas les mots pour décrire cette douleur qu’il ressent en le voyant comme ça. Pourtant, Ruhan a l’air apaisé. Comme s’il s’était préparé depuis longtemps à cette idée, à ce départ qui chamboulerait la déité. Son sourire creuse un trou béant dans sa poitrine. Il va le perdre. Il va perdre cet humain qu’il aime.
What is the reason you have come to beckon me I feel the energy rush through my veins.
Il secoue la tête, posant sa propre main sur celle de Ruhan en se redressant et en s’approchant de son visage. Il sait très bien ce qu’il doit faire. Peut-être que c’est l’une des pires décisions qu’il devra prendre mais il est prêt à en payer le prix, si ça peut le sauver. Son regard illustre ses intentions et comme toujours, il n’a pas besoin d’utiliser les mots pour que Ruhan le comprenne. Car sans qu’il ouvre la bouche, il voit l’expression de l’humain changer. S’assombrir alors qu’il secoue faiblement la tête. Un refus qui lui serre un peu plus le coeur. Laisse-moi t’aider. Même si ça signifie cesser d’exister. Sacrifier son existence pour qu’il vive. Cette idée est folle. Il est un dieu. Ruhan est un humain. Mais continuer son existence immortelle sans lui ? C’est pire que disparaître. Sa main se serre sur celle de Ruhan. Sa voix est rauque et presque brisée par les larmes quand il ouvre enfin la bouche. « Ruhan… S’il te plaït…» Laisse-moi t’aider. « Ne me laisse pas… Lais… Laisse-moi t’aider. » Laisse-moi te sauver. Pourquoi ça fait si mal ? Pourquoi ce trou à l’intérieur de lui ne cesse de s’agrandir, rongé à ses bordures par sa propre souffrance et celle de Ruhan dont il sent progressivement l’existence faiblir ? Ne m’abandonne pas. Le chaman ferme doucement les yeux, laissant la douleur transparaître sur ses traits. Il souffle, déterminé. « Je n’en peux plus, Tenebris.»
Your whispers calling me you speak my name How can I save you when I couldn’t save myself
Tenebris ? Marc secoue la tête. Il ne comprend plus. Ce n’est pas lui. Ce n’est pas… pourtant, ce sont ses mains qui serrent celles de Ruhan, ses yeux qui laissent échapper des larmes, son corps qui ressent cette douleur inimaginable. Il se voit agir et parler d’une voix qui n’est pas la sienne, comme un spectateur silencieux, pris au piège dans un corps qui ne lui appartient pas. La voix de Ruhan s’élève une nouvelle fois. Douce. Faible. Mais toujours déterminée. « J’ai bien vécu. Les mortels comme moi… Notre existence est courte. Courte mais remplie. Et je ne regrette rien. Surtout pas ces instants passés avec toi.» Un coup de plus qui agrandi le creux. «Je t’en prie, Ruhan…» Sa voix tremble alors qu’il lutte contre les sanglots qui lui enserrent la gorge. La main du chaman se pose délicatement sur son visage. « Laisse-moi partir, Tenebris.» Le contact dure quelques secondes et l’humain se redresse doucement. « Laisse-moi partir.» C’est presque une supplique. Il lui demande de le laisser mettre fin à cette souffrance. Il ferme les yeux en secouant la tête. Mais il sait. Ruhan a effectivement bien vécu. Pour un humain. Il n’est pas n’importe quel humain pour lui. Il est au-dessus des autres. Et parce qu’il ressent pour lui ce qu’il n’a jamais ressenti pour cette espèce, il sait qu’il doit le laisser partir. Il rouvre les yeux et une fois encore, pas besoin de mot. Pas besoin d’ouvrir la bouche ou de lui implanter dans l’esprit ce qu’il pense. Ruhan le sait déjà. Le chaman lui offre un nouveau sourire en pivotant doucement pour attraper quelque chose. Le geste lui est difficile. Mais l’éclat est sans appel. La forme de l’objet se dessine alors que les mains de Ruhan se referment dessus. Des tremblements commencent à secouer son être quand il comprend. Il ne les contrôle plus alors que ses yeux s’écarquillent à mesure que son esprit comprend ce qui est en train de se tramer. Non. Pas ça. Tout mais pas ça. Ses mots restent coincés dans sa gorge et ses ténèbres se pressent contre sa peau. Elles s’étendent doucement, autour d’eux, sans qu’il ne leur prête attention, comme une fleur macabre. Ruhan attrape sa propre main et la referme sur le poignard. Cette étreinte est plus douloureuse que le reste. Les ténèbres forment lentement un voile protecteur, autour d’eux, les coupant du reste du monde. Comme pour leur accorder ce dernier moment sans interruption.
Take my hand... Rescue me Justify... Set me free Break me down... Make it right
A nouveau, sa vision se brouille de larmes. Le regard de Ruhan lui indique qu’il est plus déterminé que jamais. Qu’il n’a pas l’intention de faire machine arrière et que tout ce que Tenebris a à faire, c’est de lui accorder ce dernier instant. L’accompagner jusqu’à la fin. Ruhan guide sa main jusqu’à l’emplacement de son coeur. Il tremble de nouveau, secouant la tête. Il ne peut pas s’y résoudre. Sa voix n’est qu’un murmure alors qu’il articule avec difficulté. « Je… Je n’y arriverais pas.» Je ne pourrais pas continuer sans toi. Ruhan sourit une nouvelle fois, tristement. L’encourageant. « Je ne peux pas.» Je t… Lentement, leurs mains serrent, avec cette lame au milieu pour signer cette étreinte. Elle brille. « Je…» Je t’aime. Et le geste arrive. Sec. Rapide. Ruhan abaisse leur deux mains, plongeant la lame dans son coeur. Le silence. Cette seconde où tout bascule. Puis enfin, un cri. Un cri qui s’échappe de sa gorge alors qu’il lâche la lame pour entourer de ses deux mains le visage de l’humain qu’il aime, ce chaman dont la vie est en train de s’éteindre. Il le bascule contre lui, les larmes l’aveuglent alors qu’il a l’impression que son être en train de se fracturer. Il aimerait retenir cette âme qui lui échappe entre les doigts comme de la fumée. Il hurle toujours en tremblant quand il comprend que c’est terminé. Ruhan est parti. Ses pleurs ne le ramèneront pas. Ses cris non plus. Et pourtant, il ne peut pas les arrêter.
My tortured soul is broken wanting more
Son dos heurte violemment le sol, alors qu’il est toujours en train d’hurler. La vision de cette pièce s’estompe pour laisser place à ce salon qu’il a appris à détester. Marc reste là, haletant, fixant le plafond à travers. Sa vision est floue. Quelque chose le gêne. Et c’est quand il les sent rouler sur sa joue, chaudes et glaciales en même temps qu’il comprend que ce sont ses propres larmes. Il se redresse lentement, prenant une position assise alors qu’il cherche à respirer. Il a l’impression d’étouffer. Son souffle saccadé s’apaise après de longues minutes où il a fini par ramener ses mains contre sa poitrine, recroquevillé sur lui-même. Il nage dans l’incompréhension. Alors qu’il cligne doucement les yeux, tout en chassant ses larmes d’un geste, il se rend compte que les ténèbres se sont étendues dans l’appartement. Elles reviennent avec lenteur dans sa direction, glissant sous le tabouret renversé sur lequel il s’était endormi. Ce qu’il a ressenti…là-bas… Il n’a jamais rien senti de pareil. Il n’a jamais senti une telle détresse, un tel désespoir. Cela dépasse tout ce qu’il a déjà vécu. Marc peine à se remettre debout, tremblant de tous ses membres. Tenebris. Ruhan. Les sentiments du dieu à son égard. Ce cri qui avait finit par devenir le sien. Il n’arrive pas à se remettre sur pied, tombant à genoux de la même manière que la déité s’était laissée tombée au chevet du chaman. Et laissant, pour une fois, les larmes s’épancher alors qu’il porte ses deux mains à son visage.
Take my hand...rescue me Justify...set me free Break me down...make it right Burden of sacrifice
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
La nuit imprégnait les alentours, les paysages obscurcis par son voile fin mais pourtant opaque. L'astre laiteux ornant le firmament de son halo éthéré et brillant, faisant éclater d'une lueur ardente ces rayons filtrant au travers des nuages épais et sombres. Quelques points blancs décorant le ciel noir, luisant tels des diamants étincelants. Les œuvres astrales dépeignant une toile presque onirique, tandis que le sommeil emportait les habitants de cette maison endormie. Une âme en peine errant pourtant dans ces couloirs, ne trouvant le sommeil malgré ses yeux fermés. Un second esprit le découvrant, l'entraînant à sa suite dans cette pièce assombrie. Bien trop petite, bien trop étroite. Atmosphère étouffante qui suffoquait sa gorge enserrée. Une attente trop longue et poignante, qui pinçait sous sa peau. Un silence qui s'étendait à n'en plus finir, qui s'insinuait en lui. Glaçant son épiderme échauffé, picotant ses muscles qui se tendaient. Une sensation désagréable s'épanchant sous ses contours, une effluve d'émotion ébranlée émanant par tous les pores de sa peau. Il scrutait avec acharnement ce visage qu'il a appris à détester. Qu'il hait, du plus profond de son âme. Son esprit était en ébullition alors qu'il cherchait à comprendre, à réaliser, la raison de sa présence en ces murs. Il reconnaissait pourtant, cette expression sur les traits étirés de ce jeune adulte. L'éclat dangereux qui brillait dans son regard maléfique. L'air malfaisant qui ornait son visage bien trop proche du sien. Trop près de lui, la distance entre eux semblant même l'inciter à ne pas s'échapper. A ne plus reculer et à seulement se laisser aller à accepter. Il pinçait les lèvres, poings liés. Ses ongles raclant ses paumes échauffées. Ses phalanges blanchissaient sous la pression exercée. L'autre, en face de lui, ne se départissait toujours pas de son sourire diabolique et semblait même se délecter. Du spectacle qui s'offrait sous son regard perçant et acéré. Ses doigts, telles des griffes, se plantaient dans ses bras alors qu'il scrutait la silhouette à moitié recroquevillée. D'un jeune garçon qui jusqu'ici alors, ne s'était jamais ainsi retrouvé.
Un écho régulier s'élevait dans les airs, un léger fracas qui perlait sur la fenêtre sans doute délabrée. Une mélodie qui pouvait bercer mais aussi effrayer, alors qu'un grondement tonnait au loin. Un éclat de colère soudain, qui se déversait sur les paysages désolés et marqués par l'obscurité. Presque en miroir à celle qui s'épanchait sous sa peau. À celle qui rongeait ses entrailles, grignotant son être entier à mesure qu'il écoutait l'autre lui parler. Sa voix résonnait tout autour de lui, contre les murs défraîchis. Se répercutant à même la texture rugueuse et s'élançait au plus loin, aux quatre coins de cette pièce. De cette salle qui l'oppressait, tout autant que ce corps qui s'approchait et semblait se presser. Combler la distance qui les séparait et qui pourtant n'était déjà pas assez. L'autre ne cessant de s'exclamer, de susurrer des mots qui sonnaient creux. Qui semblaient aussi vides que son cœur de pierre. Ou de verre trempé, alors que rien ne pouvait le briser. Frapper sur la surface sans pouvoir jamais atteindre les profondeurs espérées. L'autre, perfide personnalité, murmurait à son oreille alors qu'un poison s'écoulait en ses veines. Sensation atroce, où son sang bouillonnait mais semblait s'évaporer par la même. Le venin rongeant chaque parcelle qui le composait, alors que cet esprit dérangé osait encore amener le sujet. Le même sujet qui lui avait déjà valu un refus auquel il n'avait pas obtempéré. Sa colère, telle qu'une ruée de poings qui martelait son corps frêle d'une signature à la limite mortelle.
Il refusa à nouveau, au deuxième essai de cet être désaxé. Qui ne cessait de se jouer de son autorité. De le menacer, de le pousser à bout pour le faire déchanter. Il continuait, n'arrêtant jamais son administration manipulée. Amenant dans ses mots, l'horreur absolue qui dépeignait un autre être cher, auquel il ne souhaiterait jamais le pire. Qu'il voudrait voir s'en sortir, loin de cette tyrannie, de cet hypocrite qui se permettait de la mentionner. De lui promettre de la faire souffrir des tourments inimaginés s'il refusait encore ses demandes qu'il jugeait convenantes. Il ne faisait que parler mais pourtant ses propos résonnaient comme un chantage improvisé. Une manipulation de son âme pour le plier à sa seule volonté. Ses menaces le faisaient frissonner mais attisaient également ce brasier en lui. Ces flammes de haine qui le rongeait et s'épanchaient sous sa peau en dévorant ce qui restait de lui. Il se consumait par cette rage qui l'essoufflait. Et l'autre n'en faisait que d'en profiter. S'approchant encore et encore, au point de finir par l'effleurer. Par apposer ses doigts sales et crasseux sur son épiderme encore immaculé. Frôlant le corps tremblant de cet être qui ne cherchait qu'à s'éloigner. A s'extirper de cette prise sur ses poignets qui n'arrêtait pas de les enserrer. Des grognements s'échappant de sa gorge asséchée tandis qu'il lui crachait ce poison qui courait sur sa langue, muscle lourd sous son palais. Par l'instinct qui l'animait, le jeune garçon se débattait en hurlant à son tortionnaire de le laisser. De s'en aller. De se dégager. De se retirer. Et pourtant, alors qu'il criait, sa voix se brisait un peu plus à chaque seconde qui passait. Son épaule rencontrant le torse de l'autre dans une atteinte incertaine lui coupait le souffle, et permis au plus agile de respirer. Ses iris éclatant accrochant cette ombre projetée contre le mur, alors qu'une bougie éclairait faiblement cet endroit délabré. La pièce lui semblait de plus en plus sombre à mesure que le temps s'étendait, et que sa colère noire grandissait.
Son esprit éveillé atteignait la texture opaque et obscure qui rongeait le mur. La détachant de sa position précaire pour l'abattre par sa simple volonté, sur le dos de cet être dérangé. Un simple contact aussi solide qu'une tape qui pourtant le fit sursauter. L'autre se retournait, un sourire désabusé peint sur ses lèvres craquelées. Et lorsqu'enfin il compris, un air carnassier se creusait sur les traits de son visage étiré. La silhouette plus petite et agile, tremblait sous l'assaut de ce regard qui le transperçait. La voix résonnait toujours, plus sordide, plus proche, plus prenante. Tout juste contre ses tympans alors que son sang cognait contre ses tempes. Son ton, affreusement menaçant, tandis qu'il empoignait plus fermement ce corps dans sa prise solide. Instant sensible et précaire, une fraction de seconde où l'âme en était retournée, tandis que ses contours suivaient la volonté de ce tortionnaire improvisé. Des bruits étouffés, une étoffe qui s’effiloche sous ses doigts alors que la pulpe dévale ce qui a toujours été sacré. Une présence dans son dos qui le faisait se cambrer, alors qu'il cherchait toujours à s'en extirper. Secoué dans la réalité, il gesticulait sans s'arrêter, bougeant pour ne plus jamais se faire attraper. Et pourtant, l'autre réussissait toujours à le retenir et à l'immobiliser. Ses intentions les plus néfastes prenant place dans la réalité, tandis qu'une sensation de toute puissance l’empoignait. L'agilité de cette plus jeune âme qui se retrouvait acculée contre ce mur délavé, ne lui permettant plus de s'échapper. Les échos lointains de la tempête se répercutant dans son crâne alors que les grognements incessant de l'autre ne s'estompaient jamais. Un jeu de miroir où les éclats de voix et l'orage ne formaient plus qu'un contre cette vérité qui s'insinuait à même la texture de la réalité.
Tout s'écoulait beaucoup trop rapidement, alors que pourtant, le temps semblait se figer. Le retenant prisonnier de cet instant qui marquait sa vie à jamais. Qui l'enfermait dans son propre corps alors que ce qui se passait s'ancrait en son esprit fracturé. Ébranlé dans sa propre vérité, déchiré dans sa propre réalité. Il sombrait sans réaliser, inconscient de ce danger qui le dévorait et le rongeait. Perturbé au point de ne plus pouvoir émettre le moindre mouvement. Figé lui aussi, dans le temps, alors qu'il ne pouvait croire à ce qui se passait. Immobile dans son propre corps alors que de sa prison de chair il s'y emmurait. Le silence effleurant ses lèvres entrouvertes, tandis que son souffle mourait sur sa langue. Étouffé à même sa gorge enserrée et calcinant ses poumons contractés. Sa peau brûlante se consumait sous le toucher de ces mains qui l'entouraient. Les contours de sa silhouette se désagrégeant sous l'impact de ce qui lui arrivait. Son esprit se perdant dans les limbes de l'oubli alors que ce qu'il laissait derrière lui peinait à seulement compenser. Des perles salées maculant ses joues tandis que ses larmes dévalaient en cascade sa mâchoire contractée. Son organe battant à peine sous ses côtes, alors que les échos se faisaient irrégulier au creux de sa cage thoracique. Muscle qui s’atrophiait sous l'assaut de cette réalité qui s'imprégnait à lui, et contre sa volonté. Son premier et seul rempart pour se protéger, n'étant à présent plus que réduit à néant, tandis qu'il s'effritait sous les coups acharnés.
L'horreur à jamais ancrée en lui, marquée sur sa peau, imprégnée contre ses paupières qu'il fermait avec difficulté. Il pleuvait au dehors en un torrent semblable à des larmes. Ses larmes, qu'il peinait à retenir, et qu'il n'arrivait pas à contenir. L'orage éclatait encore, et un éclair scintillait au moment où l'autre grognait plus lourdement. Sa voix rauque murmurant des insanités à ses tympans fragilisés. Si tu continues de refuser... Son ricanement sonnant bien trop étrangement tout autour de lui. ... ce sera elle la prochaine. Elle. Mai. Non....Son souffle s'écrasait contre son bras qu'il voulait mordre jusqu'au sang sans s'arrêter. Alors que ses paroles résonnaient encore en son esprit déchiré, la voix de l'autre s'amenait à nouveau et sans invitation, à s'écraser sur sa peau. Tu comprends ça, Marc ? Que... Quoi ?Son ton rauque faisant frissonner ce corps frêle qui se retrouvait figé sous lui. Prisonnier de cet autre qu'il n'a jamais autant détesté. Tout semblait se déchaîner, alors que lui restait ainsi, plié et décomposé. Perdu et abattu. Choqué, alors que personne ne l'entendait. Silencieux dans ce monde bien trop bruyant pour lui. Où les âmes passantes ne le voyaient pas depuis leurs hauteurs. Un sanglot coincé à même sa gorge, il comprenait alors la fatalité de cette réalité. En cet instant, et plus jamais, personne ne viendrait à le sauver. Personne pour le rattraper alors qu'il chutait. Personne pour le retenir alors qu'il sombrait. Personne pour l'aider alors qu'il se noyait. Lui seul pouvant se relever et se tirer de cet enfer qui l'entourait, et qui se créait dans sa destiné. Vie détruite et avenir déploré. Cœur en miettes, âme fragmentée. Esprit fracturé, être déchiré. Marc ?Image ancrée dans le paysage, qui s'estompait, qui se dispersait. Rêve qui s'effilochait, alors que l'onirisme se désagrégeait. Cauchemar étouffé par une respiration saccadée qui s'imprégnait au dehors de la substance éthérée. Qui se répercutait en un écho imperturbable dans la réalité.
En un sursaut brusque et en des mouvements saccadés, je me redressais sur ce matelas trop épais. La respiration hachurée s'échappait de mes lèvres alors qu'un poids enserrait ma gorge qui me brûlait. Une goulée d'air qui ne parvenait pas à atteindre mes poumons, malgré les inspirations erratiques que je prenais. Les épaules affaissées, j'abaissais mon regard désabusé sur mes mains qui tremblaient. Les élevant lentement à hauteur de mon visage, les contemplant sans réagir, tandis qu'un écho statique résonnait en mon esprit. S'écrasait contre les parois de mon crâne à chaque expiration abrupte et chaque inspiration incontrôlée. Le souffle erratique, je peinais à me tirer de cette empreinte qui m'avait empoigné durant ces quelques instants passés. Une plainte hachurée s'échappait même de ma gorge asséchée alors qu'un voile embuait mes iris désolés. Des perles salées dévalant en cascade le long de mes joues échauffées tandis qu'un soubresaut me transperçait. Les sensations fantômes de cette vision parcourant encore ma peau en des crépitements irréguliers. Clignant des paupières en me cambrant subitement, sursautant à nouveau sous l'assaut de ces images encore bien trop vives à mon esprit. J'enserrais les draps entre mes doigts crispés, les ongles enfoncés dans la texture cotonneuse. Pourtant, ils n'avaient jamais été aussi rugueux qu'en cet instant. Les épaules tendues comme jamais et la mâchoire crispée, je laissais mon regard se perdre dans le néant un court laps de temps. Un court moment où je ressassais cette mémoire qui n'était pas la mienne, et à laquelle j'avais été témoin sans appel. Cette mémoire qui appartenait à Marc. Qui composait une partie de son existence. Et qui l'avait détruit.
Au travers des larmes et de la buée qui recouvraient mes pupilles, un mouvement lent et saccadé attira mon attention tandis que je le percevais du coin de l’œil. Clignant brusquement des yeux, je détournais mes iris de la contemplation abyssale pour les poser sur cette texture qui me narguait. Structure sombre et pourtant si familière, qui m'appelait, alors qu'elle s'éloignait. Qu'elle creusait la distance qui nous séparait inlassablement. J'entrouvris les lèvres en un instinct précaire et m'élançais à sa suite sans réaliser. Sans réfléchir, tandis qu'un soupir étouffé mourrait sur ma langue trop lourde contre mon palais. Les muscles encore engourdis par ce sommeil dérangé, je n'arrivais plus à me coordonner. Trébuchant en me prenant les pieds dans les draps froissés, tombant sur ce sol qui me maintenait à peine à la surface. Mon esprit sombrant comme jamais, à mesure que je tentais de rattraper les ténèbres qui m'échappaient. Instinct précaire contre la réalité tangible, qui s'apposa à moi lorsque j'arrivais devant la porte fermée. A genoux, les poignets contre la texture en bois, alors que mes poings se resserraient et que je martelais d'un seul coup cet obstacle. Seulement quelques secondes de répit, avant que le reste ne se déverse en mon être pour m'emporter au plus lointain de ce cauchemar éveillé. L'horreur s'imprégnant dans la réalité, s'ancrant à l'arrière de mes paupières fermées. Imprimé dans mes pensées déstructurées sans que je ne puisse les éloigner ou m'en échapper. Mémoires bien trop lourdes et trop déchirantes, qui fracturaient mon âme alors que je sombrais. Que j'étouffais en me noyant sous l'assaut de ces souvenirs chaotiques. Impossible de respirer tant je suffoquais. Et ça me tuait.
Rongé par ces remords qui m'étaient étrangers, je me redressais en trébuchant plusieurs fois. Empreint par cette solide amertume qui me dévorait de l'intérieur et crépitait juste sous ma peau, je sentais la pièce tanguer tout atour de moi. L'oppression alentour alors qu'un vertige me prenait. Toujours plus poignant, toujours plus proche et plus percutant. J'élevais ma main secouée de tremblements pour l'apposer contre ma tempe. Le pouls irrégulier cognant avec force et fermeté contre ma paume échauffée, m'arrachant un grognement désemparé. Le vertige me faisant flancher juste après, tandis que je me rattrapais de justesse au mur derrière moi. Cognant contre le bord de l'armoire en me retenant de tomber. Putain ! Je serrais les dents, la mâchoire contractée alors que je laissais passer cet instant d'évasion. Me reprenant avec difficulté lorsque je sentais que l'impression dérangeante commençait à s'estomper. Avançant lentement pour contourner l'armoire et finir par l'ouvrir, y plongeant mes mains encore tremblantes pour en retirer un sac assez large. Imposant, tandis que je le remplissais à la va-vite d'affaires dépareillées. D'instruments et d'ustensiles utiles pour une période indéterminée. Il fallait que je me barre d'ici, que je me casse de cet endroit bien trop étouffant pour moi. Bien trop étroit pour lui et moi. Je devais me tailler et surtout trouver un moyen de récupérer ce qui m'appartenait. Ce qui me composait sans avoir à compromettre qui que ce soit d'autre. Je ne voulais pas impliquer Marc dans cette histoire, mais c'était déjà bien trop tard. A présent, la seule autre personne vers qui je pouvais me tourner se trouvaient sans doute à des années lumières de là où je me trouvais. Mais il fallait que je la retrouve. Que je lui parle. J'avais besoin d'aide. J'avais besoin d'elle. Son prénom, son identité, tel un murmure qui glissait d'entre mes lèvres qui ne voulaient plus que se sceller. Ether...
Balançant le sac sur le lit, j'entrepris de fouiller dans les autres meubles qui composaient la chambre. La commode et juste la table de chevet. A peine avais-je terminé de détrousser le premier mobilier, qu'un bruit autre que le tiroir se refermant attira mon attention. Mains prises par ces affaires qui ne m'appartenaient pas, je n'avais pas besoin de détourner le regard pour savoir de qui il s'agissait. Je me retournais sans le regarder, évitant ce regard qui semblait me scruter. Fourrant les affaires à l'intérieur du sac avec empressement, tandis que l'oppression revenait m'étouffer. Une boule enserrant ma gorge au point de m'en faire suffoquer. Je déglutissais difficilement, les mains sur le sac, alors que mes poings se serraient à nouveau au rappel de ce souvenir. Souvenir qui constituait Marc et la personne qu'il était devenu. Et éprouver la même souffrance qui l'avait transcendé à l'époque, fracturait ce creux qui ne cessait de s'étendre en mon être. Je ne pouvais pas le regarder, et les larmes qui coulaient sur mes joues ne faisaient que me le confirmer. Je jurais en me détachant du sac, entreprenant alors de fouiller la table de chevet. De récupérer ce que j'y avais stocké durant la convalescence du sorcier. Ouvrant le tiroir et plongeant ma main à l'intérieur jusqu'à ce que mes doigts butent contre la texture froide et rigide. Mes phalanges s'y enroulant autour tandis que j'agrippais fermement cet objet. Le retirant de l'obscurité en le maintenant dans mes paumes échauffées. Le contraste s'imprégnait, entre la chaleur qui me consumait et la substance glaciale de la lame, avec laquelle il avait tenté d'en terminer.
Un écho perturbait le silence étouffant alentour, et sa voix résonnait doucement. Lentement, sensiblement. Bien trop basse, bien plus grave que d'habitude. Une émotion empoignant sa gorge alors que ses mots faibles s'élevaient. Il m'appelait et sa détresse me faisait me figer sur place. En un réflexe, mes doigts se refermaient plus durement sur cette lame qui brillait sous l'éclat faible qui éclairait la chambre. J'abaissais la tête, fermais les yeux en tentant d'oublier sa présence. D'y faire abstraction. D'échapper à cette volonté de lui lancer ne serait-ce qu'un seul regard pour m'assurer que... Qu'il allait bien. Qu'il n'était pas rongé par ce chagrin qui m'empoignait, qui me détruisait de plus en plus à chaque seconde. Un sanglot mourut à même ma gorge alors qu'une autre perle salée s'échappait de mes paupières fermées. Serrant les dents, le corps tendu comme jamais, je me sentais trembler plus ardemment. Les mêmes que ceux qui m'avaient transcendés dans ce motel, après que j'avais effectué le sacrifice ultime, pour le sauver. Sa voix s'élevait à nouveau et cette fois, je ne pus m'empêcher de porter mon attention sur lui. De suivre l'éclat de sa voix, de m'imprégner de ce ton faible qui émanait de lui. De m'y accrocher pour ne plus sombrer à nouveau dans la désolation. Ses contours sont flous au travers des larmes, mais sa silhouette est avachie, ses épaules affaissées. Je clignais des paupières, et lorsque mes iris se posaient sur son visage, s'ancrant à ses pupilles dilatées, je pus constater avec amertume qu'il n'avait pas été épargné. Par ces cauchemars déstructures. Son visage était ravagé, creusé, ses traits étirés comme jamais. Un air pathétique et malheureux imprégné sur sa peau. Des éclats brillants dans ses yeux délavés, ses iris fades me scrutant au delà du voile salé qui ornait sa vision brouillée. Je détournais la tête, incapable de faire face à son désespoir, à son chagrin, alors qu'un écho de son passé se montrait encore à moi, en m'envoyant ces mêmes expressions désabusées.
Rangeant la lame dans le sac, je ne mis pas longtemps à le refermer en des gestes quelques peu hachurés. Les mains toujours tremblantes alors qu'une vague glaciale déferlait sous mes côtes tandis que je réalisais que j'allais m'éloigner. De tout ça, de cet appartement, de ces démons qui rôdaient, de ces ombres qui planaient au dessus de nous à cause de Hellhound. Mais j'allais aussi m'éloigner de lui, et même si cela allait être salvateur, je savais que ça allait m'être destructeur. Le laisser en proie à cette détresse, seul, l'abandonnant presque comme tous les autres. Je ne devrai pas. Mais je n'avais pas le choix. Rester ici, enfermé avec lui, je ne pouvais pas. Je ne pouvais pas... Un son étranglé s'arracha à nouveau de ma gorge meurtrie et j'agrippais fermement la lanière du sac avant de le balancer sur mon épaule. Me redressant subitement, le plus droit possible en me tournant vers Marc une dernière fois, sans pour autant le regarder. J'avançais sans me retourner, sans jeter un ultime coup d’œil à cette pièce qui avait été un temps mon sanctuaire. Soufflant avec difficulté alors que ma respiration erratique s'élevait et s'accélérait à mesure que j'approchais de lui. La buée recouvrant mes iris d'un voile opaque ne s'estompant pas une fois à ses côtés. Une perle salée roulant à nouveau sur ma joue échauffée lorsque mon bras libre frôlait ses contours alors que je le dépassais. Le contournant afin de m'élancer au delà de sa présence, délaissant son être derrière moi. Les échos de son ton alors qu'il m'appelait désespérément, son timbre vibrant comme jamais alors que sa voix se brisait. Je fermais les yeux en me mordant les lèvres afin de rester résolument silencieux pour continuer à avancer sans me retourner. Parce que je savais, que si je me laissais aller, que si je doutais, j'allais y retourner. Que j'allais me retourner et me rapprocher de lui. Encore plus qu'auparavant. Que j'allais combler cette distance que je n'aurais jamais dû effleurer. Que j'allais encore dépasser cette limite que je ne devrai pas franchir.
Alors je continuais, j'avançais sans lui lancer un seul regard, ô combien peiné. Ô combien déchiré. J'accélérais presque mon allure, mes pas frôlant la texture du sol en un rythme effréné. Jusqu'à ce que j'atteigne la porte d'entrée. Ne m'arrêtant pas même lorsque je sentais son regard sur ma nuque, que je pouvais presque percevoir ses pensées. Renforçant la barrière qui contenait mon esprit afin de ne pas m'épancher, j'élevais la main et l'apposait sur la poignée. Ouvrant cette porte qui scellait par bien des manières nos secrets les plus sombres. En une impulsion, je m'élançais brusquement au dehors de cette antre secrète, de cette cachette qui nous avait abrités. M'éloignant de l'appartement et rejoignant le cœur même de la tempête alors que l'orage grondait sous mes côtes. Pulsant dangereusement au creux de ma cage thoracique. La panique crépitant sournoisement sur mes contours, contre ma peau en grésillant telle de l'électricité. Parcourant mon épiderme en des arabesques déstructurées. L'âme au bord du gouffre, le cœur au bord des lèvres, j'étais complètement brisé. Détruit par ce passé et par cette vérité qui s'imprimait de plus en plus sur la toile de la réalité. Sa substance même se tendant alors que je la frôlais en m'échappant de cet endroit bien trop sacré. De cet abris piégé dans la tourmente, et qui tenait malgré tout. Creusant la distance entre lui et moi, encore une fois. Si je n'avais pas déjà été complètement à l'agonie avec l'âme fracturée, mon être se serait encore plus brisé après mon départ. Dans un instant d'inattention, tandis que je parcourais les ruelles plongées dans le noir, je remarquais à peine qu'on me frôlait. Qu'on me passait littéralement au travers. Je ne pouvais pas voir ces âme perdues dans la nuit, qui marchaient droit devant moi et me percutaient sans me toucher. Qui ne me voyaient pas non plus. Sans m'en rendre compte, j'étais repassé dans le plan spectral. Visiteur impromptu à cette heure tardive, alors que je continuais d'avancer sans savoir où j'allais. L'esprit tout aussi perdu que je ne l'étais moi-même en cet instant. Ultime moment de non clarté alors que je voulais simplement oublier tout ce qui pesait sur moi et m'étouffait. Qui m'oppressait et m'étranglait de par les fils invisibles de la réalité de la destiné. Et en ce court instant, mon énergie brûlait sous mes contours. Elle consumait mes veines de par son brasier ardent dont les flammes crépitaient juste contre mon épiderme. En une seconde supplémentaire, en un battement de cil, alors que j'imprimais l'esquisse de cette ville à l'arrière de mes paupières, j'en étais pourtant parti. En une fraction de seconde, je n'étais plus. Je n'étais plus. Plus là, plus ici. L'espace d'un instant qui semblait pourtant infini. Avant de réapparaître en un ailleurs qui m'était étranger. Un autre endroit de cette terre, de cette planète perdue dans le temps et l'espace. Perdue dans le vide intergalactique entre les bribes de mirages lumineux et les éclats obscurs des ténèbres. Me retrouvant moi-même, à nouveau perdu, encore une fois.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
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Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Il a besoin d’un instant pour comprendre ce qui vient de se passer. Est-ce que… Est-ce que Tenebris s’est juste… tiré ? Seul, au milieu de la pièce, Marc doit se rendre à l’évidence. Oui. Il est parti. Comme ça. Sans lui dire. Est-ce qu’il doit s’inquiéter ? Est-ce qu’il doit lui courir après ? L’idée lui traverse la tête, quand bien même il ignore comment on fait, lui qui n’a jamais eu à courir après qui que ce soit. C’est bien la première fois qu’il songe à retenir quelqu’un. Mais il ne fait rien. Il ne fait rien car il sait au fond de lui que c’est la meilleure chose à faire. Tant pis pour ce qu’il ressent. Ce cocktail d’émotions étrangères lui tord l’estomac comme s’il s’agissait du verre de trop. Celui qu’on refuse d’avaler car on sait au fond de nous-même que le corps ne le supportera pas. Ses mains tremblent encore quand il les passe sur son visage ravagé par cet afflux. A-t-il déjà ressenti quelque chose de semblable ? Il se sent oppressé par un étau invisible se refermant sur sa poitrine. Chaque respiration est difficile, chaque battement de coeur est laborieux. Ce sont des souvenirs. Il le sait, au fond de lui. Ce sont des souvenirs, des fragments d’un passé qui ne lui appartient pas et qu’il a eu en direct dans un coin de sa tête. Ruhan. C’était Ruhan. Et sa mort. Il chasse, d’un geste rageur, les larmes qui se sont frayés un chemin sur son visage. La dernière fois qu’il a pleuré, c’était… quand Mai s’est pris une balle devant lui. Il n’a pas versé une larme depuis. Et pourtant, il se retrouve à présent avec une trentaine d’année au compteur à pleurer une perte qui n’est pas la sienne.
Il regrette cette époque où les choses étaient simples pour lui. Bien plus simple. Cette époque où il n’avait pas un souvenir brûlant dont les images repassaient en boucle dans sa tête. Ses mains tremblent encore quand il les regarde, même si elles sont bien différentes de celles qui ont tenu l’arme et la main de Ruhan. Tout ce qu’il a vu, il l’a vu de son point de vue. Il l’a vécu comme lui l’a vécu. Etait-ce de l’amour qu’il a perçu, parmi sa détresse ? L’amour de Tenebris pour Ruhan ? Cela le laisse sans voix. Marc ne comprend pas. Est-ce qu’un dieu est capable de ressentir tout ça ? Il en a eu la preuve et pourtant, cela lui semble tellement… irréaliste. Il a besoin de réponses. Mais ses questions restent en travers de sa gorge car il n’y a personne pour lui répondre. Tenebris s’est enfui. Lâchement souffle cette part de lui, pleine de colère et d’amertume. Il s’est enfui au seul moment où Marc avait besoin de lui. Comme les autres. Ils finissent tous par l’abandonner, d’une manière ou d’une autre. Et il reste seul, au milieu de la route. Seul, écorché, à peine vivant. Sans la moindre attache pour le maintenir quelque part. Tenebris est comme les autres, au final. Le fait qu’il soit un dieu n’y change rien. Il est comme Aidan, comme Mai, comme tout ceux qui sont entré dans sa vie et en sont sorti, en l’abandonnant. Le cocktail devient explosif, car Marc redevient Marc. Cet être acerbe, qui en veut à la terre entière. Ce gamin, qui au fond, n’a jamais pardonné aux adultes de l’avoir laissé tomber.
Et sa colère est dangereuse quand elle est couplé à une essence divine. Elle s’épanche, comme les larmes l’ont fait un peu plus tôt. Destructrice. Cette cachette est trop petite pour contenir sa rage et rien ne lui échappe. Il ne retient plus son envie d’hurler. Il la laisse se libérer. Les ténèbres accompagnent ses gestes vifs. Une ampoule explose, puis une autre. Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus une seule source de lumière dans l’appartement, voire même dans l’immeuble tout entier. Quand enfin, il se sent trop épuisé mentalement pour continuer à mettre chacune des pièces sens dessus-dessous, il se retrouve une nouvelle fois au milieu du salon, haletant. Ses tremblements de rage finissent par s’estomper quand il prend conscience qu’il est encore allé trop loin. Toujours plus dans l’excès. Peu rationnel. D’un extrème à l’autre. Apathique et dénué d’émotion. Et soudain, il ressent tout, à la puissance d’un ouragan. Il explose. Comme il a explosé les objets de l’appartement. Il se baisse lentement, le regard rivé vers le livre aux pages arrachées. Victime de sa colère, l’ouvrage a finit en miette. Il ne reste que la couverture reliée. Il se traite d’idiot. Il avait besoin de ce bouquin. Cet ouvrage a survécu à des purges religieuses et finit par se faire déchiqueter par un sorcier incapable de gérer ses émotions convenablement. C’est bien là toute l’histoire de sa vie. Il finit par s’asseoir au milieu des débris, contemplant son oeuvre avec une pointe de culpabilité. Cela ne le fera pas revenir et il le sait. Non seulement ça ne le fera pas revenir mais ça ne l’a même pas apaisé. Il revoit encore ces images atroces dans son esprit, s’entremêlant à ses propres souvenirs épars. Il a besoin d’y voir plus clair dans tout ça. Une vision nette et précise des évènements. Il a eu tort. Tenebris n’est pas la seule personne à pouvoir lui apporter des réponses pour ce souvenir. Il y a quelqu’un d’autre qui peut l’éclairer. Quelqu’un qu’il doit voir tout de suite.
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Il ne pensait avoir à revenir ici de si tôt et pourtant, le voilà. A nouveau dans ce paysage de désolation, déstructuré. La première fois qu’il était venu, il avait craint de finir ici, que cet endroit soit sa dernière demeure. Puis Hellhound était passé par là et lui avait fait changé d’avis. C’est peut-être mieux d’être ici que coincé entre deux états jusqu’à la fin des temps. Marc ne s’attarde pas sur le paysage et sur les âmes qu’il croise dans son périple. Il n’est pas là pour eux. Il est là pour Ruhan. Il tente de se remémorer le chemin emprunté lors de son premier voyage dans les parages. Mais comment faire quand il n’y a aucun point de repère ? Autant tourner en rond. Ou jouer au loto. La première fois, il était accompagné par la déité qui savait où elle allait. Cette fois, il est tout seul. Sur un coup de tête, il a décidé de changer de dimension - en prenant le soin de protéger ses traces parce que hors de question de se faire avoir une deuxième fois par l’autre connasse - et il regrette un peu. Et puis, une idée se forme dans sa tête, alors que son regard se perd sur l’horizon qui s’étend devant ses yeux, le décourageant presque de chercher. Il est peut-être venu seul mais… L’essence de Tenebris, qui lui a facilité le voyage, peut être l’aider à trouver Ruhan plus facilement. Il ne sait pas bien comment ça marche. Si ça agit comme un fil d’Arianne quelconque ou s’il doit juste se rapprocher jusqu’à sentir la présence qu’il cherche. Les souvenirs de Tenebris lui ont donné un aperçu de l’empreinte psychique de Ruhan. Peut-être qu’il pourrait… Oui. Cela met du temps à se produire, mais ça fonctionne. Il sait parfaitement où il va. Il n’a qu’à laisser faire et l’essence elle-même le conduira à Ruhan. Plus il s’approche, plus il sent une certaine pointe d’appréhension lui tordre les entrailles. Ou du moins, c’est l’impression qu’il en a, puisque sous cette forme, il n’a pas réellement d’entrailles. C’est presque comme des membres fantômes, à ce stade. Pourquoi est-il si nerveux à l’idée de lui parler seul à seul ? Ça ne lui arrive jamais d’habitude. Et pourtant, le voilà à se demander s’il ne ferait pas mieux de faire demi-tour. Mais il est trop tard, car il aperçoit au loin l’âme de Ruhan. Il n’a pas besoin de plus pour la reconnaître, la connexion lui permet d’établir que c’est lui. Il hésite toujours avant de finalement se décider d’avancer. Il ne sait pas comment il va expliquer sa présence ou même se présenter. Il ne sait pas quel accueil va lui faire Ruhan et surtout comment il va réussir à gérer les souvenirs de Tenebris directement planté à l’intérieur de sa tête. Peut-être aurait-il mieux d’attendre. C’est tout lui, ça. De se lancer sans réfléchir sur un autre plan, auquel il n’est normalement pas en mesure d’accéder. L’âme de Ruhan semble l’attendre, comme s’il savait que Marc allait venir. La scène semble surréaliste. Il est face à l’humain pour lequel Tenebris était prêt à tout sacrifier, y compris sa propre existence. Celui qui est mort dans ses bras. Celui qui… l’avait rendu heureux. Marc se sent indigne de rester en sa présence. Il n’a fait que rejeter la faute sur le dieu, lui en vouloir de l’avoir maintenu en vie sans chercher à comprendre les raisons l’ayant poussé à agir de la sorte. Il n’est pas Ruhan après tout, il ne mérite même pas que Tenebris sacrifie son essence pour lui. Alors, pourquoi ? C’est l’une des nombreuses questions qui revient le tourmenter encore et encore, alors qu’il se trouve face à Ruhan et qu’il est la proie de la première crise existentielle de toute son existence. Il a presque envie de jurer à voix haute pour extérioriser tout ça, mais ses mots restent coincés.
« Je savais que je finirais par te revoir. Mais pas sous cette forme.» dit simplement Ruhan. Sa voix est calme, presque apaisante et laisse Marc perplexe. Il ne sait même pas pour où commencer. Était-ce seulement une bonne idée de venir ? « Tu… m’attendais ? » De là où il se trouve, il a presque l’impression de le voir sourire. Un sourire bienveillant qui réveille en Marc les souvenirs qui ne sont pas les siens. « Eh bien… Ce n’est pas souvent que Tenebris collabore de lui-même avec les humains, tu sais ? Il y a eu quelques pactes mais… Cette situation que tu as avec lui est assez inédite. » Ah. Marc ignore si c’est une bonne chose ou une nouvelle. Et il préfère ne pas se poser la question, parce qu’il en a déjà plein en réserve et qu’il n’est pas venu ici pour ça. « Je ne suis pas venu pour parler de ma situation avec lui, mais plutôt… de la tienne.» Tout a l’air tellement irréel. Marc hésite une nouvelle fois et se lance. En face de lui, Ruhan attend patiemment, l’encourageant presque à se jeter à l’eau. Il prend une grande inspiration. Comment balancer le bazar ? Même lui, il n’y voit pas clair. « Tenebris m’a insufflé une part de son essence.» C’est déjà un début. Devant le silence de Ruhan, il se sent obligé de se justifier. « J’étais en train de mourir et j’étais piégé… Je… » Marc détourne le regard et finit par avouer. « Je ne voulais pas revenir. Pour me sauver, il m’a donné une part de lui et ça l’a rendu humain. » Ouais, il l’a enfin dit à haute voix. Il ne voulait pas revenir. Il décide de poursuivre, pour en venir directement aux faits après avoir expliqué la situation. « J’ai ses pouvoirs et… je sais pas si ça fait partie du processus mais j’ai également…ses souvenirs. Ses souvenirs de toi. » S’il n’était pas en train de parler à quelqu’un de déjà mort dans une autre dimension, Marc se serait fait interné de lui-même en entendant les propos qu’il est en train de tenir à Ruhan. « Je vois. Tu en as vu beaucoup ? » Marc secoue la tête par mécanisme et se souvient que sous cette forme, il n’a plus vraiment de tête. Il dit donc à haute voix « Non. J’ai juste vu le jour de ta mort. Je l’ai vu avec ses yeux et je sais qu’il était prêt à se sacrifier pour toi et que tu as refusé. » Il observe la forme de Ruhan qui se détourne de lui pour avancer dans la direction opposée. Marc craint de l’avoir vexé mais le fait que l’âme s’arrête et semble se tourner vers lui lui fait comprendre qu’il l’invite à le suivre. « Tenebris, tout dieu qu’il est, pense que ce qui arrive aux humains auxquels il s’attache est de sa faute. Il s’en est toujours voulu de ne pas avoir pu me sauver alors que c’était mon choix. » « J’ai cru remarquer…» commente Marc en reprenant sa mauvaise habitude de sarcasme. Il croit un instant entendre Ruhan rire avant de se dire que ça vient de son imagination. « Je suis curieux de voir comment il est, en humain.» « Insupportable. » C’est sorti tout seul. Il se reprend, d’une voix plus calme et moins amère. « Il est perdu. J’aimerais lui rendre son essence parce que c’est bien trop puissant pour moi, mais on a pas encore réussi. » « Dans l’état actuel des choses, ça va être difficile. Il devrait peut-être l’intervention d’une autre déité pour l’aider. Peut-être Ether. » « Ether ? » Ruhan marque un temps d’arrêt. « Ether est sa soeur, en quelques sortes. Elle est la déesse de la lumière. Elle pourra peut-être lui venir en aide avec ça. Il n’a pas pu passer parce qu’il est humain, c’est ça ? » Euh… Marc déglutit. Il a une soeur, l’autre ? Et elle est la déesse de la lumière ? Sérieusement ? Mais il doit d’abord répondre à la question de Ruhan. « Il ne sait pas que je suis là. Et il va certainement péter une durite s’il l’apprend. » Ruhan rit et cette fois Marc sait que ce n’est pas son imagination. Il est clairement en train de ricaner. « Il y a de grandes chances, oui. Surtout s’il sait que tu es venu ici tout seul, sans protection. Ce n’est pas bien raisonnable, vu ce qu’il s’est passé la dernière fois. » Oui, bon. Il sait qu’il aurait mieux fait de réfléchir. Pour une raison qu’il ignore, il n’arrive pas à envoyer paître Ruhan comme il le ferait avec n’importe qui. « Je pensais surtout au fait que je sois venu te parler. Je suis un peu en train de me mêler de sa vie privée… Mais bon, c’est pas le truc le plus dingue que j’ai fait ces derniers temps.» « Tu dois savoir une chose. Si Tenebris a partagé son essence avec toi, ce n’est pas anodin. » Marc hausse mentalement les épaules. « On est lié par un pacte.» Il a cette fois l’impression que Ruhan lève les yeux au ciel en l’écoutant. « Oh Marc… C’est confortable de se mentir à soi-même, pas vrai ? »
La réponse le prend de court et il ne sait même pas quoi répondre de son côté. C’est comme si on venait de lui retirer sa capacité à parler. Bah non. C’est le pacte. Enfin, du moins, c’est ainsi que… « Partager son essence n’est pas comme partager un verre. Tu l’as dit toi-même, il est redevenu humain après ça. Les dieux sont des êtres assez fiers. Leur égo est parfois tellement grand qu’ils ne passent pas les portes. Mais quand ils s’attachent à un humain, ils sont prêts à tout. » « Je ne crois pas que Tenebris se soit attaché à moi… Du moins pas davantage que le pacte.» La conversation prend une tournure à laquelle Marc ne s’attend pas du tout. Il en est presque mal à l’aise sur le coup. « Il t’apprécie autant que tu l’apprécie. » HEIN ? Quoi ? Non, c’est pas du tout ce que Ruhan pense ! « Non, on est seulement… On est seulement partenaires ! Le temps qu’on gère ce bordel et que… » Oh seigneur. Voilà qu’il se sent une nouvelle fois obligé de se justifier devant l’ex décédé de Tenebris. Putain. Il est en train de sourire, à tous les coups. Il le devine. « Non, enfin, c’est pas poss…Tu l’as vu, franchement ? » Ruhan ne répond pas, semblant s’amuser de la situation. Pour ne pas s’enfoncer, Marc préfére garder le silence une bonne fois pour toute sur le sujet. Il change donc d’objet de conversation. « Comment je lui rends son essence, exactement ? » « Ether. Demandez-lui. Tenebris devrait réussir à lui parler.» «… Il y a un léger problème.» Marc ne sait pas s’il doit lui dire clairement que la déité s’est enfuie ou arrondir les angles. Fort heureusement, il n’en a pas besoin, car Ruhan devine. « Il s’est enfui, c’est ça ? » Visiblement, l'ancien shaman est habitué à cette situation « Ouais... Et je ne sais pas où il est... » « Je vois. Il reviendra. S’il ne le fait pas, tu devrais pouvoir te servir de l’essence pour le trouver comme tu as pu me trouver.» « D’accord.» « Oh…et Marc ?» « Oui ?» « Tu es ici depuis trop longtemps. » Hein ? « Ça fait à peine cinq minutes…» « Le temps s’écoule différemment. Dans le monde réel, ça fait déjà quelques heures. Et tu n’es pas censé être ici. Ton enveloppe physique va finir par manquer d’eau et de nourriture. Tu devrais rentrer si tu ne veux pas finir coincé. Ce n’est pas encore ton heure. »
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Les rayons du soleil caressant le plancher indique qu’on est en plein milieu de l’après-midi. Ruhan avait raison. Il faisait nuit quand il est « parti ». Il s’empresse de regarder son portable pour s’assurer de la date. Il est parti durant quelques heures, même si l’échange n’a duré que quelques minutes. Il se redresse vivement, ignorant le vertige qui l’oblige à se rattraper au meuble. L’objectif est clair. Attendre le retour de Tenebris avant de partir à sa recherche s’il tarde trop. En vérité, il a envie d’y aller tout de suite parce que Tenebris est humain et donc une cible potentielle. Mais une part de lui souffle de lui laisser un peu d’espace. Il attendra quarante-huit heures. Pas une de plus. A partir de là, il fera comme Ruhan lui a dit. Il se servira du lien pour le retrouver. Une fois qu’il l’aura retrouvé, ils devront trouver Ether. Si elle réussit à faire en sorte que Tenebris retrouve son essence, les choses rentreront dans l’ordre. Ils pourront trouver le meilleur moyen d’affronter cette garce à capuche et lui renvoyer l’addition en pleine face. Les choses semblent limpides comme jamais et Marc se focalise dessus pour ne pas avoir à repenser aux sous-entendus fait par Ruhan. Et à penser à la réaction de Tenebris quand il apprendra que Marc est allé lui rendre visite. La seule chose qu’il peut faire pour l’instant, puisqu’il a décidé de donner deux jours à Tenebris avant de partir à sa recherche, c’est de dormir. Il a mobilisé énormément d’énergie pour démolir l’appartement et pour partir dans une autre dimension. Son corps a besoin de repos. Et la tâche qui l’attend va lui demander encore plus d’énergie. Il ferait donc mieux de faire le plein pour se tenir prêt. Il sécurise rapidement les lieux d’un simple geste de la main, répétant mentalement le sort de protection le plus puissant qu’il a appris au cours de son existence.
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
Des murmures étouffés qui s'estompaient à mesure que j'avançais. Des éclats de voix mourant sur les langues qui se déliaient. Des secrets échangés, dans un silence sacré, entre ces passants qui me frôlaient. Ces ombres qui m'effleuraient, et me percutaient, sans me voir, sans me percevoir. Leurs contours éraflant mes bordures, faisant crépiter l'épiderme à vif qui me contenait. Je les esquivais, pourtant, en m'insinuant entre eux. Fendant la foule, la bravant à contre-courant. Une silhouette de plus, parmi tant d'autres. Une forme que je n'avais jamais possédée, et qui me représentait tout de même. Mais ici, personne ne me connaissait. C'en était mieux ainsi. Baisser la tête, faire profil bas, et continuer d'avancer. Quoiqu'il puisse arriver. Continuer à parcourir ces pavés, ces chemins qui se profilaient à l'horizon. Avancer sans m'arrêter, vers cette destination inconnue, que je cherchais pourtant désespérément. Mes iris accrochant les visages creusés et marqués par la fatigue, de ces individus au bord d'une agonie certaine. Je pinçais les lèvres, détournais la tête. Préférant évincer ces images qui s'ancraient en mon esprit. Et s'imprimaient à l'arrière de mes paupières fermées. Un soupir franchissait la barrière qui le gardait emprisonné, lorsqu'enfin, je m'arrêtais de marcher. Stoppé à même mon élan, figé dans l'espace et le temps. Rouvrant les paupières, mes pupilles fades et vidées se perdant sur le bitume qui recouvrait la rue que j'empruntais. Des points plus foncés, parsemant la texture abrupte du sol, alors que je percevais des petites gouttelettes s'écouler. De la pluie, tombant au même rythme que les larmes qui m'avaient échappées auparavant. Des perles martelant la peau de mes mains, picotant doucement mes phalanges. Contact précaire mais salvateur, presque réconfortant. Un toucher que je n'avais plus espéré depuis que j'étais parti. Que je n'avais jamais espéré pouvoir ressentir à nouveau en réalité. Encore une sensation que je découvrais, comme si c'était la première fois. Alors que ce n'était pas le cas.
Relevant la tête, je tournais mon visage vers ce firmament coloré par un gris pastel. Des zones plus foncées ornaient le ciel, au lointain, présageant une tempête que je n'allais pouvoir éviter. Une nouvelle confrontation, qui allait me laisser des séquelles. Je fermais les yeux, mes muscles se décontractant sensiblement alors que la pluie glissait sur mes joues. Se mêlant à ses perles salées qui striaient encore la peau de mon visage aux traits étirés. Je restais ainsi quelques instants encore, la mâchoire crispée, avant de finalement abaisser la tête. Scrutant devant moi, mes iris se perdant dans le néant alors que je reprenais ma route. Avançant sans me retourner, sans faire attention à où j'allais réellement. M'en allant en me laissant aller, tout simplement. Me laissant guider par mes instincts devenus trop humains. Comme le reste. Comme moi. Et je n'avais plus la force de me battre contre ça. Plus la foi de me plonger corps et âme dans un débat sans fin. Plus l'envie de continuer, si c'était pour le voir dérailler ainsi. Il avait récupéré cette partie de moi, que j'avais délibérément sacrifiée pour le faire revenir. Mais maintenant qu'il était à nouveau là, je me retrouvais désespérément seul. Seul contre lui. Seul contre les ténèbres. Ces merveilles qui ne m'appartenaient plus. Comme si je n'existais plus. Et c'était peut-être vrai, dans le fond. Je n'avais plus mon essence, plus aucun fuel. Plus aucune once de ce qui m'avait un jour constitué. J'étais tel un dieu destitué. C'était certainement le cas, en réalité. Je n'étais devenu qu'un simple mortel, qui avait tout perdu. Jusqu'à son identité même.
—
Ether ? J'étendais mon esprit le plus loin que je le pouvais, malgré mon énergie bien épuisée. Assis par terre, dans un endroit quelque peu reculé. Ou du moins, qui avait l'air abandonné, et assez bien caché du reste de la population. Un endroit qui me servait de repère, de sanctuaire, pour ce que j'étais en train de faire. Dis moi que t'es là... Je touchais l'indicible, du bout de mes contours mentaux. Ne pouvant me matérialiser dans le plan spectral, j'essayais tout de même d'effleurer les esprits perdus alentours. En percevant quelques contours sans vraiment pouvoir les discerner. Mais aucun ne répondait à mon appel. Aucun n'était elle. Et j'avais désespérément besoin d'elle en cet instant. Je soupirais doucement, me concentrant à nouveau. Ressentant les crépitements des inscriptions que j'avais esquissées sur le parquet bien ruiné par les années. L'énergie coulant en mes veines gonflées sans que je ne puisse la maîtriser. J'ai besoin de toi. Une plainte, une supplique, qui m'échappait lentement. Echo d'une agonie qui ne m'avait pas loupé, et dont je me rappelais à tout instant. Souvenir brumeux en mon esprit étriqué, dont je ne pouvais me séparer, que je ne pouvais évincer. Même en chassant ces pensées qui étaient miennes, pour mieux me focaliser sur celles d'Ether. J'avais cette impression de la ressentir, là, toute proche de moi. Aussi loin fût-elle pourtant. Mais elle ne daignait aucunement se montrer. Du moins, pas à moi, sous cette forme humaine. Et encore moins dans ce plan physique, que je ne pouvais plus quitter avant quelques temps. S'il te plaît... Une demande, une requête, à peine silencée. Un espoir désolé teintant mes pensées, un éclat dans la voix imagée. Des secondes écoulées, dans ce silence oppressant et pesant, qui jamais ne semblait s'arrêter. Malgré le bruit de la pluie qui continuait de marteler les vitres de la planque improvisée. Et, alors que je perdais tout espoir, et envisageais d'abandonner, elle répondit à mon appel. S'insufflant elle-même dans le plan des mortels, visible à quiconque souhaitait pouvoir la contempler. Sous sa vraie forme, comme celle empruntée.
Tenebris... Je la regardais, s'imposer dans cet espace bien trop petit pour nos formes originelles combinées. Alors qu'elle semblait s'avancer vers ma silhouette prostrée, aux contours si contrastés. Ether... Je... Ma voix tremblait tandis que mon souffle mourait à même ma gorge serrée. Empoigné par une sensation qui se répandait en mon être, griffant mes entrailles de lames glaciales. Poumons contractés sous la pression de ce poids qui m'assaillait, je ne parvenais plus à m'exprimer. Je suis soulagé de te voir. Et désolé de te déranger. Elle avait l'air de froncer les sourcils, subrepticement. Qu'est-ce que tu me veux ? Son esprit me scrutait, insidieusement, alors qu'elle penchait la tête sur le côté, s'imprégnant à nouveau en mon crâne. Pourquoi te terres-tu dans ce taudis, au lieu de rejoindre le plan des esprits ? Je fermais les yeux à cette accusation, sa prise spirituelle m'écrasant sans que je ne puisse m'en défaire. Langue lourde contre le palais, je la passais sur mes lèvres en un réflexe précipité, rouvrant les paupières, sans la regarder. Me perdant dans la contemplation de l'abîme qui rôdait alentour. Je ne peux pas, Ether. Je percevais, avant même d'entendre sa voix résonner, sa fureur si particulière. Comment ? Qu'est-ce que tu as fait ? Le ton employé ne laissait aucune place au doute. Elle était dépitée, contre mes actions désespérées. En colère, contre mon sacrifice, qu'elle pouvait sonder en effleurant mon esprit. Je n'avais même pas besoin de lui expliquer, alors que je la sentais dans ma tête. Scruter mes souvenirs, contempler l'instant fatidique. Sa présence ne laissant qu'un écho statique se répercuter en mon esprit, comme devenu silencieux et apathique. TU AS FAIT QUOI ? Serrant les poings, mâchoire crispée, je fermais à nouveau les yeux brusquement. La chassant de mes pensées, n'osant plus la confronter. Bon sang ! T'es complètement fou, Tenebris ! Un écho s'intensifia près de moi, comme si elle venait de claquer la langue contre son palais. Tu as sacrifié ton essence pour... pour sauver un simple humain ?
Je tentais de contrer le coup, en évitant de repenser au sorcier. Sans réel succès, mais renchérissais tout de même. Je sais que j'ai merdé, Ether. Elle ricanait nerveusement, son rire résonnant dans mon esprit, se répercutant contre les parois de mon crâne. C'est peu de le dire, espèce d'abruti fini ! Je soupirais, rouvrant les yeux pour les lever au ciel. C'est bon, t'as terminé tes railleries ? J'ai besoin de toi j'te signale ! Je grognais par après, plissant les paupières en regardant dans sa direction. Discernant ses contours si familiers se fondre dans le décor pourtant bien contrastant avec elle. Et pourquoi je t'aiderai, Tenebris ? Tu t'es foutu là-dedans tout seul, tu peux bien en ressortir par toi-même. Sans réfléchir, je me relevais prestemment, faisant fi du vertige qui m'étreignait. Rageant brusquement, ma voix s'élevant enfin dans cet endroit que j'aurais voulu garder secret. JE N'AI PLUS RIEN, ETHER ! Mes phalanges blanchissaient sous la pression exercée, mes ongles raclant les paumes échauffées. Peau rougie, écorchée, par cette douleur infligée. JE NE SUIS PLUS RIEN ! Je m'élençais en sa direction, l'effleurant sans la toucher, la provoquant comme elle me provoquait. TU COMPRENDS CA ? Putain ! Je soufflais bruyamment, ma respiration hachurée résonnant en un écho imperturbable à mes tympans. Je me calmais sensiblement, reprenant légèrement un semblant de contenance. J'ai sacrifié cette partie de moi pour le faire revenir parce que je ne pouvais pas me permettre de le perdre. Tu connais très bien cette douleur, Ether. Tu sais ce que ça fait. Tu sais ce qu'il nous reste, quand on a tout perdu... Le souffle court, je restais silencieux un instant, laissant les mots s'imprégner dans la réalité des faits. J'ai perdu mes ténèbres, j'ai perdu mon identité. J'ai perdu plus que je ne le pensais. Et sans elles, sans mes ténèbres, je ne suis rien de plus qu'un autre mortel. Un humain qui s'est perdu en chemin. Pinçant les lèvres, je déliais lentement mes poings. Ma voix faiblissement à mesure que je retrouvais mes repères. Et j'ai aucun moyen de les retrouver. Aucune chance de m'en sortir. Sans ton aide. Elle me scrutait, silencieusement. Aucune expression ne trahissait son visage que je pouvais reconnaître entre mille. Même sous une autre forme, même dans un autre corps. C'était ma sœur. Et sa signature restera toujours la même. Similaire à la mienne. J'ai... J'ai besoin de toi, Ether...S'il te plaît... Son esprit s'ébranlait, alors que je sentais alentour, cette électricité crépiter. La lumière présente dans la pièce commençait à fluctuer, alors qu'enfin, elle reprenait la parole. Et sa voix résonna à nouveau. Son ton, sans appel. Compte pas sur moi pour te tirer de là. Débrouille-toi tout seul, comme tu l'as toujours fait. Et avec ces derniers mots flottant dans les airs, elle disparu. D'un seul coup. En une fraction de seconde, la lueur s'était estompée. Sa présence, plus qu'un simple fantôme au toucher. Et avec elle, s'était brisé mes espoirs. En une myriade de fragments, éparpillés au sol, tels des tessons de porcelaine.
—
La nuit était depuis bien longtemps tombée dans la contrée. Ciel assombri, aux tons bleutés, teintés de ce noir particulier. Diamants parsemant le firmament, décorant de points blancs la voûte céleste aux étendues infinies. L'astre laiteux éclairait le paysage plongé dans l'obscurité, illuminant ci et là quelques bâtisses et bâtiments. Le halo incandescent attirant mon regard instantanément, tandis que je soupirais doucement. Resserrant dans ma poigne, la lanière de ce sac que j'avais balancé sur mon dos. Son poids réconfortant me maintenant à la réalité, pour ne pas sombrer dans la déprime qui planait. Sans l'aide d'Ether, je n'avais plus vraiment moyen de récupérer mon essence. Du moins, pas sans inverser le processus, en changeant les rôles. Et la perspective de demander à Marc de me retransmettre ce qui me revenait, ne m’enchantait aucunement. D'autant plus qu'il serait incapacité quelques temps, jusqu'à ce qu'il puisse récupérer entièrement. Et avec l'ombre de Hellhound qui rôdait toujours alentour, prête à nous éliminer, c'était alors impossible de réaliser un tel sacrifice à nouveau. Mais il devait bien exister une autre manière de procéder. Sauf qu'en restant éloigné du sorcier pendant trop longtemps, je n'allais pas pouvoir trouver de solution. Autant pour lui que pour moi. Cette escapade m'avait permis de souffler, de respirer. De ne plus être constamment sous la pression et l'appréhension. Mais plus je restais loin de lui, plus je m'inquiétais. Pour une raison qui pourtant encore, m'échappait.
Déambulant dans les rues de la ville, j'avais trouvé un itinéraire jusqu'à l'appartement, et m'y tenais prestement. Avançant à une allure vive et prononcée, jusqu'à cet endroit que je pouvais presque appeler un foyer. Un chez moi, que j'avais partagé avec lui. Un chez nous. Et quelque part, d'être resté dans la planque pendant quelques jours m'avait fait percuter. Me rendre compte que l'appartement me manquait. Que cet endroit là-bas, ce sanctuaire qui m'attendait, je m'y étais senti en sécurité. Que je m'y sentais comme chez moi. Parce que ça l'était. C'était chez moi. Le seul endroit sur cette planète où je pouvais me poser, et me reposer. Ou je pouvais abaisser ma garde et profiter de ce que la vie pouvait offrir à ces êtres fragiles à la vie fugace. J'étais devenu humain, mortel, et j'avais pu découvrir toutes ces spécialités, sous un nouveau jour. J'avais trouvé un semblant de place, malgré la perte de mon identité. Parmi tous ces instants de ma vie, je ne m'étais senti chez moi qu'à deux endroits. Avant, là où était Ruhan. Et maintenant, dans cet appartement. Et la sensation était telle, qu'elle persistait, en crépitant contre ma peau. Vrillant mes entrailles d'une émotion qui m'avait déjà empoigné par le passé. Vive, et insistante. Pressante. Un sentiment qui m'effrayait. Alors je secouais la tête, soupirant doucement. Reprenant contenance, me rattachant à la réalité, pour continuer d'avancer. Empruntant ce chemin que j'avais mémorisé, alors que j'avais l'air de déambuler, sans savoir où aller. Ironie, qui m'avait ralentie. Je pensais être tranquille, à l'abri des regards indiscrets. Mais je n'avais perçu que trop tard, cette ombre s'insinuer. S'approcher de trop près. Jusqu'à ce qu'elle ne soit plus qu'à quelques centimètres. Une ruelle sombre, une heure tardive. Un silhouette aux contours flous et indiscernables. Une main élevée, une arme fermement tenue dans son poing. Le nom effleurait le bout de mes lèvres tandis que je réalisais la fatalité de l'instant. Un moment qui se perdait dans le temps, où l'écho résonnait alentour, crissant contre mes tympans. Et que le coup partait, une flamme s'épanchant au bout du canon de ce revolver. La balle, incrustée de symboles, percutant la chair. La mienne. Creusant un sillon sous la peau, juste sous les côtes, m'arrachant un grognement. Genoux qui claquaient au sol, en un bruit mat. La douille qui ne sortait pas, mais déversait son poison en mes entrailles. Venin s'écoulant en mes veines alors que ma vision se brouillait. La voix de l'assaillant, me prenant de haut. Négligeant. Un de moins. Je tremblais, apposais ma main sur la plaie ouverte. Le liquide carmin s'épanchait sans se tarir. Alors que la douleur me parcourait, la souffrance me transcendait. Plus que l'autre. J'écarquillais les yeux, comprenant ce qu'il voulait dire. Oh non... L'homme s'éloignait déjà, alors que je m'effondrais encore plus, réprimant les plaintes qui m'échappaient presque. Un vertige m'étreignit, mes oreilles bourdonnant à n'en plus finir. Le sang continuait de s'écouler, malgré la pression exercée. Et là, alors que j'étais en train de crever, il n'y avait qu'une seule chose à laquelle je pensais. Marc était en danger.
Instinctivement, dans un souffle fugace et hachuré, j'entrepris de rassembler les forces qui me restaient. Les concentrant en un point précis, malgré la douleur qui me transcendait. Les runes incarnées sur la carcasse de la balle, faisant pulser leur magie pour me retenir, pour me contenir. Je grognais, rageant contre cette situation et cette innovation. Avant de finalement tenter de me relever. Non sans peine, et avec difficulté, je m'aidais du mur de la ruelle pour me redresser. Appuyant de tout mon poids pour ne pas sombrer. C'était douloureux, et difficile. Compliqué avec cette douille logée qui perforait encore les tissus composant ma forme physique empruntée. Mais je n'avais pas le choix. Un hurlement déchirant s'échappait d'entre mes lèvres, avant que je ne les pinçais brusquement. Serrant brutalement le poing, en plaquant abruptement ma paume maculée sur la plaie. Me concentrant, usant de mes ultimes forces, de mon reste d'énergie bien trop épuisée. Encore un sacrifice, qui allait me coûter cher. Mais si je ne m'en sortais pas, lui au moins avait encore une chance. Si tant était que je pouvais l'atteindre, avant celui qui venait de me tirer dessus. Alors, en un ultime effort, je fermais les yeux, et visualisais le visage de Marc. Ses traits s'imprimant à l'arrière de mes paupières, tandis que je serrais les dents. Muscles crispés, corps tendu, j'attendais la salvation de l'instant. En une fraction de seconde, les sensations s'estompaient, disparaissant subitement, alors que je retournais au plan spectral, sous ma forme originelle, aux contours estompés. Les fragments de mon être se dissipaient instantanément, m'amenant à cet endroit qui m'avait marqué. Qui gardait encore des traces de ma signature éthérée. Mais je fus brusquement projeté, à peine matérialisé dans le plan physique, et de retour à ma forme plus corporelle. M'écrasant contre la porte, sans pouvoir rentrer. Crashé à même la texture qui me narguait. La surface maintenant mon poids malgré mes tremblements erratiques, alors que je sentais mon corps s'échouer. Incapable de m'exprimer, d'émettre des pensées cohérentes, tandis que je m'évidais de ce liquide vital. Ce souffle important, qui me quittait pourtant, à mesure que je sentais mes paupières se fermer. Mon esprit engourdi se faisant plus lourd, jusqu'à finir par m'emporter dans les limbes. J'entendis un écho, comme étouffé, et une voix s'élever, un ton précipité, avant de sombrer. Un contact éphémère mais pourtant ardent contre mes contours fébriles, avant que le seul autre toucher perçu ultimement, ne devienne celui glacial du néant.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Les derniers débris sont ramassés et Marc grimace en se redressant. La douleur est présente dans chaque parcelle de son être. Même à l’emplacement de son coeur, là où il a reçu le coup fatal d’Hellhound. Alors qu’il n’est plus censé le sentir depuis un moment. Si jamais il recroise la route de ce Russel, juré, il lui casse la figure. Il n’avait pas besoin de ça. Pas avec tout ce qu’il doit gérer. Il grogne car il a du mal à garder les yeux ouverts. Tout ça, ça l’a épuisé. Après sa crise de nerf sur le mobilier de l’appartement, son escapade dans le royaume grisâtre et sa rencontre avec un congénère qui aurait mieux fait de se mêler de ses affaires, il n’a pas vraiment eu le temps de se reposer. A peine quelques heures qu’il a réussi à gratter à droite et à gauche. Ce rythme est intenable avec l’essence qui l’épuise qu’elle ne le devrait. Il passe une main lasse dans ses mèches blondes en fermant les yeux. Au moins, il a réparé les dégâts qu’il a causé. Il ne marchera plus sur un bout de verre et pourra rallumer la lumière normalement. En revanche, le livre qu’il a déchiré, il ne sait pas comment lui redonner son état d’origine sans que ça se voie. Son propriétaire va lui en vouloir à mort d’avoir amoché ce précieux ouvrage. Il s’adosse au plan de travail et contemple l’appartement. Il est beaucoup trop vide. Il se retrouve seul pour la première fois depuis longtemps. Et pour la première fois depuis longtemps, également, il ne ressent pas la solitude comme un bienfait. D’ordinaire, le moment où il est seul est le meilleur. Il n’a ainsi de compte à rendre à personne. Il fait ce qu’il veut, quand il veut. Mais cette fois-ci, cette solitude est indépendante de sa volonté. Lui qui pourtant jurait sur tous les saints de sa connaissance qu’il donnerait un bras pour ne pas avoir à supporter Tenebris… En soupirant, il se mord la lèvre. Ruhan a dit qu’il revient toujours. Qu’il faut lui laisser le temps. Mais justement, cela fait déjà plusieurs jours et il n’a aucune nouvelle. Tenebris, humain, dans la nature et on ne sait où. Sans ses pouvoirs et donc possiblement sans moyen de défense.
Arrête, Bowman. Il secoue la tête et se décolle du plan de travail. Puisqu’il n’a plus que ça à faire, il ferait mieux de dormir. Il est dans un tel état de fatigue qu’il peine à marcher droit et pourtant, il s’accorde encore le luxe de s’inquiéter pour l’autre idiot. Il se dirige jusqu’au sofa sur lequel il se laisse tomber. Il recouvre ses yeux de son poignet et inspire longuement, une main sur le torse. Il craint pourtant de fermer les yeux. De revoir encore une fois la mort de Ruhan et de la ressentir comme si c’était lui qui l’avait vécu. Ou bien de revoir les souvenirs que l’intervention de Russel a fait remonter. Ou encore le sourire d’Hellhound au moment où elle lui plonge cette fichue lame dans la poitrine. Il craint de fermer les yeux pour ces raisons et pour d’autres encore. Ces visages qui se succèdent, ces voix qui reviennent, réminiscence d’un passé qu’il tente d’oublier, d’enterrer. Il doit se rendre à l’évidence. Il est usé. Combien d’épreuves un être humain peut supporter avant de flancher ? Il préfère ne pas y penser. Il préfère attendre que l’épuisement le force à fermer les yeux, pour que l’angoisse sourde qui lui ronge les entrailles se taise. Qu’il se repose pour de vrai. Il n’a pas à attendre longtemps pour que le sommeil pèse sur lui de tout son poids. Le paysage familier du salon se brouille, laissant la place aux souvenirs éthérés qu’il fuit. Des flashs, des voix, de la douleur. Du sang, de la terreur. La sienne. Celles des autres. Des grognements s’échappent de sa gorge alors qu’il lutte dans son sommeil contre un ennemi invisible. Un combat qu’il gagne uniquement parce qu’un bruit sourd le fait se redresser en sursaut.
Il cille, reprenant pied avec la réalité. Les contours de la pièce se dessinent et il se sent un instant rassuré d’être dans un endroit familier avant qu’il ne perçoive quelque chose dans l’air. Quelque chose qui ne tourne pas rond et qui le dérange. Son coeur tambourine contre sa cage thoracique, sa respiration se soulève alors qu’il tente de se calmer en chassant le reste de ces cauchemars trop saisissants pour lui. Il se souvient qu’un bruit sourd contre la porte l’a tiré du sommeil. Il reste figé, se demandant bien ce que c’est. Si quelqu’un a frappé et pour quelle raison. Un coup d’oeil en direction de la cuisine l’informe de l’heure tardive. Sa méfiance augmente d’un cran. Ce n’est pas bon. Pas bon du tout. Son être bouillonne. L’essence en lui se manifeste car elle sent qu’il y a quelque chose d’anormal. Se redressant sur ses deux jambes, Marc marche d’un pas lent vers la porte, poing serré. Des fragments de ténèbres filent vers sa paume pour former une lame, sans même qu’il n’y pense. Il se souvient que la première fois qu’il a vu Tenebris faire ça, il l’avait envié. Maintenant, ironiquement, il peut le faire. Même s’il aurait préféré ne pas avoir à traversé tant d’épreuves pour en arriver là. Cette fichu porte n’a pas de judas, aussi Marc ne peut pas voir qui se trouve de l’autre côté du battant. Il va devoir ouvrir. Il hésite, pèse le pour et le contre. L’essence s’agite en lui. Au point que ça en est presque douloureux. Il se tient prêt. Une main se referme sur la poignée de la porte, l’autre enserre la lame faite de ténèbres. Il ouvre la porte d’un geste vif. La masse qui lui tombe dessus le prend par surprise. Par réflexe, il rattrape le corps qui s’écroule sur lui, les yeux écarquillés. La lame disparaît comme par enchantement, ses fragments se dispersant comme s’ils n’avaient jamais été assemblés. De ses deux mains, il enserre la silhouette familière qui flanche, en jurant d’une voix étouffée à la vue du visage humain de Tenebris. « Mais qu’est-ce que…» Il ne s’attendait pas à ça. Il sent quelque chose de chaud et d’humide contre sa peau. Un regard vers l’une de ses mains. La paume est recouverte de sang.
Il est blessé. Presque inconscient et blessé. Marc recule en traînant le corps, parvenant au prix d’un effort incommensurable à passer le bras de la déité par-dessus son épaule pour garder au moins une main de libre. Il tend cette dernière devant lui sans réfléchir. La porte se ferme seule, alimentée par la magie. Il marmonne rapidement un sort de protection qui s’ajoute à ceux qu’il a déjà mis en place. Si Tenebris est parvenu jusqu’ici dans cet état, c’est qu’on l’a attaqué en chemin, il en est certain. Il maintient sa colère en veilleuse le temps de se traîner avec Tenebris jusqu’au sofa sur lequel il dormait un peu plus tôt. Avec difficulté, il arrive plus à le laisser tomber qu’à le déposer dessus. L’urgence de la situation l’oblige à ne pas s’embarrasser de la délicatesse lorsqu’il observe la plaie. Il reconnaît sans mal l’orifice laissé par une balle. La fureur menace de le submerger alors qu’il inspire, déposant ses deux mains sur la plaie pour faire pression et empêcher l’hémorragie. Ce n’est pas le moment. Pas le moment de s’énerver. Pas le moment de panique, même si c’est très tentant. Il tourne la tête en direction de la cuisine, à la recherche d’une idée merveilleuse pour les tirer de ce mauvais pas. Un éclat accroche son regard. Tout s’imbrique. La suite des évènements se tisse comme une toile d’araignée dans son esprit. Mentalement, sans bouger, il ordonne aux ténèbres de lui ramener l’objet qu’il convoite, de façon à ce qu’il n’ait pas à décoller ses mains de la plaie de Tenebris. Puis une fois que la lame dont il a besoin est à portée, il s’écarte, retire sa chemise pour la poser là où le sang se déverse; le temps qu’il fasse ce qu’il a à faire. Chaque seconde est précieuse. Et il en a perdu assez en se demandant ce qu’il se passait. Par chance, il garde toujours un briquet dans sa poche. Il l’extrait, l’allume et passe la lame dans la flamme pour la désinfecter. Ça ne remplacera pas des vrais soins. Mais ça fera l’affaire. Non sans appréhension, car il ne l’a jamais fait sur personne d’autre que lui, il s’approche de la silhouette de Tenebris en inspirant doucement pour garder son calme. Il fait le vide dans son esprit, avant de d’éteindre la flamme et de déposer négligemment le briquet à côté. Il retire la chemise imbibée de sang de la plaie et grogne pour lui-même. « Si t’as le culot de me claquer dans les pattes alors que j’en ai pas fini avec toi, je te traque jusqu’en enfer, connard. » Sans plus attendre, il appose la lame chauffée à blanc sur la plaie.
Il grimace en attendant le sifflement que provoque la chaleur sur la peau. Les grognements de douleur de Tenebris lui parviennent. La souffrance qu’une telle action provoque l’a tiré de l’alternance conscience-inconscience. D’un geste sec, il maintient Tenebris. « Ouais, ça fait mal, je sais ! Mais arrête de bouger ! » Au bout de quelques minutes, il écarte la lame. Il laisse échapper un soupir en voyant la plaie cautériser. Le saignement s’est arrêté. Son regard se porte sur le visage pâle de Tenebris dont les traits reflètent la douleur qu’il ressent. « Putain de merde. » finit par lâcher Marc après quelques secondes de flottement. Les questions se bousculent dans son crâne. Qui ? Quand ? Où ? S’il retrouve celui qui lui a fait ça, il lui fera souffrir mille morts. Sa rage redouble et il peine à la contenir. Il se laisse tomber à genoux à côté du canapé, en soupirant. Son regard accroche le sang qu’il a sur les mains. Ça commence vraiment à devenir redondant, cette histoire de sang. Il a en a plus vu en quelques mois que dans toute une vie. « Tu me dois une chemise. » Il n’obtient pas de réponse. Il se rassure en voyant que Tenebris a simplement basculer dans l’inconscience pour de bon. Son pouls est régulier, sa respiration aussi. Il est hors de danger pour l’instant, même s’il faudra s’occuper d’extraire cette balle un peu plus tard. Toujours à genoux, Marc se déplace légèrement pour que son dos touche le sofa, ramenant ses jambes contre lui. Il reste à côté de lui, veillant à ce tout se passe bien. Il demeure en alerte, néanmoins. Prêt à recevoir celui ou celle qui a tiré sur Tenebris. Surveillant sa respiration et son pouls. Il lui demandera qui a fait ça quand il ira mieux. Au bout d’une heure de veille, les yeux de Marc se ferment d’eux-même. Et pour son plus grand plaisir, il bascule dans un sommeil sans rêve.
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
Un songe, qui s'estompait. Des embrumes, qui s'effilochaient. Les images, d'un instant passé, refaisant surface en mon esprit. S'écrasant contre les parois de mon crâne, enserrant mon âme. Toutes ces couleurs se mélangeant en une myriade d'éclats brillants. Picotant l'arrière de mes paupières fermées. Closes, alors que je sombrais toujours dans les limbes qui m'attendaient. Une fugace pensée, m'arrachant de la torpeur me tourmentant incessamment. Des échos étouffés, que je peinais à discerner. Dans ce silence ambiant qui résonnait alentour, m'encerclant dans la prison éthérée composant mon être. Me rattachant pourtant à celle de chair, bien plus réelle. Tangible malgré la précarité de l'équilibre. Vibrant d'un côté, immuable de l'autre. L'inconscience me maintenant en cette immobilité, perdu en pleine inanité. Vide espacé et creusé, me rappelant ma proximité avec cette essence que j'avais abandonnée. L'obscurité, me rapprochant de ce qui m'avait toujours composé. Pénombre s'épanchant en ce lieu familier et pourtant étranger. Malgré ces quelques éclats fragmentés faisant défiler ces instants passés, qui m'avaient marqué, rien d'autre ne s'y trouvait. Un moment, plongé en plein dans l'illusion, avant d'en être extirpé. La conscience reprenant le dessus sur mon état, me ramenant peu subtilement à la réalité. Ma prise n'arrivant pas à se raffermir sur cette toile qui s'effilochait entre mes paupières qui papillonnaient. Iris voilés, regard terni par la douleur infligée, tandis que j'essayais de me retrouver. Ici, et là. Là, et ici. Partout, et nulle part à la fois. Les contours que je percevais, me rappelant vaguement des objets familiers. Un plafond que j'avais longuement contemplé, le mobilier contre lequel je m'étais souvent cogné en pleine nuit durant les insomnies. Un éclat d'une couleur particulière, s'ancrant à mon champ de vision restreint subitement. Un blond que je reconnaissais depuis maintenant un bon moment. Une présence qui m'avait été bénéfique et particulière. Une personne que j'avais blessée, et abandonnée. Et ça, je ne pourrai jamais l'oublier. Et encore moins me le pardonner.
Cette lueur, cette couleur que j'appréciais, s'était mise à s'estomper, alors que la noirceur envahissait à nouveau mon esprit. Pénombre si familière, me berçant insidieusement, au creux de ce néant. Absence de chaleur, absence de lumière. Absence d'un tout pourtant si précaire. Perte de mes repères, tandis que j'avais cette impression de somnoler. D'osciller entre ces deux états, qui tout deux, m'appelaient. Intrinsèquement liés, l'un se répercutant dans l'autre. L'autre tirant sa vivacité de l'un. Des voix caressant les contours éthérés de mon esprit, les faisant frémir alors que dans la réalité, je tremblais. Aucun sens ne me parvenait, si ce n'était celui de ma propre conscience. Instance qui s'épanchait alentour, brisant ces images, fracturant ces souvenirs, les libérant en une myriade de fragments. Éparpillés, semés au gré d'un vent imaginaire. Éloigné de mon être, mais proche de mes démons. Ces ombres insidieuses qui m'effleuraient. Me frôlaient sans s'arrêter, au point de m'étouffer. Certains tessons revenaient en ma direction, s'apposant en mon esprit étriqué. M'imprégnant de ces moments passés, les laissant déverser ces flux de sensations m'ayant parcourues à ces instants. Telles les vagues d'une mer déchaînée, en pleine tempête, au cœur de la tourmente. Torpeur qui jamais ne me lâchait, mais continuait de s'écraser sur mes contours. La bordure de mon être n'en tremblant que plus encore, à mesure que me rongeaient les remords. Amertume, son goût particulier embaumant sous mon palais, glissant sur ma langue alors que la souffrance revenait. La douleur du corps reprenant, m'empoignant à m'en faire saigner. Mais moins oppressante que celle instaurée, par mon propre fait. Moins lourde que ce poids que je portais au creux de mon âme. Ces regrets dont je ne pouvais plus me passer. Que je ne parviendrai jamais à évincer. Le temps n'avait aucunement réussi à les estomper au fil des siècles. Au fil des années, à la temporalité presque oubliée. La même rengaine, la même peine, au bord des lèvres, au fond du cœur. A même la chair, et dans ce vide qui n'était plus qu'une réminiscence de ce que j'étais. De ce que j'avais pu être, et de ce que je risquais de ne jamais plus devenir.
Une douleur persistante, poignante, m'arrachant brusquement de ma léthargie. De ma torpeur doucereuse, alors que je reprenais place en la réalité. M’agrippant inconsciemment à ce que je pouvais trouver autour de moi. Mes phalanges se crispant sur la texture du canapé, mes dents se serrant brutalement, tandis qu'un cri étouffé m'échappait. Voix brisée, gorge asséchée. Poumons brûlants et côtes compressées. Tympans assourdis par un écho statique résonnant en mon esprit, tandis que crépitaient les éclats bruyants d'un contact prolongé. À même ma peau, épiderme à vif, ce brasier ardent s'épanchant contre la plaie indésirée. Le sang se mettant à coaguler, reformant une pellicule de chair, précaire pansement corporel arrêtant l'effusion. La profusion de ce liquide carmin au pouvoir si divin. La voix du sorcier résonnant alentour, sans que je ne puisse la discerner parmi ce chaos ambiant. Tout ce à quoi je pouvais penser, se résumant à ce point précis, qui m'arrachait des geignements incessants et étouffés. Raclant ma langue avec des regrets lourds à porter et aux remords imprégnant mon âme à l'agonie. Dérive infinie, imposant ces confessions troublées s'échappant d'entre mes lèvres pourtant scellées. Pardons implorés qui pesaient lourdement sur ma conscience, et dont les murmures n'étaient qu'à peine énoncés. Soupirs grognés, souffle hachuré. Inspiration extatique, expiration erratique. Respiration abrégée, courte et chaotique. Lueur blanche à l'arrière des paupières résolument fermées, vision troublée par les perles salées qui roulaient en cascade le long de mes joues échauffées. Une pression. Une impulsion. Un ultime contact. Un dernier toucher. Et enfin, plus rien. La salvation, le silence, l'apaisement. Un repos en ce monde onirique évidé. Dénué de toutes images troublées. Imprégné uniquement par l'absence d'une présence, autre que la mienne, et d'un vide persistant. Cauchemars évincés, souvenirs estompés, rêves oubliés. Juste le néant qui me berçait.
—
Le temps semblait ralentir, ou bien même accélérer, je ne saurais le dire. Un moment indéterminé, qui m'avait laissé cet instant de répit. M'avait permis de me reposer, et de récupérer de cette énergie perdue pour me ramener ici. Dépit. Une inspiration plus prononcée, alors qu'un tiraillement me prenait, au niveau de la plaie. Un crépitement qui me fit expirer plus bruyamment qu'à l'accoutumée. Un soubresaut, m'arrachant de la léthargie, me ramenant au monde des vivants. J'entrouvris les yeux, mes paupières encore lourdes de ce sommeil engourdi. Un léger vertige m'enserrant le crâne, tandis que mes iris s’accommodaient lentement à la lumière ambiante. Le bout de mes doigts picotant doucement, alors que je les mouvais silencieusement. Tentant de réveiller le reste de mon corps sensiblement alourdi par les réminiscences de ces songes. Léger tremblement sur ma gauche, attirant mon regard encore embrumé. Éclat coloré, apaisant instantanément le moindre doute qui me restait. Faisant également rater un battement dans ce creux sous mes côtes, écho se répercutant de manière hachurée en ma cage thoracique. Il était encore là. Je n'avais pas rêvé. J'étais bien rentré. Visage tourné en sa direction, je contemplais doucement le profil qu'il m'offrait. Un spectacle auquel je n'aurai jamais pensé assisté. Un rayon lumineux filtrant au travers des volets, l'encerclant avec sérénité. Un halo paisible l'entourant, marquant ses traits étirés. Tableau précisément contrasté dans son exactitude pourtant absolue. L'image déversée s'imprégnant en mon esprit éperdu, tandis que je ne pouvais m'arracher de ce mirage inestimé. Un souffle se perdant sur ma langue, lorsque je remarquais que j'avais cessé de respirer. Entrouvrant les lèvres, laissant ce soupir se volatiliser. Cette légère expiration caressant un pan de son cou, effleurant sa peau en se faufilant entre ses mèches de cheveux. Le moindre de ses mouvements, semblant étirer encore plus son visage endormi et si fatigué. Même en plein sommeil, il avait l'air tendu et crispé. Pour une raison que j'ignorais. Un poids au fond de la gorge, subitement. Une saveur amère sur la langue, et les poumons se compressant insidieusement. Les remords, refaisant surface, alors que je pinçais les lèvres. Mordillant l'intérieur de mes joues, réprimant les regrets manquant de s'échapper. Ma main, tremblante, s'avançant doucement, comme pour m'assurer. Le frôlant du bout des doigts, sa chaleur picotant la pulpe désireuse de le retrouver. De toucher sa peau, caresser son corps, de sentir son contact tangible sous ma paume. Savoir qu'il était réel, et que je l'étais aussi. Que ce n'était pas un tour de mon esprit. Un espace nous séparant, que je ne parvenais aucunement à combler. Alors je restais là, ma main à proximité. Sans pouvoir jamais le rencontrer.
—
Je m'étais assoupi, à nouveau. Me perdant dans des songes que j'avais déjà oubliés. Bercé par la respiration du sorcier, j'avais fini par me rendormir. Apaisé par sa présence, j'avais abaissé ma garde, me permettant de replonger dans l'abîme onirique. Et à présent, je me faisais tirer de ma torpeur, par des éclats provenant de la cuisine. M'arrachant d'un sommeil précaire, bien que rassérénant, pour me rattacher à la substantialité. Clignant des paupières, je grognais doucement lorsque la plaie me lança subitement. Me redressant légèrement, coudes en arrière, de sorte à pouvoir contempler l'étendue des dégâts. Bordel... Ce type ne m'avait pas raté. Mais au moins la plaie était cautérisée, et semblait bien plus esthétique que ce que j'avais déjà pu voir par le passé. Au cours de cette longue existence, passée dans l'ombre et le confort de l'obscurité. Maintenant que je me trouvais en pleine lumière, je comprenais l'intérêt de rester dans la subtilité et la discrétion. L'habitude était bien trop ancrée pour que j'en fasse abstraction. Alors je soupirais doucement, serrant les dents en me redressant encore plus. M'accrochant au dossier du canapé afin de me relever. Tout du moins, de m'asseoir, suffisamment pour être en position verticale sur ce mobilier. Un grognement m'échappa à nouveau avant que je ne parvienne à m'installer de manière plus confortable. Le bruit semblant avoir attiré l'attention du sorcier, dont les pas se rapprochaient déjà du salon. Je l'entendis arriver avant de le voir débarquer, mais sa silhouette captura tout de même mon attention. Lui lançant alors un regard en coin, je hochais la tête en sa direction, détournant presque aussitôt mon visage. Reportant mon intérêt sur le vide devant moi, plutôt que de rester captivé sur lui.
Le silence s'étendait, imprégnant chaque parcelle de mon corps. Émanant même de ma peau, alors que je n'arrivais pas à m'exprimer. Marc restait debout un moment, silencieux, lui aussi, avant de finalement prendre une chaise et de s'installer. Une tasse de café fumante entre les mains. Je pouvais sentir son regard sur moi mais ne parvenais pas à le rencontrer. Les réminiscences de la veille, encore trop poignantes pour que je les laisse de côté. Et ne puisse seulement le regarder en face. Difficulté rehaussée, tandis qu'il se raclait la gorge, sans doute parce qu'il voulait parler, lui aussi. Mais aucun son ne sortait. Je fermais les yeux, en serrant les paupières, pinçant les lèvres. Me maudissant intérieurement d'être parti, et d'avoir fui. Regrettant de ne pas être resté pour lui, alors qu'il avait eu besoin de m... Non. Alors qu'il avait eu besoin d'une présence, de quelqu'un. Il avait eu besoin de réconfort, et je n'avais pas été là pour le prodiguer. Je n'avais fait que creuser encore plus cette distance entre nous, au lieu de la combler. J'expirais amèrement, fuyant mes responsabilités. Mais je savais que je devais au moins lui expliquer. Et, surtout, m'excuser. Les mots pesaient lourdement sur ma langue, comprimaient ma gorge enserrée. Ils ne semblaient même plus avoir de valeur, de signification particulière. Et pourtant, ils n'avaient pas changés entre ces quelques minutes, imprégnées par le silence pesant. Electrique. Enivrant. Pardon. J'abaissais la tête, sans pouvoir rouvrir les yeux. Mes lèvres tremblaient alors que je me penchais en avant. Mains scellées en une poigne ferme pour ne pas les laisser aller à la dérive. Chaos interne m'empoignant, tandis que mon corps se tendait. Crispé, jusqu'à mon être tout entier. Je ne voulais pas... t'abandonner. Une respiration hachurée, un souffle sensiblement erratique. Un soupir entrecoupé s'échappa d'entre mes lèvres, alors que lui semblait rester impassible. Et ces mots qui s'élevaient étaient si difficile à prononcer, laissant un goût de cendres sur ma langue. ... partir. Mais je n'avais pas le choix. Rouvrant les paupières, je perçus les perles salées s'épancher, brouillant ma vision embuée. Je pensais pouvoir trouver une solution et tout ce que j'ai fait, c'est d'empirer la situation. Inspiration courte, expiration hachurée. Soupir imprégné par la peine chagrinée. Je pinçais à nouveau les lèvres, tournant la tête sur le côté, regardant à l'opposé du sorcier. Ma langue passant contre mon palais, comme pour me donner l'énergie, et la force, que je ne possédais plus, pour continuer. Au final ça n'a servi à rien. Je suis parti, et je n'ai rien appris. Rien reçu de plus que cette balle incrustée, qu'un des sbires de Hellhound m'a fichée entre les côtes. J'expirais longuement, clignant des yeux, avant de me retourner enfin vers lui. Perdu, dans la contemplation de mes regrets, j'accrochais ses iris, sans pouvoir m'en détacher. M'y ancrant, alors que le reste tombait en ruines et que ces larmes s'écoulaient. Je nous ai mis en danger. Je nous ai exposés. Ils vont nous retrouver, et venir nous chercher, par ma faute ! Une rancœur, tournée contre moi-même, imprégnant ma voix éraillée. Gestes frénétiques, alors que je libérais l'emprise de mes mains, les laissant se frotter contre mes cuisses. L'une d'elle passant entre les mèches de cheveux, la paume enserrant la texture souple. L'empoignant d'un mouvement crispé et tendu. Le regard perdu au loin, je ne pus que murmurer, dans un ultime souffle estompé. J'aurai pas dû revenir. Un silence, un temps escompté. Je suis désolé...
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Un sommeil sans rêve, un semblant de paix. Pour la première fois depuis quelques jours, son sommeil n’est pas troublé par des images issues d'une vie lointaine. Il a fini par s'endormir en veillant sur la silhouette endormie sur le canapé, se laissant presque bercer par la respiration apaisée de celui qu’il a failli perdre. Il se réveille parfois, ouvrant un œil, balayant son regard dans la pièce pour finir par l’arrêter sur les contours familiers du dieu. Des émotions se succèdent. De l’inquiétude pour sa blessure, du soulagement de le savoir sain et sauf et de la colère liée au sentiment d'abandon qu'il a très fortement ressenti quand il est parti. Sur cette dernière émotion, il se maîtrise, ne cédant pas à l'envie mesquine de le réveiller pour se venger. Il a passé l’âge de réagir comme ça. Il se contente de replonger dans le sommeil réparateur qui lui tend les bras, une fois seulement après avoir vérifié que les protections qu’il a installées restent en place. Une fois seulement qu'il est certain que rien ne leur arrivera, il laisse retomber sa tête sur son bras et ferme les yeux. Ce n’est pas la meilleure nuit qu’il a passé jusqu’ici mais elle a le mérite d’être moins agitée que les autres depuis le début de cette histoire. Pas de cauchemars, pas de visions qui le prennent à la gorge ou qui lui soulève l’estomac au point de le réveiller. Il ne se réveille pas en sursaut, en tremblant ou au bord des larmes. Le néant. C’est tout.
Quand il ouvre les yeux pour de bon, l’appartement est plongé dans le silence, baignant dans la lumière de l’extérieur filtrant au travers des rideaux. Dans de telles conditions, il est impossible de deviner qu’une menace de taille les attend à l’extérieur. Prête à leur fondre dessus à partir de l’instant où ils passeront cette porte. Son regard balaye une nouvelle fois les lieux pour s’assurer que les protections sont en place, qu’ils sont encore en vie et surtout, qu’ils sont encore au bon endroit pour s’arrêter une nouvelle fois sur Tenebris. Marc n’aurait qu’à tendre la main pour le toucher. « Il t’apprécie autant que tu l’apprécies. » La voix de Ruhan résonne dans son esprit, sortie de nulle part. Marc secoue la tête et se redresse. Foutaises. Il sait très bien pourquoi ils ont ce lien. Ce fichu pacte. Alors qu’il pose les mains à plat sur le plan de travail de la cuisine, Marc ne peut s’empêcher de se repasser le fil de sa conversation avec l’esprit de Ruhan. Et accorde plus d’importance qu’il ne le devrait aux sous-entendus que le chaman lui a fait. « Oh Marc…C’est confortable de se mentir à soi-même, pas vrai ? » Il lui en foutrait, du confortable. Les mâchoires de Bowman se serrent alors qu’il referme ses poings. Pourquoi accorde-t-il de l’importance à ce que Ruhan pense ? Il fait partie du passé de Tenebris, pas du sien. Il devrait s’en foutre comme jamais. Mais pourtant, il y repense. Il ressasse l’entrevue comme il ressasse celle qu’il a eu avec Russel. Combien de choses Marc peut-il gérer avant d’imploser ? Et combien de temps avant que les souvenirs qui le harcèlent le laissent en paix ? Le voilà en train de pencher pour attaquer la journée avec un verre, directement et sans préliminaire. Mais sa raison lui rappelle qu’il ne peut pas se permette d’être bourré à neuf heures du matin alors que son allié s’est fait tirer dessus la veille.
Un café et bien trop de cigarette pour son propre bien plus tard, un grognement le tire de ses sombres ruminations. La Belle au Bois Dormant s’est enfin réveillée. Et alors qu’il arrive face à lui, Marc sent sa rancune envers lui se réveiller d’un coup. Elle redouble d’intensité devant ce regard fuyant qui refuse de l’affronter. Il avait besoin de lui, besoin de comprendre tout ce qu’il a vu. Besoin de comprendre pourquoi et surtout besoin de sa présence. A quoi sert ce lien qui les unit, ces ténèbres qu’ils partagent s’il ne peut pas compter sur lui ? Il peut bien fuir son regard tant qu’il le veut, ça n’effacera pas ça. Sans un mot, Marc prend place sur le fauteuil. Il ne compte pas parler le premier. Ce n’est pas à lui de fournir des explications. Il n’a pas bougé, lui. Il ne s’est pas barré on ne sait où pendant plusieurs jours, sans donner de nouvelles. Ouais, y’a ça aussi. L’inquiétude qui l’a rongé pendant des heures, pensant au pire. Qu’aurait-il fait si Hellhound avait mis la main sur Tenebris ? Ou sur lui ? Il n’y a plus de doute à avoir sur le fait qu’elle sait qu’il a survécu. Elle le sait et attend son heure pour éliminer les deux enfoirés qui sont une épine dans son pied. Tenebris parce qu’il veut l’arrêter et Marc parce que… il ne sait pas si c’est simplement parce qu’il est le frère d’Aidan ou si c’est parce qu’il est allié à Tenebris. Les deux. Probablement. Dans les deux cas, il est la cible parfaite pour atteindre une déité sans pouvoir et un sorcier qui lui a désobéi. Merveilleux constat qui s’impose. Mais à la limite, il s’en fiche d’y passer, si ça tient les deux autres à l’écart de cette mégère. Ce qui lui importe, c’est qu’Aidan lui échappe et que Tenebris arrête cette pétasse avant qu’il ne soit trop tard. Mais pour ça, il faudrait qu’il puisse retrouver son essence.
Il ne le regarde pas. Pas tout de suite. Même quand ses excuses parviennent à ses oreilles. Il se mord même la langue pour ne pas rétorquer une réplique assassine. Il lui en veut bien plus qu’il ne s’autorise à l’admettre. Pardon de quoi, au juste ? D’être parti ? D’être revenu ? D’avoir été blessé ? De l’avoir forcé à s’inquiéter pour lui ? Les doigts de Marc se resserrent autour de l’anse. Il peut être désolé autant qu’il veut, ça ne changera rien. Ses mâchoires se serrent une nouvelle fois alors qu’il s’autorise enfin à le regarder en même temps qu’il l’écoute. Il ne voulait pas partir, hein ? Marc lâche un rire sec et presque inaudible en détournant le regard. Bien sûr. C’est pourtant la première chose qu’il a fait. Sans lui dire où il allait. Et Marc, comme un idiot, s’est fait un sang d’encre pendant des jours. Sa colère et sa rancune trouvent cependant une autre cible au fur et à mesure que Tenebris poursuit ses explications. Marc tente de ne pas voir les larmes qui brouillent les yeux de la déité mais elles sont trop visibles pour lui. Cependant, c’est lorsqu’il entend ce nom, ce fichu nom qu’il craque. L’ampoule du plafond explose au-dessus d’eux, alors qu’il n’a pas bougé. Il s’en doutait. Cette pute est au courant. Et cette pute a lancé ses sbires à leurs trousses. Ce sont eux qui lui ont fait ça. Marc se redresse. Ses traits se muent en une expression froide. Ils ne le savent pas encore, mais ils sont déjà morts. Il enverra leurs putain de têtes à Hellhound en guise de message. Il fait craquer sa nuque en tentant de garder son calme, alors que la voix de Tenebris l’accompagne. Il se voit déjà leur coller assez de balles dans le crâne pour qu’ils soient méconnaissables. Il s’arrête de songer aux tortures qu’il pourrait leur faire subir quand il entend Tenebris dire qu’il n’aurait pas dû revenir. Et s’excuser encore. « Ferme-la ! » lâche Marc d’un ton sec et acerbe. Il marque un temps d’arrêt, baisse la tête en soupirant. Les mains sur les hanches, il braque ses iris furieux vers la silhouette de Tenebris. « T’es un dieu, pas une putain de pleureuse. Te barrer comme un voleur, c’est une chose. Mais trois jours, bordel. Et tu débarques, à moitié mort, après n’avoir donné aucune nouvelle, pour chialer que t’es désolé ?! » Le ton monte, malgré lui. Ce n’est plus seulement la colère qui se manifeste, mais également l’angoisse. « J’ai cru que… » tu étais mort. Sa voix commence à se briser avant qu’il ne se reprenne. « J’ai cru que t’étais parti pour de bon, espèce d’enfoiré ! » Sa respiration saccadée emplit le silence. Il passe une main lasse sur son visage. Bordel de merde. Il le déteste. Il le déteste pour ça, pour l’obliger à s’inquiéter pour lui. Et il se déteste pour lui cracher sa haine au visage. Il l’apprécie autant que Marc l’apprécie, hein ? Va te faire foutre, Ruhan. Va te faire faire foutre, Tenebris. Qu’ils aillent tous au diable, tous autant qu’ils sont. Marc les déteste. Je te déteste, connard. Je te déteste pour tout ça. Mais pour l'instant, ce n'est pas lui qu'il déteste le plus. « Ils sont combien ? » Il ne décolère pas, mais il n’oublie pas les autres enfoirés pour autant. « Tu penses qu’on a une chance de survivre ou pas ? » Un dieu sans pouvoir, affaibli par une balle. Un sorcier avec une essence qu’il ne maitrise pas et qui l’affaiblit également pour pomper son énergie sans discontinuer. Leurs chances sont maigres. Et voilà Marc qui commence à faire les cent pas en réfléchissant à toute vitesse. Elle va les avoir à l’usure, c’est certain. Marc doit trouver un moyen magique de la tenir à distance. Les protections ne tiendront pas éternellement.
« Je dois trouver son putain de nom. Si je trouve son vrai nom, je peux l’arrêter. » Il s’arrête et s’assoit sur la table basse, face à Tenebris. « Elle connait le mien et je peux pas la laisser avoir cet avantage sur moi. Faut que je revois les protections de l’appartement, que je mette en place des pièges magiques, que je.. que je trouve un moyen de nous cacher de son radar… Et je suis trop sobre pour ces conneries. » Il soupire avec lassitude. Peut-être qu’être bourré lui donne des idées de merde, mais au moins, il est plus créatif qu’en étant sobre. Il se dirige vers le plan de travail de la cuisine, sans cesser de pester. Il attrape une bouteille qu’il s’empresse de dévisser. « La prochaine fois que tu te barres on ne sait où, ce serait bien que tu laisses une adresse, tu vois ? Que je tourne pas en rond comme un con pendant des jours à me demander ce qui t’est arrivé. » Deux verres disposés devant lui, qu’il remplit. « On devra s’occuper de cette putain de balle aussi. Elle est encore là, j’ai pas eu le temps de l’extraire, hier. » Il repose la bouteille, plus fortement qu’il ne l’aurait voulu. « Il faut qu'on change de planque, j’ai les flics au derch pour une connerie que j’ai fait l’an dernier et l’un d’eux m’a déjà retrouvé. Si on ajoute les toutous de l’autre salope, ça fait un peu trop de monde à nos trousses. » Il se redirige une nouvelle fois vers le salon, poursuivant ses explications. « On doit trouver ta sœur, Ether. D’après Ruhan, c’est la seule qui puisse nous aider. » Il tend le verre à Tenebris. Il est toujours en colère contre lui mais le fait d’avoir énoncé son plan à voix haute l’a un peu calmé. « Mais d’abord, bois. » Quitte à crever, autant boire un peu avant.
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
La tension qui crépitait contre mon épiderme, se faisait plus poignante encore à chaque seconde qui passait. La pression s'imposait, prenant de l'ampleur à mesure que je réprimais ces sensations dévastatrices. Tentant de les contrôler, malgré le flux incessant et insidieux qui persistait. L'insistance des picotements me rongeant ce creux évidé, dès lors que je laissais s'exprimer les remords désolés. Les perles salées s'écoulant, traçant des sillons sur ma peau échauffée, brouillant ma vision devenue fade et fatiguée. Les iris perdant de cet éclat singulier, s'estompant sous l'orage qui éclatait et qui finirait par me noyer. Un écho particulier, des morceaux de verres, au sol, brisés. L'ampoule éclatée, fracturée en une myriade de fragments, tonalité venant ébranler les récits que j'avouais. Image en miroir, qui me renvoyait ce que j'étais. Las. Et dépité. Le mirage de l'espoir à jamais oublié, tandis que je sombrais dans la fatalité. Réalisant que rien ne pourrait être fait pour arranger la situation, et qu'à défaut, je l'avais seulement empirée. Sa voix à lui perturbait ce silence pesant qui, autrefois, régnait. Le ton employé, me frappant brusquement, comme s'il avait cogné ses mots de ses poings contre ma peau. Déversant les maux enragés en ma direction, pour exprimer sa colère si longuement gardée. Un poids singulier dans le creux de la cage thoracique, un écho sous les côtes, qui perdurait. La honte, l'amertume, le désespoir, me rongeant les entrailles tandis que je mordait mes lèvres pour ne pas sombrer. Chanceler dans les profondeurs des émotions désagréables que je ressentais. Percevant la pénombre et la noirceur du gouffre sous mes pieds, imagé. Plonger vers le danger, à nouveau. Et pourtant je restais là, ainsi. A contempler l'abîme. Gardant le silence en resserrant ma prise sur mes cuisses. Les phalanges en blanchissaient sous l'assaut de la pression exercée. La voix de Marc, bien que teintée de reproches, semblait me bercer. D'illusions fragmentées, d'images fracturées. Les tessons de ce qui avait existé à jamais brisés. Ses propres émotions imprégnant ses paroles imbibées par sa colère refoulée. Par sa rage enhardie et sa haine enragée. Un semblant de peur, d'incertitude, au creux de sa gorge, alors que ses paroles flanchaient. A cette idée de m'avoir cru à jamais disparu. Qu'est-ce que ça peut te faire... Un murmure à peine audible, soupiré du bout des lèvres. Ca n'aurait rien changé.
Sa dévotion hargneuse prenait un autre tournant, s'attardant sur ces ennemis qui nous menaçaient. Piquant mon intérêt, me tirant de ma léthargie tandis que je reprenais lentement contenance. Évinçant l'apathie de mes muscles encore sensiblement endormis. Reformant un masque d'impassibilité sur mes traits pourtant marqués par les affres du passé. La douleur présente de la veille, encore imprégnée en mes muscles, bien que légèrement reposés. Je soupirais, mes iris accrochant la fenêtre du salon pour se perdre au dehors. Me rappelant des éléments importants de la confrontation m'ayant endommagé. Y en avait qu'un seul hier soir. Liant mes mains sur mes genoux, je penchais légèrement la tête sur le côté. Je n'ai vu que lui sur le chemin. Pinçant les lèvres, je plissais les paupières en dénouant mes phalanges, frottant inconsciemment mon avant-bras. Mais c'est possible qu'il y en ait d'autres qui traînent, surtout quand on connait leur commanditaire. Cette garce pourrait avoir envoyé toutes les raclures de la région à nos trousses, ça m'étonnerait même pas. Un grognement s'élevait, vibrant en ma gorge enserrée par le poids de cette rage étouffée. Le souvenir de ce type qui m'avait tiré dessus, dans l'unique but de m'anéantir. D'en finir, avec qui j'étais, pour toujours et à jamais.
Soupirant bruyamment, je tentais de réprimer les images de cette nuit passée. Secouant doucement la tête en fermant les yeux, me concentrant sur tout autre chose. M'attardant sur la voix de Marc pour me raccrocher à l'instant. Une nouvelle question, qui m'interpellait. Me gardant silencieux un moment, le temps que je la considérais. Survivre, avec une bande pareilles qui tentait de nous nuire, espoir peu probable en effet. Leurs capacités dépassant largement les nôtres, même combinées. Ils étaient parés, préparés à nous neutraliser, pour que Hellhound réussisse son sacrifice de déités. Son trafic d'âmes innocentes, s'en fichant de les condamner pour l'éternité. A sa botte, au moins une trentaine de sorciers. D'humains, possédants des pouvoirs, ou un arsenal de qualité. Qualifiés par les morts qui se comptaient symboliquement par milliers. Comment un simple sorcier débordant d'une essence sacrifiée, et un dieu déchu privé de son identité allaient pouvoir s'en tirer ? Vivre était un espoir à jamais oublié. Survivre, était plus modéré, mais pas moins prenant et impliquant. Marc pouvait s'en sortir, s'il maîtrisait les ténèbres comme ses ombres préférées. Mais moi, dépourvu de mon essence singulière, je ne pouvais prétendre à cette illusion précaire. J'en sais rien. Un nouveau soupir, glissant sur ma langue alors que, dépité, je me renfonçais dans le canapé. Inspirant longuement, j'expirais bruyamment en croisant mes bras sur mon torse. Les paupières plissées, le regard fixé droit devant, sur un point du néant. Si on se taille de là, on peut sûrement éviter les tocards qu'elle a envoyés après nous. Maintenant si tu veux t'en débarrasser, va falloir qu'on soit préparés. Je jetais regard en coin à la porte d'entrée, murmurant silencieusement une incantation qui me permis de voir les pièges placés par le sorcier. Constatant que la plupart étaient plutôt anciens, j'en discernais pourtant d'autres, bien plus récents. Niveau protection faudra les renouveler tous les jours, sans compter que les pièges seront à dispenser à chaque fois. Des péripéties en perspective, la réalité de la situation me tirant de ma contemplation. Le sortilège s'estompait alors que je tournais la tête vers le sorcier, qui s'était remis à parler. S'asseyant sur la table juste en face de moi, de sorte à capturer mon attention le temps qu'il s'épanche dans son explication. Sans le quitter des yeux, je dardais mon regard vers lui, en me penchant en avant, sa voix caressant mes tympans.
Un plan semblait germer en son esprit, et je restais là, à l'écouter déblatérer son idée. Plissant légèrement les paupières, alors que les traits de mon visage se crispaient. Focalisé sur son récit, imprégné par la précipitation dans son ton et l'adrénaline qui pulsait en lui. Faisant écho à celle qui commençait à brûler en mon être. Il allait tellement vite que je peinais presque à le suivre, mais son acharnement titillait ma détermination. Embrasant la flamme qui me consumait lentement, pour qu'elle s'épanche et détruise sur son passage les derniers doutes. Les derniers remords, ne laissant qu'une sensation ardente de volonté pure. J'hochais la tête face aux paroles du sorcier, sans pour autant lui conter qu'il ne serait pas seul dans cette épreuve. Il s'en doutait de toute manière. Je pouvais encore servir à confectionner des pièges et à lancer quelques sortilèges pour l'aider. Même si le plus gros sera fait par lui. Et déjà il s'éloignait alors que je sortais de cette transe inestimée. Son départ, ne laissant qu'un vide en face de moi, alors que je me retenais de le suivre pour continuer sur sa lancée. Il avait besoin de temps, et surtout d'espace. Mais aussi d'une autre substance qu'il allait déjà chercher dans la cuisine. Sans le regarder, je l'entendais pourtant dévisser une bouteille, avant qu'il ne se remette à parler. Sa pique bien sentie, m'arrachant un ricanement presque agacé, bien que teinté par un amusement non dissimulé. La prochaine fois, je partirais pas. Une certitude, une vérité, confessée. Confiée dans le secret de cet appartement, arrachée à mes pensées pour être avouée. Mais je garde ça à l'esprit. Que t'aies plus besoin de te questionner sur mon état alors que je suis pas là. Et puis, à finir par tourner en rond t'en reviens toujours au même point et t'avances pas plus qu'avant. C'est rien qu'une perte de temps, après tout. Un petit sourire en coin, alors que je laissais mes iris s'accrocher au sien, par delà l'espace qui nous séparait. Un éclat brillant au creux de mes pupilles dirigées sur ses traits marqués. Un petit moment perdu dans le temps, qui m'arrachait de mes sentiments léthargiques passés. M'offrant un instant de répit émotionnel bien accueilli. Mais à nouveau, la situation nécessitait de se préoccuper d'un autre sujet.
La balle, encore et toujours ancrée entre mes côtes. Logée sagement, alors que les gravures sur la texture déversaient comme un poison synthétique en mon être. Puisant en mon énergie, m'empêchant d'utiliser mes pouvoirs basiques à profusion. Evidemment, il fallait s'en occuper. Et le plus rapidement possible serait le mieux, histoire qu'on en soit débarrassés. Contemplant l'espace où la balle avait percée ma peau, je scrutais la plaie qui cicatrisait. Une ultime marque, un énième souvenir, à jamais imprimé sur mon corps. Sur cette forme physique, corporelle, qui n'était mienne que par procuration. Et pourtant, depuis que je m'étais retrouvé piégé par la condition humaine, emprisonné dans ce corps de mortel, je n'avais pu que réaliser, qu'il était bien le mien. Ironie en un sens, car l'image représentée n'était que celle d'un fantôme du passé. D'une dimension qui n'était aucunement rattachée à notre existence. Et qui m'avait tout de même trouvé. Un soupir nostalgique, alors que j'expirais, me concentrant sur ce qui se passait. Raffermissant ma prise sur la toile de la réalité afin de sortir de cette torpeur qui m'imprégnait. Marc, à nouveau en train de parler. D'une connerie qu'il avait faite l'année passée. Et qui lui avait vallu d'être dans le radar des autorités mortelles. Putain, ouais... Les pas du sorcier s'approchant, je relevais le visage vers lui, scrutant les deux verres qu'il tenait. Remontant mon regard vers son visage, alors qu'il venait d'expirer le nom d'Ether. Perturbé par cette sonorité sur ses lèvres, que je ne lui avais jamais confiée. Légèrement interloqué, je ne tiquais pourtant qu'à la mention de cet être que j'avais jadis chéri. Ruhan... Le sorcier savait son nom sans que je n'ai pu lui en faire la confession. Et cela m'intriguait réellement, étrangement, qu'il puisse savoir son identité. Et le reconnaître, et en parler aussi légèrement, comme s'il l'avait connu de mon temps. Insécurité, qui me fit grimacer. Ruhan m'avait confié tout ce qu'il savait, alors pourquoi... Il a jamais parlé d'elle quand on est allé le voir. Et je lui ai toujours pas expliqué ce qui nous est arrivé. Il pourrait pas sav... Je m'arrêtais subitement. Réalisant. A moins que tu ne sois retourné là-bas ? Et que tu l'aies abordé tout seul pour lui en parler ? De la surprise étirait mes traits, aucune colère assourdie ne s'épanchant. De la curiosité, seulement, qui en démordait alors que je comprenais la volonté derrière l'action. Des réponses à des questions, savoir comment s'en tirer, alors que je n'avais pu l'aider. Un souffle soupiré, fatigué, excédé. Mais je ne pouvais le blâmer. Après tout, j'aurai fait la même chose, si je n'avais pas su à qui m'adresser. Et puis, de toute manière, c'était perdu d'avance. C'est pas la peine pour Ether. Je soupirais en récupérant le verre qu'il me tendait. Je suis déjà allée la voir, durant ces trois jours d'escapade. Et ça c'est mal terminé, comme tu peux le constater. Tournoyant le récipient entre mes doigts, j'observais le contenu clapoter contre les rebords. La fragrance me chatouillant la peau, la picotant doucement. Faut que je trouve un autre moyen de récupérer mon essence maintenant. Et de préférence, j'aimerai éviter qu'on retrace le sacrifice en sens inverse. On peut pas se permettre de t'avoir dans le coaltar pendant des jours. Le regard plongé sur le liquide ambré, je percevais mon âme s'y noyer à mesure que je voyais mon reflet. Tout en laissant mes pensées s'épancher sur les ridules provoquées par l'équilibre du verre en mes paumes échauffées. Instinctivement, d'un mouvement mécanique, sans me tirer de ma torpeur alanguie, je finis par apporter le verre à mes lèvres. A défaut de sombrer dans les limbes éthérées, j'effleurais l'ébriété, en sentant l'alcool brûler ma gorge. Le parfum qui embaumait picotant ma langue devenue engourdie. Une délivrance. La salvation.
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Le temps s'écoulait fluidement, sans s'arrêter. Le liquide ambré coulant à flots, en un sens, alors que le verre que je tenais finissait par toujours se remplir. Sans jamais tarir de sa forte accentuation alcoolisée. Les bouteilles s'ammoncelant sur la table basse après que l'on avait vidé la première en quelques lampées. Le plan abordé, finement argumenté. Ajoutant les détails entre deux gorgées brûlantes du fort breuvage ayant anesthésié ma langue. Engourdissant mes membres, tandis que je restais avachi sur le canapé. Le verre tenu du bout des doigts, semblant presque m'échapper. Sa texture fine si fragile contre la pulpe devenue trop rigide, calleuse. J'expirais, une effluve d'alcool émanant alentour, sans que je ne puisse la discerner. Trop imbibé déjà, par le fort liquide coulant en mes veines gonflées. Perturbant le silence régnant, d'une simple respiration extatique, se mêlant aux échos discrets qui émanaient de la radio à côté de nous. Des paroles étouffées, qui semblaient s'éterniser sans n'aboutir à une fin estimée. Ma concentration se perdant à chaque grésillement, effleurant le néant. Sombrant dans l'absolu des pensées embrumées, frôlant les limbes spirituelles des souvenirs oubliés. Sans pouvoir les percevoir ou les revoir, trop éloigné de la surface pour les toucher. Paupières à moitié fermées, iris voilés par la brume de l'ébriété. Un contact éphémère sur ma gauche, qui glissait contre mon bras, caressant mon épaule doucement, avant de disparaître presque aussi instantanément. Je détournais la tête, remarquant enfin la proximité avec le sorcier. Scrutant sa silhouette qui se repositionnait un peu plus confortablement sur le canapé. Ma main s'élevant d'elle-même tandis que je reportais mon attention devant moi, avalant la dernière gorgée du breuvage alcoolisé. Son fort caractère caressant ma langue plus qu'il ne la brûlait. L'air inspiré par après, laissant une traînée de picotement en ma gorge alors que je grognais de contentement. Un tiraillement en mes muscles qui me dérangeait, quand bien même je réprimais les exclamations étouffées. Me redressant lentement, coudes sur les genoux, le verre à présent posé sur la table, mes iris fixés sur lui. Perdu quelque part, sans savoir où exactement, ailleurs, ici. N'importe. Un nouveau soupir, et je fermais les paupières, me laissant bercer par le vertige qui m'assaillait.
Un écho statique résonnant doucement autour de nous, sans pour autant nous atteindre, étrangement. Bien qu'à un moment, peut-être même une minute après que j'eusse réalisé la portée d'un propos, je me mis à sourire suite à la réalisation. Un ricanement sur le bout des lèvres, qui caressait ma langue devenue lourde contre mon palais. Un léger éclat de rire, s'estompant déjà, tandis que je rouvrais les yeux. Mes pupilles accrochant la balle incrustée qui m'avait laissé une plaie. A présent extraite d'entre mes côtes, alors qu'elle trônait maintenant sur la table, entre les cadavres de bouteilles éparpillées. Un pincement de lèvres, un air amer sur la langue, la rancoeur étirant mes traits. Le regard brillant sous les effluves diluées, je ne pus que m'imprégner de l'image qui flottait en mon esprit. Son écho se réverbérant encore longuement, même après que je m'étais retourné. Iris affinés sous les pupilles dilatées, tandis que j'ancrais mon attention vers lui. Mon regard dans le sien. Mon intérêt en son identité. Merci. Un simple mot, soufflé du bout des lèvres. Une voix qui se brisait, craquelée par la difficulté à articuler. Un ton rauque et grave, qui s'élevait encore bien après avoir été estompé. Le sorcier glissait son regard en ma direction, et je ne pouvais discerner sa réaction. Ne pouvait appréhender son expression du fait de cette vision embrumée. Concentration brouillée, quand bien même je ne pouvais m'en détacher. Reconnaissant pourtant les couleurs imprégnant ses iris, au travers du brouillard, par habitude de les avoir contemplés. J'expirais longuement en le voyant accrocher mon regard, sans avoir réalisé que j'avais maintenu ma respiration en ce temps si incertain. Souffle hachuré, inspiration extatique, soupir erratique. Et enfin je me détournais, attrapant sans réfléchir, la bouteille encore à moitié pleine, qui trônait. La tournant lentement en mes mains, agrippant la partie haute et plus étrécie. Souriant bêtement à une remarque sans doute stupide que j'avais entendue du sorcier auparavant. T'avais pas dit que c'était meilleur quand tu buvais directement à la bouteille, heh ? Un nouveau ricanement m'empoignant, alors que je lui lançais un regard complice et brillant. Amenant le goulot à mes lèvres désormais parfumées, récupérant le liquide ambré à mesure qu'il s'écoulait. Glissant sur ma langue, caressant ma gorge, la fragrance embaumant sous mon palais. Alors que je ne pouvais m'empêcher de sourire, tout en penchant la tête en arrière, élevant le contenant pour y avoir plus facilement accès. Les brûlures délaissées sur le passage du breuvage, entraînantes et entêtantes. Même après avoir arrêté. Même une fois la bouteille reposée, et disposée devant le sorcier, si jamais il en revoulait. Le fantôme du toucher alcoolisé, caressant encore et toujours mes lèvres, empoignant toujours ma langue, tel un baiser éthéré.
A nouveau un silence qui régnait. Entrecoupé par d'autres bruits à la radio. Durant un certain temps qui semblait indéterminé. Un instant où nous n'avions que plus plongé dans l'abysse, où nous avions frôlé les limbes de la réalité. La substance même d'un état précaire qui nous était destiné, à force de s'épancher en ces boissons au caractère trempé. Un moment de perte, d'abandon, où rien n'avait été fait. Autre qu'établir un plan et continuer à picoler. Mais l'engourdissement apaisant en mes membres semblait vouloir m'exprimer que c'était sans doute pour le mieux. Un petit écart pour se ressourcer, pour se requinquer. Un instant partagé avec le sorcier, où pour une fois la rage ne nous avait pas été jetée l'un à l'autre. Où les regards échangés n'avaient pas été noirs ou haineux, mais voilés par une sensation enfiévrée. Des paroles brumeuses passées sous bas, des contacts fébriles et des effleurements instinctifs. Rien de calculé, rien de forcé. Juste des gestuelles accidentelles, qu'aucun de nous deux n'avait désignées par après. Un moment partagé, dans le secret de l'appartement, pour encore un peu de temps. Jusqu'à ce que la bulle ne soit brisée et ne nous ramène à la réalité. Grognement évasif, réprimé, alors que je pinçais les lèvres, me remettant dans le fond du canapé. Le plus à l'aise possible, malgré mon état actuel et la proximité du vertige qui me narguait. Un froissement de tissu à mes côtés, qui caressait mes tympans alors que je fermais doucement les yeux. Contemplant le néant, savourant le silence présent. Replongeant dans un souvenir qui n'était pas le mien. Une amertume s'imprégnant sur ma langue, alors que je soupirais. Rouvrant les paupières, le regard brumeux et toujours aussi perdu, vidé. Eh... Je sentis le regard du sorcier sur mon profil avant d'entendre sa voix murmurée. La nuit là, est-ce que t'as eu l'impression de... La langue qui passait sur mes lèvres, avant de les pincer. Mordant l'intérieur de mes joues, cherchant des mots pour conforter les maux. Un soupir désolé, alors que je penchais la tête de son côté. J'ai cru faire un cauchemar. J'expirais, collant ma langue à la jonction entre l'arrière de mes dents, et du palais. Un claquement sec résonnant par après. Il semblait si réel. Un peu comme ceux que je faisais ressortir, du temps où j'avais encore mon essence. Mais il y avait une différence entre faire resurgir une peur, un cauchemar, enfouis en un être vivant pour les vivre avec lui, et expérimenter ce souvenir, cette mémoire reniée, comme s'ils avaient été extirpés par autrui. Et il l'était. Parce que je le vivais et que je le ressentais comme tel. Comme si ça avait vraiment existé alors que pourtant ça m'était jamais arrivé. Mais... Arrêt brusque de ce souffle hachuré, la suite en attente, suspendue dans le temps et jamais avouée. Ce n'était pas le mien. Détournant enfin la tête vers lui, j'ancrais mes iris aux siens, avant qu'il ne finisse par s'en écarter. Ce n'était pas mon cauchemar. Ni mon passé. Respiration hachurée, temps suspendu au bord des lèvres, tandis que mon souffle mourrait à chaque seconde passée. C'était le tien. Les images fracturées, les fragments éparpillés en ma mémoire se remettant peu à peu en place, tandis qu'un poids conséquent comprimait mes poumons. Marc. Son nom, imploré par ma voix rendue grave par l'aveux confessé. J'ai revécu l'un de tes pires souvenirs. Jamais je n'aurais souhaité m’immiscer en sa vie privée, si secrètement gardée. Ni voulu lui arracher des explications sur son passé dont j'avais pourtant eu un aperçu. Mais ce poids me bouffait, me rongeait, alors qu'une perle salée voilait mes iris déjà décorés par cette brume découlant du breuvage spiritueux. Et je sais pas quoi te dire... À part que j'étais... Désolé. Un silence écrasant, une cadence ratée. L'atmosphère lourde contre l'épiderme échauffé. La tension palpable dans l'air ambiant et pesant. Et je crois qu'en contrepartie, c'est l'un des miens que tu as dû subir.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
La crise est passée, les nerfs sont apaisés. Marc a dit ce qu’il avait à dire. Ou du moins, ce qu’il a réussi à dire. Le reste ne regarde que lui et lui seul. Les réponses de Tenebris l’éclaire sur le nombre d’assaillant, sur leur projet et surtout sur l’urgence de changer de planque. Avec les flics sur le dos et les sbires d’Hellhound, il devient un homme traqué. Mais chaque chose en son temps. Ils ne peuvent pas bouger pour le moment. Pas dans l’état où Tenebris se trouve. Pas dans l’état où lui-même se trouve. Fatigués, écorchés. Brisés, tous les deux. C’est un petit miracle qu’ils arrivent encore à se mettre debout et garder les yeux ouverts, Marc le sait. Il s’attendait à ce que Tenebris réagisse sur Ether. Sur le fait qu’il soit allé voir Ruhan en son absence. Il hausse les épaules, l’air de rien, mettant de la distance entre lui et les paroles de l’esprit. Ces paroles qui reviennent encore, comme une chanson qui reste dans la tête bien trop longtemps. Il ne sait même pas pourquoi il s’attarde dessus et y accorde tellement d’importance. Il avale une gorgée de son verre, sans la moindre expression sur le visage. « Tu étais parti et j’avais besoin de réponse. Et avant que tu paniques, j’ai fait en sorte de protéger mon enveloppe physique pour éviter le même bordel que la dernière fois. Manquer de crever, ça m’a bien suffit. » L’alcool lui brûle la gorge, lui procure une sensation rassurante. Quelque chose qu’il connaît dans un océan d’incertitude. Il baisse la voix, sur un ton beaucoup moins assuré. « Il m’a expliqué qu’Ether pourrait nous aider mais… On a pas pu parler plus. Il m’a renvoyé ici, tout simplement. » Quoi ? Il ne va pas tout de même pas lui rapporter l’intégralité de leur conversation, quand même. Et les véritables raisons l’ayant poussé à aller le voir, à savoir… la mort de Ruhan lui-même. Il chasse cette vision douloureuse, une fois de plus. Ignore le pincement au coeur qu’il ressent. Ce souvenir n’est pas le sien. C’est privé.
Il se place une nouvelle fois face à Tenebris, son attention focalisée sur lui. Ses doigts enserrent doucement le verre. A en juger sa réponse, Ether ne leur sera d’aucune aide. A quoi ça sert d’avoir une famille de dieux si aucun ne vient aider, je vous le demande. Il se fige, se mord la langue et décide finalement de s’envoyer le contenu du verre dans sa totalité. Cul sec. Ouaip. Trop sobre pour ces conneries. Ils sont littéralement seuls au monde pour ce coup-là. Une simple brise contre une montagne. Il a connu des défis moins durs à relever. Et il ne peut même pas demander de l’aide à Aidan, car ce dernier est juste introuvable grâce aux sorts qui protègent sa fuite. Ça aussi, il a du mal à le digérer. Aidan est un sorcier et Marc ne s’en est jamais douté une seule seconde. C’est probablement dans le top trois de sa liste d’emmerdements. En première position, on trouve ce sacrifice. Même si Bowman tique en entendant ce mot. Il ricane en reposant son verre à côté de lui. « Putain, me tente pas. Si je pouvais te rendre ton essence, je vendrais mon âme une quinzaine de fois pour que tu la récupères sur le champ. » Il soupire, se redresse doucement. Il va avoir besoin de toute la putain de bouteille à ce rythme. Connait-on un meilleur moyen de commencer une journée ? Oui. Clairement. Les gens normaux commencent une journée avec un café et ont une vie normale, sans sorcière tarée, sans dieux blessés et sans magie. Et pour la première de sa vie, sans doute, Marc envie les gens normaux. C’est un jour à marquer d’une pierre blanche.
* * *
Il a l’impression que la chanson vient de passer à la radio. Il y a cinq minutes. Mais il sait d’expérience que sa notion du temps est différente, passé un certain nombre de verre. Il a également l’impression qu’une année s’est écoulée depuis la dernière fois qu’il s’est véritablement et volontairement mis la tête en vrac à grand renfort d’alcool. Personne ne viendra les attaquer aujourd’hui, car en plus des protections, il faut passer les pièges mortels qu’il a installé. Dans leur situation, la sécurité n’est pas négociable. Aujourd’hui, l’appartement est aussi bien gardé la porte des enfers. Un moment de répit qu’il estime mériter. Qu’ils méritent tous les deux. Aussi bien lui, que Tenebris qui prend goût à la boisson qui ne cesse de remplir son verre depuis qu’ils ont commencé. Un moment de calme, de plénitude. La balle trône sur la table. Une expérience de plus à ajouter à sa liste, quand il sera assez sobre pour ça. Il préfère ne pas bouger, pour la simple et bonne raison qu’il ne veut pas se casser la figure Son équilibre est précaire et ses pensées sont désordonnées. Mais il en avait besoin. Ils en avaient besoin. Tous les deux. Boire comme si c’était le dernier jour de leur vie, comme si la fin avait lieu demain. Une affirmation beaucoup plus vraie qu’il ne veut avouer mais passé ce point, il s’en fiche.
Un sourire se dessine sur ses lèvres quand il aperçoit Tenebris boire directement à la bouteille. Découvrant que c’est meilleur de cette manière. A cette phrase, Marc émet un rire. Un vrai rire, sincère et amusé. Qui n’a rien à voir avec les ricanements sarcastiques et empreint de sous-entendus passifs-agressifs dont il a le secret depuis sa naissance. Il hausse les épaules en se renfonçant dans le canapé. « Normalement, c’est mal élevé de le faire. Mais c’est justement pour ça que c’est meilleur. » Il lui adresse un clin d’oeil avant de reporter son attention sur son propre verre. Là tout de suite, il se sent presque bien. Presque, parce qu’il sait que ça ne durera pas. L’ivresse lui offre un confort qu’il n’a pas en temps normal. Celui de tenir ses propres démons à distance. De se sentir intouchable. Il ferme les yeux et laisse reposer sa tête contre le dossier. Se laissant bercer par la musique en sourdine. Un instant qu’il aimerait voir durer. Pas d’hostilité, pas de magie. Rien de tout ça. Ces conneries qui lui pourrissent la vie lui semblent à présent sans la moindre importance, comme un simple désagrément qu’il pourrait balayer d’un simple geste du bras. Un répit de courte durée, dont la fin intervient bien plus tôt qu’il ne l’imagine. Il garde les yeux clos quand Tenebris prend la parole. A son «Heh», il ne répond que par un grognement pour confirmer qu’il attend la suite, sans se douter que le terrain va devenir glissant. Il fait mention de cette nuit, celle que Marc ne veut pas revivre. Cette dispute qui, il en est certain, a tout déclenché. Tenebris hésite et Marc sait déjà de quoi il va parler. Ses yeux s’ouvrent, lui offrant le blanc quasi homogène du plafond. Sans dire un mot, il écoute la déité lui faire part de ce qu’il a vu. Un cauchemar qui semblait réel. Qu’il ressentait et vivait comme tel. Un cauchemar qui n’est en réalité qu’un souvenir.
Marc ne bouge pas. Son pire souvenir. Et Tenebris n’a pas besoin d’aller plus loin pour que Marc sache précisément duquel il s’agit. Son visage se ferme, ses mâchoires se serrent. Un silence, avant qu’il ne reprenne. Expliquant qu’en contrepartie, Bowman avait vécu l’un des siens. Oui, ça, ça ne fait aucun doute. Aucune réponse ne franchit ses lèvres durant les secondes qui suivent. Les yeux rivés vers le plafond. « Il s’appelait Ronald.» Sa voix est calme, rauque à cause de l’alcool et des cigarettes. Il redresse lentement la tête, puis le reste de son corps pour poser le verre sur la table et attraper son paquet de cigarette presque vide. Portant sa drogue favorite à ses lèvres. « J’ai été adopté. Par la mauvaise famille. Ronald était le fils ainé, presque adulte.» Il déglutit lentement. Il sent sa propre gorge se serrer alors que les images l’assaillent. Cette nuit maudite qu’il a gardé enfouie en lui comme si elle n’avait jamais existé. Sans qu’il ne s’en aperçoive, sa main vient enserrer son bras. Il a grandi. Ronald est mort. « Il a découvert que j’avais des pouvoirs et a voulu s’en servir à son avantage. Mais j’ai refusé. Je n’étais qu’un gamin mais je savais déjà que la magie avait un prix. Ce fils de pute m’a…» Dis-le. Il se mord la langue, ferme les yeux et soupire. Il est temps de mettre un mot dessus. Dis-le, Bowman. « Ce fils de pute m’a violé.» Le dire, c’est accepter que ça s’est produit. Et ça fait mal. Comme une lame brûlante plongée dans ses entrailles. « Bêtement, j’ai cru que cette fois-là était suffisante. Mais il en redemandait plus, encore et encore et je ne pouvais plus supporter ça. Alors je lui ai tenu tête mais il a trouvé un autre moyen de me faire faire ce qu’il voulait.» Il expire la fumée de sa cigarette avant d’avaler une gorgée d’alcool. Il sent presque les mains de Ronald sur lui, comme un écho lointain. Une douleur fantôme. « Il est mort. Je l’ai tué. » conclut-il simplement. Il renifle, en secouant imperceptiblement la tête. Il est mort. Il ne sévira plus. Son premier véritable meurtre. Le plus difficile, le plus douloureux et celui qui lui pèse sur la conscience. Il s’y est confronté grâce à Russel.
Pour chasser le silence, il se racle la gorge et se tourne face à Tenebris. « J’ai vu ton pire souvenir, oui. Et j’en suis désolé. Je ne sais pas comment ça s’est passé, ni pourquoi mais… on a eu un échange et je me suis retrouvé à revivre un moment extrêmement joyeux .» Le sourire qu’il adresse à Tenebris n’a rien d’amusé, ne contient pas la moindre trace de joie. C’est un sourire triste, résigné. « J’ai vécu la mort de Ruhan à travers tes yeux. » Sa gorge se serre de plus belle. Les images reviennent. Les échos du désespoir et de ses propres larmes mêlées à celle de Tenebris. Ce souvenir le hante. « Et je comprends mieux, maintenant. T’as pas à me raconter ça tu n’en a pas envie, ni à te justifier. Juste… Je voulais simplement m’excuser pour la façon dont je t’ai traité par rapport à… à l’essence. J’ai agi comme un connard. Un connard ingrat, même. » Alors que ses mots franchissent ses lèvres, son regard se fait fuyant. Il a été un enfoiré avec Tenebris. Lui reprochant son sacrifice sans s’être douté ce que ça impliquait. Il est tellement habitué à prendre pour les autres, à accepter de servir de bouclier tant que ça protège ses proches qu’il n’a jamais songé à accepter l’aide qu’on peut lui offrir. Sans même être capable de dire merci ou de dire pardon. Ses lèvres s'entrouvrent et les mots sortent, sans artifices. Simples. « Pardonne-moi. »
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
Un silence pesant s'écrasait contre ma peau, alors que l'écho des mots s'estompait. Les paroles prononcées désormais étouffées dans l'absence indignée. Un temps perdu qui s'étirait, à ressasser les images que je cherchais à réprimer. Éloigner de mon esprit ces souvenirs qui n'étaient pas les miens. Trop vifs, trop poignants, trop douloureux. Une peine que je n'avais jamais vécue. Un secret dont je n'étais pas le gardien. Et pourtant, cette nuit là, les bribes perçues s'étaient imprégnées à jamais. Hantant les pensées déstructurées qui me constituaient, quand bien même je tentais de les résorber. L'horreur vue et la souffrance perçue n'étaient pas un fruit de ma provenance. Le carnage senti et la douleur ressentie avaient existé. Pour lui. Dans ce passé que jamais je n'aurais dû voir. Souvenirs enfouis en sa mémoire, pensées estompées refaisant surface, brisant les barrières. S'infiltrant en ces failles décorant les murailles imposées. Se déversant alentours, guidées par les volutes de ténèbres, vers l'originel. La constatation délaissait une saveur amère sur ma langue, que même le breuvage au fort caractère n'était parvenu à diluer. Un poids enserrant les poumons tandis que je peinais à déglutir. Respiration lente, lourde et hachurée. Un silence presque murmuré du bout des lèvres. Et enfin, l'absence de bruit était brisée. Comblée par son timbre de voix, qui me tirait de ma propre torpeur. Me ramenait à la réalité tandis que je m'imprégnais une ultime fois de l'ambiance. Sensation crépitante contre l'épiderme tendu et échauffé. Je clignais des yeux en reprenant contenance, chassant la brume qui voilait mon regard. M'attardant sur un point devant moi, scrutant le néant à côté de lui. Sa voix s'élevant doucement, s'épanchant alentour. Une nuance inconnue que je percevais pour la première fois. Une fragrance nouvelle imprégnait ses propos qu'il osait confier. Aveux soupirés et dévoilés à même la toile de la réalité. Un secret gardé enfoui à jamais qui ressortait. Un poids amer, une pression alourdie de remords, qui remontait. Un pan de son passé, qu'il partageait.
J'écoutais avec attention le moindre de ses mots. Pesais les silences qu'il laissait écouler entre ses bribes de paroles. Considérais le poids de ses propos, m'attardant juste assez pour les prendre en compte. Les comprendre, les réaliser. Mes iris dévièrent à un moment donné. Se déposant sur ses contours à mes côtés. Je ne pouvais plus m'arracher de la contemplation, figé sur son profil dessiné devant moi. Son visage contrastant avec le reste du paysage, m'intimait de ne pas le quitter du regard. Malgré l'ébriété qui tiraillait jusqu'à la pulpe de mes doigts, et les effluves alcoolisées qui embrumaient mes pupilles, je ne parvenais à me détacher de lui. Ce qu'il confiait était si important, si marquant, que je ne pouvais aucunement réagir autrement. Figé sur le canapé, l'un de mes genoux effleurant sa cuisse. Un soutien presque imperceptible qui s'imposait. Mes pensées étaient apaisées, silencieuses. Seul l'écho statique résonnait en mon crâne, ainsi que la voix de Marc. Sa signature particulière m'était perceptible, de part sa proximité, et la présence de cette aura calmait sensiblement les tremblements sous la peau. L'appréhension crépitait en mes entrailles, bien que j'avais pu percevoir la finalité des faits. Et chacune de ses répliques résonnait encore et encore en mon esprit. Mes mains se contractaient sur ma jambe alors que Marc avouait enfin. Confiait son plus grand secret qu'il voulait à jamais garder discret. Et à l'entendre de sa propre voix, je n'en étais que plus ébranlé. Sa propre réalisation s'épanchait en la réalité et déferlait en vagues, par millier. S'écrasant sur mes contours sous lesquels brûlaient des sensations chaotiques. Instincts primaires reprenant le dessus, estompant les échos ratés des battements irréguliers. Je pinçais les lèvres, la mâchoire crispée, et les traits étirés en le scrutant tandis qu'il continuait. Me calmant peu à peu, à mesure qu'il racontait ce qu'il avait fait. Qu'il s'était vengé.
Un sourire amer et légèrement crispé imprégnait mes lèvres. Un tiraillement persistant en ma paume, un crépitement au niveau des phalanges. Une envie de combler la distance creusée. D'apposer la pulpe de mes doigts sur sa peau, en un contact rassurant. Un soutien fébrile, précaire, un impact docile et sensible. Une pression essoufflée, une présence marquée. Un toucher subtil tel un effleurement éthéré. De quoi montrer que j'étais désolé. Mais avant même que je n'avais pu seulement envisager d'estimer cette volonté, il s'exprima à nouveau. Coupant mon souffle que je venais seulement d'inspirer. Rendant ma respiration plus hachurée. L'expiration mourant à même ma gorge, un simple soupir s'échappant de mes lèvres. Un murmure silencé qui s'estompait sous l'assaut de sa propre voix. Ses propres iris cherchant les miens, son visage tourné vers moi. Ses lèvres se mouvant alors qu'il exprimait d'autres regrets. Le sourire amer, avant qu'il ne se résolve à soupirer le prénom de Ruhan. Ainsi que les circonstances ayant amené à cela. La réalité me frappant à nouveau d'un coup, un poing percuté en plein visage. Mes lèvres s'entrouvraient sous la surprise, mon regard se perdant à nouveau. Ultime désordre qui défragmentait l'organe pulsant. Vide creusé se repliant et s'épanchant en même temps. L'immuabilité s'imprégnait, rendant l'inanité plus présente encore. Une pression lancinante sous les côtes, douleur marquée par les affres du passé. Souffrance vive d'un temps d'auparavant, qui résonnait encore en cet instant pourtant. Ce nom que j'avais jadis adoré murmurer. Ce nom, rattaché à tant de souvenirs, de moments passés avec lui. Cet être qui avait été le premier à voir ce que d'autres n'avaient jamais pu. Son nom hantant encore parfois mes pensées. Je fermais les yeux, soufflant lentement. Les regrets, lourdement expulsés par l'expiration s'envolaient. Longuement insufflés, les bribes et éclats d'une vie bien trop chargée. Phalanges repliées, agrippant le tissu qui me recouvrait. Paupières rouvertes, mais pupilles perdues. Brume tiraillant même jusqu'à mon esprit, tandis que Marc s'excusait. Pour la première fois, depuis que je le connaissais.
Je ne parvenais plus à poser mon regard sur lui. Lui-même s'était détourné, avait fui. Réalité bien trop déchirante à appréhender. Le vécu du passé de l'autre, sans l'accord autorisé, marquait les âmes tourmentées. Le désespoir, la désolation, tel le cœur au bord des lèvres. Agonie dans l'esprit alors que découlent à flots les excuses prisées. Vertige sinueux imbibant la substantialité, tandis qu'un mal de crâne fugace me prenait. Le poids de la réalité, à nouveau s'imprégnait. Marc avait été témoin de mon plus grand regret. De ma plus grande peine. De ma plus terrible perte. Et il s'en excusait. D'avoir provoqué l'essence et de l'avoir mal jugée, sans la connaître. D'avoir agit comme il l'avait fait, et d'avoir ainsi causé tout ce qui c'en était suivi. Son air désolé émanant jusqu'à s'écraser sur ma peau. Sensation perçue autant que les effluves qui nous entouraient. Tant d'amertume, tant de regret. Fragrances chargées plus intensément que les caractères des spiritueux. Un léger sourire défait étira mes traits, alors qu'il dépeignait sa personnalité. Son idiosyncrasie que je connaissais à présent. Ah ça... Je n'en disais rien pourtant. Aucune parole s'efforçant en dehors de ma gorge pour lui signifier qu'il avait raison. C'était un connard. Mais le sorcier avait aussi des bons côtés, qui ressortaient plus qu'il ne pouvait l'imaginer. Ou seulement oser l'envisager. Et cette constatation laissait un poids délicat dans ce creux en ma cage thoracique. Une saveur amère et salée sur ma langue lourde contre mon palais. Qui embaumait plus encore lorsqu'il murmura de le pardonner. Ma gorge s'enserra instantanément à l'entente des mots prononcés. Une demande si sincère, une volonté authentique. Une requête véritable, une supplique solennelle. Une faveur inlassablement et à jamais accordée. Une de celles que je ne parvenais point à lui refuser.
Recoin des lèvres étiré, voile brumeux sensiblement estompé. Iris aux tons colorés fades, qui s'ancrent sur le visage du sorcier. S'attardant sur ses contours que je ne me lassais de contempler. Un silence qui s'imprégnait, masquait presque les battements que je discernais sous les côtes. Les pulsations cognant à mes tempes tandis que je restais ainsi à l'observer. Scrutant ce que je n'avais jamais su apprécier auparavant. Ancrant cette image à l'arrière de mes paupières, lorsque je les fermais. Contours marqués sur mes rétines alors que le léger sourire s'étirait plus encore. Un soupir silencieux s'élevant au moment où je m'arrachais de la contemplation. Abaissais mon visage pour analyser mes paumes desserrées. Le poids en ma gorge s'était allégé, je pouvais enfin respirer. La vérité c'est que je peux pas t'en vouloir. Rire nostalgique et languissant s'épanchant alors que j'inspirais longuement. Gardant un instant le silence, en contemplant le moment présent. T'es pardonné, Marc. Soupir à peine murmuré, alors que je me réinstallais un peu plus confortablement sur le canapé. Mes épaules ancrées au niveau du dossier, une jambe à présent repliée vers moi. L'un de mes poignets reposant sur l'articulation repliée. Ma main libre reposant sur ma cuisse, triturant le tissu avec un semblant de nervosité. Un air fatigué étirait mes traits, ternissant les couleurs qui parsemaient mes iris embrumés. Ma voix s'élevait, tiraillée par les émotions d'un temps passé. Marquée par les sentiments nostalgiques ravivés par les effluves des regrets partagés. Tu as vu sa mort. Mais tu ne l'as pas vu de son vivant. Tu n'aurais pas pu. Je soufflais doucement, soupir distant. C'était le premier humain qui m'avait vu sous ma vraie forme et qui n'avait pas pris peur. Le seul être vivant qui avait su discerner quelque chose qu'il jugeait précieux au fond de moi et qui avait réussi à l'extirper des profondeurs de mon âme noircie. L'unique personne aux côtés de qui j'étais resté envers et contre tout. L'ultime individu à qui j'avais conté des récits de mon existence passée et avec qui j'avais partagé bien des secrets sur mon identité. Lèvres qui se refermaient, pincement autour de l'organe fragmenté, les dents serrant les lippes plissées. Expiration erratique, souffle extatique, qui se perdait dans le vide qui nous entourait.
Ruhan était... Tremblement imperceptible, agonie rongeant les contours de mon esprit. J'expirais lourdement, me reprenant subrepticement. C'était le seul mortel que j'ai jamais pu aimer. Un instant d'arrêt, un temps pour retrouver mes repères, reprendre le cours de mes pensées, sans m'y laisser sombrer. Le premier qui m'a rendu le plus humain au monde. Avant même que je n'en devienne un. J'inspirais longuement. L'ultime poids en cet organe reposant en cet aveu qui ne cessait de me hanter. Et j'ai dû le tuer, parce que c'était ce qu'il voulait. J'ai dû tuer l'homme que j'aimais, parce qu'il était déjà en train de mourir. Et qu'il préférait en finir en m'ayant près de lui, que d'agoniser seul en mon absence. Il agonisait d'un mal que je n'avais pu discerner. Les dons du chaman avaient dû bloquer mes capacités lorsque j'étais à ses côtés. Mais à présent tout ceci était du passé. Les seules marques qui restaient, n'étaient plus que les regrets. La douleur, et la souffrance, témoins de ces affres délictueuses. Toutes ces sensations perçues en sa présence m'avaient fait me sentir vivant, pour la première fois de mon existence. Et je les avais arrachées. Je m'en étais détaché à jamais. Du moins, c'était ce que je croyais. Un regard lancé en la direction de Marc, et à nouveau ces perceptions passées revenaient caresser l'épiderme d'un toucher éthéré. Contact abstrait mais pression présente de ces émotions oubliées qui s'imprégnaient en mon âme. En mon être déchu, en mon cœur éperdu. Je soupirais tristement, m'arrachant de ma contemplation. Penchant la tête en arrière pour me perdre sur le plafond, iris perdus dans le néant. Les limbes s'offrant à nouveau à mes pensées déstructurées. Mon corps tendu par la confession, se décontractait lentement. Un calme apparent, malgré la tempête qui grondait silencieusement. L'aveu flottait toujours dans l'atmosphère, teintait l'ambiance d'un orage précaire. Le silence effleurant mes contours, m'empoignant insidieusement. A nouveau, une grimace, un soupir fébrile, et j'élançais ma main vers lui. L'apposant doucement contre lui, enserrant délicatement sa peau, sentant sa cuisse sous le tissu de son pantalon. Je suis vraiment désolé pour ce qu'il t'a fait subir. Un faible murmure qui s'envolait, tournoyait alentour. Le souffle d'une sincérité à peine voilée, qui s'imprégnait en la réalité. La substantialité crépitant contre mes contours, les sensations ardentes brûlantes sous l'épiderme. Sentiments réprimés épanchés contre la peau écorchée. Je tournais la tête en sa direction en accrochant ses iris brillants. Tu mérites pas d'autant souffrir.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Un aveu. La vérité qui sort enfin de sa bouche. Un nom, un mot. Un terrible mot qui veut tout dire mais qui est bien trop difficile à prononcer. Le nommer, c’est l’accepter. Accepter la dure vérité, les marques qui jalonnent son âme. La première d’une longue série sans fin. Le nommer, c’est également s’en détacher. Libérer ce poids qui le fait couler depuis bien trop longtemps alors qu’il le garde enfoui au plus profond de son être. Cette brûlure au fer rouge ne l’a jamais autant torturé que ces derniers jours mais à présent qu’il l’accepte au lieu de la fuir, c’est presque comme si elle brûlait moins. Ou bien ce n’est qu’une impression. Peut-être bien. Il ne l’a jamais avoué à personne. Personne n’a jamais su ce qu’il s’était vraiment passé entre Ronald et lui, parce qu’il a fait ce qu’on lui demandait. Cacher le mensonge pour la bonne conscience des adultes qui l’avaient laissé tomber. Pour qu’ils puissent dormir la nuit en pensant avoir joué leur rôle. En grandissant, il s’était forcé à ne penser que ce n’était qu’un rêve, un souvenir qu’il s’était fabriqué de toutes pièces pour justifier sa haine envers Ronald. Un simple mécanisme de défense pour un esprit traumatisé. Et puis, du jour au lendemain, il avait cessé d’y penser. C’était toujours là, quelque part, mais inatteignable. Jusqu’à ce qu’il revoie Ronald. Jusqu’à ce que Rudra déterre ce souvenir. Et jusqu’à ce qu’enfin, il l’avoue à haute voix à Tenebris. Mais cet aveu ne serait pas arrivé sans cet échange. Sans cette dispute qui avait tout déclenché. Si Tenebris avait vu le pire moment de sa vie, Marc avait vu le sien. Et c’était tout aussi douloureux, rien que d’y repenser. Après les aveux viennent donc les excuses, qu’il pense sincèrement. Il s’était comporté comme un con, sans savoir ce par quoi Tenebris était passé, sans savoir ce que sacrifier son essence pouvait coûter. Cette vision l’avait conduit à aller parler à Ruhan en personne, pour y voir plus clair, mais des questions demeurent toujours. Elles le harcèlent même, résonnant en boucle dans son esprit. Telle une chanson bloquée dans son crâne depuis trois jours.
Son regard s’attarde sur Tenebris. Il l’a sous les yeux depuis longtemps maintenant mais il n’a jamais pris le temps de le regarder. Le voir sans l’observer véritablement. Ressemblait-il déjà à ça quand il était avec Ruhan ? Avait-il un autre visage ? Sans s’en apercevoir, Marc laisse ses yeux étudier chacun des traits du dieu, avec une attention nouvelle. Comme s’il le voyait pour la première fois. Vulnérable comme jamais, atteignable pour la première fois mais pourtant encore si éloigné de lui, appartenant un autre monde que le sien. Quand le silence se brise enfin, les yeux de Marc retournent s’imbriquer dans ceux de la déité. Il lui pardonne ? Malgré l’enfer qu’il lui a fait vivre au cours des dernières semaines ? Comment peut-il ne pas lui en vouloir pour tout ça ? Un éclat surpris colore momentanément les iris de Marc avant qu’il ne s’aperçoive qu’il y a autre chose. Il garde sa bouche fermée quand il sent Tenebris sur le point de continuer. Les mots comblent le silence, ignorent la distance. Sa voix porte l’empreinte nostalgique qui transparait sur son visage. Ruhan était l’humain spécial. Il l’aimait. Avant même qu’il ne le dise, avant même que ses mots le trahissent, Marc le savait. Cette perte l’avait changé à jamais. Est-ce qu’un dieu peut aimer ? Il a sa réponse. Un dieu est capable d’aimer et de souffrir de la même façon qu’un mortel, à la différence près que son tourment ne prend pas fin avant de longues années. Le poids d’une vie éternelle. Et les remords qui vont avec. Une brève image de sa main tenant une lame lui revient en mémoire. Pas sa main, celle de Tenebris. Il avait senti son désespoir et sa souffrance comme si elles étaient siennes. Et plus encore.
Son poing se serre. Il l’a vécu comme lui mais ce n’est pas pareil. Il n’a eu que la fin, pas le début. Il n’a pas vécu cette histoire comme Tenebris l’a vécu. Et il aimerait avoir les mots pour apaiser cette souffrance qui l’anime encore. Mais il n’en trouve aucun. Car aucun mot ne pourra apaiser une telle plaie. Et à le voir ainsi, humain, Marc comprend ce que Ruhan a vu en lui. La personne qu’il est, ce qu’il représente. Sans son masque de ténèbres, sans les artifices ni les mises en scènes théâtrales dont il a le secret. Celui qui porte sur ses épaules un poids que personne ne peut alléger. Il a fallu que Tenebris perde sa divinité et que Marc la porte en lui pour que le sorcier le comprenne enfin. Pour que cette barrière entre eux s’affaissent. Il n’aurait qu’à tendre la main pour le toucher et devenir plus que ce sorcier qui a passé un pacte avec lui. Un geste, c’est tout ce qu’il faudrait. Mais il ne fait rien. Sa main reste là où elle est, immobile. Pendant l’ombre d’un instant, il a pourtant failli le faire. Montrer sa présence, le soutien qu’il veut lui apporter. Peut-être même partager son fardeau, qui sait. Mais il doit aussi être réaliste. L’essence se manifeste énormément en présence de son vrai propriétaire. Elle veut retourner ne faire qu’un avec l’être divin qu’elle compose. N’est-ce pas elle qui nourrit ce soudain besoin de proximité ? Il ferme un instant les yeux en se détournant. Retient le soupir qui manque de franchir la barrière de ses lèvres. Il les rouvre en sentant ce contact, sa peau contre la sienne. Une sensation électrique. Une nouvelle fois, son visage se tourne vers lui, vers Tenebris. La phrase qui sort de sa bouche le frappe de plein fouet, si bien qu’il écarquille les yeux sous la surprise.
- Tu n’as pas à…
Il secoue imperceptiblement la tête, laissant le reste en suspens. D’une certaine manière, la suite l’en empêche. Car c’est la première fois qu’on lui dit ça. Qu’on lui dit qu’il ne mérite pas de souffrir comme il l’a fait alors qu’il en était persuadé toute sa vie. Une chose, que d’une certaine manière, il avait besoin d’entendre de la bouche de quelqu’un. Qu’il attendait qu’on lui dise pour l’accepter. Et c’est lui. C’est lui qui a prononcé cette formule magique pouvant le libérer. Le cœur de Marc martèle sourdement sa poitrine, chaque sursaut en étant presque douloureux. Il ressent à nouveau ce besoin d’aller vers lui. Cette proximité qu’il cherche. Il n’a plus à tendre la main car on l’a fait pour lui. C’est Tenebris. Ça a toujours été Tenebris. Il l’a plus aidé en quelque mois que n’importe qui au cours de son existence. Cette main tendue qu’il attendait depuis si longtemps, elle vient de lui. Ses barrières se sont affaissées en sa présence, sans même qu’il ne s’en aperçoive. Il ne les dresse plus quand il est dans la même pièce que lui car il sait qu’il n’en a pas besoin. Il ne laisse jamais personne entrer dans sa vie, il ne laisse personne l’approcher assez pour savoir qui il est et pourtant, Tenebris est l’exception. Peut-être même le seul être dans cet univers à n’avoir jamais partagé autant de chose avec lui, volontairement ou non. Son regard se perd sur ce visage qu’il apprend à connaitre pour de vrai. Son souffle se fait soudain irrégulier alors qu’il a soudainement la sensation de manquer d’air. Ce besoin de proximité devient obsédant. Il l’attire vers Tenebris comme un aimant. Et pendant un bref instant, Marc cesse de lutter. Abaissant pour de bon ses barrières, rendant les armes. Peut-être qu’il regrettera. Peut-être pas. Saisi d’une pulsion, son corps s’anime d’un seul mouvement pour que ses lèvres finissent enfin par toucher celle de Tenebris. Que ce soit l’essence qui le pousse vers lui ou que ça vienne tout simplement de son propre désir… Pour l’instant, rien ne compte. Plus rien ne compte. Car comme pour les couper du monde, les ténèbres les entourent. Pour que rien ne les atteigne.
Morgan Reed
Dieu
More about you : Ceos, Eosphoros, Hesperos
Codename : Tenebris
Pouvoirs : Changement de forme et de plan. Télépathie et emprise. Hallucinations et cauchemars. Création de matière spectrale et contrôle des ténèbres.
What has become of me ? I stare down at the ground that's under me and I'm feeling like I'm sliding below. You've taken enough from me, trying to ruin me, there's no more hope. I feel your knife slicing my throat like a chokehold. You're tightening the rope as I grow cold, fighting to hold. Another part of me has died as I've tried to show this side of me I hide. Denying to know, I'm dying alone and I'm so low.
Let me become what I want You won't believe what I ponder I saw the world through a notch Somewhere within I uncovered Everything that I once was Dwelling beyond my subconscious I saw myself as a god That’s when I realised I wasn't
Simple murmure qui s'élevait en un écho irrégulier, au rythme d'une respiration saccadée. S'estompant parmi l'atmosphère ambiante, mourant dans un silence apprécié. Sa propre voix se coupant brusquement, à l'entente des mots prononcés, et sincèrement pensés. Souffle perdu dans le temps, alors que la pression exercée sur sa cuisse s'intensifiait sensiblement. Contact prolongé, soutien témoigné. Coin des lèvres élevé en un sourire simplifié et compatissant. Amertume rongeant le bout de ma langue tandis que je clignais des yeux. Les anciennes images incrustées à l'arrière de mes paupières, comme envolées une fois la vérité éclatée. Une fois le secret avoué, confessé dans l'intimité de cet instant. Un moment qui semblait se perdre dans le temps, lui-même ralentissant, se figeant presque dès que je rouvrais les yeux. Iris embrumés scrutant les contours empreints d'immuabilité. Le regard du sorcier perdu quelque part en ma direction, s'attardant sur ce visage possédé. Un éclat au creux de ses pupilles, marquant mon intérêt. Attention captivée par le temps d'arrêt, intention oubliée, alors que je contemplais les iris colorés. M'y perdant un instant, observant la lueur s'épancher en arabesques sur son regard assombri. Pupilles encore plus obscurcies, sensiblement opacifiées. Sa prestance et sa présence, un spectacle qui s’imprégnait en mon être, rompant ce silence sous les côtes. Echo réverbéré, répercuté par les battements déstructurés et désorganisés en ce creux de ma cage thoracique. Le paysage découvert sous mes yeux, une sorte de nouveauté que j'avais cependant longtemps admiré parmi l'humanité. L'éclat émanant de lui différait pourtant de tous ceux que j'avais pu rencontrer. Sur ce long chemin pavé de malheur, qui constituait mon existence même, en mon for intérieur. L'observer s'animer autour de lui, telle une aura imprégnée par l'essence qu'il gardait, une beauté inégalé et inespérée. Une tension ambiante qui crépitait contre ma peau échauffée, alors que je me perdais dans cette contemplation qui m'appelait. Sensation transcendante et marquante, poignante, enserrant à même ma gorge brûlante. Respiration hachurée, souffle exalté du bout de la langue, effleurant mes lèvres entrouvertes. Soupir à peine exprimé des poumons compressés. Expiration entrecoupée, alors même que je me sentais plonger en son regard si imprégné. Et que parmi les ombres qui s'estompaient alentour de ma conscience, je sombrais. Percevant l'impact des ténèbres qui crépitaient en effleurant la surface de l’errante ignorance.
When I asked how you colour the sky And you told me I already knew When I asked could I see through your eyes And you told me I already do Oh then why do I feel like a fool
La tension parsemait l'atmosphère si lourdement chargée, m'enchaînant sur place, à même figé sur ce canapé. Des liens invisibles et indicibles, indiscernables tant je me sentais emporté par le reste de l'instant. Par ce moment qui perdurait, en un silence écrasant, statique assourdissante à mes tympans. Le regard de Marc, plongé sur moi, me rappelant les iris embués de cet être jadis adoré. Admiré, aimé, en ce temps d'auparavant. Affres du passé qui se répercutaient en ce moment présent. Langue alourdie contre le palais, gorge enserrée par le poids imprégné. Je ne parvenais à me détacher de cette vision inespérée. Sensiblement familière, dans ce regard partagé, mais également authentique de nouveauté escomptée. Sensation éthérée dévalant en cascade la peau échauffée, souffle d'un toucher abstrait sur mon échine qui se tendait. Courbure entamée, sensiblement annoncée, alors que les contours du sorcier se mouvaient. Son corps élancé sous l'impulsion la plus précaire et brute, archaïque émotion qui s'inscrivait dans la réalité. Altérant l'instant de par l'authenticité du moment. La pression de sa peau en un contact tangible sur la mienne, sa chair écumant mon souffle perdu du bout de sa langue. Impact ardent de ses lèvres s'écrasant fermement sur les miennes. Comblant la distance creusée depuis la toute première rencontre, celle qui n'avait cessé de se prononcer en apparence, mais qui n'avait été qu'emplie depuis les profondeurs. Espacement inexistant en réalité, alors que le contact se prolongeait d'autant plus longuement. Alors que je m'abandonnais en l'instant. Fermant les paupières brusquement, savourant la fragrance émanant du sorcier. Mes lèvres se mouvant en un instinct primaire, cherchant la texture des siennes sous l'effleurement précaire. Ma main sur sa cuisse se retirant prestement pour enserrer sa hanche délicatement. Remontant lentement dans son dos, accrochant sans le remarquer le tissu de son haut. Une certaine précipitation tandis que je réalisais, m'éloignant juste assez pour relâcher la pression. Rouvrant les yeux une fraction de seconde, pour contempler son visage. Observant ainsi les éclats brillants et blancs, qui parsemaient le voile opaque nous entourant. Mon regard se perdant à nouveau sur son visage, quémandant silencieusement un ultime contact. Ma main agrippant sa nuque, doucement, effleurant les mèches de ses cheveux. Texture adoucie sous la pulpe de mes doigts tremblants, qui enserraient presque tendrement sa peau. M'approchant à nouveau, l'amenant lentement en ma direction afin qu'il se repose sur mes cuisses. Le regard brillant et embrumé par cette sensation, les iris brûlants d'ardeur sous le poids de l'émotion qui m'assaillait, je ne pouvais m'arracher de lui. Me perdant plus à même dans l'instant, alors que je capturais encore la saveur qui émanait de ses lèvres. Imploration doucereuse du bout de la langue, un soupir écrasé par l'émail. Une plainte étouffée sous l'assaut obtempéré, un souffle exalté par la pression exercée. Un écho estompé par l'avidité du baiser.
Tell me there's a path to take Where I'll know I will get another day Tomorrow If you could just elaborate I'll follow Cause I don't know if I'm awake
Une sensation s'épanchait en mes entrailles, remontant vers l'organe aux battements désordonnés. Les répercussions, tels des échos déstructurés, s'évadant sous les côtes sans plus jamais s'arrêter. Une étincelle qui jaillissait du plus profond de mon identité, un éclat au cœur de ma forme spectrale, qui brillait. Qui grandissait, s'imprégnait des perpétuelles émotions qui m'assaillaient. S'inspirant des mémoires auparavant ressenties pour autrui, et pensées par lui actuellement envahies. Son visage imprégné à l'arrière de mes paupières fermées, l'éclat de son regard marqué à jamais en mon esprit. La texture et la saveur de ses lèvres, ancrées sur les miennes. Le contact contre sa peau, une sensation de picotement le long de mes phalanges, un tiraillement électrique au niveau de la pulpe. Un vide qui se remplissait par les flots des émotions, les effluves parfumées embaumant contre mon palais, titillant le bout de mon nez. Soupir essoufflé qui s'arrachait de ma gorge tandis que je ne cessais de l'embrasser. Encore et encore, sans m'arrêter. Le souffle me manquant, son toucher contre ma peau me coupant la respiration. Mes mains venant lentement s'apposer sur son visage par après, encerclant ses joues échauffées de mes paumes encore tremblantes. La pression s'adoucissant, le contact s'attardant toujours pourtant. La respiration erratique, mirage chaotique des échos ratés estompés en ce creux évidé. Espace vide à présent empli d'une émotion aussi ardente qu'un brasier, un incendie de sensations qui crépitaient sous ma peau. Un sentiment qui s'encensait en mon être et qui consumait mon âme. Identité adonnée, moi-même abandonné, au creux de ses mains.
Let me become what I'm not I don't decide what I ponder I saw the Earth as it was The moment I fell to its aura There I erased all my thoughts Teaching myself to discover Everything I thought I lost Hiding right where I left off
Un crépitement en mon esprit, tel un écho statique qui résonnait. S'épanchait en mon crâne, effleurant des pensées emmêlées aux souvenirs impossibles à oublier. Un contact éthéré, un poids abstrait qui s'étendait et tirait sur un fil invisible. Un lien qui se créait durant l'échange, tel un partage mental, comme lorsque j'étendais mon esprit. Mais bien plus puissant, bien plus présent. Guidé par les ténèbres qui caressaient ma peau, tentaient de s'imprégner en mon être, cherchant l'origine des pensées qui s'écoulaient. Point d'ancrage en l'esprit du sorcier, dont les contours devenaient de plus en plus flous, à mesure que l'échange se déroulait. Un pan de l'âme comme absorbé et confondu en l'esprit de l'autre. La pression sur ses lèvres renforçant ce fil qui reliait le partage. Mémoires, souvenirs, images. Sensations, émotions, sentiments. Une épreuve sensibilisée par l'impact répercuté du baiser. Où j'avais l'impression de fondre sous son contact et de m'imprégner de lui, en lui, autour de lui. Une perception altérée, où ses propres ressentis martelaient mon être, encensaient les sensations qui crépitaient alentour de nous. Une sorte de légèreté mêlée à une pression alourdie par les points combinés et connexions établies. Avalanche d'émotions qui m'empoignaient, tandis que je sombrais plus encore. Éloigné de la surface, cherchant l'air au travers de ses soupirs, tentant de supporter le manque. Mais l'écho statique grésillait trop ardemment en mon esprit, m'arrachant des plaintes sous l'assaut de la nouveauté. Aucunement habitué par la présence de cet être particulier, dans mes pensées, du moins de cette manière. Je pressais un ultime contact fugace sur ses lèvres, y déversant une émotion du bout de la langue, sur le soupir qui y glissait. M'éloignant par après de lui, m'extirpant de la chaleur qui émanait de ses pores. Rejoignant peu à peu la proximité des ténèbres ambiantes, accolant mon dos au dossier du canapé. La texture presque indicible tant je percevais encore les touchers partagés, même par après, tels des impacts éthérés et contacts abstraits. Élevé en mon âme, libéré, léger comme jamais, je ressentais encore ces sensations comme si elles perduraient. Retombant lentement en dehors de l'osmose tandis que la réalité me rattrapait, mon souffle hachuré s'évadant dans les airs encore imprégnés par l'instant. L'essence s'évaporant doucement, telles des effluves d'une fragrance qui s'estompait. Les arabesques opaques et assombries tournoyant alentour de nos contours pour se dissiper. Rompant le lien ainsi créé, raccrochant mon attention ébranlée à une vérité. Me ramenant toujours plus à la réalité.
I'm unsure if I should ask But I question everything that I see I venture into my past Realising that it's in front of me I sit with hands in my lap Piecing together these memories I left you where I began Knowing that I'm what you used to be
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Le livre reposait sur la table du salon, ouvert sur un sortilège que je connaissais depuis des lustres. En une autre langue que celle habituellement pratiquée. Les arabesques ancrées sur le papier à moitié déchiré s'imprimaient en mon esprit. Tandis que je m'attelais à retenir les incantations de ce dialecte ancien et quasiment disparu. En dehors des quelques sorciers et mages qui connaissaient encore cette langue et qui la faisait perdurer, plus aucun être mortel ne l'utilisait. Encore une perte culturelle qui n'était que peu marqué dans l'histoire de l'humanité. Dommage. Un soupir s'échappait de mes lèvres alors que je continuais à triturer les ingrédients dispensés sur la table. Mes mains se mouvant afin de créer une fournée de nouveaux pièges. Bowman n'avait pas lésiné sur leur intensité et quantité depuis mon départ. Et encore moins depuis que j'étais revenu, complètement à l'agonie. Ses protections n'avaient jamais été aussi bien ficelées et incrustées, et l'image m'arrachait un ricanement désabusé. L'amertume sur ma langue, tandis que je me concentrais sur l'entrelacement final du piège. Le terminant aisément, en marmonnant la fin de la formule. Le sortilège prenant instantanément place dans l'espace constitué par l'objet enchanté. J'esquissais un rictus amusé avant de me redresser, refermant le livre et commençant à placer les pièges aux endroits spécifiés. Désignés par la présence des anciens charmes déposés par le sorcier. Je retournais dans le salon une fois terminé, et attrapais le bouquin pour aller le ranger dans la bibliothèque improvisée. D'autres ouvrages ancestraux sur la magie, noire principalement, décorant les étagères, presque pleines à craquer. M'éloignant du mur chargé par les écritures, je me dirigeais vers ma chambre. M'attardant un instant sur la commode qui gardait la lame récupérée par Marc, et qui avait failli l'achever. Qui l'avait tué. Je secouais la tête, chassant ces pensées de mon esprit, m'approchant de la fenêtre. L'ouvrant en grand, inspirant l'air frais de l'extérieur, savourant la caresse sur ma peau. Mon regard se perdant sur les contours en contrebas, effleurant le néant, le vide qui s'installait entre les mortels. Mon intérêt se laissant capturer par la vie qui défilait en dehors de l'appartement. Un spectacle que j'aimais étrangement observer, durant ces instants où je ne sentais pas la pression constante de la situation sur mes épaules. Ces moments ne se manifestant qu'en de très rares occasions.
Un écho particulier interrompit le flux de mes pensées, m'arrachant de ma contemplation. Tiré de ma torpeur diurne, je clignais des paupières avant de refermer la fenêtre. M'attardant sur les éclats qui caressaient mes tympans, reconnaissant les bruits caractéristiques de ses pas. Percevant sa signature si familière, ainsi que le froissement des sachets en papier qu'il devait tenir entre ses mains, ou sous ses bras. Mes pieds effleuraient la texture du sol alors même que je refermais la fenêtre et quittais la chambre. Me laissant diriger par les bruits qui résonnaient dans l'appartement, m'approchant de la porte d'entrée. Non loin du palier, je discernais ses contours alors qu'il soulevait quelques sachets. Les déposant sur la table de la salle à manger avant de s'en détourner. Marc refermait la porte derrière lui en rajoutant une protection, avant de revenir et d'extirper le contenu. Il avait dit partir pour aller n'acheter que le stricte nécessaire, afin qu'on ne se fasse pas remarquer. Les sbires de Hellhound rôdaient toujours alentour, et la prudence restait notre meilleure alliée. Il n'avait pas été repéré en chemin, et c'était une assurance supplémentaire, un instant où je pouvais respirer, sans m'inquiéter. Je savais qu'ils allaient nous retrouver, mais en attendant, je profitais de ces moments d'accalmie, comme s'ils étaient les derniers. L'avenir était incertain, me semblait si vague et troublé. Je ne savais pas ce qui allait nous arriver, et peut-être qu'il était préférable de ne pas trop y accorder d'importance. Mais l'angoisse me rongeait continuellement les entrailles durant ces nuits emplies de solitude, où l'insomnie crépitait en mon esprit. Je fermais les yeux un instant, tentant de reprendre contenance. Laissant un soupir s'échapper de mes lèvres, alors que je frottais mes paupières, massais mes tempes. Un écho captura mon attention, alors que quelque chose était jeté sur la table. Un bruit mat, solide, qui m'interpellait. Les sonorités d'un sachet en plastique caressant mes tympans. Je rouvrais lentement les yeux, mes iris s'attardant sur le paquet de sucettes, apporté par le sorcier. Mes pupilles embrumées par un voile brillant se perdant sur les sucreries. Et avant même que je ne puisse réagir autrement, je me redressais. Mon visage remontant vers le sien, le scrutant avec appréhension. Un étonnement teintant les orbes de mes yeux tandis que je contemplais les siens. M'y perdant un court instant. Je croyais que tu voulais prendre uniquement ce qui était nécessaire... ? L'incompréhension marquant le ton dans ma voix, bien qu'une bribe de gratitude et de reconnaissance s'imprégnait dans mon souffle estompé. Un remerciement marqué à même mon visage, étirant mes traits. Les iris brillants, je me détachais difficilement de ma contemplation. M'y arrachant involontairement, m'attardant à nouveau sur les sucreries. Apposant ma main près du paquet, dont je triturais les bords plastifiés. Marc, Marc, Marc... Un ricanement léger s'échappait de ma gorge alors que j'ouvrais le plastique, récupérant un bâtonnet sucré et coloré. Retirant l'enveloppe avant de la déposer sur le bout de mes lèvres, humant le parfum acidulé, savourant la fragrance des cristaux fondant sur ma langue. Un fin pli dessiné sur mes lèvres qui s'étendaient en un sourire amusé et sincère. Aussi éclatant que la lueur brillante que je savais pétiller en mon regard. Merci. Mes iris retournaient déjà s'ancrer sur son corps familier. Revenaient s'attacher à ses contours appréciés. Mon attention toute tournée vers le sorcier alors que la complicité s'imprimait à même mes traits. Son visage à lui, marqué par une expression particulière emplie de sincérité et de malice. Je souriais, me perdant sur sa silhouette, absorbant sa forme de mon regard embrumé. Sombrant dans l'instant même, alors que le temps semblait ralentir alentour. Coupé du monde autour de nous. Seul avec lui, dans ce moment partagé. Une sorte d'intimité qui marquait l'instant. Un temps passé à le contempler. Sans pouvoir m'en détacher.
Ⓒayaraven
Marc Bowman
Sorcier
More about you :
Codename : Pride
Pouvoirs :
Manipulation des ténèbres ► Marc possède la capacité de manipuler à sa guise les ombres. Il faut cependant que ces dernières soient présentes. Dans une pièce intégralement noire, son pouvoir ne lui servira à rien.
En plus de les manipuler, il peut également s'en servir pour guérir certaines blessures et recharger son énergie. C'est une capacité passive et elle ne sera jamais aussi efficace qu'un vrai repos.
Magie ► Marc est un sorcier, ce qui le rend donc logiquement capable de maîtriser la magie. Il est capable de lancer certains sorts après les avoir appris - et non naturellement comme avec sa maîtrise des ombres. Il peut également détecter les autres sorciers et reconnaître une empreinte magique s'il y a déjà été confrontée.
I'll return from darkness and will save your precious skin. I will end your suffering and let the healing light come in. Sent by forces beyond salvation there can be not one sensation. World on fire with a smoking sun. Stops everything and everyone. Brace yourself for all will pay. Help is on the way.
Les ténèbres s’agitent en lui. Toujours aussi fortes, mais bien plus faciles à contrôler qu’avant. Comme s’il suffisait simplement qu’il arrête de lutter contre les sentiments qui le rongent pour que tout devienne plus facile. Accepter ce qu’il ressent et bien plus encore. Il sait qu’il ne les contrôlera jamais parfaitement, puisque cette puissance ne lui appartient pas. Mais entre les contrôler un peu et pas du tout, il y a un pas énorme qui a été franchi. Les incidents se font moins réguliers depuis. Une chose de moins à se soucier. Il a un nouveau problème, ceci dit. L’impossibilité de se sortir un certain dieu de la tête. Il s’interdit de repenser à la proximité qu’ils ont partagé, en vain. Et même alors que ses yeux tentent de déchiffrer une page écrite dans une langue ancienne, il peut encore une fois sentir ses pensées se tourner vers cette soirée. Marc ferme les yeux, soupire et secoue la tête pour s’obliger à se concentrer. Son menton reposant au creux de sa paume, il pose une nouvelle fois un regard pensif sur ces mots qu’il cherche à traduire. Son autre main baisse et abaisse mécaniquement le capot de son briquet, produisant un claquement régulier. Cette langue ressemble à du latin sans vraiment en être. Probablement un dialecte dérivé. Cela ne lui facilite pas la tâche. Il doit s’y reprendre à deux fois pour certaines phrases et ça, c’est quand il parvient à rester concentré suffisament. Mais il doit comprendre ce sort, comprendre ses mécanismes. Les noms ont un pouvoir et Hellhound connait le sien. Il compte reprendre l’avantage en découvrant sa véritable identité.
Il ferme une nouvelle fois les yeux, portant ses deux mains à ses tempes. Un soupir franchit la barrière de ses lèvres. C’est plus qu’énervant. C’est frustrant. Avancer d’un pas, reculer de trois. Et c’est comme ça depuis bien trop longtemps. Il rouvre les yeux, repousse le tabouret du comptoir et décide de tenter. Au point où il en est, franchement. Il a épuisé tous les sorts de sa connaissance pour obtenir le nom de cette garce. Il est à court de patience. Il regarde autour de lui. Tenebris n’est pas dans la pièce. Concentré comme il l’était dans ses recherches, il ne l’a même pas entendu quitter le salon. Mais il sent sa présence, grâce aux ténèbres, donc son inquiètude meurt dans l’oeuf. Pas besoin de s’en faire. C’est un grand garçon. Pas vrai, Marc ? Pour éviter de se remettre à penser à lui encore une fois, il rassemble ce dont il a besoin pour le sort. Mécaniquement, en suivant avec attention les étapes. Les trois premières sont assez simples. La quatrième en revanche… Marc se retrouve avec deux fioles d’ingrédients qui pourraient faire parti du sort. Une dans chaque main, son regard passe d’un contenant à l’autre, hésitant. Pourquoi les gens écrivent pas dans un latin classique et compréhensible pour tout le monde ? Cela lui donne presque envie d’écrire des sorts dans un mélange de gaelique et de valyrien, pour leur apprendre la vie. Entre une langue morte et une langue fictive, il peut presque plaindre les imbéciles qui tenteront de traduire ses conneries. Il secoue la tête, encore une fois et porte son choix sur l’ingrédient qui ressemble le plus à ce dont il a besoin. Seul au milieu de la cuisine, le voilà penché sur le récipient dans lequel il ajoute le contenu de la fiole en serrant des dents. Il se recule vivement, au cas où. Il y a le risque que ça lui explose à la gueule, s’il s’est trompé.
Mais pour l’instant, ça a l’air de fonctionner. Du moins, ça n’a pas explosé. Il quitte sa position immobile pour s’avancer et poser ses mains sur le comptoir en prenant une grande inspiration. Okay, et de quatre. Maintenant, il va falloir prononcer l’incantation. Et là, ça va être drôle. Il déteste ces sorts qu’on doit prononcer à voix haute. Pour peur que t’aies pas la bonne façon de prononcer un mot, tu l’as dans l’os. C’est bien plus facile quand il s’agit d’un sort plus moderne. Il inspire, expire. Pour l’instant, rien n’a explosé, mais ça peut changer. Il ferme les yeux, se concentre et puise en lui l’énergie dont il a besoin. Il prononce parfaitement la première phrase. Puis la deuxième. Au début, il ne se passe rien. Le calme plat. Pas la moindre perturbation dans l’atmosphère. Mais c’est là. C’est presque impossible à percevoir au début, tant c’est faible. Mais avec les secondes, ça gagne en intensité. Grandit. Il peut le sentir. Il est temps de prononcer la troisième phrase. Il y a moyen que ça fonctionne. Il faut que ça fonctionne, car sinon il aura épuisé toutes ses cartes pour obtenir le véritable nom d’Hellhound. Ses poings se serrent. Il prononce ces mots étranges pour terminer l’incantation. Sauf qu’à l’instant où il prononce le dernier mot, il prend conscience de l’erreur qu’il a commise. Et merde. Il aurait dû choisir l’autre fiole.
Car le sort lui explose effectivement à la gueule. Une impulsion le projette quelques mètres plus loin alors qu’un bruit sourd résonne dans l’appartement et qu’un juron s’échappe de la bouche de Marc. Il s’écrase lourdement contre la table basse qui s’effondre sous son poids et la violence du choc. Il lui faut quelques secondes pour retrouver ses esprits et comprendre qu’il vient de faire un vol plané. Il laisse reposer sa tête sur le sol en grognant. Putain de merde. Mais quel con. Étendu au milieu des débris, il se demande s’il ne va pas rester là le temps que le paysage arrête de tourner. Il a presque l’impression que les ténèbres sont en train de se payer sa tête, mais peut-être qu’il extrapole. Au moins, Tenebris n’a pas vu ça. Et encore une fois, pour lui prouver qu’il n’est qu’un débile, l’univers décide de la lui mettre sévère. La voix de la déité résonne dans la pièce. Affolée par tout ce vacarme. Tenebris rapplique en l’appelant. Et ne le voit pas, parce que Marc est dissimulé par le canapé. Oh, ta mère, l’univers ! En soupirant et en s’avouant vaincu, il se redresse à moitié en s’aidant de ses coudes.
- Chuis là. J’vais bien répond Marc d’une voix blasée.
Un grognement s’échappe de ses lèvres alors qu’il s’aide cette fois du canapé pour se redresser.
- J’ai foiré mon sort commence-t-il à expliquer en redressant la tête vers Tenebris. T’as le droit de te foutre de…
Ses mots ne franchissent pas ses lèvres quand il s’aperçoit que la déité est… à moitié nue et seulement vêtue d’une serviette. Oh. Okay. Le cerveau de Marc affiche une erreur critique. Plus rien ne répond. Il déglutit avec difficulté pour finir sa phrase.
- … ma gueule…
Il a chaud d’un coup. Et il ne sait pas si c’est à cause de l’explosion qu’il s’est prise en plein visage ou simplement à cause de Tenebris et ses cheveux ruisselant. Et le vertige, c’est le choc de sa chute ou autre chose ? Marc cligne des yeux et désigne d’un vague geste du bras un point de la cuisine, sans lâcher la déité du regard
- Je… Euh… C’est que… Je me suis planté d’ing… Je me suis cogné la tête, non ?
Un rire nerveux s’échappe de sa gorge alors qu’il porte un main à l’arrière de son crâne en grimaçant. Sa propre connerie est à pleurer de rire ou dépît. Ou les deux. Au choix. La pièce tourne toujours et ses pensées sont désordonnées. Encore plus en présence de Tenebris qu’il n’arrive pas à lâcher des yeux, même s’il le voudrait avant que ça devienne encore plus gênant. Il est où, l’épuisement qui le fait presque s’évanouir quand on a besoin de lui ? Il en aurait bien besoin pour se sortir de cette situation plus embarrassante pour lui.
Il jette sa cigarette sur le pavé. Recrache la fumée et continue de marcher sans s’arrêter. Ses recherches n’ont rien donné. Ses contacts sont muets. Encore une fois, il ressent la présence de cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête. La frustration lui enserre la gorge. Dans le calme apparent de la nuit qui reprend ses droits sur une ville endormie, Marc sent sa propre agitation. Sous tension, se battant contre un adversaire bien trop fort pour eux. Elle a toujours un coup d’avance. Comment gagner quand un ennemi peut prévoir vos actions ? Elle savait qu’il allait se tourner vers le peu d’allié qui lui reste dans le monde magique. Elle savait qu’il allait les contacter. Et il aurait du s’en douter. L’échange ne s’est pas passé comme il l’avait prévu, comme en témoigne l’oeil au beurre noir qu’il arbore à présent et l’entaille qui orne le côté gauche de son front. Hellhound avait réussi à retourner ses derniers alliés contre lui. Craignant davantage cette folle furieuse que lui. Il a dû prendre la fuite. Et ça lui laisse un goût amer dans la bouche. Tout en continuant d’avancer, Marc lève les yeux vers le ciel sombre, sans lune. Un petit coup de main, ça aurait été trop demandé, visiblement. Il ne s’est jamais adonné au mysticisme, à la vénération des divinités qui ont forgés l’univers dans lequel il évolue. Mais alors qu’il est aussi en train de chercher un moyen de leur sauver la mise, une petite aide de leur part n’aurait pas été de trop. Mais il devra se débrouiller.
Il rentre la tête dans les épaules, calant ses poings au fond de ses poches. Sa nuque le tiraille, l’obligeant à jeter un coup d’oeil méfiant derrière lui. Il ignore si c’est de la parano ou s’il est véritablement observé. Il devient difficile pour lui de différencier la méfiance à l’extrême du vrai danger. Et à raison, si on prend en compte ce qui s’est passé ce soir. Il doit à tout prix retrouver Aidan. Aidan est son dernier espoir. Un espoir introuvable. Ses pas résonnent sur le bitume et cette impression ne le quitte pas. Elle se renforce, même. Il tend sa magie vers la source du problème mais ne détecte rien d’alarmant. Il bifurque sans crier gare au coin d’une rue et continue d’avancer. Il tourne une nouvelle fois à l’intersection suivante. Cela l’oblige à faire un détour mais il préfère ne prendre aucun risque. Son agitation ne cesse de s’accroître au fil des secondes. Et encore plus quand l’impression revient. Ce n’est peut-être pas de la paranoïa tout compte fait. Il est à une rue du refuge et il doit se rendre à l’évidence. Il a été suivi. Il s’arrête, s’obligeant à garder une respiration calme et contrôlée. Ils les ont retrouvés. Ce n’était qu’une question de temps avant que ça arrive. Mais c’est arrivé. Il fait craquer sa nuque doucement en prenant une grande inspiration, les yeux clos. Il tend son esprit vers celui de Tenebris. Cette connexion entre eux va servir dans le bon sens, cette fois.
Je suis pas loin mais j’ai été suivi. Ils nous ont retrouvés, prépares-toi à prendre le large. Je vais les semer.
Il reste volontairement silencieux sur ses intentions, car il sait très bien que Tenebris va l’en empêcher. La dernière fois que la déité les a croisé, il est rentré avec une balle dans les côtes. Marc se met à avancer, calmement. Contrôle ses émotions. Inspire et expire. Tente de ne pas céder à la rage qui l’agite alors que les souvenirs de ce soir-là s’impose à lui. Il rentre dans le premier immeuble sans porte sécurisée qui se présente à lui. Leur refuge est deux batiments plus loin. C’est trop près mais c’est la seule alternative qu’il a trouvé pour gagner du temps. Monte les étages quatre à quatre en s’assurant qu’ils le suivent toujours. Arrivé dans la porte menant sur le toit, porte fermée bien entendu, il invoque juste assez de pouvoir en lui pour ordonner aux ténèbres de forcer l’ouverture. Alors qu’il entends ses poursuivants gagner du terrain, il observe les filaments sombres se former sur la serrure. Un craquement plus tard, la porte s’ouvre.
Lorsque les deux sbires arrivent sur le toit, ils ne trouvent qu’une plateforme vide. Ils se figent, poussant des exclamations surprises. Un bruit léger retentit. Après avoir bondit du petit bâtiment entourant la sorti, Marc atterrit entre eux et la porte. Un genou au sol, le poing serré, il redresse lentement la tête vers les deux autres alors qu’un voile de ténèbres recouvre ses yeux. Un sourire sadique se dessine sur ses lèvres quand il voit l’étincelle de peur qui anime le visage des autres. Il abaisse son poing d’un geste vif, son sourire se transformant en grimace de rage. Il sent les ténèbres parcourir ses veines, se perdre dans le sol et gagner en puissance. Elles se dressent d’un coup, empalant celui qui ne s’est pas reculé en sentant le coup venir. Un gargouillis étrange sort du trou que l’une des extrémités a percé dans sa gorge. Il n’en reste plus qu’un. Qui se recule de plus belle en voyant Marc se redresser et poser son regard noir sur lui. Le sort fuse de sa main et Marc l’esquive d’un pas vif sur le côté. Chacune des tentatives pour le tenir à distance se solde par un échec devant la détermination de Bowman à régler ses comptes avec ces enfoirés. Cet enfoiré, vu qu’il n’en reste plus qu’un.
Marc ? Qu’est-ce que tu fais ?
La voix de Tenebris dans sa tête. Marc l’ignore sciemment alors qu’il n’a plus qu’un pas à faire. L’adversaire a fini par atteindre l’extrémité du toit, son repli se heurtant au rebord.
Tire-toi, je te rejoins dès que j’ai terminé.
Sa main se referme sur le col de l’autre sorcier qui pousse une exclamation surprise. Les ténèbres matérialisent une lame tranchante dans son autre main. L’avantage certain que Marc possède, c’est que ces enfoirés ignorent ses nouvelles capacités. Ils pensaient sans doute que ce serait aussi facile que lorsqu’ils avaient tirés sur Tenebris par surprise. Lui planter la lame entre les deux yeux seraient trop facile. Trop rapide. Il préfère une mort lente. Il augmente la pression sur sa main pour pencher l’autre sorcier en arrière, à moitié dans le vide. La seule chose qui le retient actuellement, est le fait que Marc l’agrippe par le col. Il laisse la lame s’évaporer et referme son autre main sur le tissus.
- J’espère pour toi que t’as appris à voler, connard. - Même si tu me tues, tu crois vraiment qu’on est venus tous seuls ? D’autres sont en chemins, Marc. Et c’est qu’une question de temps avant que… - Ta gueule.
Et il le pousse, le lâchant au bon moment. Il entend le cri que le sorcier pousse en tombant. Et le bruit qu’il fait lorsque son corps rencontre le toit d’une voiture. Le voile de ténèbres quitte le regard de Marc quand il pose ses yeux sur le paysage en contrebas. Une chute de cinq étages, mortelle. L’alarme stridente de la voiture résonne dans toute la rue. Et il sourit un instant, contemplant son sinistre travail. Puis un mouvement dans le coin de son oeil. La silhouette familière de Tenebris. Il est là, parfait. Il n’a plus qu’à le rejoindre et se tirer de là. Mais de là où il est, Marc voit autre chose. Le sbire n’a pas menti. Ils n’étaient pas seuls. Il y en a qui se dirige vers Tenebris, sous le regard impuissant de Marc dont les yeux s’écarquillent de stupeur. Son coeur manque un battement et le cri sort de sa gorge sans qu’il ne puisse le retenir.
- NON !
Il quitte sa place, s’élançant à travers le toit pour regagner la porte. Il n’a jamais couru aussi vite de sa vie. Et il n’a jamais autant eu la trouille, aussi. Son être est projeté vers un seul objectif. Arriver avant qu’il ne soit trop tard. Il est hors de question qu’il le perde maintenant, pas après tout ça. Il manque de se briser la nuque plus d’une fois en dévalant les escaliers mais il tient bon. Redouble de vitesse quand il atteint le rez-de-chaussée. Quand il se retrouve à l’extérieur, il s’arrête une fraction de seconde pour trouver dans quelle direction aller. Les ténèbres grouillent en lui, lui donnant peut-être l’énergie nécessaire pour courir encore plus vite. Il craint d’arriver trop tard. Il craint le spectacle qu’il va trouver. Il franchit la distance sans s’arrêter jusqu’à finalement arriver. Et ce qu’il a sous les yeux l’oblige à s’arrêter. Tenebris, debout. Le sbire au sol. Et cette vision semble faire s’évaporer toute l’adrénaline qui l’habite, d’un seul coup. Un profond soulagement ainsi que de l’épuisement se manifestent. Il va bien. Il est vivant. Il n’a pas eu besoin de lui. Forcément qu’il n’a pas eu besoin de lui. Stupide humain se sentant surpuissant alors qu’il n’a rien de divin. Il se fait violence pour ne pas courir à sa rencontre et s’assurer qu’il n’est pas blessé. Haletant, il ne peut que rester là, laissant Tenebris lever les yeux vers lui. Il n’est pas blessé. Il n’a pas besoin de se rapprocher. Il a juste à le regarder. Et alors qu’il pourrait exprimer son soulagement par des mots, il n’en fait rien. Car le temps presse.
- D'autres sont en chemin. On doit se tirer de là.
Le souffle court. Le coeur sur le point d’exploser. Et l’épuisement qui pointe le bout de son nez. S’il tient encore debout, c’est parce que la situation l’exige. Mais il ne pourra pas conduire sans causer un accident, car il sait très bien ce qui arrive quand il se sert de l’essence. Il peut lire de là où il est l’expression de Tenebris et peut voir qu’il est en train de penser à la même chose que lui. Il se remet en marche, car il sait qu’il ne pourra plus bouger s’il reste trop longtemps immobile. Il se concentrer sur la voiture. Laissant derrière eux ce refuge qui les a protégé si longtemps. Ils doivent aller ailleurs. En sécurité. Il n’a pas besoin de se retourner pour savoir que Tenebris l’a suivi. La déité le rejoint à grand pas, marchant à son niveau. Et l’empêchant de s’effondrer quand la démarche de Marc commence à se faire chancelante. Sa main se referme sur son bras plus d’une fois pour ne finir par ne plus le lâcher dans les quelques mètres qui les sépare de la voiture. Lorsqu’ils arrivent devant le véhicule, la vision de Marc a commencé à se troubler et il doit à présent cligner des yeux pour rester éveillé. Il n’est pas question qu’il s’évanouisse d’épuisement maintenant. Il se laisse tomber sur le siège passager, aidé de Tenebris. Sa vision s’assombrit un peu plus et les sons alentours deviennent lointain. Mais il sait qu’ils sont en train de s’éloigner. Il tourne faiblement la tête pour voir Tenebris concentré sur la route, le visage éclairé par les lumières de la ville. Et c’est seulement lorsqu’ils sont enfin assez loin que Marc cesse de lutter et se laisse aller. Ils sont en sécurité, pour le moment.
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In the end it's all going down | Marc
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