I feel something is brewing

I feel something is brewingLes poings se serraient, un soupir, d’entre ses lèvres, filtraient. Les paumes de la jeune femme agrippèrent le drap vide d’une présence singulière à ses côtés, et finalement, par désespoir de cause, Nikki se redressa. Le repos fut écourté bien plus rapidement que prévu, et un souffle bruyant s’échappa, commentant sobrement la lassitude de l’Agent d’Hydra. Depuis bien des jours, voire des semaines, la Ren n’était plus la même. Plus la même personne d’avant, avant Elsa, avant Genosha. Bien de l’eau a coulé sous les ponts depuis que la traîtresse a fuit ses griffes revanchardes, et entre temps, moult souvenirs ont eu le temps d’effacer la mince aventure qu’elle a pu vivre avec la chasseuse de primes. L’idée qu’elle ait pu laisser l’opposé de sa propre idéologie, parée à détruire ce pourquoi elle vivait à l’heure actuelle, entrer dans sa maison, coucher dans son lit, la dégoûtait au plus haut point. Heureusement, l’histoire s’était terminée il y avait désormais plusieurs mois de ça, mais entre temps, quelque chose en Nikki s’était brisé. Le rappel de sa vie d’avant la pliant à même le sol en même temps que la honte d’elle-même prenait le dessus sur tout ce qui l’habitait. Qui pouvait se résumer en un simple mot : la noirceur, à son apogée. Cette même couleur qui pointait dans son dos, ses ailes noires comme la suie ne demandant qu’à traverser la femme à même sa peau.

L’aînée des Ren rejeta les draps d’un coup sec, et quitta la chambre à pas vifs. Encore habillée des suites de sa journée éprouvée, la jeune femme se rendit à la cuisine, farfouillant son frigo à la recherche d’une boisson pour faire passer sa frustration du moment. Se rendant subtilement compte du cliché qu’elle incarnait, la porte du réfrigérateur fut claquée dans un sourd ricanement. Nikki savait qu’elle ne pouvait continuer comme ça. A tout supporter sur ses épaules, à prétendre ne pas avoir besoin de la seule personne qui comptait encore un tant soit peu pour elle. Merde, elle n’avait pas pris la peine de se confier ni à Marc ni à Hailey sur les récents événements ayant pris place dans sa vie. Il fallait dire qu’elle se voyait mal à raconter à qui que ce soit, ses meilleurs amis inclus, qu’elle avait traversé les terres alternatives et les réalités, littéralement. Pourtant, quelqu’un était susceptible de la comprendre. La chair de sa chair, le sang qui coulait dans ses veines et qui faisait pulser son cœur bien malgré elle. Mais la personne concernée par tant d’amour caché refusait le moindre de ses sms. Aucun de ses appels n’était retourné, l’éloignement étant ainsi bien trop imposé. Et avec ce qu’elle avait infligé à Anna, elle n’osait même pas rendre visite à la prunelle de ses yeux. Et pourtant.

Pourtant, ce silence avait trop duré. Bien trop de semaines ont été écoulées depuis la dernière fois qu’elle avait vu sa sœur. Malgré les menaces d’Anna, malgré la peur tenace que les souvenirs ne la terrasse, Nikki devait oser. Elle avait besoin de voir April. Au moins s’assurer qu’elle allait bien. Prier, également, pour qu’elle ne se souvienne de rien. Une boule nouant sa gorge et creusant une sensation désagréable au sein de son ventre, l’aîné des Ren ne mit pas longtemps à descendre les escaliers de son immeuble. Enfourchant sa moto, elle fit jouer le moteur à plusieurs reprises, et démarra brutalement. La vitesse la soulageait alors qu’elle roulait dans Genosha, redoutant le moment qu’elle ne pouvait pourtant plus repousser. Elle n’avait pas la moindre idée de ce qui l’attendait, l’asiatique, mais elle ne pouvait plus lutter. Les Ren devaient se réunir, et toujours, Nikki devait préserver sa petite sœur de son horrible passé. Tout comme de son présent.

La jeune femme gara enfin son bolide devant la maisonnée où logeait sa cadette, et elle souffla. Retirant son casque et observant la maison, une pointe de tristesse envahissant son regard naturellement noir. Elle secoua la tête, secoua ses cheveux, avant de prendre son courage à deux mains. Escaladant les petits escaliers menant à même la résidence d’April, levant la main pour toquer à sa porte. Quelques coups, accompagnés d’un appui exagéré sur la sonnette, et le visage d’April apparu, quelque peu agacé par l’embêtement soudain. Nikki étira alors ses lèvres en un mince sourire, dévoilant ses dents blanches en une mine désolée et quelque peu joueuse. Du moins, qui se voulait ainsi. « Heeey, little sis’. Je me suis dit que je devais bien te payer une visite, depuis le temps qu’on ne s’est pas vu. Tu me laisses entrer ? » Et elle attend ainsi, l’aîné des Ren, les pieds dansants, le corps bancal. Craignant d’avance le regard déçu qui hantait ses pensées depuis l’apparition de souvenirs oubliés.

2981 12289 0

PSEUDO
&
PSEUDO

I FEEL SOMETHING IS BREWING - NIKKI & APRIL REN

Une plainte rageuse s'échappa de ses lèvres, atténuée par le coussin contre lequel elle avait plongé son visage. April ne voulait rien voir ou entendre. Elle ne voulait pas réfléchir. Elle voulait que tout s'arrête. Que le monde autour d'elle disparaisse. Alors, peut-être, son mal de tête s'en irait. Enfin elle pourrait se reposer et retrouver une sensation de bien-être. Sa mémoire, devenue plus puissante encore, telle une machine en surchauffe, cesserait de la tourmenter. Cette douleur lui était insoutenable et pourtant, ce n'était pas ce qui faisait le plus mal. Le plus douloureux, c'était de se souvenir. De ces fragments de vie passée, de cette vie perdue, de ces visages rencontrés, de ces pouvoirs, de cette soeur dont les actions l'avait mené à ôter la vie d'un autre...

Ce regain de souvenirs, sa mémoire ne pouvait les supporter. N'étant plus habitué à contenir autant d'informations, son cerveau se rebellait, chauffait et déclanchait en elle un mal insoutenable. Un mal qui l'avait empêché de travailler ce jour-là. Après toutes ces années à travailler chez Stark, ce devait bien être une des premières fois qu'elle s'absentait, aimant travailler même au plus fort de la maladie. Elle avait bien tenté de se lever mais Alexia avait pris les devants, prévenant Stark Industries du mal-être de sa compagne avant même que celle-ci ne puisse protester. Ainsi, April était resté coucher, attendant avec impatience que son cerveau veuille bien se refroidir et lui laisse du répit. Ainsi, elle essayait d'oublier, elle qui, elle le savait à présent, en était incapable. Elle essayait de chasser tous ces souvenirs douloureux au plus profond de son esprit, essayant de se concentrer sur le positif de Genosha. Alexia. Jamais elle ne l'aurait rencontré. Les choses allaient-elles changés maintenant qu'ils commençaient à se souvenir? Elle en avait peur. Elle perdait Nikki petit à petit, de sa propre faute. Elle ne voulait pas perdre Alexia.

April s'était concentré sur le visage de sa belle, de son sourire, repassant encore et encore les même souvenirs heureux qu'elle avait en sa présence. Ce fut bénéfique puisqu'elle sentit son mal de tête s'atténuer, séchant ses larmes de douleurs par la même occasion. Elle put enfin ouvrir les yeux, doucement, n'ayant plus peur d'ingérer une nouvelle information, aussi minime soit-elle. N'étant plus effrayée d'entendre un bruit dans la rue, qui serait comme un dossier supplémentaire dans le disque dur qu'était son cerveau. Elle se redressa et décida de rester ainsi quelques minutes de plus, ne voulant pas tenter le diable. Cependant, son répit fut de courte durée puisque des coups furent donnés contre la porte et la sonnette retentit agressivement. April mit ses mains contre ses oreilles, ne supportant pas la douleur que lui provoquait ce vacarme soudain. De peur que la sonnette ne retentisse à nouveau, l'ingénieure décida se leva, se fichant bien de se présenter en pyjama, et ouvrit la porte. L'agacement qu'elle ressentait s'envola lorsqu'elle découvrit sa grande soeur. Ce n'était plus de l'agacement qu'elle ressentait mais de la tristesse, de la colère, de la déception... April chercha pourtant à ne rien laisser paraître, ne sachant trop ce qu'elle voulait faire à ce moment précis. Lui fermer la porte au nez et continuait de l'éviter? Repousser la confrontation à nouveau? Elle avait tellement de choses sur le coeur qu'elle se sentait incapable de renvoyer sa soeur chez elle. Alors, même si elle n'avait pas envie de la voir, April fit un pas de côté pour laisser Nikki entrer, toujours en silence.

Que Nikki se montre joyeuse, fasse comme s'il n'y avait eu aucune distance, aucun sms et appel sans réponse énervait April. Il n'y avait pas à faire semblant. Elle ne rendait pas les choses plus faciles. Au contraire, elle attisait le feu. Qu'elle ne prenne pas tout ça au sérieux devait cacher quelque chose. Elle devait savoir. Elle devait se douter. Elle devait se souvenir, elle aussi. C'est pourquoi, avec un ton empli de reproche malgré elle, April prit enfin la parole:

- Comment va ton dos?

Une question qui semblait innocente mais qui voulait tout dire. Je me souviens de tes ailes. Je me souviens en partie de notre vie passée. Pire encore, je me souviens de cette nuit-là.

CODAGE PAR AMIANTE

I feel something is brewingLa peur nouait ses entrailles. Ses tripes s’emmêlaient et manquaient d’exploser le buste de la Ren. Celle-ci regrettait instantanément son action du soir. Cette arrivée inopinée alors qu’elle broyait égoïstement du noir. Tentant de se rabibocher avec sa sœur, sans savoir ce qui, en vérité, avait séparé et brisé leurs deux cœurs. Ceux-ci ne semblaient plus battre à l’unisson et Nikki redoutait le pire. Elle n’avait jamais été un fort beau modèle de grande sœur, mais l’idée que la cadette puisse se souvenir terrorisait l’aînée jusqu’au plus profond de son être. Elle avait subi une première fois son regard atterré. Avait connu sa colère, sa déception et sa souffrance suite à ses actes manqués. La vie ôtée par sa faute hantait April, et l’asiatique craignait que cet affreux souvenir ne creuse un fossé encore plus profond qu’avant Genosha. Elle aussi regrettait. Se souvenait de cette nuit en particulier. Volant jusqu’au foyer de la petite à protéger. Arrivant bien trop tard en se faufilant par la fenêtre, ses ailes imposantes ne pouvant cacher le corps sanguinolent à terre. Les excuses ne suffiront jamais. Pas plus que les explications. Comment Nikki en était arrivée-là ? Elle-même ne le savait même pas. Mais le pire dans l’histoire, c’était que cette dernière se réitérait. Le moindre de ses faux pas se ressentait. Hydra couvrant les origines de la Ren sans même qu’elle ne le réalise. Si dans cette réalité là, April n’avait jamais eu à tuer malgré elle, Nikki avait fort contenté l’ensanglanté appel. Nourrissant la mort à chaque échelon dépassé au sein de la criminelle organisation.

De tout ce que subissait au quotidien l’aînée des Ren, la perte de l’estime et de l’amour de sa sœur constituait sa peur la plus profonde. Son vœu avait été bref mais simple, d’autant plus précieux qu’elle escomptait qu’il dure le plus longtemps possible. Néanmoins le silence radio de la cadette obligeait l’asiatique à tout remettre en question. Y compris cette putain d’illusion. Deuxième chance apparentée qui relevait d’un cauchemar vicieux et meurtrier. Croiser les prunelles attristées et désappointées d’April une deuxième fois crevant déjà le cœur du lieutenant d’Hydra. Divine comédie, les poètes les plus reconnus auraient fort à faire avec Wanda et son idée saugrenue. Comédie d’autant plus jouée par la Ren au sourire mensonger, très vite détesté par la benjamine tentée de la repousser. Les lèvres étaient tremblantes quand elles laissaient filtrer des mots, et les lèvres se scellèrent quand la chair de sa chair la fit entrer sans un mot. Le moment tant craint était arrivé. Et il n’y avait rien, absolument rien, qui pouvait retarder plus encore cet instant détesté. Le sourire se figea alors quand la répartie frappa de plein fouet la Ren. Ses yeux s’écarquillèrent et sa bouche forma un ô de surprise, un son voulant traverser sa gorge sans y parvenir. Quelque chose, là, au tréfonds de son âme, parut se fissurer. Craquelant son palpitant en un crac désavoué. « Qu-quoi ? » Il n’y avait toutefois plus besoin de faire semblant. Si Nikki avait recouvré toute sa mémoire, étant donné l’étrange mutation de sa sœur, il était logique que celle-ci la récupère aussi. Certainement bien plus violemment que Nikki. « Merde. Tu sais. » Chuchotement éperdu qui n’avait aucune intention de parvenir aux oreilles de la plus jeune. Désespoir montant, gonflant, prêt à écraser l’ange aux ailes noires et méchamment trompeur.

L’aînée des Ren resta ainsi, ses bras se balançant sans mot dire. Son souhait disparaissant dix pieds sous terre, là où elle-même aimerait bien se trouver en l’instant présent. Les cicatrices de son dos la picotèrent, comme elles savaient tant y faire depuis des semaines, et une grimace de douleur déforma le visage de l’asiatique. Très vite remplacée par une moue dépitée et désolée. « Tu te souviens toi aussi. » Soupir qu’elle ne pouvait désormais plus contenir. Qu’y avait-il à dire désormais ? « Et à en juger par ton silence, j’imagine que tu te souviens surtout du pire. » Putain. Illusion paradisiaque qui n’était rien d’autre qu’un enfer véritable. La cruauté de la situation se refermant sur Nikki, qui souhaitait soudainement se rouler en boule et se cacher derrière ses propres ailes ravivées. « April je… je peux tout t’expliquer. » Encore une fois. Sauf que c’était faux. Rien ne pourrait jamais justifier ses actes et les conséquences provoquées. Rien ne pourrait réparer ce qu’elle avait brisé en sa sœur, la prunelle de ses yeux qu’elle s’était juré de protéger. Envers et contre tout. Sauf que dans l’équation, elle s’était complètement oubliée. Arme fatale qui transperça d’elle-même le cœur de son sang tant aimé. « Je suis… » Abasourdie, ébahie, désolée. De tout, de rien, de ça à subir une deuxième fois. Je suis une meurtrière et un monstre marcherait tout autant mais aucun son ne désirait faire écho à la moindre de ses pensées. « Tu sais. » Trop. Ou pas. Pas assez, mais pas nécessaire. Elle avait failli. Une deuxième fois. Et ce regard. Non, elle ne pouvait le supporter. Alors elle baissait les yeux, Nikki. Incapable de faire autrement. Donnant ainsi raison à April qui avait de quoi la détester. Et peut-être l’emprisonner. Car son sort, un jour ou l’autre, serait ainsi scellé.

2981 12289 0

PSEUDO
&
PSEUDO

I FEEL SOMETHING IS BREWING - NIKKI & APRIL REN

Elle n'arrivait pas à faire semblant. Son visage affichait un air sévère et témoignait de la colère qu'elle ressentait en elle. Elle aurait aimé s'adoucir face à sa sœur. Elle l'avait espéré, sachant que la confrontation arriverait inévitablement. Pourtant, c'était l'effet inverse. Cela ne faisait qu'attiser le feu qu'elle ressentait en elle. Tant de déception et de rancœur qui remontaient à la surface. Oh oui, elle savait. Elle se souvenait. Peut-être ne se souvenait-pas de tous les détails, pas encore, mais sa mutation lui permettait de se rappeler de bien plus qu'elle n'aurait souhaité à ce stade.

- Oui, je me souviens. répondit-elle sur un ton accusateur. Cela ne t'arrange pas j'imagine.

Elle n'avait pas pour habitude de parler aussi méchamment à sa grande soeur. Pourtant, elle le voulait aujourd'hui. Elle voulait une explication. Elle voulait lui faire prendre conscience que ses actes avaient des conséquences... Lui faire comprendre qu'April avait fait du mal pour elle. Chose qu'elle n'avait jamais souhaité et qui, désormais, la hanterait à nouveau pour le restant de ses jours. Comment parviendrait-elle à se regarder dans un miroir à nouveau maintenant qu'elle se souvenait de cette tragique nuit?

Observant attentivement Nikki, April comprit rapidement qu'elle souffrait non seulement de cet aveu mais également de ses ailes. Celles-ci étaient de retour. L'ingénieure savait combien c'était douloureux, elle qui avait tant pris soin de sa sœur. Et, instinctivement, elle voulut lui proposer de l'aide mais cette proposition ne vit jamais le jour. Sa colère l'en empêchait.

- D'accord. Explique moi. Explique moi pourquoi je ne me souviens pas de toute mon ancienne vie mais je me souviens précisément avoir ôté la vie d'un homme par ta faute?!

Sa voix s'était progressivement élevé, la douleur prenant le dessus. Des larmes étaient apparus aux coins de ses yeux et elle les essuya d'un mouvement rageur. Oui, elle souffrait mais elle ne voulait pas paraître faible. On lui disait toujours qu'elle était allergique aux émotions. A ce moment précis, plus que jamais. Elle voulait rester stoïque, ne pas se laisser atteindre. Cependant, si elle ne comprenait pas toujours les émotions, celles qu'elle ressentait à l'instant présent étaient bien trop fortes pour être ignorer.

- Laisse moi te poser une question. reprit-elle plus calmement, ce qui n'annonçait rien de bon. Pour qui travailles-tu? Ici, à Genosha.

Nikki avait toujours été évasive à ce sujet. Jusqu'ici, April n'avait jamais insisté pour savoir, tant que sa sœur n'avait pas de problème pour vivre. Sa sœur n'avait jamais été toute blanche. Elle n'aurait pas été étonnée si cela impliquait quelque chose d'illégal. A présent, elle devinait pourquoi il y avait tant de mystères autour de ce sujet. Et c'était bien pire que toute illégalité.

- Comment vont-ils à Hydra?

Elle voulait se tromper. Elle l'espérait de tout son cœur. Elle voulait entendre Nikki lui dire qu'elle était différente. Que dans cette nouvelle vie qui leur avait été accordé, elle s'était éloignée du mauvais chemin. April n'était pas sûre de pouvoir supporter une nouvelle déception.

CODAGE PAR AMIANTE

I feel something is brewingLe monde qui s’écroulait sous ses pieds. Avec cette incapacité flagrante de pouvoir se rattraper. Nikki était achevée, en un instant, en une milliseconde. Le visage tourné de la cadette, dur et fermé, suffisait à la transpercer en plein cœur. La phrase qui s’ensuivit ne lui laissait guère un sort meilleur. L’agent d’Hydra était découvert. Coiffée sur le poteau même, alors que la vérité, lancinante, traçait un sinueux chemin, creusait un improbable fossé entre les sœurs jadis si rapprochées. Sa cause était perdue avant même qu’elle n’ait l’occasion de savoir si elle pouvait être rattrapée. Là, ainsi prise sur le fait, la Ren savait. Le retour en arrière était impossible. Le souhait n’était qu’un mensonge, qu’une illusion comme toute cette putain d’île. Ce qu’elle espérait ne pouvait exister. Parce que rien ne pourrait jamais effacer les crimes commis. Encore moins à l’encontre de son sang partagé, celui tant aimé. Au lieu de la protéger, l’asiatique n’avait fait qu’empirer les choses, que trahir plus encore la benjamine à couver. Ses traits se déformèrent alors, une boule coincée dans sa gorge. Qu’il était dur à avaler, ce son si accusateur et si mérité. « Ne dis pas ça comme ça… » Et pourtant, c’était la vérité. Car ces souvenirs ne l’arrangeaient aucunement. Ils ne faisaient que crever la bulle d’affection des deux sœurs, remises à un état de sauvagerie avancée. Se regardant tels des chiens de faïence, l’une avec tous les droits du monde, l’autre possédant tous les torts de l’univers.

Grimace renouvelée tandis que l’agent de l’Hydre se rapprochait. Une envie soudaine de fuir l’étripant un peu trop puissamment. Un regard discret fut lancé vers la fenêtre d’April. S’imaginant échapper à cette confrontation pourtant inévitable. L’envie de balancer ses ailes était tentante, mais le pouvoir n’était pas encore suffisamment maîtrisé pour passer outre la douleur. Encore moins outre la honte ressentie face au regard embué de la benjamine. Nikki effaça sa moue crispée, fit dériver son regard sur un quelconque mobilier. La fenêtre lui rappelant aussi bien ce cuisant retard qui l’avait amené chez April, en larmes face à un putain de macchabé. Comme si celle-ci lisait dans ses pensées, la plus intelligente des deux Ren eut tôt fait de raviver la cause de leurs tourments. Une vie enlevée, causée par les affiliations de la plus grande qui avait pourtant tenté de tout empêcher. Sans grand succès. Parce qu’à l’époque déjà, elle était une ratée. Et cette situation, à ce jour, bercées toutes deux par une hallucination, ne sauvait en rien son cas. L’échec était là, marqué par la mort, par la souffrance, par la peine et la colère. Et qui blâmer pour ça ? « Je… » Au début la femme ne savait pas quoi dire. Le choc était si intense pour April qu’il fallait forcément que son premier souvenir soit le pire. En cela, Nikki n’y pouvait pas grand-chose. Elle irait bien chercher la Sorcière par elle-même, mais ça ne changerait rien à la donne. Pas plus que cela n’allègerait sa culpabilité. « Parce que c’est probablement le dernier événement flagrant qu’il y a eu avant que… » Les mots se coincèrent. Avant quoi hein ? Qu’elle ne souhaite effacer cet instant de l’esprit de sa sœur, et qu’elle la baigne par ce fait dans le mensonge le plus total ? Ouais, c’était totalement ça. « Je suis désolée. Ce n’était pas censé arriver, ça n’aurait jamais dû se passer comme ça. Je suis vraiment désolée, tu dois me croire. Si je pouvais revenir en arrière, je le ferais. » Mais tu peux pas, putain. Alors ferme ta gueule, Ren. Elle empirait les choses. Comme toujours.

Les larmes de la cadette poignardèrent l’aînée qui ne pouvait plus supporter ça. Son regard, celui-là même qu’elle avait vu le jour du… meurtre. Oh. Pu.Tain. Elle était la cause de tout ce qui n’allait pas chez April. Et elle le réalisait seulement maintenant. Elle ferma les yeux alors que la question la plus fatidique tomba. Telle l’épée de Damoclès planant sur sa tête, elle pouvait sentir l’arme la déchirer en deux. Migraine qui se réveillait alors pour raviver la honte de ses conneries récurrentes, répétées en toute conscience. L’organisme cité, le glas était sonné. Nikki passa une main nerveuse dans ses cheveux colorés, ne trouvant rien de mieux à faire que d’esquiver l’accusation de la benjamine énervée. Elle secoua la tête, chercha des mots qui tardaient à poindre sur sa langue. Celle-ci humidifia ses lèvres en un mouvement fébrile, incapable de plonger ses prunelles dans celles d’April. Parce qu’elle ne pourrait pas supporter. Pas encore. La Ren ne pourrait pas voir à nouveau la déception se peindre au ralenti sur le visage brisé de la plus jeune. Elle ne pourrait pas subir son jugement, sa réprobation, néanmoins à raison. Et pourtant. L’histoire se répétait. L’être humain ne pouvait décemment pas changer, et elle en était la preuve vivante. « April, c’est pas aussi simple. J’ai fais des erreurs, mais j’te jure que j’ai essayé de les réparer. Je te jure que j’ai essayé de changer, d’être meilleure. » Et ça aurait presque pu marcher. Presque. Si seulement elle n’était pas retombée dans ses travers, cédant à la facilité. « Tu comprends pas. J’étais.. j’suis… si bonne à rien. Là-bas, j’arrive à quelque chose. Je fais quelque chose d’utile, je me bats pour une cause. » Ouais, autant dire qu’elle participait aux actes terroristes de son employeur. Mais en même temps, que pouvait-elle dire d’autre ? « Hydra c’est… » Inévitable. « C’est la maison. » Les mots qui n’auraient jamais dû être dis. Mais c’était comme ça. Et Nikki n’y pouvait plus rien.

2981 12289 0

PSEUDO
&
PSEUDO

I FEEL SOMETHING IS BREWING - NIKKI & APRIL REN

"Ne dis pas ça comme ça." April se retint de répliquer. Que croyait Nikki? Que ça lui faisait plaisir de lui parler sur ce ton? Qu'elle adorait avoir à lui reprocher une chose aussi affreuse qu'un meurtre? April souffrait aussi. Elle souffrait affreusement et ça la dégoûtait jusqu'au plus profond d'elle-même que sa sœur en soit la cause. Nikki avait toujours été la plus importante à ses yeux. Qu'elle soit tombé amoureuse n'y avait rien changé, la famille passait avant l'amour aux yeux d'April. Si Alexia avait fait du mal à Nikki, l'ingénieure aurait mis un terme à leur relation sans la moindre hésitation, que cela fasse mal ou non. Désormais, alors qu'elle avait le cœur meurtri et qu'elle se sentait trahie, elle savait que ça allait être différent. Que ses priorités avaient d'ores et déjà changé... Qu'elle allait devoir s'éloigner. Pour son propre bien.

- "Flagrant", répéta April après un ricanement mauvais. Tu m'étonnes. Pousser sa petite sœur au meurtre, c'est sûre que ce n'est pas anodin.

Elle haïssait avoir à dire ces paroles mais c'était à la fois irrésistible. Elle voulait lui faire mal. Elle voulait qu'elle se sente coupable, peu importe si elle finirait par regretter ses paroles ou non. Elle voulait donner un électrochoc à Nikki par cette conversation qu'elle n'avait peut-être jamais eu le temps d'avoir.

- Et qu'est-ce que tu ferais si tu retournais en arrière? Tu le tuerais à ma place?

L'ironie s'entendait dans sa voix qui était glaciale. Il semblait qu'on leur ai donné une nouvelle vie, peut-être qu'il était donc possible de revenir en arrière. Mais qu'est-ce que ça changerait? Ça n'enlevait rien au fait que Nikki avait rejoint Hydra et qu'elle lui avouait y être toujours, maintenant qu'elles étaient sur Genosha. Elle avait pris le même chemin que la première fois. Celui du crime. Parce que c'était la facilité. C'est tout ce à quoi elle pensait alors qu'elle écoutait sa grande sœur essayer de se justifier. Elle se battait pour une cause qu'elle disait. Cela enragea encore plus April qui, après quelques secondes de silence à observer d'un regard dégoûté Nikki, dit simplement:

- T'es pathétique.

Une larme coula sur sa joue alors qu'elle essayait de se tenir. Elle sentait qu'elle était sur le point d'exploser. Les paroles de Nikki lui étaient insupportables. Ce n'était pas la femme qu'elle connaissait. Ce n'était pas la grande sœur qu'elle avait toujours admiré. Ou peut-être que si. Et qu'elle se rendait compte seulement maintenant qu'elle n'était rien de plus qu'une criminelle.

April fit les cent pas, le dos de sa main contre ses lèvres, comme pour retenir les mots qui allaient suivre. Sa respiration était rapide. Elle n'allait pas pouvoir tenir.

- Quelque chose d'utile. Tu te fous de ma gueule? hurla-t-elle soudainement en faisant face à sa sœur. Se battre pour une cause, ok. Mais laquelle?! Tuer de parfaits innocents pour faire du profit et gagner en pouvoir? Non mais tu t'écoutes quand tu parles? T'es juste une putain de criminelle qui mérite de pourrir derrière les barreaux! C'est tout ce que t'es!

Toute cette déception, cette tristesse et cette haine qu'elle avait accumulées se déversaient sur Nikki. Oui, peut-être elle regretterait. C'était même presque sûre. Mais à l'instant présent, rien n'aurait pu l'arrêter. Elle voulait dire le fonds de ses pensées, peu importe si ça faisait mal.

- Tu dis que t'es une bonne à rien mais tu sais que c'est faux. Tu sais que tu prends la facilité en te tournant vers le crime et ça t'arrange bien de te cacher derrière de minables excuses comme "Hydra c'est la maison". Oui, on n'a pas eu une vie facile toi et moi mais je pensais que la maison c'était moi. Que c'était notre relation. Mais tu sais quoi? Si Hydra c'est la maison, retournes-y. Et écoute bien ce que je vais te dire... dit-elle avant de faire une pause alors qu'elle prenait conscience de l'impact qu'auraient les mots qui suivraient. Ne m'adresse plus jamais la parole. Je ne veux plus jamais te voir. Désormais, nous ne sommes plus sœurs. Juste des inconnues.

CODAGE PAR AMIANTE

I feel something is brewingSon pire cauchemar. Il n’y avait pas d’autres mots pour qualifier ce qui était en train de se dérouler sous ses yeux. Par sa faute, celle de Wanda, hell, celle du monde entier. Nikki déglutissait face à la colère qui se dessinait petit à petit sur le visage de sa petite sœur. Cette scène, elle l’avait vécu une première fois, il y a des années si l’on osait prendre en compte cette vie sur Genosha. Aussi, la revivre, à l’identique, équivalait à garnir ses vieilles blessures de sel, ouvrant à nouveau ses cicatrices sans aucune pitié démontrée. Elle avait ce sentiment qu’on l’étripait, de l’intérieur, qu’on la dépiécait pour mieux s’amuser avec son cœur. Alors même, au final, qu’elle était vraiment la seule à blâmer dans l’histoire. Et si l’aînée des Ren, loin de se comporter en responsable, loin également de ressembler au lieutenant tant respecté dans sa maison si vindicativement défendue, la cadette, elle, ne se gênait pas pour remuer le couteau dans la plaie. Usant de son sarcasme comme jamais auparavant, redécouvrant sa capacité à se socialiser pour mieux se lâcher sans aucun filtre programmé. April se lâchait, et les mots utilisés perçaient son sang partagé, en long et en large et même en travers. « Je n’ai jamais voulu ça. » Pousser sa petite sœur au meurtre. Elle grimaçait à ces termes, l’asiatique, refusant d’accepter qu’elle avait transformé sa plus aimée en une arme contre son propre gré. Elle avait tout fait pour repousser la compétition, tout. Mais elle n’avait pu éviter cette recrue de fouiller dans sa vie pour découvrir ce qui était le plus cher à ses yeux, et tenter de lui arracher. « Je te jure que j’ai tenté de l’en empêcher. De le maintenir à son rang, de le retenir de faire une connerie. Mais il… il a insisté, et le temps que je réalise qu’il t’avait trouvé, ce… » C’était trop tard, Nikki, mais à quoi bon le dire ? Tout était déjà gravé dans les vieux livres.

Baissant la tête alors, l’agent d’Hydra essayait de communiquer, un peu tardivement, avec la benjamine. Débitant ses raisons, une à une, espérant qu’elles pourraient solidariser un peu plus la plus intelligente des deux. Ne répondant pas à la provocation sur le meurtre impliqué, la Ren allait pour tourner les choses plus doucereusement, quand l’insulte claqua violemment. Pathétique. C’était donc tout ce qu’elle était ? Bien sûr, Nikki l’avait pensé pour elle-même. Mais là, comme ça, se le prendre en pleine face par la plus jeune ? C’était autre chose. Pire qu’une gifle en pleine gueule, pire qu’un coup de fouet asséné sans pitié. Elle eu un mouvement de recul, l’asiatique, une moue déformant son visage, mais elle était encore bien trop hébétée pour pouvoir répondre à cette agression. Alors, elle enchaînait. Encaissant les coups sans broncher, le corps entier tremblant face aux assauts répétés. Il lui semblait qu’elle cédait, que des perles transparentes finissaient par marquer ses joues en formant des lignes sinueuses, gâchant le maquillage et mordillant la peau sans qu’elle n’eut le réflexe de se protéger. Elle prenait, cher, très cher. Probablement qu’elle le méritait. Très certainement même. Mais cet égo en elle, demeurait. Ses raisons aussi, fussent-elles moins claires sur cette vie là que sur celle d’avant, mais toujours aussi dévouées à cet être aimé. En dépit du crachat, de cette haine et ce dégoût profond enfin exprimés, la Ren ne pouvait ainsi injustement tout supporter. Bien que ses choix étaient largement discutables, ses motifs, du passé au présent, en restaient inchangés. Alors, à son tour, elle hurlait. Les poings serrés, les ongles enfoncés dans ses paumes qui faisaient déjà naître quelques gouttes carmin, elle se défendait, osait dire tout haut ce qu’elle avait retenu en elle pendant si longtemps. « MAIS TA GUEULE PUTAIN ! » Bon, les insultes, ce n’était pas franchement ce qu’elle gardait en elle. C’était surtout le reste, à vrai dire. « Tu crois vraiment que ça marche comme ça ? Qu’on entre et qu’on part de là en claquant les doigts ? Tu m’as vu un peu ? Tu penses sérieusement que je passe mon temps à tuer les gens sur mon passage, sans rien d’autre en tête que l’appât du gain ? MAIS TU ME PRENDS POUR QUI PUTAIN. » Un monstre ? Peut-être bien. « Oui, ça va sûrement te paraître incroyable, mais en effet, y a des causes que défend Hydra. Bien plus que tu ne le crois. C’est sûr, il y a des trucs qu’ils font, je n’approuve pas, mais crois-moi que je préfère encore être là qu’à la Garde Rouge. Et tu penses vraiment que les autorités sont parfaites ? Que le sang ne coule jamais injustement avec elles ? Mais tu vis dans quel monde bordel. C’est le chaos partout, la seule différence dans mon cas, c’est que j’ai choisi un camp pour enfin faire tourner les choses en notre faveur. Peut-être qu’avant, j’ai merdé, mais dans cette vie, j’ai choisi ma voie, et je la regrette pas. C’est différent, okay ? Bien plus que tu ne pourrais jamais le savoir. » Avant, elle était prisonnière de l’organisation. Dans cette vie là ? Elle gérait les choses à sa façon.

Elle se recula, d’un coup, tourna le dos à sa sœur pour porter une main fébrile à ses lèvres. Essuyant également ses larmes, elle récupéra quelques secondes avant de continuer, toujours aussi perturbée et brisée. « La facilité ? Mais c’est tout sauf facile ce que je fais. Mais qu’est-ce que t’en sais hein ? Toi, t’es là, tu penses à tout, tu sais tout, tu peux construire n’importe quoi sans que t’aies besoin de douter de toi. Flash news, sister, on n’a pas tous ton talent et ton QI. » Est-ce qu’elle se lâchait un peu trop ? Probablement, mais April l’avait cherché. Et elle aurait toute l’occasion de regretter ses quatre vérités plus tard, lorsqu’elle se ferait arrêter. Mais ça, c’est une autre histoire. « Et ma maison, elle était où quand tu t’es cassée à l’université ? Quand y avait plus que moi, à la maison, avec mes ailes, face à notre entourage si compréhensif, hein ? Vas-y, dis-moi, puisque t’es si maline. » Nikki s’arrêta, leva une main en la secouant, presque ironiquement. « Non non, tu sais quoi, ne dis rien. Je sais très bien que je t’ai encouragé à y aller, et je le recommencerai dix mille fois encore. Mais ne prétends pas une seule seconde que tout allait bien pour moi tandis que tu vivais ta meilleure vie. » Soudain, l’aînée éclata d’un rire, sardonique, mesquin, abattu peut-être. Tout à la fois, sûrement, parce qu’elle avait cet horrible sentiment qu’il était désormais bien trop tard, pour rattraper quoi que ce soit. « Ok, ok. » Elle hochait la tête, presque nerveusement, le regard flamboyant, d’une lueur autant ravivée par le voile transparent apposé que par cette flamme dansante qu’elle ne pouvait décemment masquer. « Tu ne veux plus avoir affaire à moi ? C’est noté. Mais que tu le veuilles ou non, je serais toujours là. Et je ferais toujours ce que je peux pour te protéger. Je ne peux pas réussir à chaque fois, c’est clair. J’ai merdé avant, je commets des erreurs encore maintenant. Mais ça n’enlève rien à ce qui motive mes actions, que tu le comprennes ou non. » Enfin, elle se tût. N’attendant rien de plus, à vrai dire, pas même un dernier regard avant qu’elle ne quitte cet endroit, où elle n’était plus la bienvenue.

2981 12289 0

PSEUDO
&
PSEUDO

I FEEL SOMETHING IS BREWING - NIKKI & APRIL REN

Elle était furieuse. Elle avait une telle fureur en elle que de voir sa sœur aussi abattue par ses mots la rendant plus mauvaise encore. Oui, elle voulait que Nikki souffre même si une part d’elle était meurtrie par ce qu’elle lui faisait endurer. Mais cette partie d’elle, elle l’étouffait par tout ce ressentiment qu’elle avait contre sa grande sœur. Des jours et des jours de colère et de douleur qu’elle déversait contre celle qui en était responsable.

Son regard se fit plus dur encore alors que Nikki lui ordonna de la fermer avec des mots d’une violence qu’elle n’avait jamais employé à son encontre. Ses mots lui avaient fait mal, bien sûr, mais April était dans un tel état qu’elle se servit de cette douleur pour alimenter sa colère et non pas son désir d’être pardonnée. Les poings serrés, les sourcils froncés, elle faisait face à sa sœur avec un regard plein de haine et de dégoût. Elle l’écoutait se mettre en colère à son tour, s’adresser à elle de la même manière, avec antipathie. Quelque chose s’était brisé pour toujours dans leur relation, April s’en rendait compte. Rien ne serait plus jamais comme avant.

April rit d’un rire mauvais alors que Nikki essayait encore de lui faire croire qu’Hydra voulait changer les choses. Pour elle, il était clair qu’elle avait subi un lavage de cerveau sans même s’en être rendu compte. Et elle qui pensait que sa sœur était intelligente. Elle aurait aimé lui dire, lui partager cette pensée mais Nikki ne lui en laissait pas le temps. C’était à son tour d’hurler et de la blesser. Et elle y arrivait parfaitement bien. Elle touchait là où ça faisait mal. Elle lui rappelait qu’ils n’avaient pas tous un QI qui rendait la vie facile. Et c’était précisément ça qui faisait mal à April. Parce que plus que quiconque, elle avait toujours vu sa sœur comme la seule à comprendre ce qu’elle vivait. Combien être un génie n’avait rien d’agréable dans une société qui vous rappelait constamment que vous étiez différents. Oui elle était intelligente mais à quel prix ? Elle avait toujours été incapable de se faire des amis, elle s’était retrouvée dans le monde des adultes quand elle n’était encore qu’une adolescente, chaque jour elle avait l’impression de passer un test dés lors qu’elle s’adressait à une personne, comme si c’était là une épreuve qu’elle ne cessait de rater encore et encore. Comme une incapable. Chaque jour, on lui rappelait qu’elle n’était aimée que par très peu de monde. Ceux qui l’appréciaient se comptaient sur les doigts d’une main. Et elle perdait la personne plus importante de tous.

April aurait voulu protester au sujet de l’université. Bien sûr qu’elle avait toujours été consciente que c’était un cauchemar pour Nikki à la maison, elle l’avait toujours su. Mais comme elle le disait, c’est elle qui l’y avait poussé et à aucun moment elle ne se serait permis de penser que la vie était rose pour sa grande sœur. Jamais elle n’aurait fait ça. Est-ce qu’elle avait essayé de ne pas y penser quand elle était étudiante ? Oui, parce que ça rendait les choses plus faciles et qu’elle pouvait se concentrer davantage sur ces connaissances qu’on lui donnait et qu’elle adorait. Elle s’en était voulu à de nombreuses reprises, se sentant parfois égoïste. Le fait est qu’elle ne pouvait pas vivre que pour Nikki. Elle devait vivre pour elle. Et cela deviendrait plus réel encore désormais que leurs chemins se séparaient.

Elle avait mal d’entendre tout ça, comme jamais auparavant. Et quand Nikki lui dit que malgré tout, elle ferait tout ce qu’elle peut pour la protéger, cela acheva April qui retint de nouvelles larmes.

- Pars. S’il te plait. Dit-elle d’une voix cassée, sentant qu’elle allait à nouveaux exploser d’un moment à l’autre.

Nikki lui tourna le dos avant de quitter les lieux. De nouveau seule, le corps tout entier tremblant encore de cet affrontement, April essayait de se contenir. Mais c’était peine perdue. D’un geste rageur elle s’empara d’un vase et le jeta contre la porte par laquelle Nikki était passé quelques minutes plus tôt. L’objet éclata en morceaux tout comme elle éclata en sanglots.

CODAGE PAR AMIANTE