Silence imposé. Vide alentours. Demeure muette, déserté par ses habitants pour quelques heures bien mérité. Seul, Yong-Sun grogne. Yong-Sun peste. Il ne s’attendait pas à ne trouver personne dans sa grande et luxueuse maison. Il ne s’attendait pas à trouver la porte close, délesté par sa femme. Cette femme qu’il ne regarde même plus, faisant uniquement partie du décor et de ses habitudes. Il ne s’attendait pas à trouver ce mot, accroché sur le frigo comme un doigt d’honneur lancé en sa direction. Ses sourcils se froncent et il sert la mâchoire. Il plisse les paupières, pestant maintenant contre son fils qui a encore eu la merveilleuse idée de le titiller comme il sait dorénavant si bien le faire. Mot lancé avec sarcasme. Ecriture fine et mesurée qu’il commence à reconnaître. Ses yeux sombres se posent sur le papier et son visage se tend. Change légèrement en lisant ces quelques lignes qui lui sont adressé :
“ Cher géniteur.

Maman avait besoin de prendre l’air et comme tu en as visiblement rien à foutre qu’elle va mal, j’ai décidé de l’emmener avec moi faire une promenade pour l’après-midi entier. De toute façon, tu ne remarqueras même pas notre absence. Ca ne te changera pas de d’habitude. Ah si ! J’oubliais. Pompom. Tu sais le chien? Il doit aller chez le vétérinaire. J’ai dis au véto que je serai présent mais comme je ne suis pas là. J’ai prévenu que t’irais à ma place. Allez la bise.

Ps : T’as intérêt à le faire sinon je peux te jurer que je trouverai un autre moyen de bien te faire chier.

Signé : Le fantôme, ton fils. “

- Sale môme.

Grognement traversant pour la énième fois la barrière de ses chairs. Doigts agrippant ce bout de papier pour le chiffonner et le jeter dans la poubelle dressée tout à côté. Ce gosse commence sérieusement à l’irriter. Il le sait. Il le sent à ses muscles crispés. Lui qui, pourtant, ne ressent habituellement rien de particulier. L’idée de s’en débarrasser lui vient même à l’esprit mais alors qu’il s’apprête à faire demi-tour, à quitter cette cuisine pour rejoindre son bureau et s’y enfermer à double tour, son regard se pose sur le husky assis à quelques mètres seulement de sa position actuelle, attendant visiblement que ce dernier vienne le caresser. Social, affectueux, joyeux. Tout l’inverse du mercenaire qui lui, a un coeur de pierre. Qui ne connaît ni amour ni affection. Ni tristesse ni hésitation à tuer ce qui peut le gêner. Oui. Caractère inversé. Opposé. Yong-Sun s’impatiente et lance à l’égard de ce chien qui remue la queue sous cette attention toute nouvelle et inespérée :
- Tu me veux quoi toi? Dégage. Vas-t-en. Tss.

Voix rauque. Ton rude tandis qu’il foudroie le chien de son regard glacé. A contrario de Morgan, son chef et ami de longue date, Yong-Sun n’aime pas les animaux. Il n’aime pas les responsabilités inutiles et futiles qu’ils occasionnent. Il n’aime pas grand chose cela dit et à part son travail. Ses contrats. La Team et ses responsabilités de mercenaire vétéran à l’égard de son rival passé, il ne connaît nul plaisir sinon celui de servir l’homme qui l’avait jadis sauvé. Sang contre sang. Vie contre vie. Dette qu’il s’adonne à payer sans culpabilité ni remord éprouvé.
- Foutaise. Pour qui, il me prend.

Colère non dissimulé. Pensée qui se tourne vers son fils. Cet être qu’il n’a jamais souhaité, désiré, aimé. Le considérant même comme une épine dans le pied. Yong-Sun lâche un grondement mais alors qu’il quitte enfin son immobilité. Alors qu’il compte bien ne pas se soumettre à cet ordre insensé, Pompom le suit et ses plaintes lui parviennent aux oreilles. Il se masse les tempes. Il ne supporte pas ce bruit qui lui donne presque la migraine. Lui qui n’aspire qu’à un peu de calme solitaire. Son corps se tend alors et il se retourne, appose sa main à l’intérieur de sa veste. Ses doigts entrent en contact avec son revolver mais pour la première fois depuis des années, il hésite sur ce geste presque familier. Il ne le brandit pas en sa direction. Il se contente de rester là, main enfouie à l’intérieur de sa veste, à peser le pour et le contre devant un visage, un chien, une figure familière que sa femme avait recueilli une fois de plus contre son gré. Il y a de cela bien des printemps. Quand ils venaient d'emménager.
- Tss.

Sifflement rageur dans cette hésitation incohérente. Volonté d’en terminer au plus vite tandis qu’il rechigne à chercher la laisse. Yong-Sun traîne le chien derrière lui et son humeur n’en est que plus maussade, irritable. Il ne comprend pas ce qu’il fait là. A conduire à présent en direction du vétérinaire dont il s’en contrefiche éperdument. Il ne comprend pas sa réaction. Celui de ne pas foudroyer ce chien par une balle fusée pour une tranquillité bien mérité. Il ne comprend pas sa décision à le laisser vivre, grognant presque à la secrétaire une fois arrivé comme la poussant à aller plus vite dans cette tâche qu’il considère particulièrement stupide :
- C’est pour ce... cette chose. Apparement, il semblerait que nous avons rendez-vous. Si vous pouvez vous dépêcher. Je n’ai pas que ça à faire.

Ⓒslythbitch.

Elle n'avait plus la patience pour gérer certaines choses. Les relations clients, c'était ce qu'elle détestait le plus. Avait-elle seulement déjà eu une quelconque patience, ceci dit ? Non, pas sûr. Ce qui était sûr c'était que les prochains clients n'avaient pas intérêts à ramener leur animaux en trop mauvais état où ils allaient manger le mur dans le meilleur des cas. Si elle aimait la chasse, elle aimait que les animaux soient traités correctement tout de même. Elle n'aimait pas faire dans le social, n'aimait pas parler aux gens, si elle faisait ce métier c'était pour s'occuper des animaux, pas des humains. C'était aussi pour cela que bien souvent, elle consacrait ses après-midis aux animaux de la forêt ou des fermes. Avoir la paix. On la connaissait, elle faisait son taff et ne demandait rien de plus. Sa dulcinée aurait été plus patiente qu'elle pour tout ça en tout cas.

L'auxiliaire lui annonçait que son prochain rendez-vous allait bientôt commencer, bien. Elle avait le temps de boire un café et de faire le tour du chenil pour voir où en étaient les animaux se réveillant des opérations du petit matin. En buvant son café, elle pouvait entendre ce qu'il se passait au comptoir. Demander à l'auxiliaire de se dépêcher ou comment dire qu'Angela allait juste prendre tout son temps pour finir son café, appelant l'auxiliaire pour la rejoindre et laisser l'homme seul.

Cinq minutes, c'était le temps qu'elle avait attendu, sachant que cinq minutes cela pouvait être long, seul, dans une salle d'attente. Surtout si on "est pressé". Elle ouvrait finalement la porte de son cabinet. Un regard désintéressé pour l'homme, curieux pour l'animal et ce qu'il pouvait avoir pour venir en consultation. Lire aurait pu être utile aussi mais après tout... Les gens venaient souvent en pensant quelque chose et le contraire se passait en réalité alors pour elle, cela ne voulait pas dire grand chose, les papiers.

Que se passe-t-il ?

Les bonnes manières ? À quoi bon ? Et si elle n'aimait pas faire dans le social, elle devait comprendre ce qui était arrivé à cette créature. Elle tapotait la table pour que l'animal y soit déposé, qu'elle puisse le consulter plus facilement. Elle préférait aussi aller droit au but, directement, quitte à paraître trop froide.

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AVATARS PAR Renescence & dracarys.

Humeur assassine. Volonté accrue de faire machine arrière, de laisser ce chien dans ce centre vétérinaire et de ne plus jamais revenir, abandonnant ce poids inutile qu’il l’incombe plus que de raison. Il n’en a que faire des recommandations de son fils. Il n’en a que faire de son avis, le tolérant juste assez dans la maison pour partager son sang. Rien de plus. Mobilier parmi tant d’autre dressé dans sa grande demeure. Chose insignifiante dont il commence simplement à avoir l’habitude. Il ne l’a jamais aimé. C’est un fait, une vérité. Il n’aime personne cela dit. Ses traits sont tirés et il pousse un grognement rageur en pénétrant dans la bâtisse. Il ne comprend même pas ce qu’il fiche ici. Il aurait dû partir, s’enfermer dans son bureau ou abattre d’une balle ce compagnon dont sa vie ne lui importe peu. Ou pas. Car à contrario de Morgan, son boss mais aussi son “ami”, son plus ancien compagnon d’arme, Yong-Sun n’aime pas les chiens, ni les chats, ni aucun animal existant sur cette planète. Il n’aime pas les hommes non plus ni les enfants, ni même les femmes, ne s’accordant aucun sentiment qu’il estime futile, absurde. Vide tant il n’en comprend pas le sens et ne cherche pas à les connaître.

Oui. Humeur maussade, hargneuse et désagréable. Yong-Sun tire sur la laisse et l’animal pousse un couinement plaintif. Il n’en tient pas compte. Ses traits se tirent et il regarde la secrétaire en espérant qu’elle aille plus vite. Pas de formule de politesse. Pas de sourire étirant ses traits. Seulement un grondement, un ronchonnement, poussant toujours plus son interlocutrice à se dépêcher pour se dépêtrer plus rapidement de cette lourde corvée.
“C’est à quel nom monsieur?”

Cette dernière tâche néanmoins d’être agréable mais il ne change pas d’attitude pour autant. Il se contente de lâcher un “tss”. Son corps se tend et il fronce les sourcils. Légèrement. Il maudit intérieurement son fils de l’avoir contraint à venir ici. Silence imposé. Enième grognement échappé. Sa voix tinte enfin dans le hall et il marmonne, le plus directement possible.
- Lee.

Pas de prénom. Pas de mention. Ni du chien, ni de sa femme et encore moins de ce rejeton qui ne lui pose que des problèmes. La secrétaire parcourt son ordinateur et hoche simplement la tête. Yong-Sun ferme les paupières, quelques instants. Il se pince le nez. Il commence clairement à perdre patience et ses grondements incessants le prouvent. Une minute de plus et il est prêt à abandonner. A tout lâcher, estimant en avoir fait assez. Quand enfin, elle lui demande cependant de le suivre, il lâche un :
- Ce n’est pas trop tôt.

Avant de tirer toujours plus sur la laisse. Docile, le chien le suit. Il remue la queue. Il tire la langue aussi mais Yong-Sun n’en tient pas compte. Il ne le regarde pas. Il s’en fiche éperdument et c’est dans une même attitude froide et tendue qu’il se présente à la vétérinaire. Pas de salutation. Conversation droite et directe. Yong-Sun apprécie. Yong-Sun ne s’offusque pas et préfère cela plutôt que des révérences interminables et badines. Elle lui demande ce qu’il se passe et il fronce les sourcils. Il grogne. Une nouvelle fois. Il la regarde et gronde de plus belle quand elle lui fait signe de déposer le chien sur la table, estimant que c’est à elle de le faire et non l’inverse.
- Qu’est-ce que j’en sais. C’est à vous de me le dire.

Il ne sait même pas pourquoi cet animal doit être examiner. Il ne le connaît pas. Il n’a jamais cherché à le connaître et son crétin de fils n’a pas jugé bon de le marquer dans sa stupide lettre. Il lève les yeux pour la forme. Devant l’immobilité de la jeune femme en face de lui, un ultime “tss” traverse ses croissants de chair et il porte enfin le husky sur la table. Il ne lui accorde aucune caresse. Directement, il recule et vient s’adosser contre le mur les bras croisés, reprenant de plus belle :
- Faites votre travail. C’est tout ce que je vous demande.

Ⓒslythbitch.

Angela n'était pas réputée pour sa patience, surtout à l'égard des humains. Elle trouve l'humain trop intrusif, trop nuisible. Et qu'importe si elle faisait parti de ces personnes, elle avait au moins la présence d'esprit de faire attention à son emprunte sur ce monde et non pas envers les humains, mais envers la nature et les animaux en tout genre. Sauf si ceux-ci devenaient nuisibles comme certains humains pour les autres. Elle n'avait pas de patience en général et n'aimait pas se forcer à parler, encore moins se forcer à être gentille pour faire plaisir à certains et leur égos. Ce qui n'était pas la meilleure stratégie lorsqu'on avait besoin de clients, elle aurait tout le temps d'y penser le jour où elle n'en n'aurait plus. Pour l'heure elle essayait de rester dans son cabinet et laisser son auxiliaire se charger du reste.

Forcément, si l'auxiliaire-même n'était pas respectée, cela commençait d'un mauvais pied et Angela aurait d'autant moins la patience de faire des manières et mettre les formes dans ses possibles propos. Elle ne se souvenait pas d'une fois où elle avait pris sur elle de toute façon, jouant souvent avec les limites qu'il pouvait y avoir, quitte à s'en prendre une ou risquer de s'en prendre une. Paraît qu'il n'y a que comme ça que ça rentre. Ou alors elle n'avait pris ce temps qu'avec Sera mais c'était du passé et elle avait bien vu ce que cela avait donné d'être trop patiente même avec sa propre compagne. Elle avait préféré ne pas réagir au "ce n'est pas trop tôt", se contentant d'un simple regard froid. Si les clients comme lui étaient rares, elle ne réagirait sans doute pas ainsi et réagirait plus sur le vif, hélas ils étaient si réguliers qu'elle avait fini par s'habituer. 10 minutes et il serait parti, c'était juste le temps de la consultation, rien d'insurmontable.

Après ce qu'elle pensait être un duel de regard et d'intention, l'homme posait l'animal sur la table. Elle commençait à examiner l'animal, les procédures standards pour un animal qu'elle ne se souvenait pas avoir déjà rencontré. L'animal semblait se laisser faire entre ses mains, elle prenait son stéthoscope, profitant pour écouter coeur et poumons.

Visite de contrôle ? Vaccins ? En général quand on prend rendez-vous c'est qu'il y a une raison.

Elle pouvait faire bien des choses mais deviner les réels besoins d'une visite, elle n'avait pas encore ce talent. Elle regardait les dents de l'animal, qui sur le coup ne se laissait pas faire et aurait manqué de la mordre si elle n'avait pas eu le réflexe d'une très légère tape sur le museau avec son index. L'animal semblait surpris et malgré sa réticence à ouvrir la gueule, elle parvenait à examiner ses dents et le tartre qu'il pourrait y avoir. Sa langue, son haleine, la couleur de ses gencives.

Elle ne s'était pas tourné vers l'homme pour sa réponse, continuant son examen, valait mieux être trop prudent en vérifiant tout que pas assez et être négligeant. De toute façon c'était l'animal qui était en consultation et non cet homme au caractère visiblement difficile. Elle ne pouvait pas le blâmer des masses, ce n'était pas comme si elle était agréable aussi.

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Yong-Sun n’aime pas cet endroit. Yong-Sun estime avoir autre chose de plus urgent à faire et son humeur est mise à mal. Il garde un air froid. Une expression glaciale. Ses pas reculent et il s’adosse contre le mur, croise les bras, n’accorde aucun regard à ce chien. Cette chose. Cet objet encombrant dont il s’en contrefiche éperdument. Ce dernier par ailleurs baisse la queue. Gémit presque sous le touché de la professionnel. Il demande de l’attention mais Yong-Sun ne lui en porte aucun en particulier. Là-dessus, il n’est pas comme Morgan. Il n’aime pas les chiens. Il n’aime rien et il se demande pourquoi. Pourquoi avoir accepté de venir ici alors que ce n’est en rien son problème. C’est celui de son fils. Fils qui n’a en commun que son sang, et qui semble devenir bien trop impudent à son goût. Bien trop présent. Il grogne. Il peste. Il souhaite que ce moment passe au plus vite et le fait savoir par des mots claquants, hautains.
- Tss.

La vétérinaire lui pose des questions et ces questions a de quoi le déranger. Sa langue claque contre son palais. Sa voix grave glisse, tonne et ses sourcils se froncent sur son front déjà plissé. Qu’est-ce qu’il en sait? C’est à elle de le dire. Et non l’inverse. C’est à elle de faire son travail et de savoir ce que cette chose a exactement. Pas lui. Quand bien même, son fils n’a pas jugé bon de le préciser dans sa lettre. Épine dans le pied. A croire que ce rejeton l’a fait exprès. Il aurait dû le tuer quand il avait l’occasion et il ne manque pas de le penser. Il n’est qu’un mobilier dans son quotidien. Une présence tolérée mais une présence non souhaitée. Volonté de rentrer. Volonté d’abandonner cette chose sur la table et de laisser ce rejeton se démerder pour le retrouver. Cette femme n’aura qu’à le garder. Après tout, c’est son métier. Un nouveau grognement échappé et son dos quitte son appui pour une allure plus redressée.
- Demandez-le à ce qui me sert de progéniture. C’est lui qui a prit rendez-vous. Pas moi. Alors je le répète. Faites votre travail. Point. Vous êtes payé pour ça non?

Yong-Sun ne mâche pas ses mots. Yong-Sun n’est pas réputé pour son amabilité. Il n'est pas non plus réputé pour tenir une longue conversation. Être glacé, sans sentiment pour le bercer. Corps sans émotion par un souhait aujourd’hui oublié. Cette femme non plus n’est pas aimable cela dit et elle se contente de focaliser son attention sur le chien qui ne se laisse pas faire pour autant. Grognement traversé. Tape sur le coin du nez. Yong-Sun ne s’en offusque pas et regarde sa montre pour voir l’heure affichée. Temps passé. Écoulé. Énième grondement traversant la barrière de ses chairs serrés. Sa patience est mise à rude épreuve. Un soupir s'échappe de ses lèvres et son regard se pose de plus belle sur la femme pour une question posée. Une seule. Celle qu'il estime le plus important :
- Vous en avez pour longtemps ?

Ⓒslythbitch.

Des clients chiants, il fallait le dire, elle en avait beaucoup. Ca pouvait être les questions connes, les remarques connes, ou les clients juste cons. Elle avait du mal avec les gens. Et certaines fois son métier en clinique ne l'y aidait pas, bien au contraire, ça la confortait dans ses idées. Le comportement de l'homme faisait parti de la case où elle sentait qu'il n'en n'avait rien à foutre de son chien. Ce qui était dommage, car ce chien était magnifique et mériterait bien une chance dans la vie, comme tous. Mais elle avait l'impression qu'il était parti perdant.

Quelque part, elle était rassurée d'apprendre que le chien était celui de son fils ou sa fille et non le sien, il aurait peut-être plus de chance dans la vie, surtout si l'homme parlait de son enfant comme "sa progéniture", elle avait le mince espoir qu'ils soient trop différents pour s'entendre. Elle était heureuse parfois de ne pas avoir connu son père et avoir été éduquée juste par sa mère, un froid avec les hommes qu'elle avait toujours eu et ce genre d'homme n'aidait pas. Ou là encore, il la confortait dans ses idées.

Elle haussait un sourcil toute fois aux réflexions de "faites votre travail, vous êtes payés pour ça". Des instincts profonds qui lui donnaient envie de prendre le scalpel pas si loin et de s'en servir pour des fins plutôt douteuses. Le respect ne s'apprenait plus quand on avait dépassé un certain âge, la violence par contre, les gens la comprenaient la plupart du temps. Cet instinct lui revenait de plus en plus, la rendait plus amère chaque jour, plus difficile, plus froide. C'était compliqué à gérer, comme chose. Surtout quand elle avait de plus en plus de mal à contrôler ses pulsions, se disant qu'il aurait été vraiment très facile de prétexter un vaccin ou de ne rien dire du tout et se servir et agir comme elle le voulait. Les conséquences étaient la seule chose qui la retenait.

Alors autre chose lui venait à l'esprit, à défaut de répondre, elle comptait faire ce qu'elle faisait aux clients chiants ; elle les faisait raquer. C'était une autre forme de violence pourtant justifiée sur le papier et même si la personne était aisée, elle savait que le principe d'une facture bien salée était compliqué. Bien, si l'homme ne voulait pas lui dire ce qu'avait le chien, Angela allait sur son ordinateur pour revoir le dossier de l'animal puis elle allait lui chercher les fioles pour les vaccins. Le chien se laissait faire, bien que se léchant nerveusement les babines. Les chiens sentaient tout, elle le savait, ils sentaient des choses qu'elle-même ne pouvait sentir. Notamment les personnes avec qui il fallait être sage des personnes plus faibles, des personnes qu'il fallait juste fuir. Les chats étaient pareils.

Elle ne s'arrêtait pas aux vaccins. Elle lui coupait les ongles, lui nettoyait les oreilles, les yeux, elle notait sur la facture à venir qu'il faudrait du sérum pour lui nettoyer les yeux, ainsi que du produit pour lui nettoyer les oreilles. En plus du produit, des lingettes. Il lui avait demandé si elle en avait pour longtemps, elle ne se gênait donc pas pour des choses peu utiles. Son maître ou sa maîtresse aurait pu lui faire les ongles ou les oreilles lui ou elle-même, après tout.

Si je ne sais pas ce qu'a votre chien, je dois vérifier ce qu'il m'est possible de vérifier sans informations. J'aimerais lui faire passer une radio, ces chiens ont souvent des problèmes aux hanches et je préfère vérifier.

Car passer une radio avait un coût. Elle verrait s'il acceptait ou non, elle n'était pas à ça près non plus. Car honnêtement, ce n'était pas le fait de gagner de l'argent qui l'intéressait, pour elle ça reviendrait au même. C'était juste pour emmerder le monde tandis qu'elle palpait le chien et testait ses réflexes. S'il était malade, le chien aurait sûrement déjà vomi et les gencives du chien n'étaient pas blanches, son regard était expressif, donc elle partait du principe que l'animal n'était pas malade. Elle gardait le dos tourné à l'homme, ne lui accordant pas de regard, quand bien même celui-ci ne devait pas en avoir grand chose à faire. Vérifier que l'animal n'était pas mal traité, elle le faisait aussi en le palpant et regardant entre ses poils.

Je vous ai donc mis sur la liste un produit à injecter dans ses oreilles pour les nettoyer, il semble que cela n'a pas été correctement fait, je vous ai aussi mis un anti-puce et vermifuge, le dossier indique que ça n'a pas été fait.

Avant la radio, elle attendait l'accord ou non de l'homme. L'argent puis finalement le temps. Le plaisir d'emmerder le monde, surtout.

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Temps écoulé. Temps perdu dans ses sombres activités. Yong-Sun grogne. Yong-Sun peste. Il n’est déjà que trop resté. Il ne supporte pas cet endroit et il le fait savoir sans l’ombre d’une culpabilité. La culpabilité. Il ne sait même pas ce que cela signifie. Il ne sait même pas ce que cela veut dire. Il reste froid, implacable et sa voix rauque perce le silence avec une certaine irritation. Oui. Yong-Sun n’apprécie pas d’être ici. Il a l’impression de perdre son temps. Un temps précieux qu’il mise et donne seulement pour Morgan, lorsque ce dernier à besoin de lui. Il n’en a que faire de ce chien. De cet animal apeuré sur la table de consultation. Il n’en a que faire de sa peur. Une peur pourtant justifiée alors que rare sont les animaux friand de ce genre d’intervention. Ses sourcils se plissent légèrement et il demande presque aussitôt à la femme désignée, si elle en a encore pour longtemps. Même s’il est déjà à deux doigts de se retourner. Même s’il n’éprouve aucun remord à laisser cette chose sur la table en l’abandonnant à son triste sort sans rechigner.

Yong-Sun n’aime personne. Ce n’est pas un secret. Il ne cache pas son caractère renfrognée. Il ne cache pas sa répulsion envers sa propre famille fondée. Yong-Sun vit uniquement pour ses missions et cela lui convient. Que sa femme ou son fils en soient touché, il ne se sent pas concerné. Son visage reste figé et il lâche un énième :
- Tss.

A la réponse donnée. Qu’il est bien loin d’apprécier. Des radios. Allons-donc. Yong-Sun aurait mieux fait de tuer ce chien sans se poser de question. Cela lui aurait évité d’être coincé ici, avec une femme aussi aimable que lui, prête à lui soutirer de l’argent pour des broutilles insensées. Son fils va le regretter. Yong-Sun grogne et se promet de lui envoyer la facture désignée sans lui laisser le choix de refuser. Ses doigts vinrent à sortir son téléphone portable, soigneusement rangé dans la poche avant de sa veste bien repassé et il pianote ces quelques mots, à ce numéro jamais utilisé. D’un fils qu’il n’a jamais aimé. D’une progéniture qui le lui rend bien cependant, en le titillant assez pour lui donner envie de s’en débarrasser.
“Ton chien. Ton problème. Si tu ne payes pas les frais de vétérinaire, tu sais ce qu’il t’attend.”

Point. Yong-Sun ne s’encombre pas de formalité. Pas de signature posée. Pas de bonhomme inutile qu’il ne sait même pas utiliser. Qu’il n’en comprend aucun intérêt. Un nouveau grognement traverse la barrière de ses chairs et il avance d’un pas. Puis deux. Il regarde la femme faire des soins qu’il n’a jamais demandé. Il la regarde pianoter sur son ordinateur, imposant une liste qu’il n’a jamais approuvé. Sa patience est mise à rude épreuve et il gonde, peste, à ses mots claqués pour n’en apprécier aucun aspect.
- Je vous l’ai dit. Ce chien n’est pas à moi. Voyez avec son propriétaire.

Yong-Sun. Oui. Perd patience. Il n’a déjà que trop traîné. Il n’aurait jamais dû amener cette chose ici et sa voix tonne à nouveau, laissant un habituel grondement lui échapper. Sans se soucier du chien qui, sous le touché de la vétérinaire, pleure, rabat ses oreilles sur la tête, non confiant d’être ainsi palpé. Non confiant également d’entendre l’homme grogner. Pour une raison que Yong-Sun est encore bien loin de se douter. D’un loup garou endormi. D’un Alpha ensommeillé. Des souvenirs nullement retrouvé pour être partiellement oublié.
- Est-ce vraiment nécessaire? Croyez-vous donc que je n’ai que ça à faire? J’imagine que cela coûte un prix. Combien?

Ⓒslythbitch.