Luna venait d’ouvrir le bar, la soirée promettait d’être calme. Ce serait bien pour la jeune femme, après les événements de la soirée d’ouverture, ce n’était pas une sinécure.

Pour l’heure, l’ambiance était un peu tendue entre Rigel et elle. La jeune femme avait du mal à digérer le terme « mal baisé » qu’il lui avait sorti devant leur client.

Ce soir, aucun thème pour la soirée, à part peut-être, « calme et respect ». La barmaid savait qu’étant propriétaire d’un tel établissement, elle devait faire face à ce genre de comportement, mais à la longue elle était lassée de ces personnes qui ne respectaient pas le travail des autres. Elle était habillée relativement, sobrement, elle portait un corset de couleur rouge, un pantalon noir et des bottes hautes de la même couleur. Ses cheveux étaient relevés en chignon et quelques fausses mèches de couleur s’en échappaient.

Elle était aux aguets, elle naviguait entre les tables, elle était attentive à ce que tous les clients aient leur consommation. La jeune femme venait de se poster derrière son comptoir lorsqu’elle le vit rentrer.

Il s’agissait d’un homme d’origine asiatique, elle ne connaissait pas son nom, mais elle avait déjà eu à faire à lui, cependant pas dans de bonnes conditions. La dernière fois qu’il avait mis les pieds dans le bar cela s’était mal terminé.
Elle ne savait pas réellement ce qui s’était passé cette soirée-là.

Tout avait bien commencé, mais l’alcool étant un bon inhibiteur, elle s’était retrouvée à séparer le jeune homme et un autre client.
Si Rigel s’était chargé de l’un d’eux, Luna quant à elle s’était chargée de l’inconnu, il s’était vu offrir une rencontre violente avec l’une des tables.

-La direction de l’établissement vous prierait de bien vous tenir ! Fit-elle sans pouvoir s’en empêcher.

Elle ne tient pas sa victime très longtemps et le relâcha vite, car bien qu’imbibé d’alcool, elle sentait qu’il n’aurait aucun mal à la mettre à terre s’il lui prenait l’envie.

-Réglez vos consommations et dehors.

La jeune femme revint à l’instant présent, elle regarda l’homme qui venait de s’installer au comptoir. Professionnelle, elle s’approcha de ce dernier avec un léger sourire.

-Bonsoir ! Qu’est-ce que je peux vous servir ? La jeune femme ne put s’empêcher de rajouter avec humour. On est en rupture de cocktail « rencontre violente avec la table ».

Elle espérait juste que son client ne s’offusque pas de son sens de l’humour particulier.

Une longue journée s'achève mais la soirée vient à peine de débuter. Sin n'a aucune intention de rentrer. La journée a été plutôt longue, rude, intense et il ressent le besoin de se ressourcer. De penser à autre chose qu'aux entraînements passés. Par ailleurs, le souvenir de sa nouvelle confrontation avec leur formateur le fait ricaner et il se promet de ne pas s'arrêter en si bon chemin malgré un "Continue petite bite et c'est ta gueule et celle de l'autre qui vont servir à récurer les chiottes, capiche? Allez du nerf les gueux ! Vous me soûlez putain. Nettoyer la merde tient, c'est tout ce que vous savez faire. Qui m'a foutu des glands pareils? Bowman je vais te niquer. Je te jure que je vais te niquer. " lancé à la volée après avoir passé trois bonnes heures à le faire tourner en bourrique. Ou plus exactement : à le faire chier. Facile quand le dit formateur s'avère impatient et pas pédagogue pour deux sous. C'est d'autant plus intéressant à titiller. Même si pour ça, il doit s’allier avec son pire ennemi pour le voir exploser.
- Pour une fois qu'il sert à quelque chose celui là. Non, j'ai bien fais de venir. Au moins ici, je ne risque pas de m'ennuyer.

En vérité, divers raisons l'a poussé hors de son pays natal. La première, celle de s'éloigner de son frère. Celle de s'éloigner de son passé, de son quartier. De cette tombe fleurie, décorée, dans ce cimetière qu'il ne compte plus jamais remettre les pieds. Sa mère lui manque. Il ne le montre pas. Il garde un air carnassier. Une allure droite et fière dans un égo démesuré mais il s'en veut néanmoins de ne pas avoir été là. De ne pas avoir été présent lorsque ce bâtard l'a frappé, malmené, tué même s'il s'est évertué après à le faire payer. Il ne regrette pas ce geste. Ce tir lancé à pleine vitesse dans la tête de son géniteur détesté. Non, il n'en regrette rien mais il a ressenti le besoin de prendre du recul. De vivre sa propre vie et quelle meilleure façon de le faire en rejoignant son meilleur ami sur cet île repliée. Isolée. Même après plusieurs mois passés.

Cigarette coincée au coin des lèvres, l'asiatique quitte le court ses pensées et marche dans la rue vers une direction toute trouvée, toute indiquée pour passer le reste de la soirée. Oui. Il ne tient pas à rentrer. Il ne tient pas à se poser ni à regarder l'heure s'écouler. Il a envoyé un message à Yuda. Il espère qu'il va rappliquer même si ce dernier lui a informé ne pas pouvoir être là. Divers chose le retient et c'est donc seul qu'il entre dans ce bar devenu familier. Qu'il pose un regard autour de lui. Qu'il sourit, ricane au souvenir passé d'une bagarre écoulée. Éclatée. Une bagarre qui n'avait pas de cause précise, sinon l'alcool imbibé. Une bagarre qui aurait pu cependant très mal tourné si les gérants ne s'étaient pas évertué à les séparer. Par ailleurs, le souvenir de cette table balancée au coin de son nez le traverse et il laisse un énième ricanement lui échapper. Sous l'audace de cette femme qui n'avait pas trouvé meilleure arme pour le calmer. En règle générale, il l'aurait mal prit. Il n'aime pas voir son égo touché et sa fierté brisée par une inconnue qui plus est. Mais c'est l'inverse qui s'est produit. Il a trouvé son audace plutôt intéressante et surprenante. Elle a attisé un peu sa curiosité et c'est l'une des raisons pour laquelle il a décidé de revenir ici aujourd'hui pour, qui sait, en apprendre plus à son sujet. Parlementer, sans arrières pensées.

Sa main vient coiffer ses cheveux plaqués et Sin se dirige alors vers le comptoir. Par chance, elle est là. Il la voit. Fidèle au poste dans ses fonctions. Cette dernière ne tarde pas à aller à sa rencontre et ses yeux croisent les siens tandis qu'elle lui demande ce qu'il souhaite comme boisson.  Ses dires le fait à nouveau ricaner et il prend place sur l'un des sièges. Hausse un sourcil en prenant son air carnassier. Soirée tranquille en perspective. Il compte bien se prélasser sans se faire virer par un surplus d'alcool qui lui donnerait la migraine du siècle au petit matin levé.
- Oh comme c'est dommage. Je dois admettre que ce "cocktail" avait de quoi me réveiller. Une autre fois peut-être? Même si je préfère l'éviter. Une bière m'irait très bien gente dame. Par chance pour vous, j'ai décidé d'être sage aujourd'hui.

Voix mielleuse. Joueuse et légèrement suave sous son allure soignée. L'asiatique marque une pause et incline légèrement la tête. Entre dans une forme de jeu avant de poursuivre, accentuant son expression folâtre et  mesurée :
- D'ailleurs, je me suis toujours demandé comment s'appelait la créatrice de ce surprenant et douloureux cocktail. Vous pourrez peut-être me le dire maintenant que je suis assez sobre pour l'assimiler ?

Ⓒslythbitch.

Luna fut heureuse de voir que l’homme face à elle acceptait son sens de l’humour un peu particulier.
Elle sourit en entendant sa réplique, elle n’était pas du genre à nouer des liens avec ses clients mis à part quelques personnes qu’elle pouvait compter sur les doigts d’une main. Elle se pencha sous le comptoir pour en sortir une bouteille de bière qu’elle posa devant son client.

-Luna Archelune ! Pour vous servir. La douce et délicate propriétaire de ce lieu. Enfin « douce » et « délicate » ne sont pas les termes que j’emploierais me concernant.

La jeune femme était assez en forme ce soir, malgré la tension avec Rigel, elle faisait attention à ses tables depuis son poste du jour : le bar. Ils avaient tendance à se répartir les tâches avec son ami, si l’un s’occupait des tables, l’autre gérait le bar. C’étaient deux rythmes relativement soutenus, les tables nécessitaient de l’adresse et de l’attention, il ne fallait pas renverser les consommations qui se trouvaient sur le plateau, ne pas se prendre les clients qui ne regardaient pas devant eux et gérer les encaissements des tables. Le bar n’était pas mieux, ils devaient naviguer d’un bout à l’autre du meuble, faire les cocktails des clients devant ce dernier et ceux des tables, tout en gérant les encaissements et en évitant les clients peu scrupuleux qui auraient envie de partir sans payer. Pouvait s’ajouter à cela les personnes qui avaient trop bu et qui avaient l’affreuse tendance à s’engager dans une pâle copie d’un combat de coq.
La rousse, fit un tour de bar pour servit quelques clients avant de revenir vers le brun, elle désigna la bière d’un léger mouvement de main.

-À consommer avec modération. Je ne tiens pas à vous accompagner violemment vers la sortie si vous en consommez trop.

Elle se retourna pour servir un verre à un autre client avant de revenir vers l’Asiatique.

-Par contre vous avez un avantage me concernant que je n’ai pas vous concernant… Je ne connais pas votre nom.

Elle remarqua alors que la bouteille du brun face à elle était vide, elle en prit une nouvelle avant de la poser devant lui et la décapsuler.

-Cadeau de la maison.

Ce genre de privilège, n’était pas accordé à tout le monde, mais uniquement à ceux qui lui plaisaient. Étrangement, le brun devant elle la touchait, il ne lui faisait pas pitié ou autre, elle était sensible à cette mélancolie qu’elle pouvait voir dans ses yeux.

L’Italienne ne savait pas ce qui le rendait ainsi, qu’avait-il vécu avant d’arriver sur cette île ? Avait-il dû quitter quelqu’un d’important ? Ou bien était-ce la vie sur l’île qui le rendait ainsi ?

-Alors comme ça va avez décidé de rester sage ce soir ? Je dois vous faire sortir à minuit, avant que votre carrosse ne redevienne une citrouille ?

Elle voulait étrangement le faire rire, elle s’installa un peu mieux avant de se servir un Bloody Pirate, il y avait un peu moins de client dans le bar pour le moment, elle pouvait donc se permettre de relâcher un peu son attention et boire un verre avec son client.

Rictus étiré. Oui, volonté de passer une bonne soirée. Sin se place derrière le comptoir souhaité et sa voix grave, amusé, claque dans ce bar bondé. Ce soir, pas de mélange formé. Ce soir, pas d’esprit embrouillé ni de bagarre déclaré. Juste une simple soirée sous le signe évident de la curiosité. Son regard malicieux se pose alors sur cette femme. Sur cette gérante au caractère aiguisé qui ne manque pas d’humour et de répartie - ce qui a de quoi le réjouir - et il s’enquit presque aussitôt de son identité. Oui. Elle attise en lui une certaine attention. Une certaine complaisance et amabilité. Ses yeux brillent de malice et il répond volontiers à ses taquineries, avec cet air avare et joueur qui le caractère bien en vérité.
- “Sauvage” et “un peu folle” me viendrait plus à l’esprit. Enchanté de vous connaître, Luna. Doux nom pour quelqu’un qui ne manque pas de sortir ses griffes.

Sourire affiché. Ricanement échappé au coin de ses lips finement étiré. Sin est comme ça. Mutin, parieur, folâtre même quand ses intentions sont loin d’être sous le signe aguicheur. Ses sourcils se haussent et ses prunelles s’animent d’une certaine lueur claqué. Ses propres souffrances, son propre passé et pensées sont bien cadenasser dans son coeur et son égo gonflé et ses épaules s’abaissent. Signe qu’il se détend enfin après cette longue journée passé. Après ces longues heures d'entraînement déroulé avec un rival qu’il ne peut toujours pas blairer et un formateur dont il est facile de faire chier, par son caractère explosif si aisément titiller. Il ne regrette en rien ses choix. Il ne regrette en rien d’avoir rejoint Hydra, quittant son pays, sa vie, son frère, pour l’éloigner de tout danger. Pour l’éloigner de l’homme qu’il est. Lui. Qui a toujours baigné dans l’illégalité à l’égard de son petit frère et de son existence bien rangé. Existence qui n’est en rien la sienne. Existence qu’il ne peut changer ni veut chambouler. C’est comme ça. Son petit frère doit vivre avec. Et il ne peut en rien le modifier.

L’une de ses jambes frétillent au son d’une musique lointaine, camouflé et ses doigts entourent le contour de son verre, pour le porter à ses lèvres étirées.
- A vos ordres Gente Dame. Me voilà largement prévenu. Au moins je saurai quoi faire si l’envie m’en prend d’égayer un peu plus ma soirée.

Oui. Joueur derrière son air particulièrement mutin et aiguisé. Sa bouche trempe dans le breuvage et ses yeux s’ancrent à nouveau dans ceux de la dite Luna, qui s’enquit elle-même de son identité.
- Hum, l’avez-vous vraiment mérité?

Un ricanement, de plus belle, s’échappe de la barrière de ses chairs et il repose son verre, tapant légèrement le cristal de sa bague enroulé. Bague qu’il porte toujours aux doigts. Non pas par une quelconque conquête - Qu’il a don d'enchaîner - mais souvenir souhaité, ancré, d’un père qu’il a tué, abattu pour une vengeance bien mérité. Une vengeance qu’il n’est pas prêt d’oublier.
- Sin Guo. Nom pas bien compliqué à retenir.

Quittant le cours de ses pensées, la jeune recrue vide d’une traite son verre. Il marque une pause, un silence, ricanant au cadeau fort aimable de son interlocutrice qui prit une nouvelle bouteille pour la lui offrir. Oui. Autant dire qu’il l’apprécie. Elle a ce quelque chose. Ce caractère. Qui l’amuse autant qu’il savoure sans arrière pensée. Ce cadeau. Il ne peut en rien le refuser. Sa promesse est sincère. Il compte rester sobre mais il n’est pas contre cependant de profiter. De profiter de cette simple soirée qui l’éloigne de toute ses réflexions murées.
- Oh, c’est fort aimable à vous. Que me vaut cet honneur? Je croyais que vous ne tenez pas à me voir bourré ce soir? Envie encore de me jeter dehors? Avouez-le. Vous hésitez.

Un pied se pose par terre et l’autre se cale contre la barrière en fer du tabouret installé. Son allure est à la fois droite mais posée. La conversation est lancée et une main rejette brièvement sa chevelure soignée en arrière. Ses doigts caressent le bout de sa barbe avant de les porter sur la nouvelle bouteille de bière pour la porter de plus belle à ses lèvres finement étirées.
- Et oui. Comme quoi, les miracles existent. Pourquoi pas. Je perdrai ma chaussure de verre et vous devrez poster une annonce pour me retrouver. Moi. Votre chevalier servant, perdu à jamais.

Soupir exagéré. Voix mélodramatique alors que le jeune Hydra porte une main à sa poitrine dans un geste parfaitement théâtrale. Un rire, une fois de plus, est lâché et sa bague, à nouveau, qui cogne légèrement contre le verre dans une mélodie camouflée.
- Alors comme ça, c’est vous la maîtresse des lieux? Hum. Je dois dire que cela vous va bien. J’imagine que vous devez faire peur à toute votre aimable clientèle. Moi y compris. Ce qui, vous pouvez me croire, est aussi rare que de rencontrer Marraine la bonne fée et sa baguette magique au détour d’un bon cocktail.

Ⓒslythbitch.

Luna regarda son client déguster son verre, elle était heureuse de voir qu’il semblait vouloir garder son calme et ne pas faire de vague ce soir. Au moins elle n’aurait pas de grabuge ce soir, elle aimait ce qu’elle faisait comme métier, cela lui permettait de rencontrer des gens, comme l’homme en face d’elle, mais parfois elle le regrettait quand les enivrés avaient décidé de se faire entendre. Elle sourit avant de faire une petite révérence lorsqu’il la qualifia de “sauvage” et de “un peu folle”.  

-Merci du compliment. Pour ce qui de sortir les griffes… Il le faut bien quand on dirige ce genre d’endroit. Ou bien ai-je été un chat dans une autre vie ?

Elle ajouta la dernière phrase avec un faux air sérieux et pensif. Elle était pleine d’humour, c’était sa manière d’aborder les choses de la vie. Elle préférait user de l’humour plutôt que de la force, bien que cette dernière fût souvent la solution la plus efficace.  

-Je ne saurait trop vous conseiller de ne pas partir sur cette voie par contre… La dernière personne qui a tenté de faire des vagues, s’est retrouvé avec le nez fracassé sur cette table.

La demoiselle désigne une table au milieu de la salle. Elle espérait dissuader l’homme face à elle de faire des vagues, certes, il semblait las et fatigué, mais elle n’était pas sûre de réitérer l’exploit de prendre le dessus sur lui.  

-Et je vais vous faire une confidence … Je ne veux pas m’énerver ce soir.

Elle boit une gorgée de son cocktail tout en ne quittant pas le brun face à elle, avant de le reposer son verre. Elle sourit lorsqu’il se présenta.  

-En effet un nom peu compliqué… Mais qui offre une petite touche d’exotisme dans cet antre aux accents méditerranéens.

La rousse jeta un regard à son collègue, avisant qu’il gère la situation elle reste auprès de Sin, tout en continuant de préparer certaines commandes. Son regard passe sur la bague qui orne son doigt, celle-ci semble avoir une valeur sentimentale pour l’homme.  

-Peut-être ai-je envie de vous enivrer pour abuser de vous ? Fit-elle mutine lorsqu’il lui demanda que lui valait l’honneur d’une bouteille offerte. Non, vous n’êtes pas assez russe à mon goût... Peut-être parce que vous m’êtes sympathique.

L’Italienne éclata de rire lorsqu’il rebondit sur son histoire de carrosse et qu’il se proposa d’être son preux chevalier.  

-Poster une annonce ? Non, j’enverrais un lapin blanc en gilet avec une montre pour vous guider jusqu’ici.  

Elle regarde son collègue qui circule entre les tables.  

- J’aurais bien besoin d’un preux chevalier, en effet. Même si Rigel est utile, un peu de testostérone en plus ne serait pas du luxe.

La rousse finit son verre, elle le rinça avant de passer à du "sans alcool", elle ne souhaitait pas finir la soirée complètement ivre et puis à boire sans modération et tous les jours, elle n’était pas certaine que son foie apprécie la plaisanterie.  

Elle sourit face à l’amusement et à la détente de Sin, il était agréable de voir des clients s’amuser et être agréable. L’alcool avait souvent tendance à rendre les gens irritables, parfois elle en venait même à se demander si elle n’aurait pas mieux fait d’ouvrir un café gourmand où elle aurait servi des boissons chaudes agrémentées de sucreries. Mais bon, elle n’aurait peut-être pas eut autant de succès qu’elle commençait à en avoir actuellement.  

-En effet, je suis la maîtresse de ce lieu de perdition. Merci, j’en viens à me demander parfois si j’aurais mieux fait de m’abstenir parfois. Je suis bien obligée de jouer le Père, ou plutôt, la mère Fouettard parfois sinon, c’est la foire à l’empoigne ici.  

Elle se sentit presque flattée de savoir qu’elle avait réussi à l’impressionner.  

-Quoi ? Moi ? Une frêle et pauvre demoiselle sans défense… Je vous fais peur ?  

Elle est à demi sérieuse en disant cela.  

Oui, sourire étiré. Volonté de se laisser aller à cette simple soirée. Un sourire est esquissé. Un sourcil est levé et la conversation est lancée avec cette gérante qui ne peut qu'attiser sa curiosité. C'est vrai. Elle a cette audace qu'il ne peut qu'apprécier. Son rire tinte à ses propos formulés. Le souvenir de la bagarre passée le traverse et il se recule légèrement. Il se met plus à l'aise sur ce tabouret. Un pied posé à terre, l'autre plié, son buste se penche en avant et ses doigts jouent avec la bouteille au son teinté, d'une bague volée sur un corps. Le corps de son propre père tombé au souhait le plus cher de le voir crever. De le voir mort après que ce dernier a frappé sa mère. Jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus se relever. Jamais. Ce qu'il n'a pas oublié. Ce qu'il n'oubliera jamais malgré la distance claquée, formulée pour refaire sa vie ici, mettant de côté son passé.
- Je ne vois absolument pas de qui vous parlez.

Sin hausse les épaules et un nouveau ricanement est lâché. Ses yeux brillent de malice et il entre consciemment dans ce jeu qui a de quoi l'amuser. Le divertir. De toute façon, ce soir, il n'est pas spécialement d'humeur à se battre avec n'importe qui et il préfère se délecter de cette simple soirée. Cela lui arrive. Un même sourire est étiré. Une table familière est désignée et des mots sont murmurés, ce qu’il répond dans un même ton susurré, le regard rivé sur elle et le verre légèrement levé :
- Ça tombe bien, moi non plus.

Oui. Confidence partagée. Air de malice pourtant si soigneusement affiché. Le jeune Hydra boit à nouveau une gorgée et les présentations sont formulées. D’un nom qui n’est pas spécialement compliqué à retenir. D’une identité qui rappelle ses origines. Ses racines bien que le jeune Guo a préféré s’en éloigner. Le premier verre est vidé et Sin accepte volontiers le second offert par cette demoiselle dont le caractère aiguisé le met au respect. Il ne ressent pas l’ennui. De plus belle, un ricanement est lâché et un clin d'oeil est adressé. Oui simple soirée. Soirée pourtant appréciée d’une conversation légère avec son interlocutrice aux répliques savourées :
- Voilà qui est intéressant. Dois alors me transformer en Russe pour avoir la chance d’être abusé par une si jolie et piquante tenancière?

Joueur jusqu’au bout. Malicieux et prétentieux. Ses yeux, oui, brillent de malignité et il en use sans compter. Il ne tient pas cependant à la draguer. Pas cette fois. Une pause est marquée et il poursuit, humant le doux parfum de l’alcool qui glisse à son nez :
- A moins qu’un autre Russe a déjà pris ma place? Quel dommage. Vous ne savez pas ce que vous perdez.

Oui prétention. Maître mot de son caractère épointé. Le jeune Hydra est pourtant sincère. Il tâte le terrain, comprend certaine chose aux paroles échangés, aiguisant toujours plus sa curiosité. Autour d’eux, la soirée est enivré. Les clients sont enjoués et leurs rires tintent dans ce bar bondé. La bague à son doigt est une fois de plus teinté. Le verre est à nouveau porté à ses lèvres et la conversation est toujours plus lancée, allant de question en question. Allant de réplique en réplique, ce qu’il savoure, oui, avec délectation et amusement claqué.

Il lui demande alors si elle est la maîtresse des lieux. Elle lui répond que oui et un sourcil est levé. L’alcool coule légèrement dans son gosier et un silence est marqué. Une question est échangée, ce qui a le don de l’amuser au sourire esquissé d’un souvenir encore bien marqué dans sa mémoire voilée.
- Disons que vous m’avez impressionnez. Et pourtant, sachez qu’il m’en faut plus pour m’intimider. Vous êtes une femme d’empoigne. J’imagine, oui, qu’il le faut devant une telle clientèle éméchée pour ne pas se faire bouffer. Je me demande. C’est un caractère naturelle ou vous l’avez appris de quelques façons?

Ⓒslythbitch.

Luna observa la salle, elle était épuisée parfois, mais elle était fière du succès de son bar. Certes il y avait les aléas, les personnes ayant tendance à abuser de l’alcool par exemple et ceux qui ont la colère facile, mais il y avait aussi de bonnes rencontres, comme l’homme en face d’elle. Leur première rencontre avait été mouvementé, mais au final il ne semblait pas si désagréable que cela.  

Savoir qu’il n’était pas décidé à mettre le bazar dans l’établissement l’arrangeait, elle était heureuse de pouvoir passer des soirées tranquilles. Ce n’était pas monnaie courante d’avoir des bagarres en ces lieux mais le peut qu’il y eût, étaient souvent issu de gros bras enivrés.  

C’était reposant de ne pas avoir à jouer les gros bras à chaque soirée, elle était heureuse que Rigel est accepté de travailler pour elle, elle ne se serait pas sentit de devoir gérer autant de viande saoul tout le temps.

-En effet il faut avoir un sacré caractère pour espérer rester en vie avec une clientèle comme ici. C’est un caractère naturel, du moins en grande partie, pour le reste... Vous ma taille de souris, j’ai appris à ne pas m’en laisser compter. Après j’abois souvent plus que je ne mords. Votre dernière visite ici avait été une soirée relativement agitée.  

Il en avait souvent des comme celle-ci, la dernière en date s’était terminée par un super petit tête à tête, mais la plupart se terminait généralement par soit la fermeture précoce du bar soit par l’arrivée des forces de l’ordres. La dernière option, elle préférait ne pas avoir à l’utiliser, elle n’aimait pas voir la police débarquer avec ses grands sabots à l’Inferno.  

-Je ne devrais pas, mais je suis ravie de vous impressionner. C’est flatteur d’apprendre que je suis impressionnante.

Elle avait gardé son éternel sourire en disant cela, elle le trouvait sympathique cet homme, elle était heureuse de ne pas s’être arrêté à la première impression. Elle servit quelques commandes de client avant de revenir auprès de Sin, elle remarqua que sa bière était presque vide, en bonne hôtesse, elle lui en proposa une autre, elle lui laissa la possibilité de refuser l’offre. Elle n’était pas là pour insister à l’abus mais elle n’aimait pas voir ses clients avec des verres vides … Défaut professionnel.  

-Encore un verre ? Ou quelque chose sans alcool ?  

La soirée se passait bien, Rigel gérait la salle comme un chef, le comptoir commençait à se vider, elle avait plus de temps à consacrer à son client d’honneur de la soirée. Elle remplit un verre de boisson sans alcool qu’elle prit pour elle.  

-Et que faites-vous dans la vie à part mettre le bazar dans les bars lorsque l’alcool est trop fort pour vous ?

Il est vrai que la jeune femme voulait en apprendre un peu plus sur son mystérieux client, entre la bague qui tintait régulièrement sur le verre de sa bouteille et qui semblait avoir une importance pour lui ainsi que l’air nostalgique et mystérieux. Son côté méditerranéen ressortait, ce côté convivial, familial, celui-ci qui la poussait vers les autres et à s’inquiéter pour eux, qu’ils soient des proches ou de simple connaissance. C’est aussi pour cela qu’elle aimait le bar, elle pouvait malgré tout parler avec les habitués, elle adorait pouvoir passer du temps avec eux et découvrir de nouvelles histoires, bien qu’elle ne soit pas des plus intrusives. Elle écoutait, si on n'avait pas envie de parlait elle respectait le silence.

Secondes passées. Minutes écoulées d'une soirée - oui - tranquillisée. Pas de combat de coq. Pas de sarcasme échangé. Pas de séduction non plus, autre que sa langue si finement mesurée. D'un égo surdimensionné. D'un caractère fiévreux, aiguisé, aujourd'hui plutôt discret. Est-ce parce qu'une partie de son esprit est ailleurs? Est-ce parce qu'il pense inconsciemment à son frère? à sa mère, à ce jour enterré? A son passé en somme bien qu'il n'en montre aucune culpabilité. Aucun regret. Encore moins vers son père qu'il a prit grand plaisir à buter. A lui mettre une balle dans la tête sans l'once d'une innocence depuis longtemps brisé. Non. Sin n'a aucune culpabilité. Il n'a aucune culpabilité de s'être élevé selon ses atouts, ses charmes et ses plans si minutieusement préparé. Il n'a aucune culpabilité, d'avoir pris ce chemin au détriment de son frère, bien que ni lui ni ce dernier ne savent vraiment la vérité. Sur une vie ancienne, effacée, troublée par un sort que peu à ce jour n'est capable de se rappeler. Il n'a aucune culpabilité mais il y pense - oui - pour quelques raisons inconnus, d'une date posée peut-être. D'une soirée après une dure journée et un entrainement plutôt long entre un formateur dont il s'en moque éperdument à ce connard dressé, d'une rivalité mordante qu'il ne peut refréner. Son regard est tout posé sur la serveuse dont il est prit de sympathie malgré son caractère pas toujours - voir non facile à gérer. Un sourire est esquissé. Un ricanement est échappé, à la mention d'une clientèle tout aussi difficile à museler. Il ne peut que se dire que - oui - elle invite au respect. Au respect de devoir fermer leur grandes gueules souvent éméchées.
- Je crois m'en souvenir oui. Pour ce qui est de ne pas mordre, je pense ne pas être tout à fait d'accord avec vous. Dois-je vous rappeler le coup que vous m'avez donné? Ou plutôt la table que vous m'avez envoyé? Outch. Mon splendide nez s'en souvient encore. Regardez.

D'un air taquin, Sin montre son nez suivi d'un clin d’œil mesuré. C'est qu'elle peut mordre. Il en a déjà fait les frais. Les frais de ne pas la prendre au sérieux avant de se voir éjecté par cette satanée table lancée à la volée. Ricanement. Rire échappé alors que sa tête se secoue légèrement. Alors qu'elle murmure être ravie de l'impressionner.
- Vous pouvez. Comme je l'ai dis. Je ne suis pas facilement impressionnable. Vous voilà chanceuse d'être dans mes "petits papiers".

Verre vidée. Moment de silence entre des rires retentit. Des éclats de joies et d'entrain dans ce bar ainsi bondé. Bague teintée. Moment de solitude alors que son interlocutrice vient et repars pour servir quelques clients dressés. A nouveau, la conversation est lancée et l'asiatique fait mine de réfléchir, optant finalement pour une boisson moins alcoolisé.
- Hum. Bien qu'un nouveau Wisky est particulièrement tentant, je vais me contenter d'une autre boisson. Un cocktail sans alcool pourquoi pas. Il me semble vous l'avoir promis non? Pour une fois que je joue le parfait adolescent obéissant. Profitez. Cela sera au moins arrivé une fois dans ma vie. Qu'est-ce que vous me proposez?

Plaisanterie. Taquinerie. Volonté toujours présente de se détendre, d'apprécier, quitte à faire quelques concessions dont il s'en fout habituellement pour vivre selon ses codes, ses désirs les plus profonds et claquée. Pensée particulière pour sa mère qui l'a malgré tout bien élevé, malgré la précarité. Malgré sa désobéissance d'être un jeune érudit suivant la voie d'un travail bien rémunéré et apprécié. Malgré sa vie passé dans un gang, à faire la loi, sa loi dans le quartier ainsi mal famé. Pour une vie délaissé par la société. Question soudaine de ses activités. Sourire esquissé aux coin de ses lèvres étirés, d'une question mise en suspens de ne pas pouvoir ni vouloir en dévoiler plus sur ses véritables intentions, sur son choix, son chemin, de rejoindre Hydra et de s'y élever.
- Voilà une question bien indiscrète. Disons que je suis en formation. Une formation quelque peu particulière si je puis dire. Attention à ne pas m'en demander plus, sinon je pourrai vous éliminer. Alors ce cocktail? Faites celui que vous faites le mieux que je puisse vous juger et ne pas opter pour de l'alcool finalement. Ma santé est entre vos mains désormais.

Ⓒslythbitch.