I know, I'm such a bad mother [pv James Howlett]

I know, I’m such a bad mother...James Howlett & Jennifer Walters
Je n’arriverai jamais à comprendre cette gamine. Elle claque la porte, me laissant plantée dans le salon, et j’ai tout juste le temps de sortir dans la rue pour voir une moto s’en allait au loin, avec ma fille dessus. Ma fille, avec un gosse un peu plus âgé qu’elle – trop mon goût – et qui a tout du mauvais genre. Des milliers de scénarios me passent par la tête : j’ai pourtant tout fait pour qu’elle ait une vie plus équilibrée, pour qu’elle ne finisse pas comme moi, et j’étais heureuse de voir Chloé avec la tête sur les épaules. Elle n’a jamais fréquenté de garçons, avant lui, c’était études, études et éventuellement cinéma avec ses copines. Et voilà qu’elle en pince pour le premier roublard du coin et qu’elle se sent pousser des rêves d’aventure et d’indépendance. Je suis blessée – et surtout en colère – après ce qu’elle m’a dit, en tournant les talons. ‘C’est pas parce que t’as raté ta vie que tu dois micromanager la mienne.’ Quelle idiote, je fais ça pour son bien. Tout ce que je fais, c’est pour elle. Je sens mon estomac se tordre et une bouffée de chaleur : je vais me sentir mal, je dois rentrer. Je rentre dans ma cuisine, et je me mets à tourner en rond comme un lion en cage, puis avisant le téléphone je tente de composer son numéro. Messagerie. J’écrase presque littéralement le téléphone sur sa base. Il faut que je me calme. Je fais mon possible pour ne pas perdre le contrôle, je respire, comme la psy’ me le conseille. Il faut que je me détende, que je fasse quelque chose. J’avise la table de la cuisine sur laquelle se trouve encore mon sac de sport, pour le yoga, et mes clés de voiture. Un moment d’hésitation. Mes vieux démons me rattrapent, et bordel non, je n’ai pas envie de faire des exercices de respiration, j’ai envie de boire.
C’est comme ça que je me retrouve assise au bar, seule. J’ai quand même emmené mon carnet, des fois que j’éprouverais suffisamment de remords pour vouloir me confesser. Le barman me sert un nouveau Scotch et je le remercie, le regard perdu dans le vague. Je n’écoute que la musique, sans prêter attention aux discussions de piliers de bar. Il y a bien le barman qui s’étonne de ma présence en plein après-midi, me faisant remarquer que ça fait quelques jours qu’il ne m’avait pas vu.
- Sale journée, besoin de décompresser., je maugrée, en portant le verre à mes lèvres.
- Des soucis au boulot ?
Je me demande pourquoi je paye une fortune en psychologue quand Jerry le barman fait aussi bien le travail, avec le luxe de m’offrir un verre. Je soupire un peu avant d’alléger un peu mes tourments en vidant un peu mon sac.
- C’est ma fille, elle est en pleine crise d’ado’, j’imagine. Je fais ce que je peux pour qu’elle ne manque de rien, mais ça ne suffit pas, je pense… , je hausse les épaules, J’étais contente de voir qu’elle se consacrait à ses études, qu’elle n’empruntait pas le même chemin que moi, et maintenant elle part en moto avec le premier branleur boutonneux qu’elle rencontre !
Sûrement que Jerry n’en a pas grand-chose à foutre, mais j’imagine que faire la discussion, ça fait partie du boulot, alors bien sympathique, il fait mine de compatir, en jouant du torchon avec ses verres. Toujours est-il que ça fait du bien de se plaindre un peu.
Combien de verres, combien de temps… Des questions sans réponses quand je remarque un visage connu, malgré ma vision maintenant un peu trouble. Un visage connu accompagné de ma progéniture qui tire une sale tronche. Et la première chose qui me vient à l’esprit c’est :
- Oh bordel… je suis une mauvaise mère…