Les journées qu'elle préférait, c'était celles où elle pouvait travailler à l'air libre. Rester enfermée toute la journée était désagréable au possible alors dès qu'elle pouvait aller travailler en forêt ou en campagne, elle y allait. Sa préférence allait pour les forêts mais elle ne rechignait pas à travailler dans les campagnes. Aujourd'hui, ce serait dans une écurie. Elle venait souvent faire le tour des chevaux pour vérifier que tout allait bien, quand elle venait pour un cheval, elle profitait pour voir tous les autres. On faisait appel à elle, même si elle n'était pas la personne la plus loquace qui soit ni la plus agréable. Elle était vive, elle était franche, parfois trop, ça déplaisait, toujours. Ou presque toujours. Surtout lorsqu'il fallait annoncer des choses délicates et qu'elle les annonçait comme si c'était normal. La mort faisait parti de la vie, elle n'avait donc pas de problèmes à annoncer ces choses là mais son détachement ne plaisait pas à tous. Un peu d'humanité, qu'on lui demandait souvent. Alors elle s'enfermait dans sa bulle avec les animaux qui eux ne demandaient pas autant d'efforts.

Elle faisait le tour de l'écurie après avoir soigné un cheval malade ayant des problèmes à un oeil. Drainer son nez avait été une chose dont elle se serait bien passer mais quand c'était bloqué, pas d'autre solution. Elle faisait son tour de l'écurie habituel, évitant les mains dans les poches à cause des gants qu'elle conservait au cas où.

Une jeune femme à la chevelure sombre était là, dans un des box, celui qu'elle comptait visité après avoir fait le box voisin. Elle passait ses mains sur le rebord de la porte où le cheval passait habituellement sa tête. Angela était grande, très grande. Trop grande. C'était ses origines du grand Nord qui faisait ça, à ce qu'on disait.

Bonjour, mademoiselle.

Elle aurait pu la confondre avec Sera, de dos, c'était la même allure, la même apparence, le même style à quelque détails près. Sa défunte était peut-être un homme autrefois mais elles avaient vécues cette transition avec plaisir et Sera avait toujours été très féminine alors même là, elle aurait pu les confondre mais ne l'avait heureusement pas fais. Il lui arrivait parfois d'avoir l'impression que Sera était encore là, quelque part, à l'attendre, à croire qu'elle ne ferait jamais vraiment son deuil. Bref.

Je viens vérifier la santé de votre cheval, ce serait plus simple si vous sortiez.

Pas qu'ils tiendraient pas mais elle ne pourrait pas agir comme elle le voulait. Elle n'aimait pas être observée, fixée. Et elle aimait être libre de ses mouvements sans recevoir mille et une questions en retour.

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Angela avait horreur de perdre son temps. Horreur qu'on lui pose des questions, aussi. Elle n'était pas quelqu'un de très sociale, elle en avait bien conscience, cette sauvagerie pouvait lui jouer des tours mais elle s'en était toujours remise et rien n'était assez grave pour la contraindre à changer jusque là.

Elle allait de box en box, se contentait de faire son travail sans que ce ne soit du zèle selon elle. Elle savait aussi comment fonctionnaient les épidémies ou les problèmes avec les chevaux, une barrière mal fermée, un clou mal planté, l'un qui se le prenait et les autres aussi, c'était toujours ainsi. Là, un cheval enrhumé pouvait en entraîner d'autres. Cela ne la dérangeait pas non plus de passer par ici et vérifier tout le monde, ça ne la dérangeait pas de revenir si jamais le besoin se faisait ressentir mais quitte à être ici et ne rien avoir à faire, sinon après aller vérifier les enclos et vérifier les animaux dans la forêt, ceux qu'elle connaissait bien... C'était rien.

Une jeune femme y était encore quand elle la saluait. Elle attendait que la femme sorte pour vraiment entrer à son tour, ne souhaitant pas non plus trop stresser l'animal en étant plusieurs et surtout de trop dans le même endroit. Vu ce que la jeune femme disait, elle avait bien eu raison de ne pas le stresser davantage, deux personnes dans un seul box en plus du cheval, elle aurait préféré le sortir si c'était ça.

Elle passait la main près du nez du cheval, puis sur le chanfrein, cherchant à le rassurer avant de regarder ses yeux. Regarder son nez, vérifier qu'il respire bien, sans difficulté.

C'est une simple routine. Je suis venue pour un autre cheval, malade, j'ai préféré vérifier les autres aussi.

Elle n'était pas vache, elle n'allait pas facturer tout ça non plus au propriétaire de l'écurie ou aux propriétaires des chevaux, c'était sa propre décision et mieux valait prévenir que guérir. Elle faisait son petit tour, calmement, gardant une main sur l'animal.

Quel est son nom ?

C'était une belle créature. Elle trouvait les chevaux majestueux, bien qu'elle ne les monte pas et n'ait pas spécialement dans l'idée de remédier à ça un jour. Elle continuait son inspection, d'abord visuel avant de chercher à écouter le coeur, les poumons. Elle prenait son temps, surtout. Que l'animal s'habitue à elle et son contact. Qu'il comprenne qu'il n'avait rien à craindre.

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Elle ne s'était jamais sentie de sociabiliser et avec la disparition de sa compagne, c'était encore pire. Sera avait toujours su la comprendre et cela a toujours été réciproque. Elle ne voyait plus l'intérêt de faire des efforts aujourd'hui et les animaux ne lui demandaient pas ces efforts donc elle s'efforçait de rester avec eux, qu'on la comprenne ou non ne changeait pas grand chose aux faits ; elle ne faisait pas d'efforts.

Cette femme semblait faire partie de ceux qui comprenaient qu'il n'y avait rien de personnel à son comportement, qu'elle ne faisait pas ça parce qu'elle avait quelque chose contre la personne en particulier. Beaucoup croyaient que c'était à cause d'eux mais non.

Elle vérifiait l'animal et...

Ils ont bien fais de m'appeler. Le nez bouché, bloqué. À se demander comment l'animal faisait pour respirer. Je vérifie que ce soit pareil ou non pour les autres.

Elle levait le regard vers la jeune femme à la fin de sa réponse, puis regardait à nouveau l'animal et continuait son inspection. Aragorn.

Comment dans le Seigneur des Anneaux ?

La référence l'amusait et ça changeait des noms à la "petite tempête". Elle essayait d'y aller lentement pour que l'animal s'habitue à elle et ce qu'elle faisait, ne voulant pas le mettre plus mal à l'aise qu'il ne devait l'être. Un coup de patte et ça pouvait très mal finir pour elle donc autant éviter ce type d'incident le plus possible, pas sûre qu'elle se relève de ça.

Dix minutes après, elle finissait par une dernière caresse et par sortir du box.

Tout va bien. Il est en forme. C'est un bel animal que vous avez.

Très bel animal en effet. En bonne santé, il semblait que celle qui le possédait en prenait bien soin. C'était une autre chose qu'elle vérifiait aussi mais sans l'annoncer, regardant les soins reçus des chevaux délaissés. C'était donc une bonne chose pour elle, Angela n'ayant aucun scrupule s'il fallait dénoncer de mauvais traitements, aucun problème avec le fait de dénoncer ces exacts.

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Ses examens pourraient être plus long mais Angela commençait à avoir tellement l'habitude de ce qu'elle avait à vérifier qu'elle allait plus vite. On pourrait dire qu'elle était moins consciencieuse, elle dirait qu'elle savait surtout quoi regarder et comment pour provoquer quelque chose. Dans le cas d'Aragorn, il n'y avait tout simplement rien à dire, l'animal était très bien entretenu, il était en pleine forme et le regard était très expressif. Il n'avait pas l'air d'être craintif non plus, il avait l'air plutôt franc dans son genre, elle n'avait vraiment rien à y redire. Si cela pouvait être ainsi plus souvent, cela faciliterait son travail et son rapport avec les autres humains, elle aurait moins de mal à s'avancer vers eux, parler, si elle savait qu'ils n'étaient pas capable du pire. Sauf qu'il n'y avait pas pire que les êtres humains, ou plus ingénieux pour faire le mal autour de soi.

L'animal était en forme et c'était tout ce qui comptait, de même que le comportement de la jeune femme envers l'animal, visiblement inquiète là où d'autres n'en n'auraient rien à faire du tout. Il y avait plus intéressant comme échange, Angela s'efforçait juste de répondre aux questions de la jeune femme le plus calmement possible et, disons, en essayant de mettre les formes, voir faire un brin d'humour sans en être pour autant convaincue. La sociabilisation n'était pas son fort.

Ah, il n'était pas encore le sien ? Ah. La jeune femme était pourtant très présente avec lui à ce qu'il semblerait. S'inquiétait-elle de sa future acquisition ou s'inquiétait-elle réellement pour le cheval ? Pour le coup, Angela se posait de nouvelles questions au sujet de cette jeune femme. Mais elle semblait sincère donc elle lui laissait le bénéfice du doute.

Retirant ses gants, elle prenait dans la poche arrière droite de son jean une carte. Elle n'aimait pas faire de la publicité mais elle lui tendait la carte avec son prénom, nom et le numéro de son cabinet.

N'hésitez pas, si vous adoptez ce cheval et qu'il vous faut quelque vérifications sur la santé ou les papiers.

Combien de personnes profitaient pour ajouter n'importe quoi sur les papiers ? Trop. C'était surtout avec les chiens et chats à adopter mais les chevaux en étaient parfois aussi victimes. On prétendait que l'animal était un pur sang, on prétendait de grandes origines qui se révélaient être fausses. Là encore, Angy n'aurait eu aucun mal à dire la vérité, quitte à troubler la personne. Elle savait aussi que c'était risqué, que la personne risquait de ne plus vouloir de l'animal et que celui-ci se retrouverait seul sans propriétaire et que l'autre ne pourrait sûrement pas le vendre et qu'il finirait donc à l'abattage, mais elle préférait croire que la personne achèterait l'animal quand même, juste qu'elle éviterait de le mettre à la reproduction ou faire des concours ou essayer tout du moins pour rien.

Angy savait que sa démarche était un peu brutale, peut-être trop franche pour le peu de mots qu'elles s'étaient dits mais à la jeune femme de voir si elle était ou non intéressée, elle n'insisterait pas des masses non plus.

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Angela avait plus de facilité avec les animaux que les humains, c'était ainsi. Il y avait un feeling entre eux, un petit quelque chose. C'était toujours tout ou rien avec eux, soit ils la fuyaient et paniquaient en la voyant sans qu'elle n'ait rien fait, comme un cheval fuirait et paniquerait en voyant un loup arriver, soit ils seraient très proches d'elle. Les chevaux c'était toujours tout ou rien aussi, ici, le courant semblait passer. Peut-être avait-elle une aura particulière, il est vrai que ces temps-ci, elle se sentait un peu bizarre. Plus en forme, peut-être, énergique, trop parfois. Des choses qu'elle voyait et n'aurait pas vu avant, des choses qu'elle faisait et n'aurait pas fais avant. Bref.

L'animal était en bonne santé et le feeling passait, la jeune femme le disait elle aussi. Ils se sont déjà adoptés mutuellement et elle confirmait pour le fait que l'animal semblait l'accepter, ce qui lui faisait se demander si l'animal n'avait pas un mauvais caractère qu'il évitait de lui montrer. Aucune idée. Elle l'avait pourtant regardé dans les yeux et n'avait pas vu grand chose de négatif ou de défiant ou de... Hm. Bref. Au moins l'animal était en bonne santé et serait adopté. Elle préférait le terme adopter à acheter tout en sachant que pour certains, avoir cet animal était plus représentatif d'un achat fructueux pour des courses et de la reproduction que pour le plaisir de rendre un animal libre sur un terrain vague où il pourrait s'amuser et rentrer quand bon lui semble.

Elle remettait son gant après lui avoir donné la carte, chose qu'elle n'aimait pas forcément faire, c'était trop officieux et elle n'aimait pas démarcher les gens mais au moins ce serait fait. Elle voyait la jeune femme ranger la carte et prendre quelque chose à son tour. Hm ? Elle la regardait faire, comprenant qu'elle n'était pas encore tout à fait libre de s'échapper et qu'elle devrait encore sociabiliser un peu. Ah. Pour l'animal. Bien. Aragorn, ça ne s'oublie pas facilement comme prénom pour un cheval. Elle prenait donc le papier, le regardait et le rangeait dans sa poche arrière.

Parfait. N'hésitez pas. De jour ou de nuit.

Autrefois elle aurait dit juste de jour, sauf que la nuit était désormais son pire moment et si elle pouvait trouver quelque chose à faire pour s'occuper, elle sauterait sur l'occasion. Elle avait donc ouvert son cabinet ou du moins son téléphone de travail allumé la nuit et avait parfois à se déplacer. De toute façon, elle ne dormait pas des masses et plus le temps passait et moins elle en avait besoin, à croire qu'elle avait réussi à attraper le rythme de vie idéal, d'une certaine manière. C'était sûrement le grand air qui lui valait cette forme olympique. Elle regardait à nouveau le cheval, trouvant curieux ce que Brunhilde ait pu dire à son propos. Nerveux, caractériel si elle déduisait ce qu'elle disait. Pourtant l'animal semblait relativement calme, comparé à d'autres qu'elle avait vu juste avant. Pas parfaitement calme mais il ne bougeait pas au point qu'elle ne pouvait pas l'ausculter. Hm. Curieux. C'était ce qu'il y avait de bien aussi avec les animaux, ils étaient tous différents et avaient tous leur petit caractère. Ca les rendait particulier.

Bon courage pour vos démarches.

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