Elle devait se reprendre. Il le fallait, absolument. Elle avait bien réfléchis à tout ça et après des jours à se lamenter, il fallait qu'elle se reprenne vraiment. Elle avait enfilé un survêtement et avait couru deux heures sous une certaine chaleur. Courir avait cette capacité à vider l'esprit et le corps de toute onde négative, en temps normal. Mais il fallait croire que ce n'était pas ce dont elle avait besoin.

Carol avait trop de remords pour qu'une course de deux heures puisse l'aider. Elle avait tout essayé, pourtant. Les cuites, le sport, le travail. Elle n'avait pas la tête malgré ses pensées à rencontrer quelqu'un, difficilement approchable ces derniers temps et ne voulant pas imposer sa tristesse et le poids de sa culpabilité à qui que ce soit.

Après avoir couru, elle n'était pas rentrée chez elle. Elle avait transpiré et aurait mieux eu fait pourtant de rentrer prendre une douche mais elle savait que si elle rentrait chez elle, elle s'effondrerait dans le canapé et ne bougerait plus, deviendrait juste improductive au possible. Donc elle s'était arrêtée dans un bar. Elle pensait à une bonne bière ou du whisky mais finalement en s'asseyant au bar et voyant l'heure, elle demandait un café noir et un grand verre d'eau glacé.

Elle relevait à peine la tête, sortant d'abord son portable et regardant les actualités rapidement. Plus ou moins obsédée par les nouveautés, les annonces que les journaux pouvaient passer, se tenir aux faits de la Garde Rouge et de certaines actions. Son visage était de toute façon connu et il ne passait pas un jour sans qu'on la relie à la Garde Rouge et le travail qu'elle y avait fait, parfois en bien, parfois en mal. Ca n'allait pas l'aider à avancer si on lui remettait ces conneries en plein visage.

Ce n'est qu'une fois son café et son verre d'eau servis, qu'elle levait le visage vers la serveuse et qu'elle lui souriait.

Merci.

Elle regardait la tasse.

Dites-moi, vous servez des trucs à manger ?

Elle s'installait plus confortablement sur son siège, l'envie de revoir à nouveau son portable et les actualités ou le laisser là, se battre pour ne pas regarder et donc s'occuper comme elle pouvait en parlant avec la jolie jeune femme devant elle et commander à manger s'ils faisaient. Il était 16h mais qu'importe.

Elle buvait d'abord le verre d'eau, d'une traite, quitte à en avoir mal au crâne à cause de la glace. Ca réveillait. Elle avait tellement bu ces derniers temps, niveau alcool, qu'elle avait l'impression d'être déshydratée et le sport n'avait pas aider du tout.

 

Elle avait l'esprit un peu ailleurs, un peu partout sauf là où elle se trouvait physiquement. Elle regardait souvent les news, sait-on jamais ce qu'elle pouvait trouver ou lire. Même si elle ne pouvait rien y faire, elle voulait savoir. Sait-on jamais, elle pouvait avoir causer une de ces chose là ou elle aurait pu l'éviter si elle avait su prendre les bonnes décisions.

Elle ne se pardonnait pas son aveuglement, tout en se disant qu'il fallait avancer. Qu'elle ne gagnait rien à rester aveugle, à rester sur le passé. Ni elle ni personne. Sauf que c'était plus facile à dire qu'à faire ce genre de conneries. Elle demandait donc eau et café à la serveuse - ou serveur, pour le coup, elle ne regardait pas - le temps de fixer son portable et les différents sites d'informations les plus à la page selon elle avant de finalement poser son portable.

Elle ne relevait le visage que pour remercier et surtout demander s'il y avait des choses à manger, sait-on jamais que ce bar serve aussi des plats de comptoir. La serveuse était plutôt jolie, surtout lorsqu'elle souriait, selon elle. Et serviable qui plus est avec sa proposition, proposition qui, sur le coup, la surprenait beaucoup. Carol était indépendante, trop parfois, alors elle plissait juste un peu le nez avant de se reprendre et répondre ;

Vous êtes adorable, mais ça ira, c'était juste... comme ça. J'aurais le temps plus tard pour manger.

Le verre entièrement but, elle le reposait et prenait son café encore bouillant, attendant qu'il refroidisse un peu et se mettant à jouer nerveusement avec son portable entre ses mains, le faisant tournoyer entre celles-ci. C'était ça ou tapoter sur le comptoir et il valait mieux faire tournoyer le portable, ça ne faisait aucun bruit que les autres auraient à supporter. Un café était-il une bonne idée si elle était déjà si énervée et nerveuse ? Hm. Qu'importait, au final. Y'avait-il une télévision quelque part pour qu'elle suive les info ou est-ce qu'il n'y aurait que du sport ? Elle regardait les murs autour d'elle par précaution. Puis son portable au cas où elle ait eu une notification mais que son téléphone n'ait pas vibré ou sonné. En même temps qu'elle regardait autour, elle essayait de voir dans quel type de bar elle pouvait être, se rendant compte à quel point elle avait foncé sans savoir où elle mettait vraiment les pieds.

Dans quelle partie de Genosha nous sommes, déjà ?

Elle avait couru sans se fixer de réel objectif, elle avait juste couru pour se défouler, sans savoir vraiment où aller sinon rentrer chez elle à un moment donné, sauf que même en regardant vers l'extérieur la rue ne lui disait rien. Hm. La serveuse allait finir par la prendre pour une folle.

 

Elle avait fait - ou plutôt, elle avait tenté - de faire le calcul, du nombre de choses qu'elle avait merdé. Cela ne l'aiderait certainement pas à avancer mais ça lui donnait une idée approximative des choix qu'elle avait fait et n'aurait pas du faire. Dans le fond, elle n'avait jamais voulu que faire le bien mais elle s'y était mal prise, ça aurait pu passer pour une erreur de parcours si d'autres vies n'avaient pas été impliquées, surtout de cette façon.

Elle était détestée de bien des civils et n'était plus vraiment appréciée de la Garde Rouge non plus, même si elle avait veillé à quitter poliment son poste, ce n'était pas comme si on pouvait entrer et sortir de la Garde comme on le voulait, elle était plutôt bien placée pour savoir ce genre de chose. Elle l'avait vu de près.

Elle regardait le comptoir, regardait autour d'elle et regardait la jeune femme. Elle lui avait si gentiment proposé d'aller lui chercher quelque chose à manger mais elle n'était pas non plus du genre à vouloir se faire servir. Du moins, pas si ça n'entrait pas dans les fonctions de la personne. Servir un verre, ok, elle était là pour ça, mais aller lui chercher quelque chose à manger, ça irait. Mais c'était gentil, trop gentil ? Elle n'avait pas l'habitude de ce genre d'altruisme, en tout cas. Ca l'aurait mis assez mal à l'aise, en fin de compte. Mais c'était vraiment... gentil, oui.

Hammer Bay. Ah. Pas si loin que ça, finalement, juste un quartier qui ne lui disait rien. Elle ne pouvait pas tout connaître, après tout. Elle buvait son café, un poil trop chaud mais qu'importe. Sûre que tout va bien ? Elle haussait les épaules. Oui. Non. Je ne sais pas. Qu'importe. Ses problèmes étaient trop complexes pour qu'elle en parle comme ça au premier venu et elle ne voyait pas quelles seraient les métaphores envisageable pour parler de ça, donc, elle ne disait rien, elle se contentait d'hausser les épaules. Au début.

Qu'aurait-elle pu faire ? Elle avait essayer son remède habituel des cuites mais ça n'avait pas fonctionné des masses, elle avait juste eu mal au crâne et au ventre après coup mais ça s'arrêtait là.

Quand les cuites ne suffisent plus, quand coucher avec plus de femmes que j'ai de doigts ne suffit plus, on se met à la course. Quand la course ne suffit pas, on se met à quoi ?

Elle avait rencontré quelque femmes mais souvent, elle était trop ivre pour vraiment s'en souvenir le lendemain, ce qui était problématique pour elle, pourtant, qui avait un énorme respect et une profonde affection pour la gente féminine, c'était dire où elle en était. Juste qu'elles avaient été nombreux mais en même temps si elle ne se souvenait pas de ce qu'il s'était passé, c'était à la fois nombreux et rien du tout. Elle était une fêtarde autrefois, il était légitime qu'elle pense que reprendre ces vieux démons puissent être une solution. Sauf qu'absolument pas.

Je n'ai pas envie de vous embêter avec ça. Je suis juste à court de solution. Des trucs merdiques qui arrivent dans la vie, j'aimerais passer à autre chose mais... je ne vois juste pas comment.

Elle posait sa tasse de café, se disant que peut-être un avis objectif sur tout ça, un regard lointain, pourrait peut-être aider, être utile, qu'importe. A voir. Puis elle pensait aussi ensuite que la pauvre devait déjà être bien embêtée d'avoir à supporter tout ça toute la journée, se doutant qu'elle n'était pas la seule à s'échouer sur un bar et se plaindre, bien au contraire.

Peut-être que la jeune femme avait un petit quelque chose pour mettre en confiance, aucune idée. Un petit truc. Impossible à savoir.

 

C'était toujours ces même idées sombres, des flashs, des choix qu'elle regrettait au point de questionner toute sa vie et les choix qu'elle avait pu faire, se demandant si, à tout hasard, si une seule chose avait changé, tout le reste aurait été différent. En réalité, elle ne savait jamais à partir d'où tout avait réellement merdé et ça restait sur des fantasmes qu'elle avait. Fantasmes qui ne voulaient pas forcément signifier de bonnes choses dans son cas. C'était impossible de savoir.

Elle ne se mettrait sans doute pas dans ces états si elle n'avait pas impliqué d'autres personnes qu'elle-même dans tout ça, le problème était pourtant là ; elle n'était pas du tout la seule à être impliquée. Ses actions avaient fait des victimes et elle ne voulait pas appeler ça des dommages collatéraux, elle avait beau faire parti de l'armée et en avoir fait parti pendant des années avant d'entrer dans la Garde Rouge, elle n'aimait pas parler de victimes comme des dommages collatéraux. Elle avait toujours eu un certain sens de la justice, très manichéen et des principes sur lesquels on ne revient pas. Même si ça ne plaît pas aux autres.

Boire, c'était un pari risqué, elle avait vu déjà un de ses frère périr à cause de la bouteille et elle n'avait pas spécialement envie d'avoir le même avenir que lui, elle ne savait que trop ce que ça pouvait faire pas juste à la personne mais aussi à son entourage. Puis de toute façon, pas le choix que réaliser que ça ne lui servait à rien, elle oubliait certaines choses certes mais avant de les oublier avec l'alcool, elle se lamentait pitoyablement sur son sort et s'endormait comme une masse. Donc l'oubli était vraiment bref par rapport à ce qu'elle aurait souhaité.

Elle était indépendante, par nature, elle gardait énormément pour elle, elle était expansive mais pas sur ce qu'elle pensait vraiment ou ressentait vraiment. Donc se lâcher, là, ce n'était pas une chose à laquelle elle était habituée et cela ne devait surtout pas devenir une habitude.

La jeune femme lui répondait, elle voyait où elle voulait en venir mais c'était hélas plus compliqué pour elle. Elle ne pouvait pas forcément retrouver ces personnes, ce n'était pas comme si ces endroits étaient accessibles au commun des mortels. Pour d'autres, à voir si elles accepteraient de la rencontrer, elle en doutait. Et encore pour ça il fallait trouver comment les contacter, ce qui ne serait pas simple. Mais après tout si elle voulait une certaine forme de rédemption, il valait mieux se bouger. Si ça lui tombait tout cuit, ce ne serait pas pareil. Hm. A méditer. Elle buvait une gorgée de son café en réfléchissant à tout ça. Se pardonner, elle ne pouvait pas. Elle n'avait pas la sensation que c'était une chose faisable, en tout cas. Pas quand ça impliquait autant de personnes.

Elle levait le nez de son café quand la jeune femme s'excusait de ne pas avoir de solution miracle, Carol fronçait brièvement les sourcils.

Ne vous inquiétez pas, ça m'arrive de penser à voix haute. Il y a malheureusement des fois où on fait des choses irréparables et où on ne peut pas se pardonner. Enfin, pas selon moi.

Elle avait plus ou moins conscience que parler de ça comme ça, donnait presque l'impression qu'elle avait tué quelqu'un ou plusieurs personnes. Elle en avait parfaitement conscience, même. Après, ce ne serait pas tant mentir que ça quand on y regardait de plus près, elle avait condamné bien des personnes et ne s'était, à cette époque, pas assez soucié du sort de ceux qu'elle retrouvait. Donc allez savoir ce qu'il leur était arrivé, sinon qu'elle savait qu'ils n'étaient pas juste gentiment enfermés quelque part. Elle finissait son café, lâchait finalement un long soupir. Elle poussait doucement sa tasse, un sourire un peu discret sur les lèvres.

J'en voudrai bien un autre, s'il vous plaît.

Elle ne se reconnaissait plus depuis des mois, elle qui était d'habitude si optimiste, si joyeuse, à toujours voir le bon, même si ça paraissait niais. Peut-être qu'elle devait aussi commencer par essayer de se retrouver avant tout. Hm. Elle regardait la jeune femme, réfléchissant à ses paroles sur le fait d'affronter ce qu'il s'était passé. Hm.

 

Carol ne pouvait pas se pardonner. Pas dans l'immédiat. Pour ça, il faudrait qu'elle répare les bourdes qu'elle avait commises. Et des bourdes, il y en avait des tas. C'était assez ironique avec Carol qu'elle ne se pardonne pas de la sorte, quand on sait qu'elle avait toujours eu tendance à pardonner trop vite tout le monde. Elle pardonnait vite les erreurs de n'importe qui à condition qu'il montre un peu de repentance et de regret. Mais pour elle ? Elle n'avait pas appris à se pardonner. Jamais.

Elle ne pouvait pas en vouloir à la jeune femme de lui parler de ce genre de chose, c'était assez bateau et elle ne connaissait pas son histoire. Carol pensait être connue pourtant mais visiblement certaines personnes ne savaient pas qui elle était, pas encore. Donc peut-être profiter de cette ignorance ?

Elle prenait la nouvelle tasse de café et n'attendait pas qu'il refroidisse pour y tremper ses lèvres. Elle aimait le café bien chaud, ça réveillait autant que la caféine à l'intérieur, selon elle. Mais elle manquait de s'étouffer, elle se reprenait assez vite pour éviter le pire, posant sa tasse. Elle souriait légèrement. Une invitation qui ne se refusait pas. D'une part elle se changerait les idées, d'une autre, elle ne savait pas dire non à une jolie femme. Il ne fallait toute fois pas que la jeune femme la prenne en pitié ou se sente forcée de quoi que ce soit, Carol n'avait pas raconté ça pour attiser quoi que ce soit. Mais la jeune femme la prenait au dépourvu de nouveau, la faisant sourire une fois encore.

Je ne vois aucune raison de refuser.

Pourquoi aurait-elle refusé ? Autre chose à faire ? Non, il n'y avait rien d'autre à faire, elle n'avait pas d'excuses à ce niveau là.

C'est un charmant prénom. Carol.

Ce n'était pas un prénom très commun, surtout. Brunhilde. C'était joli. Elle terminait son café puis prenait son porte feuille de sa poche.

Je passerai vous chercher dans une heure.

Un sourire un peu espiègle sur les lèvres. Elle payait pour ses consommations - avec un peu trop de pourboire, peut-être - puis elle rangeait son porte feuille dans sa poche. Il fallait qu'elle prenne une douche et se change avant tout. C'était une bonne idée finalement de s'arrêter ici, ça lui donnait un objectif pour ce soir autre que se morfondre et se noyer dans le whisky, la bière ou la vodka. Encore que, ce n'était pas dis que ce soir elles ne picoleraient pas, Carol était assez douée pour trouver des moyens pour boire, c'était dans les gènes, son frère et elle étaient assez doués pour ça. Elle regardait l'heure sur son portable et se mettait un plan jusqu'à chez elle. Elle passerait très certainement la chercher en moto. C'était un bon plan. Ceci dit, il est vrai que la jeune femme avait très probablement une voiture, un vélo, une moto, qu'importe, donc, elle verrait bien ce que répondait Brunhilde.

 

Brunhilde était charmante et semblait bien vouloir jouer à son jeu, Carol n'allait donc pas passer à côté de cette belle occasion de s'amuser un peu et se sortir la tête hors de l'eau. C'était peu évident de trouver des femmes dans ce genre, ces derniers temps, ça ne lui ferait pas de mal, pas plus qu'à la jeune femme. Si elle avait bien compris ce dont elle parlait. Brunhilde lui rendait bien son petit jeu donc si, elle devait l'avoir compris.

Le temps de rentrer et se changer, soit, pourquoi pas, elles n'étaient pas à la minute près. Ca lui laisserait le temps de rentrer, prendre une douche et se changer aussi puis sans doute de manger un peu, vu que ce soir elles allaient sûrement bien boire plus que manger. Difficile à dire, Carol ne prévoyait pas grand chose en général, tout partait vite en vrille et à l'opposé de ce qu'elle voulait faire initialement.

Elle payait, elle s'apprêtait à partir et surtout, elle notait l'adresse du lieu pour être sûre de pouvoir y revenir sans se planter, ce serait quand même dommage de vouloir s'organiser une soirée avec une belle femme et ne pas être capable de la retrouver. Donc elle notait l'adresse. Et elle s'amusait aussi de la demande, moto ou voiture, à croire que c'était marqué sur son front. Brunhilde l'avait-elle mieux cernée qu'elle ne se l'imaginait ? Il semblerait. Ou alors Carol était une femme sacrément banale ou son comportement était celui que bien d'autres avaient.

Moto, je te prendrai un casque.

Quitte à passer la soirée ensemble, autant se tutoyer. Elle avait deux casques chez elle, elle prendrait l'autre pour la jeune femme, sait-on jamais qu'elle n'en n'ait pas, ce serait sacrément dommage, voir même carrément con, elle n'allait pas l'inviter à faire un tour en moto sans lui proposer un casque et la jeune femme n'allait pas se prendre un casque juste pour une soirée. Sauf si Brunhilde avait elle aussi une moto, ce qui, pour le coup, ne l'étonnerait pas des masses non plus.

Sauf si tu en as déjà un.

Sait-on jamais, en fait à bien y penser, elle était presque sûre que c'était déjà le cas. Bien, le sujet était clos, un petit clin d'oeil et elle s'en allait de son côté après avoir attendu la réponse de Brunhilde. 1h30 ça laissait une belle marge pour rentrer et faire ce qu'elle avait à faire.